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Lequin Mathilde et Albert Piette (dir.), 2022, Dictionnaire des anthropologies. Paris, Presses universitaires de Paris Nanterre, 1074 p.

  • Francine Saillant

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  • Francine Saillant
    Département d’anthropologie, Université Laval, Québec (Québec), Canada

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Couverture de Restes inquiets, Volume 48, numéro 3, 2024, p. 11-242, Anthropologie et Sociétés

Cet ouvrage intrigue au point de départ. Une longue liste de noms d’anthropologues, de philosophes, de sociologues, de littéraires, de psychanalystes, et autres scientifiques et leurs notices rédigées par des spécialistes. Un ouvrage d’anthropologie qui n’en serait pas un ? Pas tout à fait, et c’est pourquoi il est important d’en parler, et qui plus est, dans une revue d’anthropologie. Les auteurs souhaitaient contribuer au savoir en proposant ce dictionnaire exceptionnel, car jamais personne ne s’y était risqué à ce jour. À la frontière de l’anthropologie, de la philosophie et de l’histoire des sciences, nombre de spécialistes ont écrit sur des figures marquantes de l’anthropologie (Boas, Levi-Strauss, Devereux, Leroi-Gourhan, Bateson, etc.), de la sociologie (Mauss, Goffman, Luhmann, etc.), de la philosophie (Arendt, Derrida, Deleuze, etc.), pour ne citer que ces exemples. L’anthropologie qui est ici pratiquée est celle de l’anthropologie philosophique, soit l’exercice de mettre en évidence, pour chaque intellectuel convié, son anthropologie au sens de la manière dont le sujet humain se présente implicitement ou explicitement dans son oeuvre. On parle d’une anthropologie qui ouvre sur une réflexion sur l’humain et ses caractéristiques : C’est pourquoi cette pluralité de visions ne conduit pas à une, mais à des anthropologies, au sein desquelles des auteurs de différentes disciplines sont placés au même rang que les anthropologues. L’humain reste toujours au centre de l’attention et des configurations. Chaque entrée ne suit pas obligatoirement la biographie de l’auteur, mais plutôt « restitue la mise en scène de l’humain qui se dégage de l’oeuvre » (p. 7). Au travers de tous les domaines de la vie sociale et d’un large éventail d’intellectuels, un paysage de la pensée — des pensées — s’anime et offre une vision extrêmement intéressante des anthropologies en présence dans cet ouvrage. La lecture des notices (composées d’une dizaine de pages chacune) est agréable, et malgré la difficulté du sujet, les textes présentent un grand souci de lisibilité et sont accessibles tant aux collégiens qu’aux universitaires ; chacune comprend une courte liste de références essentielles. De fureter dans ce dictionnaire donne le goût de lire, de connaître, de comparer les propositions de plus d’une centaine d’auteurs et autrices de l’Antiquité ou plus près de nous, au XXe siècle. L’anthropologie se trouve décentrée par effet de mise à distance et de comparaison, tout en contribuant à sa propre pluralisation. Quelques commentaires de fond méritent ici d’être faits, moins en tant que reproche que dans l’intention de proposer quelques pistes de réflexion. Il fallait certainement déposer une première pierre dans ce type de projet d’anthropologie philosophique pour que des suites se fassent peut-être. La première pierre est ce dictionnaire de 1074 pages. Il aurait intéressant de connaître le mode de sélection des auteurs choisis dans un si large bassin disciplinaire. Cela aurait permis de mieux comprendre la sélection retenue — comment fut formé cet ensemble philosophico-anthropologique ? — et ainsi d’expliquer, inévitablement, les personnes absentes. Les directeurs ont eu le souci d’inclusion d’un certain nombre de femmes (Arendt, de Beauvoir, Weil), de non euro-américains d’origine (glissant toutefois un auteur « français »), mais on note la rareté plus que l’abondance des choix effectués. De centrer tout le projet sur ces conceptions de l’humain fait passer outre toutes les questions actuelles sur le rapport des humains aux non-humains. Enfin, la pluralité dont il est question reste largement euro-américaine, voire européenne. On ne sent pas vraiment l’influence des perspectives issues du Sud global, et plus largement, l’appel à la « décolonisation des savoirs ». Peut-être les responsables ont-ils jugé ces considérations trop éloignées de leur projet central ? Toutefois, comme on appelle à …