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Kanemasu Yoko, 2023, Pacific Island Women and Contested Sporting Spaces: Staking their Claim. Abingdon, Routledge, coll. « Global Gender », 215 p.

  • Alice Servy

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  • Alice Servy
    Faculté de sciences sociales, Laboratoire Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe, Université de Strasbourg, Strasbourg, France

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Couverture de Le genre à l’épreuve du sport, Volume 48, numéro 2, 2024, p. 11-218, Anthropologie et Sociétés

L’ouvrage de Yoko Kanemasu nous fait découvrir un domaine encore peu étudié par les recherches en sciences sociales : le sport pratiqué par des femmes dans les îles du Pacifique. Si depuis une dizaine d’années les travaux sur les sportifs océaniens émergent, ils portent encore principalement sur des hommes, souvent professionnels, qui s’adonnent au rugby ou au football américain. Rares sont les recherches qui s’intéressent aux expériences sportives de femmes. Le livre de Kanemasu participe grandement à combler ce manque en présentant cinq cas à l’étude issus de quatre pays insulaires du Pacifique : le rugby féminin aux îles Fidji, les pratiques sportives de femmes indo-fidjiennes, le volleyball de plage féminin au Vanuatu, le football féminin aux îles Salomon et le rugby féminin à Samoa. Au croisement de la sociologie du sport et des études sur le genre, ce livre met d’une part en lumière l’entrelacement des rapports de pouvoir qui façonnent et qui sont façonnés par les activités sportives de femmes océaniennes. Ces rapports sont fondés non seulement sur le genre, mais aussi sur le milieu social, la sexualité, l’ethnicité, le lieu d’habitation ou la géopolitique. Kanemasu montre qu’ils sont produits par des processus (post)coloniaux spécifiques, tels que la christianisation, la militarisation, la ségrégation ethnique ou la résistance à la colonisation, plus ou moins forte en fonction des îles. D’autre part, l’ouvrage révèle brillamment les stratégies que des femmes océaniennes mettent en oeuvre pour s’opposer à ces rapports de pouvoir et pratiquer des sports encore souvent considérés, localement et internationalement, comme des « sports d’hommes ». L’autrice nous présente par exemple le cas des joueuses de rugby samoanes qui invoquent le statut de soeur auprès de leurs homologues masculins, afin de bénéficier du respect et de la protection que ce statut implique traditionnellement. Les joueuses de volleyball de plage au Vanuatu ou celles de rugby aux îles Fidji s’appuient quant à elles sur l’exaltation du sentiment d’appartenance nationale, liée à leurs victoires dans des compétitions internationales, pour gagner du respect dans leur communauté. Dans l’introduction, Kanemasu offre une réflexion sur la « colonisation épistémologique » particulièrement inspirante. L’autrice s’appuie sur la méthodologie dite « talanoa », qui s’oppose à un mode de recherche hiérarchique, pour mettre en avant des valeurs telles que l’empathie, le respect et l’humilité. Kanemasu prône le partage émotionnel et la réciprocité entre les chercheuses et les chercheurs et leurs interlocutrices et interlocuteurs, même si cela n’apparaît pas clairement dans le reste de l’ouvrage. Les cinq cas à l’étude présentés dans ce livre se fondent sur des recherches plus ou moins approfondies, menées sur une période allant de quelques mois à dix ans, et un nombre d’entretiens relativement limité (entre 10 et 27 par étude de cas). Du fait des restrictions de déplacement liées à la pandémie de COVID-19, les entretiens semi-directifs aux îles Salomon, au Vanuatu et à Samoa ont été réalisés à distance. Aux îles Fidji, Kanemasu a par ailleurs effectué des observations en tant qu’amie et supportrice des joueuses de rugby, même si le terme observation n’est pas utilisé par l’autrice et que les données présentées dans ce livre sont malheureusement presque uniquement issues d’entretiens. Si cet ouvrage enrichit considérablement la littérature en sciences sociales portant sur les questions de sport et de genre dans les îles du Pacifique, l’autrice reconnaît avec humilité les limites de son travail de recherche qui exclut les pays francophones, les zones rurales, les sportives ne parlant pas anglais, les jeunes filles et les sports dits « indigènes » ou « traditionnels ». Par ailleurs, l’ouvrage de Kanemasu cite uniquement des textes anglophones. Il fait notamment l’impasse sur …