Comment le néolibéralisme a-t-il imprégné les corps, les subjectivités et le genre des jeunes de la planète entière tandis que les industries mondiales du sport étendaient leur sphère d’influence jusque dans les régions marginales, appâtant de jeunes athlètes avec le rêve d’une carrière athlétique dans les ligues professionnelles du Nord global ? Cette interrogation est le point focal du recueil d’écrits ethnographiques intitulé Sport, Migration, and Gender in the Neoliberal Age, dirigé par Niko Besnier, Domenica Gisella Calabrò et Daniel Guinness. Comprenant un exposé d’introduction par les rédacteurs, deux parties respectivement intitulées « Sport néolibéral et relations sociales » et « Reconstituer des subjectivités », ainsi qu’un épilogue, ce recueil est constitué de six chapitres par partie. Il présente les contributions de chercheurs impliqués dans le projet dirigé par Niko Besnier entre 2012 et 2017, « Mondialisation, sport et précarité de la masculinité », qui consistait à mener des enquêtes ethnographiques dans différents sports pour examiner les relations complexes entre le sport, la mobilité et le genre. Des chercheurs invités y ont également apporté des contributions de grande valeur. Des exemples de la mobilité des athlètes sont examinés dans cet ouvrage collectif à la lumière du processus de développement néolibéral depuis le début du XXe siècle. Ce processus de transformation a engendré des zones de stratification sociale au sein desquelles les migrations prennent la forme d’une entreprise personnelle à laquelle s’attache une partie considérable de la cohorte démographique des jeunes. L’espérance d’une vie plus faste au sein de ces contextes se laisse voir au prisme d’un avenir situé au-delà des frontières existantes. Dans ce cadre, les sports de haute performance, occupant un niveau d’élite dans une catégorie professionnelle extrêmement spécialisée, se transforment en un projet auquel on aspire, que l’on idéalise ou que l’on imagine. Il est par conséquent impératif de souligner que la dichotomie globale entre Nord et Sud ne correspond pas systématiquement à des entités géographiques bien délimitées sur la carte du monde ; ces dichotomies peuvent plutôt coexister à l’intérieur d’un même pays, y compris à l’intérieur d’une même ville. Les itinéraires des athlètes, qui se lancent dans la mobilité en quête d’un accomplissement professionnel et d’une trajectoire de vie dans un contexte de plus en plus néolibéral, font intervenir un réseau complexe d’acteurs contribuant activement à la construction et à la modulation de leurs subjectivités. Cette façon de catégoriser les migrants permet la création de cadres d’analyse innovants qui révèlent des voies alternatives par lesquelles le néolibéralisme, fonctionnant comme un appareil d’accumulation et de structuration sociale, exerce son impact sur ces individus, catalysant les transformations de leurs conceptualisations du genre, de l’ethnicité et de la religiosité. Les précédentes recherches avaient tenté d’établir des connexions entre les migrations du sport et les processus plus larges de la mondialisation, se déployant principalement du Sud global en direction du Nord global. Ce paradigme de recherche insiste particulièrement sur le tracé des schémas de circulation, les itinéraires migratoires, les motivations fondamentales de l’immigration, les cas de réfugiés, les trajectoires de vie, les modalités d’adaptation à des contextes différents et les complexités des réseaux d’acteurs en interface avec ce tissu dense de phénomènes interreliés. Cependant, comme le souligne l’épilogue rédigé par Susan Brownell, la plupart de ces études tendent à se focaliser sur le football (soccer), reflétant le rôle prédominant que joue celui-ci dans le façonnage et la concrétisation des dynamiques migratoires dans le domaine du sport. Divergeant de l’orientation traditionnelle qui se concentre majoritairement sur les dynamiques globales Nord-Sud, parce que s’écartant du narratif convenu de la fiction néolibérale qui postule que la combinaison de l’entraînement discipliné et …
Parties annexes
Référence
- Sassen S., 2003, Contrageografías de la globalización. Género y ciudadanía en los circuitos transfonterizos. Madrid, Traficantes de Sueños.