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Les étagères regorgent de livres et d’articles sur les rites funéraires, décrivant les images et les expériences de la mort d’un point de vue post-mortem, mais les anthropologues ont rarement porté leur attention sur l’expérience du mourir. S’agit-il d’une lacune anthropologique ? Devrions-nous être au chevet d’une personne mourante avec un carnet ou un enregistreur audio et noter ses dernières paroles, observer ses derniers gestes, enregistrer et interpréter les réactions des témoins ? Je me souviens avoir lu il y a longtemps Une mort très douce de Simone de Beauvoir (à moitié anthropologue) sur la mort de sa mère. La façon dont elle a écrit sur les derniers moments de la vie de sa mère et partagé l’intimité de cette expérience avec le grand public m’avait dérangé. Il y a des moments où il faut fermer son carnet de notes et renoncer au rôle de spectateur. Malgré tout, cela me tenaillait. Serait-il possible d’écrire sur le mourir d’une manière respectueuse et acceptable ? Dans cet essai, je réfléchis à voix haute à cette possibilité, sans que ces réflexions soient fondées sur des résultats de recherches et des preuves empiriques.

Pas de rituels de la mort

Il n’est pas surprenant que nous ayons beaucoup de connaissances sur le deuil et les rituels funéraires ni que nous en sachions peu sur les rituels du mourir. Peut-être même que ces derniers n’existent pas. L’accomplissement d’un rituel ne semble pas approprié lorsqu’une mort s’annonce. Un rituel est un signe de souveraineté, une preuve de maîtrise de la situation. Les rituels créent de l’ordre et facilitent les transitions : les gens se dévoilent, montrent qui ils sont et où ils vont. Les mots, les gestes et les symboles inspirent confiance en l’avenir, à la suite de cette transition. Mais que dit-on à une personne qui se meurt ? Peut-on mener à bien un rituel d’espoir lorsque la fin (de vie) s’annonce, et que tout menace de s’écrouler ? Si le chagrin et la peur vous serrent la gorge, vous ne chanterez pas une chanson, ne lirez pas un texte sacré.

Au sein de l’Église catholique, les « derniers sacrements » ou l’« onguent sacré » évoquaient autrefois un rituel pratiqué par un prêtre lorsque la mort était imminente. Le prêtre oignait les yeux, les oreilles, les narines, la bouche, les mains et les pieds du malade en prononçant les mots suivants : « Par cette onction sainte et sa miséricorde bienveillante, le Seigneur te pardonnera ce que tu as fait de mal en voyant (en entendant, en sentant, en goûtant et en parlant, en touchant et en allant). Amen. » Ce rituel avait pour but de libérer le mourant de ses péchés afin que les « portes du paradis » lui soient ouvertes. Il ne s’agissait pas d’un rituel très gai. Le mourant était un pécheur qui, à ce moment critique, pouvait ne pas trouver la « paix éternelle ». Dans ces textes prescrits, rien n’était dit sur les joies et les mérites de sa vie passée. Il est possible que de nombreux prêtres aient été mal à l’aise avec ces textes lugubres et terrifiants et qu’ils aient tenté d’en amoindrir la portée par leurs propres mots. Que dire des sentiments des personnes présentes et du mourant, s’il était encore conscient ?

Au fil du temps, peut-être en raison de l’inconfort suscité par des propos lugubres tenus au chevet d’une personne en fin de vie, ce rituel s’est éloigné du moment de la mort et a été renommé « sacrement des malades ». Transformé, il s’agissait désormais d’un rituel de guérison, l’onguent sacré devenant en quelque sorte une médecine spirituelle.

Les mots et les gestes rituels figés sont rarement suffisants lorsque quelqu’un est en train de mourir. Ce sont des stéréotypes impersonnels qui ne représentent pas forcément ce que la plupart d’entre nous pensent et ressentent. Il est peut-être même devenu embarrassant de prononcer des phrases générales et préconçues en présence d’une personne mourante. Le seul « rituel » qui puisse fonctionner est de garder le silence, de tenir une main en silence. Ce silence nous permet de ne pas mentir sur un avenir fictif. Même égrener un chapelet au chevet d’un mourant catholique était une forme de silence ; la répétition sans fin de sons — souvent vides de sens — rendait le silence audible et témoin de la présence de quelqu’un.

Les rituels pré-mortem : un exemple ethnographique

Il existe un exemple joyeux de rituel de mort pré-mortem en Indonésie sur l’île de Nias, près de Sumatra (Klasen 1990). Lorsqu’un vieil homme ou une vieille femme sent que sa fin approche, les enfants préparent une grande fête d’adieu (fangotome’ ö). Des cochons sont abattus, les meilleures pièces de viande étant destinées à la personne dont la mort approche. Les enfants, petits-enfants et autres villageois assistent à la fête et rendent hommage à la personne âgée. Cette fête ressemblant à celle d’un mariage, les gens y dansent et s’amusent. L’aîné prépare la suite de manière à pouvoir mourir en paix. Il bénit ses enfants et petits-enfants, veille à son héritage et choisit l’endroit où il souhaite être enterré. La personne dont la vie s’achève est le coeur de la fête. Le cercueil attend quelque part dans la maison. C’est littéralement une fête d’adieu.

Une bonne mort doit avoir lieu à la maison. Une mort inattendue, sans adieu, est une mauvaise mort. « Votre père est mort au coin d’une rue, comme un porteur d’eau tombé » est perçu comme une grave insulte. Henrikje Klasen, qui a écrit son livre sur le modèle d’un mémoire de maîtrise, a passé trois mois à Nias, sans toutefois avoir observé ce rituel. Elle a néanmoins interrogé 27 jeunes femmes à propos de la mort de 91 grands-parents. Pas moins de 88 d’entre eux avaient effectivement organisé ce rituel d’adieu, suivant lequel la personne âgée se retirait de la vie publique active jusqu’à sa mort biologique. Des travaux ethnographiques antérieurs à ceux de Klasen (1990) révèlent également comment le fils aîné approchait sa bouche de celle du mourant afin de capter son dernier souffle.

Dans une étude sur l’euthanasie dans d’autres cultures, Hans Lam (1997) a compilé et commenté quatre exemples classiques de mort cérémonielle. Il s’agit de l’enterrement vivant du maître de lance chez les Dinka (récit détaillé par Godfrey Lienhardt [1961]), du suttee (brûlage des veuves) en Inde, du seppuku (suicide) chez les samouraïs au Japon et de l’interruption de vie sur demande chez les Inuit. Ce n’est pas un hasard s’il s’agit dans tous les cas d’une « mort planifiée ». Après tout, comment une telle cérémonie peut-elle se dérouler au bon moment quand la mort « arrive comme un voleur dans la nuit » ? L’étude de Lam coïncide avec la période où l’on a introduit l’euthanasie aux Pays-Bas. Inspiré par les pratiques documentées (ailleurs), il tente de mieux cerner celles en émergence, notamment le rôle central joué par les médecins dans les contextes de mort planifiée. L’euthanasie devient ainsi un « rituel » médico-technique. Lam écrit :

La société a choisi de mettre les actions de fin de vie entre les mains exclusives des médecins. Les membres de la famille qui sont plus proches du patient n’ont aucun statut officiel ; ils souffrent avec le mourant, ils le soignent, mais lors du dernier événement, ils ne sont que spectateurs. Les proches sont exclus de l’accompagnement actif en fin de vie.

Lam 1997 : 221

Le mourant n’a lui aussi qu’un rôle modeste : il subit l’acte rituel du « célébrant » médical et reçoit le dernier « sacrement ». La mort elle-même est principalement passée sous silence.

Ce n’est qu’après le départ du mourant, après sa mort, que l’on ose accomplir un véritable rituel : un enterrement, une crémation. Mais alors, nous ne célébrons pas tant son passage à une autre vie que notre propre passage à une vie sans le défunt. Ce qui est beaucoup plus facile. Nous n’avons pas besoin de le soutenir ni de lui « souhaiter bonne chance », mais nous pouvons nous souhaiter mutuellement force et longue vie, car la vie continuera pour les proches. Lors des funérailles, nous pouvons raconter des histoires sur le défunt, sans inhibition, puisqu’il n’est pas présent. En son absence, nous pouvons mentir un peu ou exagérer sur son dos. C’est même amusant, et cela soulage.

Euthanasie et rituel

L’étude de Lam et sa position critique à l’égard du rôle prépondérant du médecin dans ce qu’il appelle ironiquement un « rituel » datent du début de la légalisation de l’euthanasie aux Pays-Bas. Les personnes qui réclamaient alors l’euthanasie le faisaient principalement dans l’espoir d’éviter la douleur et le déclin de leurs facultés avant la mort. Aujourd’hui, plus de vingt ans après son implantation, l’euthanasie est également considérée comme une chance de mettre fin à sa vie de manière digne et gracieuse, en compagnie de ses proches et après avoir rencontré ses amis et ses proches et leur avoir parlé. Le fait de connaître le jour et l’heure de la mort génère, en quelque sorte, une obligation de célébrer et de commémorer avec d’autres la vie qui s’achève. L’euthanasie permet aussi de réunir certaines conditions essentielles et quasi universelles d’une bonne mort : « Une mort […] à domicile, sans violence ni douleur, le mourant étant en paix avec son environnement et ayant au moins un certain contrôle sur les événements. » (Seale et van der Geest 2004 : 885.) À l’inverse, tel que déjà mentionné, l’euthanasie n’est pas une « bonne mort » si elle n’est pas accompagnée d’une sorte d’« adieu » partagé avec famille et amis.

De plus, l’euthanasie a créé un espace pour des rituels personnels. Si la mort peut être planifiée et la fin choisie, si le mourant peut être présent en toute conscience, les gens inventeront de nouvelles façons de dire au revoir, dans le cadre desquelles ils devront penser le passé et l’avenir avec leurs propres mots ou avec des paroles empruntées qu’ils auront eux-mêmes choisies. Une musique préférée, des embrassades, des prières et des poèmes, des boissons et des aliments spéciaux pourront aussi marquer ce moment.

Deux rituels d’euthanasie simples dans un hôpital néerlandais peuvent servir d’exemples[1]. Ils sont tous deux uniques, mais témoignent d’une nouvelle tendance. Le premier exemple concerne un homme de 92 ans, qui n’avait pas d’atteinte cérébrale mais dont l’avenir s’annonçait d’une souffrance insupportable. Sa femme et sa fille étaient présentes à l’heure prévue. L’atmosphère était professionnelle, tout avait été organisé. Ils se tenaient la main en silence. Le médecin a pris la parole et demandé si tout allait bien. Le vieil homme a hoché la tête et la fille l’a confirmé. Le médecin a injecté l’agent euthanasique tandis que les proches de l’aîné continuaient à lui tenir la main. La cérémonie a été courte, mais digne.

Le deuxième cas concerne un chrétien pratiquant, un pasteur protestant d’environ 65 ans. Il voulait mourir lucide, avec sa femme et tous ses enfants à ses côtés. L’euthanasie a été prévue pour dix-sept heures. Sa femme et ses enfants étaient présents toute la journée. Le moment venu, toutes les personnes présentes se rassemblèrent autour du lit. Le mourant s’adressa à eux. Le texte était une sorte de sermon préparé d’avance par ce dernier. Il a prié pour chacun d’entre eux personnellement. Son psaume préféré a été lu dans la Bible, et un poème de leur poète préféré a été récité. L’atmosphère était triste, mais parfois joyeuse, et les gens riaient. Pour le pasteur, sa mort était une rédemption et il était convaincu qu’il allait à la « rencontre de son Créateur ». Vers dix-sept heures, deux médecins et une infirmière sont entrés pour effectuer l’intervention. Le médecin responsable a demandé une nouvelle fois au pasteur s’il acceptait l’euthanasie. Après une première injection, l’homme est entré dans le coma, après quoi la famille a quitté la pièce. La deuxième injection a été faite en son absence. Le coeur s’est arrêté. Après la mort de l’homme, la famille est revenue une dernière fois dans la salle. C’est alors que les émotions l’ont submergée.

La fille d’une patiente australienne atteinte d’un cancer qui a été la première à profiter de la nouvelle loi sur l’aide à mourir du pays a déclaré :

Nous étions à ses côtés, David Bowie jouant en fond sonore, entourés d’amour, avec les derniers mots prononcés, simples et dignes. […] Pour moi, c’est la partie la plus importante : le fait de savoir que nous avons fait tout ce que nous pouvions pour la rendre heureuse dans la vie et à son aise dans la mort.

BBC News 2019

L’euthanasie va changer le paysage de la mort. Ce sera un paysage dans lequel la mort ne sera plus une voleuse dans la nuit. On peut désormais être littéralement prêt à mourir. Mais l’euthanasie crée aussi des obligations. La mort ne peut plus être désordonnée sans que personne ne soit là. On ne mourra plus « comme un porteur d’eau tombé au coin d’une rue ». Peu d’invités auront recours à une excuse pour s’absenter. Cette nouvelle situation exige néanmoins un rituel, aussi simple soit-il. La mort ne peut plus être écartée sous prétexte que « je ne savais pas que son heure était venue ». La famille et les amis sont prévenus. Le mourant peut élaborer son propre scénario, choisir ses mots, choisir la musique, commander sa boisson préférée, comme on le fait pour une fête d’anniversaire. « Mourir est quelque chose que nous faisons », peut-on lire dans la devise de l’étude de Hans Lam (1997).

Authenticité

Les répercussions de l’euthanasie recoupent le processus de sécularisation et le fait que l’on se détourne des traditions chrétiennes ancestrales avec leurs textes, gestes et symboles prescrits. Les croyances relatives à la vie et la mort sont en mouvement, elles se diversifient et se personnalisent. La notion de « religion » se transforme et devient « spiritualité », un concept beaucoup plus large et vaguement défini (Rose 2001). Les anciens textes religieux peuvent ne plus correspondre aux idéaux et aux valeurs de la personne mourante (Fortuin et al. 2017 ; Vandendorpe 2000). Dans un passé récent, les funérailles étaient des occasions où les aînés pouvaient « détourner » la vie de la personne décédée et imposer leurs canons religieux lors de la cérémonie funéraire. Le défunt ne pouvait pas protester et les personnes présentes aux funérailles n’avaient d’autre choix que de garder le silence par respect ou politesse tout en protestant intérieurement contre cet acte d’aliénation.

Aux Pays-Bas, ce conflit générationnel et religieux fait lentement place à de nouveaux rituels centrés sur la vie et la personnalité du défunt. Florence Vandendorpe (2000), qui a étudié les pratiques funéraires contemporaines en Belgique, a observé que les familles peuvent désormais adapter le déroulement des funérailles en fonction de l’unicité de la personne décédée : « Plutôt que de reproduire ce qui a été organisé par le passé, le but de la cérémonie funéraire est de réaffirmer l’unicité de la personne décédée, conformément au principe d’authenticité désormais répandu : rien n’a de valeur si cela ne respecte pas l’identité intime de la personne. » (Vandendorpe 2000 : 24.)

Un pas de plus est franchi lorsque le mourant décide du moment et du contenu de la cérémonie. Après tout, même la famille n’est pas toujours digne de confiance. Ezekiel Emanuel, oncologue américain et auteur de plusieurs ouvrages, a fait la déclaration provocatrice suivante qui a suscité de nombreuses discussions :

Lorsque j’atteindrai 75 ans, j’aurai vécu une vie complète. J’aurai aimé et été aimé. Mes enfants auront grandi et seront au milieu de leur propre vie féconde. J’aurai vu mes petits-enfants naître et commencer leur vie. J’aurai poursuivi les projets de ma vie et apporté toutes les contributions, importantes ou non, que j’aurais pu faire. Et avec un peu de chance, je n’aurai pas trop de limitations mentales et physiques. Mourir à 75 ans ne sera pas une tragédie. D’ailleurs, je prévois d’organiser mon service commémoratif avant de mourir. Et je ne veux pas de pleurs ou de lamentations, mais un rassemblement chaleureux rempli de souvenirs amusants, d’histoires liées à ma maladresse et de célébrations d’une bonne vie. Après ma mort, mes survivants peuvent avoir leur propre service commémoratif s’ils le souhaitent — cela ne me concerne pas.

Emanuel 2014

Bien sûr, son affirmation est d’abord une provocation ; à l’âge de 57 ans et en très bonne santé, il annonce qu’il mettra fin à ses jours dans 18 ans parce que, d’ici là, sa vie sera « complète ». Mais ce qui est vraiment intéressant dans cet essai, c’est qu’Emanuel prévoit de maîtriser complètement son rituel de mort sans se soucier de ce que les autres feront et diront après sa mort. Nous saurons en 2032 s’il a tenu sa promesse et s’il a réussi à organiser de manière autonome sa « fête d’adieu », mais je doute qu’il le fasse. Les idées et les intentions concernant la fin de vie ont tendance à évoluer lorsque la fin se rapproche (van der Geest et Satalkar 2019 ; Van Wijngaarden 2020). Mais la « fête » pré-mortem aura probablement lieu et sera alors un phénomène assez courant.

Pour aider ceux qui souhaitent une cérémonie de fin de vie authentique, qu’elle soit pré-mortem ou post-mortem, des entrepreneurs de pompes funèbres, des pasteurs, des artistes et des anthropologues (qui se considèrent comme des experts en rituels) publient des suggestions pour créer de nouveaux rituels axés sur la personne. Un exemple de guide néerlandais pour de nouveaux rituels est celui de Christiane Berkvens-Stevelinck (2007). Elle propose des textes et des suggestions pour ritualiser les transitions conventionnelles de la vie que sont la naissance, le mariage et la mort, mais elle se penche également sur des moments moins conventionnels comme le divorce, l’émigration, la réconciliation et l’euthanasie. Examinons de plus près ses suggestions de rituels préeuthanasie. Elle propose deux options, l’une religieuse et l’autre plus humaniste (« libre »), constituées des principaux éléments suivants : être tranquillement ensemble et reconnaissants de cette vie qui s’achève, réfléchir aux raisons qui ont motivé le choix de l’euthanasie et réaffirmer le lien entre le mourant et les personnes à son chevet. Ces différentes composantes peuvent être concrétisées par la musique et le chant, la lecture d’un poème, le récit de souvenirs personnels, la projection de photos, l’allumage d’une bougie, le toucher et les mains, le manger et le boire[2].

Évidemment, l’état de la personne mourante détermine ce qui est possible et approprié. Dans la plupart des cas, il est peu probable qu’une cérémonie réunissant un grand nombre de personnes soit organisée, mais, si possible, elle pourrait avoir lieu quelques jours avant l’euthanasie prévue. Cependant, je n’ai pas encore documenté de tels événements.

Conclusion

Ce bref essai s’est intéressé aux récents développements de la ritualisation de la mort et du décès dans le contexte de l’euthanasie et à la pluriformité croissante des croyances religieuses et séculaires concernant la mort. L’importance accrue accordée à l’authenticité dans les rituels du mourir pourrait constituer un pas vers une approche anthropologique plus ouverte et plus acceptable de l’expérience de la mort et vers une détabouisation de la mort en tant que partie naturelle de la vie.

Cependant, l’évolution la plus significative à laquelle je m’attends est la disparition progressive des experts médicaux et religieux/spirituels de cette scène. Utiles, voire indispensables, ils se déplaceront vers les coulisses alors que le mourant ou ses proches seront les principaux orchestrateurs de la cérémonie finale. En d’autres termes, les processus actuels de sécularisation et de démédicalisation seront bien visibles dans les actions que les personnes entreprennent à l’approche de la mort. Les règles juridiques qui insistent sur le rôle prépondérant des médecins en matière de mort et d’euthanasie cèderont la place à un appel à l’autonomie et à l’authenticité en fin de vie.