Résumés
Résumé
L’amélioration des compétences d’écriture dans une langue seconde (L2) est un processus complexe et laborieux. En enseignement des langues basé sur les tâches (ELBT), nous nous tournons davantage vers les tâches d’écriture qui sont, très souvent, ponctuelles. Pour aider les jeunes apprenants à développer leurs compétences scripturales en s’appuyant sur des tâches de façon régulière et continue, nous proposons le portfolio d’écriture. Cet outil, basé sur le modèle de Mak et Wong (2018), propose cinq phases : la préparation, la collecte, la réflexion, la sélection et l’évaluation. Avec notre portfolio d’écriture du capitaine, les jeunes scripteurs de niveau A2-B1 du Cadre européen commun de références pour les langues suivront les aventures du capitaine en accomplissant une panoplie de tâches tout en ayant du plaisir. L’élève aura à sa disposition une carte au trésor qui propose un parcours à suivre, ainsi que cinq outils du capitaine qui l’aident dans les phases d’écriture.
Mots-clés :
- tâche d’écriture en langue seconde,
- portfolio d’écriture,
- l’enseignement des langues basé sur les tâches
Corps de l’article
Introduction
Le développement des compétences scripturales peut s’avérer un processus long, voire accablant, pour de jeunes élèves d’une langue seconde (L2). Pour amener les élèves à développer leurs compétences en tant que scripteurs autonomes, le portfolio d’écriture est une avenue très prometteuse (Lam, 2013; Lee, 2011; Mak et Wong, 2018). Le portfolio, également connu sous le nom de dossier de présentation ou dossier d’apprentissage (Jalbert, 1998), regroupe de nombreuses versions et types de textes produits par les élèves qui permettent ainsi de suivre leur développement et d’évaluer leur performance. Dans le champ de la recherche sur l’enseignement des langues basé sur les tâches (ELBT), les chercheurs qui se penchent sur la compétence écrite (Byrnes et Manchón, 2014) s’intéressent aux tâches d’écriture comme moyen authentique d’engager les élèves dans des interactions significatives entre paires et enseignant afin d’accomplir un objectif communicatif qui simule des situations de la vie réelle (Ellis, 2017). En ELBT, cependant, ces tâches de rédaction sont ponctuelles et l’élève n’est pas nécessairement encouragé à établir des liens entre les différentes tâches de rédaction. Dans cet article, nous faisons le pont entre le portfolio d’écriture et l’ELBT afin de montrer comment étayer les tâches de rédaction pour appuyer le développement d’une L2.
Le portfolio d’écriture
Le portfolio d’écriture comprend divers éléments, soit la préparation, la collecte, la réflexion, la sélection et l’évaluation (Mak et Wong, 2018) (voir Figure 1). La préparation a lieu avant d’entreprendre une tâche de rédaction et sert à guider les élèves pour se fixer des objectifs (p. ex., travailler l’organisation, la précision, l’aisance) et pour activer leurs connaissances préalables sur les contenus et leurs connaissances métacognitives (p. ex., connaissance des genres, des processus de rédaction, du public ciblé) (Lam, 2013; Lam et Lee, 2010; Mak et Wong, 2018). Lors de cette première étape, l’élève est placé au centre de son propre apprentissage : c’est l’élève qui détermine ses objectifs de rédaction en évaluant ses diverses compétences à travers une variété de tâches.
Le portfolio est aussi une représentation holistique des savoirs des élèves qui regroupe plusieurs versions et travaux rédigés sur une longue période, chacun des travaux ayant divers objectifs, auditoires et genres (Hamp-Lyons et Condon, 2000). Donc, le deuxième élément du portfolio, sans contredit le plus important, est celui de la collecte. La collecte se fait tout au long d’un cours et c’est à l’élève de garder, dans un seul dossier, toutes les versions des textes réalisés y compris les premiers jets, les textes révisés et les autoévaluations (voir Figure 2) pour chaque tâche de rédaction. Cette étape sert à amener l’élève à communiquer ses idées avec son auditoire (p. ex., camarades de classes, direction de l’école, etc.) afin de combler des objectifs communicatifs authentiques en accomplissant des tâches centrées sur le sens (meaning-making tasks) tout en travaillant la précision langagière (Manchón, 2014).
À la suite de la collecte, vers la fin d’une année scolaire, les élèves sont amenés à réfléchir individuellement et concrètement à la qualité de leurs écrits, leur processus de rédaction et leurs futurs objectifs de rédaction (Lam, 2013; Lam et Lee, 2010; Mak et Wong, 2018). À la suite de cette étape de réflexion, l’élève est mené à l’étape de la sélection. Le portfolio comprend plusieurs textes et c’est à l’élève de sélectionner les textes, avec l’aide de l’enseignant si nécessaire, pour que l’enseignant puisse ensuite procéder à la dernière étape, soit l’évaluation sommative des meilleurs travaux (Jalbert, 1998; Lam, 2013; Lam et Lee, 2010; Mak et Wong, 2018).
Dans le champ de la recherche sur l’écriture, l’utilisation des portfolios comme outil d’apprentissage a souvent été étudiée, et les avantages sont nombreux. Lam et Lee (2010) ont examiné cet outil auprès d’étudiants préuniversitaires d’anglais langue étrangère. Les participants de l’étude ont noté qu’ils se sentaient plus motivés pour rédiger des textes et qu’ils percevaient une amélioration en tant que scripteurs autonomes. Travailler plus d’une version d’un texte, intégrer la rétroaction corrective et établir des objectifs de rédaction ont également contribué au développement de la pensée critique, une compétence importante pour tous. Dans leur étude avec de jeunes apprenants de l’anglais au primaire, Mak et Wong (2018) confirment que cette approche promeut l’autorégulation parce que ce sont les élèves qui déterminent leurs propres objectifs et que cet exercice de réflexion contribue au développement de leur autonomie. Cette autorégulation adhère à la conceptualisation de l’ELBT qui place l’élève au centre de l’apprentissage (Ellis, 2003). De plus, puisqu’ils travaillent un texte à maintes reprises, ils arrivent à évaluer et à monitorer leur performance. Les enseignants y trouvent également leur compte en intégrant cette approche puisqu’ils proposent des tâches de rédaction et de révision. Cet échafaudage pédagogique permet aux enseignants de prendre un rôle secondaire favorisant ainsi un enseignement centré sur les apprenants (Ellis, 2017), leur permettant d’observer et d’évaluer le développement des compétences et non pas seulement un produit final (Lam et Lee, 2010).
Malgré les avantages associés à l’utilisation du portfolio, certaines limites ont été identifiées. Dans un premier temps, on remarque que les apprenants continuent à éprouver de la difficulté à travailler de façon autonome et lorsqu’ils doivent réviser leurs textes, ils préfèrent la rétroaction corrective des enseignants à celle apportée par les pairs (Lam, 2013). Les chercheurs observent également un manque de motivation intrinsèque chez les élèves (Mak et Wong, 2018). Les élèves éprouvent des difficultés à gérer leur temps et à identifier leurs objectifs personnels (Lo, 2010). Somme toute, le développement de la pensée critique est complexe pour les scripteurs d’une langue seconde et donc on ne peut sous-estimer le rôle important que joue l’enseignant tout au long du processus.
L’enseignement des langues basé sur les tâches et le portfolio d’écriture
L’ELBT s’appuie sur l’utilisation de tâches pour soutenir l’apprentissage (Ellis, 2003, 2017; Samuda et Bygate, 2008). Dans cet ouvrage, nous nous appuyons sur la conception de la tâche proposée par Ellis (2017) : les tâches pédagogiques sont axées principalement sur le sens, comportent un but communicatif identifiable et mesurable, sont en lien avec les besoins des apprenants et reflètent un langage réel et authentique. Le portfolio d’écriture, en plus de comprendre plusieurs étapes, comprend un nombre important de tâches d’écriture individuelles et collaboratives (ainsi que des tâches à l’oral) qui aideront l’élève à développer ses compétences en tant que scripteur autonome tout en développant ses compétences langagières. La tâche, sans contredit l’élément le plus important en ELBT, fait partie d’une démarche en trois phases : la prétâche, la tâche et la post-tâche (Willis et Willis, 2007). La première phase, la prétâche, prépare l’élève à rédiger des textes en activant ses connaissances préalables sur le sujet, les genres ou les formes/structures linguistiques. L’enseignant peut modéliser cette préparation. La tâche est l’étape où l’élève travaille pour atteindre les objectifs de la tâche. Et enfin, à la post-tâche, les élèves peuvent réaliser des activités langagières qui mettent l’accent sur la forme afin de solidifier leurs connaissances, répéter la tâche sous des conditions similaires ou partager leur travail. Lors de la collecte, l’étape la plus importante du portfolio, nous allons montrer comment chaque tâche devrait comprendre une prétâche et une post-tâche.
En ELBT, quoique l’accent semble mis principalement sur les compétences à l’oral, les tâches d’écriture jouent un rôle important (Byrnes et Manchón, 2014). Le portfolio rassemble ainsi diverses tâches authentiques, à l’écrit et à l’oral (préparation, collection, réflexion). Cet outil, cependant, ne semble pas être exploité par de jeunes scripteurs d’une L2, peut-être parce qu’il est démesurément complexe. Par conséquent, l’intégration de tâches itératives au sein d’un portfolio d’écriture permet de décomposer cette démarche exhaustive en unités d’intervention plus gérables pour les apprenants et les enseignants. En ce sens, la démarche d’enseignement en trois phases de l’ELBT est essentielle : il est important de développer des prétâches et des post-tâches qui accompagneront l’élève à travers le processus de rédaction tout en l’aidant à réfléchir sur le sens et sur la qualité de ses écrits. Avec cette démarche, l’élève prendra un rôle actif et développera son indépendance en tant qu’utilisateur de la langue cible (Ellis, 2003, 2017). Chemin faisant, il contribuera à la conception de son portfolio sur une plus longue période. Pour appuyer les enseignants qui souhaitent intégrer le portfolio d’écriture et ses tâches connexes dans un cours avec de jeunes apprenants du français L2, nous proposons un thème ludique ainsi que les tâches pertinentes pour son utilisation.
Le portfolio d’écriture du capitaine
L’auteure, professeure au primaire, s’inspirant des étapes du portfolio présentées par Mak et Wong (2018), a transposé chaque étape du portfolio en une aventure de pirates. Le monde des pirates évoque certaines idées telles que l’aventure et les trésors. En encadrant la rédaction dans le monde des pirates, nous adoptons un thème qui captera l’attention de jeunes scripteurs (ayant un niveau A2-B1 du Cadre européen commun de références pour les langues) et soutiendra leur intérêt et motivation. Le portfolio d’écriture du capitaine inclut deux éléments clés, notamment, la Carte au trésor et les Outils du capitaine. Chaque élève, ou capitaine, aura un dossier avec sa propre carte au trésor et des copies de ses outils pour l’accompagner tout au long de son aventure pendant l’année scolaire.
La Carte au trésor et les outils du capitaine
Pour présenter les étapes du portfolio aux jeunes apprenants, nous proposons la Carte au trésor (voir Figure 3). Sur cette carte, chaque étape du portfolio et les tâches connexes sont représentées par un titre ludique et un symbole graphique. De plus, pour accompagner l’élève à travers ces étapes, nous proposons le chemin à suivre. L’élève dispose ainsi d’un petit bateau qu’il déplace sur la carte lorsqu’il travaille sur ses écrits afin de suivre son cheminement. En plus d’avoir ce schéma, l’élève dispose des Outils du capitaine, notamment (1) la boussole, (2) le code secret, (3) la cambuse, (4) le coffre-fort et (5) le journal de bord (annexe A). La mise en place du portfolio est présentée dans la section suivante ainsi qu’une explication des outils.
La mise en place du portfolio du capitaine
La préparation : étape 1
La première étape, celle de la préparation, requiert l’utilisation de la Boussole, le premier outil du capitaine. Cet outil aidera les élèves à sélectionner leurs objectifs; c’est ce qu’on a appelé la Décision de la conquête. Pour cette tâche, les élèves placent leur bateau sur la rose des vents (dans le coin gauche) et définissent leurs objectifs de rédaction pour le travail à venir (p. ex., travailler les temps verbaux, utiliser un lexique soutenu), identifient leur plan (p. ex., stratégies pour y arriver) et prennent note des aspects qui leur ont causé des ennuis dans le passé. Cette réflexion en amont est exigeante pour de jeunes scripteurs. Ainsi, cette tâche de réflexion peut se faire en grand groupe s’ils n’ont pas encore l’habitude de le faire et éventuellement en petite équipe. Les élèves sont ensuite invités à écrire leurs réponses dans la boussole qui est partagée avec l’enseignant qui, à son tour, offre de la rétroaction et des conseils. La boussole est gardée dans le portfolio de l’élève (dans un classeur) qui peut la consulter ou la modifier si cela s’avère nécessaire lors de la collecte.
Toujours à l’étape de la préparation, nous proposons une deuxième tâche, l’Entraînement. L’élève avance son bateau sur les sabres pour débuter son entraînement avec sa classe. L’enseignant partage avec ses élèves des textes similaires à ceux que les élèves devront produire. Ensemble, ils peuvent analyser les éléments du genre à produire, notamment, les caractéristiques communicationnelles, textuelles, sémantiques, grammaticales et graphiques/visuelles (Chartrand, Émery-Bruneau et Sénéchal, 2015). Il est important d’accorder du temps à l’entraînement puisque ces connaissances aideront l’élève lors de la prochaine étape, celle de la collecte.
Ces deux premières tâches doivent être accompagnées de prétâches et de post-tâches. Nous proposons une modélisation de l’activité comme prétâche. Plus précisément, pour la Décision de la conquête, l’enseignant remplira sa boussole tout en verbalisant ses idées pour que l’élève puisse entendre le processus de réflexion. Pour l’Entraînement, l’enseignant peut analyser les éléments du texte cible en grand groupe, une étape qui aidera l’élève à remarquer les caractéristiques du texte cible. Étant donné l’âge et le niveau des élèves, cette analyse doit être brève et centrée sur peu d’éléments (p. ex., la chronologie des évènements d’une narration, les temps de verbes d’une narration, etc.).
Pour la post-tâche, nous proposons deux activités. Dans un premier temps, le partage des boussoles peut se réaliser en présentation par affiche, positionnant ainsi l’élève au centre de son apprentissage. Chaque boussole est affichée aux murs de la classe et les élèves se promènent pour les lire et, si possible, pour demander des clarifications aux auteurs. Pour l’entraînement, nous proposons plutôt une répétition de l’analyse des éléments du genre du texte ciblé, mais cette fois-ci, en collaboration avec de nouveaux amis. La répétition a un effet positif sur l’apprentissage et les émotions (Payant et Reagan, 2018). En répétant cette tâche, les élèves pourront ainsi comparer leurs réponses, ce qui permettra à l’enseignant, qui écoutera les échanges des petits groupes, de déterminer s’ils ont bien compris.
La collecte : étape 2
La prochaine composante, celle de la collecte, comporte plusieurs tâches rédactionnelles authentiques qui sont représentées par le drapeau de pirate et les trois îles. Encore une fois, chacune de ces tâches doit être accompagnée de prétâches et de post-tâches.
C’est lors de l’Abordage (représenté par le drapeau de pirate) que l’élève rédige un premier jet. Pour échafauder le processus de rédaction, la planification demeure la prétâche idéale. Cette planification devrait se faire en dyade et l’utilisation de la L1 peut être permise pour que les élèves activent leurs idées. Après avoir réalisé la tâche de rédaction (individuellement ou en collaboration), nous proposons une post-tâche qui met l’accent sur des formes grammaticales qui auraient posé des ennuis à une majorité des élèves (p. ex., un enseignement explicite de la forme). En mettant l’accent sur la forme après la rédaction, les élèves pourront se concentrer sur le sens du texte.
Par la suite, l’élève peut avancer son bateau vers les îles de réflexion. Son premier accostage est sur la Petite île, représentée par les palmiers et le hamac, où l’élève entreprendra un premier travail de révision de son propre texte. L’enseignant devra modéliser ce travail puisque les élèves auront peu d’expérience avec ce type de tâche. Pour s’assurer que l’élève se concentre sur un nombre limité d’éléments, il serait important de développer une grille d’autoévaluation avec des questions stratégiques (p. ex. Est-ce que ma narration d’évènements personnels a des marqueurs temporels, un sommet ? une résolution ? etc.). De plus, avant de débuter cette révision, nous invitons l’enfant à relire sa boussole dans laquelle ses objectifs sont précisés pour s’assurer qu’il ne fasse pas fausse route.
À la suite de cette révision, nous proposons une discussion de groupe dans laquelle les élèves échangent une chose qu’ils ont apprise ou une stratégie qu’ils ont utilisée. Il est nécessaire d’allouer du temps aux élèves en classe pour cette post-tâche puisque la révision est une tâche complexe.
Cette révision individuelle est suivie de la Rencontredes capitaines, représentée par l’île avec deux pirates. Afin d’aider les jeunes scripteurs à entreprendre cette tâche (qui risque d’être nouvelle pour eux), il est important de les accompagner dans cette démarche. Premièrement, nous proposons qu’ils lisent en silence (sans écrire) le texte d’un camarade. Cette première lecture les aidera à bien comprendre le texte. Ensuite, en dyade, chaque élève présente sa boussole pour expliquer ses objectifs de rédaction. Ces composantes sont des exemples de prétâches. À la suite de cet échange, chaque élève relit attentivement le texte de son partenaire et propose des suggestions pour l’améliorer. Ceux-ci sont ensuite retravaillés par les scripteurs soit individuellement, soit avec l’aide de leur partenaire. À la suite de cette tâche de révision, il pourrait être pertinent de retravailler les structures grammaticales ayant posé des ennuis.
Finalement, l’élève accoste son bateau sur l’Île du vieux sage, le moment où se produit la rencontre avec l’enseignant. Avant cette rencontre, l’enseignant aurait déjà offert une rétroaction corrective sélective sur le texte pour ne pas surcharger l’élève puisque la rétroaction corrective sélective cible un nombre restreint d’erreur. Nous invitons également l’enseignant à offrir une rétroaction corrective directe pour les erreurs non traitables (p. ex., erreurs qui ne s’expliquent pas avec une règle simple ou qui ont plusieurs exceptions) et une rétroaction corrective indirecte pour les erreurs traitables (p. ex., erreurs fréquentes qui s’expliquent avec une règle simple et qui obscurcissent le sens du mot) (voir Guénette et Jean, 2012). Ainsi, avant la rencontre, du temps sera alloué à la lecture de la rétroaction corrective et à la correction des erreurs traitables (prétâche). Les erreurs traitables sont accompagnées du Code secret, le deuxième outil du capitaine. Ce dernier comprend une liste des catégories des erreurs fréquentes. Lors de la rencontre, les discussions devraient être centrées sur les erreurs non traitables puisque l’élève arrivera difficilement à identifier ces erreurs. Après la rencontre, l’élève pourra ainsi réviser les erreurs non traitables, soit individuellement ou avec un ami.
Une fois de retour au point de l’abordage (le drapeau de pirate), l’élève travaille avec un troisième outil, à savoir la Cambuse. La cambuse est un tableau dans lequel l’élève inscrit les erreurs, le type d’erreurs en s’appuyant sur le code secret et la correction proposée. Cette post-tâche supplémentaire aidera l’élève à remarquer ses difficultés langagières et l’aidera davantage à prendre conscience de la fréquence d’un même type d’erreur, il peut également inscrire le nombre de fois que la même erreur a été produite. Aussi, pour appuyer le développement du vocabulaire, l’élève a également recourt à son Coffre-fort, le quatrième outil. Le coffre-fort est une compilation du nouveau vocabulaire que l’étudiant a acquis par lui-même au fil du temps. Il peut ajouter des mots à son coffre-fort en tout temps (p. ex., utilisation du coffre-fort comme prétâche ou post-tâche). Après avoir fait le tour des îles, l’élève peut refaire le tour des trois îles pour améliorer son texte ou peut soumettre une version finale révisée qui sera gardée dans son portfolio.
La réflexion : étape 3
Pour promouvoir la réflexion, l’élève visitera l’Île secrète du trésor où il prendra le temps d’écrire dans le Journal du capitaine, le cinquième outil du capitaine. La réflexion peut se faire entre chaque étape, mais est extrêmement importante avant d’entreprendre un nouveau voyage, c’est-à-dire, avant de répéter les étapes de la préparation et de la collecte. Dans son journal, il note ses découvertes et ses défis. Lorsque cette réflexion est effectuée à la fin d’un voyage, l’élève peut également se préparer mentalement et définir la boussole du voyage à venir.
La sélection et l’évaluation : étapes 4 et 5
Après avoir réalisé plusieurs voyages (étapes 1 à 3), l’élève est en mesure de sélectionner les textes qui seront évalués (évaluation sommative) par les enseignants.
Tâches pédagogiques connexes
Avec le portfolio du capitaine, il est possible de développer un nombre important de tâches connexes authentiques. Nous en proposons deux qui appuient le développement du vocabulaire et de la lecture.
L’île du troc
Cette première tâche sert à développer le vocabulaire de l’élève. Nous proposons la tâche de l’Île du troc. L’élève placera son bateau sur le symbole du Marché. Pour la prétâche, chaque élève choisira trois nouveaux mots de son coffre-fort et en petites équipes, ils réinvestiront ces mots dans de nouveaux textes/dialogues préparés en collaboration (courte tâche de rédaction). Les nouveaux textes seront présentés oralement pour encourager le partage (post-tâche).
Le Tour des conquêtes
Une deuxième tâche proposée ayant comme objectif de valoriser les travaux est le Tour des conquêtes. Dans un premier temps, chaque élève choisit parmi ses propres textes le meilleur et le place sur son pupitre avec une feuille colorée. Les étudiants naviguent de pupitre en pupitre vers un nouveau texte, le lisent et laissent un commentaire positif au capitaine (l’auteur). Ils peuvent se concentrer sur leur passage préféré, sur la qualité globale, etc. Cette tâche peut être répétée à plusieurs reprises. Éventuellement, chaque capitaine aura reçu des phrases d’encouragement qui pourraient contribuer à son estime de soi. Pour encourager le partage à long terme, ces mêmes textes peuvent être affichés au Mur de la conquête et relus par les élèves.
Conclusion
Le développement des compétences scripturales est un long processus et il est important de guider l’élève à comprendre la façon d’améliorer ses propres compétences en tant que scripteur. En ELBT, les tâches écrites sont souvent ponctuelles et il se peut que l’élève n’arrive pas à voir comment se développent ses compétences. Pour amener les élèves à témoigner le développement de leurs compétences en tant que scripteurs autonomes, nous vous avons présenté le portfolio d’écriture. À chaque étape du portfolio, nous nous sommes appuyés de prétâches, de tâches et de post-tâches afin d’échafauder leur apprentissage. Une version de ce dispositif pédagogique a été partagée avec des enseignants de français langue seconde du niveau primaire afin d’obtenir leur opinion sur sa pertinence et faisabilité. À la lumière de leurs commentaires positifs, nous vous invitons à l’utiliser avec vos jeunes élèves qui pourront ainsi suivre leur progrès et partager leurs textes tout en développant leur autonomie et estime de soi.
Parties annexes
Annexes
Remerciements
Je tiens à remercier sincèrement les réviseurs anonymes qui ont apporté des commentaires très pertinents et un grand merci à la professeure Caroline Payant pour ses conseils. Un remerciement également à Jaco, l’artiste qui a créé les images pour le portfolio d’écriture du capitaine.
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