Résumés
Résumé
La pièce La paix des femmes de Véronique Côté, présentée au Théâtre La Bordée à Québec du 13 septembre au 8 octobre 2022, puis en webdiffusion pendant trois mois, traite de la marchandisation du corps de la femme. Ce sujet est tellement brûlant et polarisé que la pièce a suscité de vives réactions et laissé des traces profondes. Pour saisir ce phénomène multiforme, il importe d’exposer au préalable le contexte social qui a donné lieu à la création de la pièce, car il établit déjà la pertinence de celle-ci. J’examinerai ensuite le caractère polémique et féministe de son contenu. Puis j’étudierai les empreintes qu’ont laissées le texte dramatique et surtout sa réalisation scénique; je ferai ressortir les différentes natures de ces empreintes et leurs provenances variées qui déterminent leur portée idéologique. Enfin, je comparerai la pièce de Côté à ses antécédents culturels afin de montrer en quoi elle s’en démarque.
Abstract
The play La paix des femmes by Véronique Côté, presented at the Théâtre La Bordée in Quebec from September 13 to October 8, 2022, then webcast for three months, problematizes the commodification of women’s bodies. To understand this multifaceted phenomenon, it is important to first expose the social context which gave rise to the creation of the play, because it already establishes its relevance. I will then examine the polemical and feminist nature of its content. Then I will continue the thread downstream to study the imprints left by the dramatic text and especially its stage production by highlighting the different nature of these imprints and their varied origins. Finally, I will compare Côté’s play to its cultural background in order to show how it stands out.
Corps de l’article
En amont de La paix des femmes
L’origine de La paix des femmes réside dans une demande formulée par Michel Nadeau, directeur artistique de La Bordée, qui désirait que son théâtre produise une pièce ancrée dans la réalité locale, celle du quartier Saint-Roch où se situe La Bordée. Il pensait moins au fait que ce quartier constitue le coeur artistique de Québec, qu’à autre chose : c’est le lieu de ce qu’on appelle la prostitution de rue, et, à la fois, où oeuvre la Maison de Marthe qui aide les femmes voulant sortir de ce métier. Nadeau a sollicité Véronique Côté, qui est aussi bien praticienne de théâtre que dramaturge, pour qu’elle écrive la pièce en question et en assume la mise en scène. À ces fins, Côté a effectué des recherches pendant des années, lu et entendu de nombreux témoignages, pris connaissance de statistiques, visionné des sources vidéo, recueilli une somme de données auprès de plusieurs organisations et consulté des spécialistes de la prostitution, dont Rose Dufour, anthropologue et fondatrice de la Maison de Marthe, ainsi que Martine B. Côté, journaliste et juriste (avec qui elle publiera par la suite un essai). Bref, sa pièce s’appuie sur de solides assises.
Quoiqu’elle provienne d’une commande bien ciblée et d’inspiration locale, elle traite d’un problème, la commercialisation du corps féminin, largement répandu à l’échelle mondiale. « La paix des femmes » est d’ailleurs le nom d’une loi qui existe en Europe : adoptée en Suède en 1998 (et mise en vigueur le 1er janvier 1999), elle est la première loi au monde qui protège les femmes victimes de violences sexuelles, celles-ci étant symptomatiques d’une société inégalitaire[1]. À la lumière de cet arrière-plan, le titre emprunté par Côté promet donc une approche féministe. Il suppose aussi une position idéologique puisque le modèle suédois, suivi par le Canada et maints pays occidentaux, encadre notamment la prostitution en criminalisant les proxénètes et les clients, ce contre quoi s’élève le camp qui se dit en faveur du travail du sexe, connu sous l’appellation pro-TDS (Brabant, 2021). Mais le titre annonce également la fin de la pièce : le parcours personnel des personnages débouche sur un espace de réparation qui prépare une « paix »; et la division entre différentes positions féminines, assez représentative du débat actuel, évolue vers sur une certaine réconciliation, qui, elle, ne se produit guère dans la réalité (Mensah et Laberge, 2006 : 72).
Une polémique mise en abyme
La pièce se compose d’une vingtaine de courts tableaux impliquant sept personnages et reliant les crises qu’ils traversent. Celles-ci concernent le don d’ovules et la procréation assistée, l’inconduite sexuelle et l’abus de pouvoir par un directeur de thèse, le bouleversement d’un couple dont l’homme recourt à une escorte; mais cette question du travail du sexe est plus élaborée entre Isabelle (jouée par Anne-Marie Olivier), professeure de littérature féministe, et Alice (Nathalie Séguin). Cette jeune inconnue surgit dans le bureau d’Isabelle à l’université et raconte peu à peu l’histoire de sa soeur Léa, morte d’une surdose huit mois après avoir commencé à se prostituer. Découpée en sept tableaux, leur confrontation alterne avec les autres dialogues et avec les monologues de Léa (Catherine Oksana-Desjardins) qui, outre-tombe, livre rétrospectivement son expérience : c’est le troisième canal par lequel se développe le thème de la prostitution.
Dans l’un des tableaux, Isabelle lance un livre sur les polarisations qui divisent les mouvements féministes. Or, la pièce aborde quelques-unes de ces polémiques collectives en reflétant un féminisme non univoque mais polyphonique, à l’image de ce qu’il est dans la société : nullement simpliste mais foisonnant d’arguments complexes (Conseil du statut de la femme, 2002 : 85-91). Non seulement la matière qu’explore la pièce est de nature à susciter le débat, mais les affrontements dialogiques entre certains personnages alimentent cette dynamique, en mettant énergiquement en présence des points de vue divergents. Cette énergie des affrontements est une autre caractéristique que l’on retrouve dans la réalité (La Vie en rose, 2005 : 72). L’impact qu’a eu la pièce et les traces qu’a laissées sa représentation scénique s’expliquent par les enjeux qu’elle soulève; ceux-ci sont aussi clivés que d’actualité.
Deux facteurs sont évoqués avec récurrence comme des critères antagonistes pour mesurer l’exploitation du corps de la femme : le facteur économique et le consentement. Le titre judicieux de Marrie Bathory (2022) les circonscrit plus ou moins : « Argent et agentivité : La paix des femmes ». Le facteur économique est abordé dès le début de la pièce. Le prologue dépiste des formes insidieuses de violence qui ont cours au quotidien dans les pays riches, et se termine par cette assertion lapidaire : « Je paye, donc j’ai le droit » (Côté, 2021 : 24). Il s’agit d’une allusion qui s’éclaircit quand Léa aboutit aux mêmes mots pour dire le pouvoir du client sur la prostituée : dans « une chambre d’hôtel chic […], toute seule avec un Américain ultrariche […] c’est pas toi qui décides / le pouvoir est pas de ton bord […] y paie : y a le droit » (Côté, 2021 : 64). L’étude théorique de cette question va dans le même sens : « La transaction entre une prostituée et un client présuppose en principe la maîtrise masculine et la soumission féminine, puisque le statut d’acheteur de services est plus élevé que celui de vendeur de tels services. » (Löwy, 2003 : 100) Ainsi, les personnages féminins de la pièce croient qu’un rapport transactionnel induit une domination économique et un risque d’oppression. Mais Isabelle fait exception en ne voyant pas la composante financière comme déterminante. Elle dénonce plutôt la relation dominant/dominé qui repose sur le statut social, comme entre le directeur de thèse et son étudiante, car c’est là que réside le « différentiel de pouvoir », selon elle. Alice souligne toutefois qu’il règne autant un « différentiel de pouvoir », mais de nature économique, dans la prostitution, alors que son interlocutrice n’y voit qu’« un échange de services sexuels mutuellement consenti » (Côté, 2021 : 79).
L’autre fil conducteur servant à soupeser l’exploitation du corps féminin, la notion de consentement, est préalable à l’agentivité. Isabelle promulgue le droit des femmes à décider pour elles-mêmes, entre autres ce qu’elles « veulent faire ou pas avec leur corps » (Côté, 2021 : 29). Cependant, chaque situation qui convoque ce principe le relativise. Le cas de Marion et celui de Léa sont particulièrement significatifs. Ces deux femmes avaient beau être adultes, elles étaient jeunes et un peu naïves; elles avaient beau reconnaître leur responsabilité, elles se méprenaient sur ce qu’on attendait d’elles. Leur consentement n’était pas éclairé et recelait une extorsion : Marion a été victime d’un chantage (par son directeur de thèse); Léa, d’une imposture (par sa supposée amie, Kim, qui s’est révélée proxénète). De plus, Kim s’est aussitôt assujetti Léa en la rendant dépendante de la drogue, de l’argent et de la prostitution. Ni Marion ni Léa ne pouvaient donc exercer d’agentivité dans leurs situations respectives. Côté expose ici des hiérarchies plus subtiles que l’aliénation dépistée par un certain courant de pensée féministe (Toupin, 2009 : 117-118).
Une remise en question de l’agentivité survient aussi lors du face-à-face entre Alice et Isabelle. Dans ses cours, ses publications et ses entrevues, cette dernière valorise le travail du sexe en lui appliquant le concept d’agentivité, comme quoi il atteste le pouvoir des femmes. Toutefois, rétorque Alice, les femmes qui disent choisir ce métier ne représentent pas la majorité, incapable de parler parce qu’elle est engluée dans une réalité destructrice. Le cas de Léa corrobore cette assertion. D’une part, son travail entraîne une consommation abusive de drogue, au point qu’elle en meurt; une abondante documentation montre effectivement la corrélation, dans la réalité sociale, entre prostitution et stupéfiants, comme entre prostitution et mort prématurée (Conseil du statut de la femme, 2002). D’autre part, Léa constate qu’elle n’est plus un sujet qui agit, mais un objet qui subit : « si y a besoin de te pisser dans la bouche pour avoir un orgasme, […] de te mordre […] de t’étrangler / de te donner des coups de pied […] pour venir / y va le faire » (Côté, 2021 : 64). Léa fait les frais de ce dont témoignent beaucoup de prostituées réelles, qui servent à assouvir des fantasmes autres que les services sexuels classiques (Löwy, 2003 : 100).
À l’agentivité avancée par Isabelle, Alice oppose également un mécanisme adaptatif par lequel des prostituées se font croire qu’elles choisissent ce métier et qu’il leur convient. Léa s’est efforcée en ce sens de recourir tantôt au déni : « j’ai fait semblant que ça me faisait rien » (Côté, 2021 : 37); tantôt à la dissociation par un refuge intérieur. En outre, Alice allègue des faits que rapportent des témoignages lus ou entendus par Côté lors de ses recherches et qui infirment « les idées » théoriques d’Isabelle : « Y a les idées, pis y a des mâchoires disloquées à force de faire des pipes. Y a les idées, pis y a des femmes […] en choc posttraumatique. […] Y a les idées, pis y a le corps de ma soeur » (Côté, 2021 : 90). Ce corps avait été trouvé avec « des traces de violence […] banalisée, répétée » : « fissures anales » et « ITS dans la bouche » (Côté, 2021 : 88). Quant au premier fait allégué, il est la conséquence d’une pratique dénoncée plus tôt par Alice : « faire huit pipes par jour à du monde que tu connais pas » (Côté, 2021 : 76), et expressément désigné par Sarah (Carolanne Foucher) pour dessiller les yeux de son conjoint Max (Jean-Philippe Côté) : « faire des pipes à la chaîne? Tu penses-tu que c’est l’fun? » (Côté, 2021 : 71). En fin de compte, Isabelle semble avoir construit une image qui ne correspond au vécu ni de Léa ni de nombreuses prostituées réelles. Elle s’inscrit à la suite de courants de pensée dont la conception masque des problèmes concrets (Perreault, 2005 : 73).
La pièce ne manque pas de thématiser la distinction parfois flottante entre travail du sexe et trafic humain, quand Isabelle accuse Alice de confondre ces deux phénomènes. Il est vrai qu’il existe une zone où la démarcation n’est pas claire; même le Dictionnaire critique du féminisme inclut le trafic des femmes dans la première des deux définitions qu’il donne de la prostitution (Legardinier, 2004 : 161-166). Une autre controverse que thématise la pièce a cours depuis quatre décennies et concerne la terminologie (Fédération des femmes du Québec, 2007). Alice et Léa utilisent souvent un pronom démonstratif en guise d’euphémisme allusif, par exemple : « Elle prenait aucune drogue avant ça » (Côté, 2021 : 88. Je souligne). Tandis qu’Isabelle privilégie la traduction française[2] des expressions états-uniennes sex work et sex worker[3], revendiquées par les coalitions de travailleuses du sexe depuis qu’elles prennent la parole, afin de légitimer leur secteur d’activité (Lebovitch et Ferris, 2020). Ces expressions sont généralement adoptées par les médias, mais malgré leur notoriété, Alice les trouve « détachée[s] de la réalité dégueulasse qui se cache en dessous des mots ». On dit « “travailleuse du sexe’’ comme si c’était l’unique façon respectueuse » de les désigner; « “travail du sexe’’ […] comme si c’était un TRAVAIL, c’est pas un travail, ça devrait jamais être un travail », s’écrie-t-elle avec une conviction tranchante (Côté, 2021 : 91).
L’essai : écriture subséquente, publication simultanée
Côté a été secouée par l’enquête dans laquelle elle s’est plongée pour cerner de près son sujet : « Au fil de ce que j’ai appris, confie-t-elle, ce qui n’était au départ qu’une volonté de documenter ma pièce de théâtre est devenu un questionnement citoyen à part entière » (B. Côté et Côté, 2021 : 18). Puis le processus créateur s’est révélé si stimulant qu’elle a coécrit, avec la journaliste et juriste Martine B. Côté, un essai sociologique en complément du spectacle. Elle y partage des informations précises et récentes sur divers aspects du travail du sexe[4], et qui apparaissent essentielles pour mener une réflexion éclairée. Elle signale notamment la difficulté accrue de séparer le travail du sexe de l’esclavage sexuel et du trafic des femmes, vu l’ampleur que prennent ces derniers au xxie siècle. Elle est sensible au fait que les recrues sont souvent très, très jeunes, racisées ou migrantes, et d’autant plus vulnérables à une exploitation brutale par les puissants réseaux qui orchestrent ce marché. Elle interroge enfin le sens profond de la florissante industrie du sexe et fait part de son cheminement avisé vers un néo-abolitionnisme[5].
De toute évidence, les différents types de contenu que renferme l’essai seraient moins appropriés pour le médium théâtral. Mais c’est de celui-ci que vient Côté, comme elle l’affirme d’emblée en parlant du « sujet de braises » qu’elle examine (B. Côté et Côté, 2021 : 14) :
[…] c’est par le théâtre qu’il est arrivé dans ma vie. Et si j’ai tenté de le résoudre par la fiction, il m’est aussi apparu essentiel de porter mes interrogations plus avant dans l’espace public. J’ai eu peur que le théâtre […] ne puisse pas assez pour changer [une] situation intenable.
L’engagement caractérisait déjà sa pratique artistique; il s’accentue par la prose plus cérébrale de l’essai. Entièrement écrit après la pièce, celui-ci s’intitule Faire corps : guerre et paix autour de la prostitution en tant que fatalité. Lourd de sens, le dernier syntagme semble découler du passage de la pièce où Léa pense à la prostitution comme à une fatalité féminine potentielle :
[…] toutes les femmes, au fond d’elles-mêmes, le savent. Même celles qui sont loin, loin de ça […] vivent avec le pressentiment glacé qu’en cas d’extrême nécessité, au bout d’une guerre ou d’une maladie, ou juste pour nourrir leurs petits, elles pourraient. Elles pourraient faire ça
Côté, 2021 : 62
En fait, ce passage renvoie en amont puisqu’il a d’abord été prononcé par Rose Dufour lors de l’étape préparatoire avec l’équipe d’artistes. Côté l’a donc récupéré dans sa pièce, puis en a condensé l’idée dans le titre de l’essai, avant d’en faire un énoncé-clé du programme du spectacle (La Bordée, 2022 : 18). Le fameux syntagme, « la prostitution en tant que fatalité », fait aussi écho au lieu commun que rapporte Alice : « […] ça a toujours existé, pis ça va toujours exister ». Alice cite ici la prémisse de l’argument classique : « […] donc occupons-nous-en de manière à ce que ça se passe le mieux possible pour les femmes ». Mais elle ajoute avec dépit cette rectification : « Ça peut pas bien se passer pour les femmes! » (Côté, 2021 : 91).
Outre la partition textuelle, l’expérience sensorielle que procure la mise en scène aide à comprendre la « fatalité » postulée dans le titre de l’essai. Dans une scénographie (de Marie-Renée Bourget Harvey) si minimaliste qu’elle amplifie l’inconfort des personnages, un gros rocher imposant magnifie le vaste plateau. Suspendu très haut au début, il descend et s’approche graduellement des acteurs, jusqu’à se poser au sol à la fin. Cette masse figure une menace latente qui plane, dont les personnages ne sont pas conscients, mais que le public voit, selon l’intention de la metteure en scène confirmée en entrevue (Bastien, 2023). D’après Valérie Marcoux (2022), elle symbolise « l’option de faire commerce de son corps qui pend au-dessus des femmes »; d’après Bathory (2022), c’est plus largement « le spectre du patriarcat » qu’elle symbolise. Il faut dire qu’un des camps féministes détecte justement dans la prostitution une « institution patriarcale » (Mensah et Laberge, 2006 : 77). Quoi qu’il en soit, peut-être en réaction instinctive à la « fatalité » que postule littéralement l’essai et implicitement la pièce, il arrive qu’une danse et une musique (de Josué Beaucage) vibrent comme « des transes surgies d’une profonde révolte », selon Alain-Martin Richard (2022).
À juste titre, Christian Saint-Pierre perçoit l’essai tel un prolongement de la pièce, une « sorte de journal de création théorique » (2022 : 72). Aussi les deux livres sont-ils parus en même temps. Cet événement éditorial et la création scénique ont tour à tour entraîné une effervescence médiatique; les entrevues avec Côté se sont multipliées, ainsi que les annonces, résumés, critiques et comptes rendus. Le dossier de presse auquel j’ai eu accès est d’ailleurs très fourni et ne porte que sur la création scénique en 2022, non sur la double publication de l’année précédente. Or, la pièce traite une variété de rapports de pouvoir impliquant le corps féminin, mais c’est la prostitution qui a retenu l’attention des médias. C’est que Côté prend parti pour l’abolitionnisme, qui s’attaque aux prostitueurs, pénalise les proxénètes et les clients. Sa position est explicite dans l’essai, alors que dans la pièce, il est possible de la déduire. En revanche, elle est sous-entendue dans le titre La paix des femmes puisque cette loi suédoise prohibe l’achat de services sexuels et a servi de matrice législative à plusieurs pays dont le Canada. La position politique de Côté est courageuse, quand les abolitionnistes passent pour des puritaines à contre-courant du discours progressiste pour la liberté individuelle. À l’opposé, le camp en faveur du travail du sexe, communément appelé pro TDS, veut décriminaliser tout ce qui a trait au commerce du sexe en le normalisant comme une simple source de revenu; il passe pour le porte-parole légitime, tellement il a de visibilité.
Les répercussions de la représentation scénique
Il fallait s’attendre à ce que la représentation scénique provoque des remous. Peu avant qu’elle soit à l’affiche, une très longue lettre ouverte a été publiée sur le site Internet d’un organisme montréalais, le Comité autonome du travail du sexe, et sur les réseaux sociaux. Les journaux Le Devoir (Lambert, 2022) et Le Soleil en rendent brièvement compte, et celui-ci en cite un passage (Marcoux, 2022). La lettre est signée par Maxime Holliday, une ancienne étudiante de Côté, lectrice et spectatrice de ses oeuvres, maintenant masseuse érotique et danseuse nue. Cette militante reconnaît les mérites de la pièce : dénoncer la pression du système capitaliste machiste et les injustices faites aux femmes, sensibiliser le public à la pauvreté de celles qui se prostituent pour survivre, et humaniser la figure du client. Par contre, la signataire exhorte Côté « à considérer l’impact que peut avoir une pièce de théâtre telle que La Paix des femmes sur l’imaginaire collectif » (Holliday, 2022a). Car certaines répliques esquissent un portrait misérabiliste et alarmiste du travail du sexe, tandis qu’elle-même et plusieurs de ses collègues en ont une expérience positive, sinon neutre, où il s’agit bien d’échange consensuel de services. Plus que cela, selon elle, « [s]e faire rémunérer pour performer la féminité et la sexualité hétéronormative, c’est aussi s’immiscer dans l’institution pour l’abattre de l’intérieur […]. Parce que c’est reconnaître que les femmes ne doivent jamais rien aux hommes », alors qu’on leur a appris « à combler les besoins des hommes gratuitement », comme si c’était un dû (Holliday, 2022a). On aperçoit dans cette attitude la branche du féminisme qui considère le sexe comme un lieu pour « déstabiliser les rapports patriarcaux » en vue de l’égalité, et qui soutient sa marchandisation comme un outil subversif de lutte (Löwy, 2003 : 99).
Côté répond à Holliday en privé sur un mode pacifique. « Comment ouvrir le théâtre, en faire un lieu de discussion? », lui demande-t-elle (Côté, 2022). Elle lui propose d’afficher sa lettre en gros format avec ses références de lectures et de balados, dans le hall d’entrée du Théâtre La Bordée, tout le temps que la pièce y sera présentée. Holliday accepte comme une preuve d’humilité puisque sa lettre exprime l’opinion inverse de ce que défend la pièce. Elle apprécie cette réflexion partagée comme « une bonne façon […] de cohabiter au théâtre […] de rester solidaires et d’entretenir notre sororité » (Holliday, 2022b). Résultat : pendant quatre semaines, le hall de La Bordée exposait l’intégrale de l’échange épistolaire, accompagnée d’une mise en contexte par Michel Nadeau. Ce dernier y soulignait qu’au-delà de leurs différends sur un sujet ultrasensible, deux femmes sont arrivées par « l’écoute respectueuse […] à une compréhension de l’autre » (Nadeau, 2022). Que chacune reçoive le discours de son interlocutrice, au lieu de le discréditer, semble un exploit qui s’accomplit par le biais du théâtre, mais qui serait improbable dans un autre contexte (Mensah et Laberge, 2006 : 75).
Une deuxième protestation est survenue; celle-là, lors de l’avant-première et sous une forme elle-même esthétisée et spectaculaire – comme l’ont rapporté maints critiques mais avec une brièveté approximative. À l’instant précis du climax du spectacle, quand Alice s’écriait : « c’est pas un travail », un spectateur dans la salle a clamé : « Oui, c’est un travail! ». Quatorze travailleuses du sexe, assises dans la première rangée, se sont alors levées d’un mouvement synchronique et ont ouvert des parapluies rouges – accessoire symbolique de la résistance des travailleuses du sexe à la discrimination, reconnu internationalement depuis la célèbre « Marche des parapluies rouges » inaugurée en Italie en 2002. Puis en choeur, ces quatorze femmes se sont mises à scander avec aplomb : « Mon travail, mon choix! » à dix reprises, avant de quitter la salle. Elles voulaient faire savoir que leur métier s’exerce comme un « choix » véritable, et non comme dernier recours. Elles touchaient là un point chaud : « [L]a question du choix est l’un des plus grands tabous du féminisme : LA source de désaccord profond entre groupes abolitionnistes et prodécriminalisation » (Navarro, 2005 : 75). Néanmoins, il n’est pas anodin que ce soit un homme qui ait répondu à Alice et, par la même occasion, donné le signal au choeur de femmes, comme si c’était lui qui dictait le texte de cette manifestation politisée et qui en dirigeait la mise en scène. Le cas échéant, le « choix » que ces femmes revendiquent haut et fort s’en trouve amoindri. Dans la mesure où il concerne le « travail », on peut supposer entre cet homme et elles une relation employeur/employées par l’entremise de laquelle il serait leur proxénète.
Le spectacle a aussi suscité une réaction écrite très élogieuse : une lettre ouverte parue dans le journal Le Soleil, de Cynthia Jay Dionne, une ex-travailleuse du sexe convertie à l’abolitionnisme et hébergée à la Maison de Marthe. Saisie par « la justesse des mots », « la force des images », « l’exactitude du jeu d’acteur », cette signataire admire que le spectacle dévoile « une réalité qui est trop souvent minimisée et banalisée » (Jay Dionne, 2022). Ce faisant, elle donne de son ancien métier un aperçu contraire à celui que dressait Holliday : « Nombre de personnes […] qui en sont venues à se prostituer » vivent l’enfer. Dans l’industrie du sexe, « les histoires d’horreur abondent […] et les survivantes se raccrochent à leur force de vivre pour continuer d’avancer malgré […] les séquelles physiques » et psychologiques. C’est pourquoi Jay Dionne découvre une fonction thérapeutique au spectacle de Côté :
L’histoire de Léa me semble tellement familière […]. La pièce a su valider mon vécu et […] voir les causes de ma douleur, douleur qui est si fortement imprégnée en moi, […] est venu m’apaiser. J’ai enfin entendu une voix représentative de mon parcours [et de celui] de collègues dans le milieu
Jay Dionne, 2022
L’éloignement très prononcé entre la réaction de Holliday, lectrice du texte dramatique, et celle de Jay Dionne, spectatrice de la réalisation scénique, est dû en partie à « la grande disparité des conditions de vie » des travailleuses du sexe et à l’élasticité de leur métier (Löwy, 2003 : 99).
De retour en amont : des antécédents?
Apparemment, il n’existe pas d’antécédents directs de la pièce La paix des femmes au Canada français, mais des thématiques contiguës ont déjà été abordées. Dans d’autres genres fictionnels, on pourrait penser à l’oeuvre de Nelly Arcan, surtout à son autofiction inaugurale Putain, parue en 2001. Elle est nommée dans la pièce de Côté pour deux raisons. D’abord, Isabelle l’inclut dans son corpus, soucieuse de rendre compte de la mouvance contemporaine que constituent les « formes littéraires des travailleuses du sexe » (Côté, 2021 : 91); mais Alice soupçonne que cette professeure enseigne Arcan sans même considérer le désespoir suicidaire qui s’en dégage. Ensuite, Arcan est présentée comme la « soeur » de Léa, aux sens intellectuel et spirituel (Côté, 2021 : 61). Virginie Despentes aussi est nommée, à une autre occasion dans la pièce, mais cette écrivaine prolifique qui s’inspire de sa pratique prostitutionnelle est française. Au Canada, on pourrait ajouter le roman Et au pire, on se mariera de Sophie Bienvenu, paru en 2011 et adapté au cinéma par Léa Pool en 2017. Mais si on se limite plutôt au répertoire dramatique, on mentionne la pièce italienne Nature morte dans un fossé de Fausto Paravidino, parue en traduction française à Paris en 2006, puis montée à Québec et à Montréal dans une traduction (non publiée) de Paul Lefebvre en 2009 et en 2011. Si on se concentre cependant sur la production proprement canadienne et francophone, c’est Trafiquée qui ressort. Cette pièce a été publiée en 2010 par Emma Haché, dramaturge d’origine acadienne néo-brunswickoise et lauréate du prix du Gouverneur général en 2004 pour sa pièce L’intimité.
Trafiquée est une oeuvre courte : le livre fait cinquante pages et la représentation dure une heure. Il s’agit d’un monologue où une jeune immigrée, sans nom ni pays d’origine, parle aussi pour cinq autres filles. Toutes rêvaient d’une vie meilleure qu’on leur promettait au Canada, mais, recrues piégées, elles ont été vendues et traitées comme de la marchandise, prisonnières d’un réseau de prostitution. Avec une hargne et un sarcasme qui trahissent sa vulnérabilité, la revenante brisée raconte ses années de captivité. « On la bat pour qu’elle ne dise jamais non, qu’elle se plie aux envies sexuelles les plus vicieuses vingt fois par jour » (Desloges, 2017). Cherchant la liberté, elle a maladroitement emprunté un chemin où elle se trouve condamnée pour meurtre. Aussi l’énonciation prend-elle la forme d’une déposition lors d’un interrogatoire policier.
Remarquons que Haché aussi s’est sérieusement renseignée au cours du processus d’écriture, bien que moins longuement que Côté. Afin de « puiser des faits à la manière d’une journaliste » (Genest, 2017), elle a lu des rapports sur la santé physique et mentale émis par des centres de crise, rencontré des intervenants de première ligne en travail social et en relation d’aide ainsi que des survivantes du trafic sexuel. « J’ai consulté différentes sources, autant du Canada que de l’international, pour être capable de mettre notre situation en perspective », précise-t-elle (Genest, 2017). Sa pièce fait prendre conscience de la traite des femmes, montre que le Canada n’en est pas exempt et comment ce système structuré profite de la précarité de ses victimes. Comme l’observe Marie-Pierre Bouchard (2010), elle s’adresse tout à la fois au spectateur, au citoyen, à l’être humain. Néanmoins, après un récit d’enfance prévisible, elle ne parvient pas à une vraisemblance psychologique en raison des « idées contradictoires qui se bousculent chez le personnage déroutant », lui reproche Josianne Desloges (2017).
La création scénique, interprétée par Nico Lagarde aux Écuries à Montréal en 2010, s’intitule Traffik Femmes. Le spectacle est repris la même année au MAI (Montréal Arts Interculturels), puis en 2012 au Segal Centre. Chacune de ces deux séries commence en français et finit en anglais (dans une traduction de Michael Brunet), car le Trunk Collectif, qui produit le spectacle, cherche à abolir les barrières linguistiques pour atteindre les communautés. Le bilinguisme n’est pas son seul moyen : cette compagnie privilégie des codes non verbaux tels que le théâtre physique, clownesque et d’objets. Mais dans ce cas-ci, la mise en scène de Lynne Cooper verse dans la surenchère, selon Alexandre Cadieux (2010) :
Les tentatives […] de traduire scéniquement le propos en incorporant à la représentation des éléments de danse, de théâtre d’ombres, de chant, de jeu marionnettique et de bouffon détournent l’attention, au lieu d’amplifier le sens. Le geste et l’image, plutôt que de révéler l’indicible, viennent redire ce que le mot exprimait déjà. Dans ce virevoltement, peu de répit nous est laissé pour recevoir la charge textuelle dans ses prolongements les plus fins.
Cette critique de l’esthétique scénique et celle formulée plus haut à propos du contenu suscitent une comparaison avec La paix des femmes : la pièce de Côté bénéficie d’un texte plus mûr et d’une mise en scène tout à fait au point comportant des partitions visuelle et sonore équilibrées, ce qui contribue sans doute à son retentissement.
La pièce de Haché est montée, sous son titre originel Trafiquée, par Marie-Ève Chabot Lortie au Théâtre Premier Acte à Québec en 2017[6]. Cette fois, l’héroïne n’est pas seule en scène, mais incarnée par trois artistes : une comédienne qui porte le texte (Catherine Côté), une chanteuse sans paroles (Myriam Brousseau) et une danseuse contemporaine (Ève Rousseau-Cyr, qui s’exécute sur des chorégraphies de Maryse Damecour). Grâce à cette interprétation trinaire et pluridisciplinaire, le rythme respire et le langage varie, ce qui concourt à communiquer efficacement l’atrocité : le public reçoit un choc qui le remue, comme le rapportent Josiane Desloges (2017) et Catherine Genest (2017). Dans la construction du personnage, un trait se démarque et reviendra dans La paix des femmes : pour supporter l’insupportable, la prostituée finit par se dissocier intérieurement. En effet, la monologuiste de Trafiquée tâche de trouver en elle-même une évasion et conséquemment, la mise en scène de Chabot Lortie vise à montrer que son corps et son esprit se séparent (Genest, 2017). Dans La paix des femmes, Léa se forge à son tour un refuge imaginaire : « […] au travers de leur grosse face grasse / de leurs poils / de leurs grognements / de leur odeur […] je regardais vers un soleil de l’ancien temps. Je disparaissais dans la vapeur d’or » (Côté, 2021 : 107). À une décennie d’écart, les deux dramaturges, Haché et Côté, prennent bravement à bras le corps un problème délicat pour dénoncer ce qui les scandalise. Du coup, elles ont un autre point commun : elles savent pertinemment que ce faisant, elles ne s’attirent guère la faveur populaire. On l’a vu pour Côté, mais Haché a la même lucidité sans illusions : « C’est extrêmement difficile de rallier les gens à ce sujet-là parce qu’il y a du scepticisme. Pourtant, c’est vrai! Il y en a ici, à Québec[7], du trafic humain […] mais on ne fait rien parce que c’est hot d’être hypersexualisé […] et on ne veut pas avoir l’air moralisateur » (Genest, 2017).
Les différences entre les deux pièces, outre le degré de mûrissement, résident dans les nuances thématiques. Trafiquée circonscrit un phénomène social méconnu du grand public, tandis que La paix des femmes embrasse un objet plus large, le travail du sexe, qui est certes mieux connu, ce qui ne signifie pas pour autant qu’on en évalue toutes les implications. Par ailleurs, Trafiquée porte carrément sur le trafic des femmes, au lieu de poser la question de la frontière entre ce phénomène et la prostitution, comme le fait La paix des femmes. Par conséquent, la notion complexe de consentement ainsi que l’agentivité qui peut en découler n’y sont pas développées non plus, puisqu’elles sont écartées d’entrée de jeu par les circonstances mises en place. Alors que Léa, dans La paix des femmes, est une jeune adulte lorsqu’elle commence à se prostituer (elle vient de terminer sa première année d’université), l’héroïne de Trafiquée est vendue dès l’âge de 14 ans : psychologiquement, c’est l’adolescence avec sa crise d’identité doublée du besoin d’être libre et aimée; socialement, 14-15 ans est l’âge moyen des prostituées au Québec, d’après Diane Chayer, présidente de Coopération Forces Action qui vient à leur secours (Genest, 2017). De même, dans Trafiquée, le rapport transactionnel n’est pas verbalisé, puisque les prostituées réduites à l’esclavage ne touchent jamais l’argent qu’empochent les proxénètes. En somme, la particularité de La paix des femmes est de braquer le projecteur sur des situations non seulement problématiques, mais aussi controversées, et sur les controverses elles-mêmes que soulèvent ces situations.
Conclusion
Si la marchandisation du corps féminin est une pratique universelle, elle n’est débattue que dans les pays démocratiques. Au Canada, elle l’est vigoureusement. Dès sa genèse, le projet épineux qui a abouti à la création de La paix des femmes laissait présager des répercussions en ce sens. Quand « on parle du corps des femmes […], explique Côté, la réaction est immédiate et viscérale » (Lambert, 2022). Elle est d’autant plus vive, en l’occurrence, que Côté prend le parti impopulaire vis-à-vis du travail du sexe, tout en passant les enjeux éthiques dans une grille féministe. Elle justifie sa démarche ainsi : « J’ai écrit une pièce de théâtre que j’ai voulue puissante dramatiquement, chargée de la souffrance qui m’a été donnée de voir. J’ai prêté ma voix à celles […] qui ne sont pas en mesure en ce moment d’écrire ou de militer ». Elle aspirait justement à « élever [sa] parole au politique », selon ses propres dires (Côté, 2022), afin de « participer à l’évolution des mentalités » (Saint-Pierre, 2022 : 72). Elle cristallise des thèmes brûlants et conflictuels où, observe-t-elle, « l’espace de rencontre est vraiment difficile à trouver » (Lambert, 2022). Son spectacle a pourtant eu l’effet d’un tremplin en réussissant à provoquer une ouverture à un dialogue, comme le confirment des traces qu’il a laissées.
Faire corps : guerre et paix autour de la prostitution en tant que fatalité, l’essai sociologique complémentaire à la fiction théâtrale dont il est issu, laisse une marque indéniable dans la somme des publications théoriques sur ce sujet, du moins au Canada francophone. Il procède par démonstrations factuelles, qui s’additionnent et acquièrent une force de persuasion, sur un ton humble et suivant une démarche informée. Cette humilité revient dans la correspondance entre une travailleuse du sexe militante et Côté, qui était bien en vue dans le hall de La Bordée pendant les semaines où la pièce était à l’affiche. Elle ouvre enfin une porte où s’accueillent des divergences affirmées. En revanche, la manifestation protestataire très esthétisée qui a interrompu le spectacle au coeur de son déroulement, lors de l’avant-première, prenait une allure péremptoire qui empêchait toute discussion. Elle illustre que la participation de travailleuses du sexe au débat ne l’a pas rendu moins enflammé (Van der Meulen, Durisin et Love, 2013). Une autre lettre ouverte bien argumentée a été publiée en réaction au spectacle, celle-là de même orientation idéologique que Côté. Dans le style d’une confidence, l’autrice fait part de la prise de conscience thérapeutique que le spectacle a déclenchée chez elle, qui était traumatisée par son ancienne pratique professionnelle.
Considérant les retombées qu’a eues La paix des femmes, Julie Veillet (2022) arrive logiquement à cette conclusion : « Les nombreuses et diverses réactions entourant sa présentation […] témoignent du poids que peut avoir le théâtre dans notre société ». Le bien-fondé de cette pièce en particulier est indubitablement attesté. Il est à souhaiter que celle-ci soit de nouveau mise en scène avant longtemps et qu’une tournée soit organisée pour que d’autres publics puissent en profiter. Partout son acuité ravivée pourra agir comme un catalyseur de réflexion.
Parties annexes
Note biographique
Sophie Bastien est professeure titulaire au Collège militaire royal du Canada, à Kingston. Sa monographie, Caligula et Camus : interférences transhistoriques, a remporté en 2007 le prix de l’Association des professeurs de français des universités canadiennes. En plus d’une soixantaine d’articles publiés dans des revues savantes, elle a codirigé trois ouvrages collectifs : La passion du théâtre : Camus à la scène (Amsterdam, Rodopi, 2011), Le surréalisme et les arts du spectacle (Lausanne, L’Âge d’homme, 2014) et Camus, l’artiste (Presses universitaires de Rennes, 2015). Un dossier thématique, dont elle est l’unique directrice, s’intitule La scène surréaliste (publié dans L’Annuaire théâtral en 2016).
Notes
-
[1]
Cette loi comporte vingt-quatre articles, qui couvrent entre autres le harcèlement, les sévices, etc. Sa traduction du suédois au français pourrait également être « La paix pour les femmes ».
-
[2]
Employée depuis le début des années 1990, mais avec des variantes : le Canada francophone a adopté « travail du sexe », l’Europe francophone privilégie quant à elle « travail sexuel » (Syndicat du travail sexuel, 2024).
-
[3]
Lancées dans leur sens actuel par Carol Leigh, travailleuse du sexe militante et performeuse, en Californie dans les années 1980.
-
[4]
Dans ce livre d’une centaine de pages seulement, la bibliographie occupe une proportion impressionnante, avec ses quatre pages et ses quarante-deux entrées.
-
[5]
Pour une définition détaillée de ce concept, voir Conseil du statut de la femme, 2002 : 105-106.
-
[6]
Après avoir été présentée dans deux villes de Belgique (Namur et Saint-Ghislain) en 2014.
-
[7]
Notons que c’est dans cette ville qu’a eu lieu l’opération Scorpion en 2002, une enquête policière d’envergure qui a démantelé une vaste filière de prostitution juvénile.
Bibliographie
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