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Lori Saint-Martin. Un bien nécessaire. Éloge de la traduction littéraire. Montréal, Boréal, 2022, 304 p.

  • Charles Bolduc

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  • Charles Bolduc
    Cégep de Jonquière

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Couverture de Traduction et journalisme, Volume 36, numéro 1, 1er semestre 2023, p. 9-283, TTR

Lori Saint-Martin nous a quittés à l’automne et son dernier essai, paru le printemps précédent, se révèle être un ultime hommage rendu à une activité qu’elle chérissait tout particulièrement : la traduction littéraire. Cet art souvent méconnu, mal-aimé et malmené, elle l’avait déjà défendu dans les pages du magazine Spirale en 2014 et cet ouvrage, qu’elle aura eu la chance de terminer et de nous léguer avant de nous laisser, s’en veut le prolongement direct, suppléant de la sorte aux nombreux « J’aurais aimé dire aussi… » (p. 59) qui concluaient en guise de programme son article. Une nouvelle fois, ce qui a aiguillonné tout particulièrement la pensée de Lori Saint-Martin sur cette question, c’est le fait que la plupart du temps, le nom des praticiennes de la traduction (la féminisation reflétant d’ailleurs dans son essai l’état des lieux de la profession) est gommé ou passé sous silence et qu’habituellement, leur travail est seulement remarqué quand une personne le juge défaillant, comme si une traductrice était constamment condamnée à faillir et qu’elle ne pouvait jamais se réclamer d’une quelconque réussite. Ce qu’elle nous propose alors d’une manière plus approfondie que dans son précédent article, c’est de renverser cette perspective en nous faisant d’abord (re)prendre conscience que ce que nous tenons pour acquis est loin de l’être. Par exemple, il arrive parfois, après avoir lu les premières lignes d’un texte, que nous sentions immédiatement une affinité avec ce qui est énoncé ou, au contraire, que nous trouvions tout de suite à redire à ce qui vient d’être affirmé. Or, ces premières impressions seraient impossibles si nous ne comprenions pas un mot de ce qui se trouve sur la page devant nous. Considérant qu’il existe des milliers de langues dans le monde et que la plupart d’entre nous n’en maîtrisons qu’une ou deux, il faut se rendre à l’évidence que, sans l’oeuvre des traductrices, nous ne pourrions réagir qu’à une infime partie de ce qui est écrit sur cette planète. Inversement, sans ces ponts tendus par toutes ces intermédiaires de l’ombre, ce que nous exprimons dans une langue ne pourrait évidemment rejoindre les personnes (généralement la très grande majorité) qui ne comprennent pas d’emblée celle-ci. La traduction est de cette façon « un bien nécessaire » à double titre et plutôt que de la voir comme une « trahison, infidélité, faute – au double sens d’erreur et de péché –, appauvrissement, perte » (p. 37), il faudrait en revanche selon Lori Saint-Martin célébrer cette « oeuvre de vie » (ibid.) où il n’y a en fait qu’un gain net sur l’incompréhension qui, sinon, caractériserait nos rapports. Cela étant posé, plusieurs exemples illustrent on ne peut plus concrètement le genre de questionnements qui ont accaparé l’attention de Lori Saint-Martin dans son travail, que ce soit dans sa comparaison de deux traductions d’un passage de Virginia Woolf (pp. 211-215), dans le commentaire qu’elle offre de sa traduction (avec Paul Gagné) d’une phrase de Mordecai Richler (pp. 161-170) ou encore des choix nouveaux qui se présentent dans l’autotraduction de l’un de ses textes (pp. 245-257). Ce qui se dégage alors progressivement de ce foisonnement de cas de figure, c’est une nouvelle manière d’envisager le rapport au texte original où « la fidélité n’est pas dans la traduction, mais dans l’éthique » (p. 209). Cette éthique peut de prime abord prendre l’allure d’une forme de relativisme où tous les choix se valent, puisqu’à de nombreux endroits, l’autrice n’offre pas de réponses tranchées, définitives, et reconnaît volontiers soit le mérite égal de différents choix de traduction (p. 215), soit la possibilité d’une meilleure traduction que …

Parties annexes