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Les résultats des élections législatives suédoises du 14 septembre dernier ont révélé un éclatement du paysage politique avec une percée sans précédent de l’extrême-droite qui passe avec 13% des voix de 20 sièges à 49 sièges au Parlement. Les Sverigedemokraterna deviennent ainsi la troisième force politique du pays en consolidant leur assise électorale. Si les Sociaux-démocrates, avec plus de 31% des voix, demeurent la première formation politique, les temps sont révolus lorsqu’ils étaient en position exclusivement dominante. Pendant des décennies, les Sociaux-démocrates avaient pu gouverner quasiment seuls grâce à des scores supérieurs à 45%. La crise des années 1990 et les réformes menées pour adapter la Suède aux exigences de la mondialisation libérale avaient inévitablement provoqué leur lent déclin. La victoire de la coalition conservatrice de 2006 menée par Fredrik Reinfeldt avait introduit un début de bipolarisation de la vie politique confirmé par les élections de 2010 où la coalition conservatrice (Allians) forte de ses quatre partis (libéraux, centristes, conservateurs et chrétiens-démocrates) tenait l’avantage. La montée de l’extrême-droite a interrompu ce scénario ce qui fait que le système politique suédois a une alternative entre des formules de gouvernement minoritaire et une coalition majoritaire hétéroclite impossible à mettre en œuvre de manière cohérente.
La Suède n’a pas encore de premier ministre puisque le leader des Sociaux-démocrates, Stefan Löfvén, recherche des compromis pour construire un gouvernement minoritaire capable d’affronter les négociations du budget 2015. Après avoir refusé toute alliance avec le Parti de Gauche dès le lendemain des élections, les Sociaux-démocrates alliés aux Verts ont alors approché les Libéraux et les Centristes pour tenter de constituer une majorité. Ces deux derniers partis ont refusé d’entrer dans un gouvernement social-démocrate, ce qui fait que la coalition restera rouge-verte (de rödgröna). Le politologue Maurice Duverger avait montré que la culture politique d’un pays dépendait étroitement du mode de scrutin. Le système proportionnel est plus porté vers la recherche de compromis transpartisans comme c’est le cas en Allemagne et dans une certaine mesure en Italie. La Suède traverse une phase de mutation sociale importante avec une montée constante des inégalités sociales depuis le début des années 2000. La dispersion des salaires, le faible montant des retraites, le dysfonctionnement du système de santé ont révélé un État-providence écorné. Les politiques familiales sont celles qui demeurent les plus généreuses au monde avec la possibilité de concilier vie professionnelle et vie familiale. De ce point de vue, la Suède reste un modèle même si les effets de la crise se font sentir progressivement avec un chômage des jeunes assez élevé. L’école a été au centre du débat politique car elle a subi des réformes radicales au début des années 1990 avec la communalisation du système éducatif et son ouverture au privé. La baisse des résultats scolaires illustrée lors des dernières enquêtes PISA et le problème de la formation des enseignants sont les deux thèmes mis en avant par l’ensemble des partis politiques. Le gouvernement minoritaire a peut-être ainsi la possibilité de lancer des réformes importantes sur des domaines qui pourraient bénéficier d’un consensus plus large. Les quatre années qui arrivent montreront si la Suède est à la hauteur de sa réputation consensuelle dans cette période de turbulence politique.