Résumés
Résumé
L’objectif de cet article est de présenter des réponses concrètes offertes par des soignants aux manifestations d’obligations religieuses exprimées par des patients dans une salle d’urgence. Il y existe ce que l’on peut nommer une « harmonisation pratique » du pluralisme religieux, en ce sens que les soignants semblent prêts à accommoder un nombre important d’obligations religieuses, ayant pour principales limites des contraintes pratiques, telles que les ressources matérielles, temporelles et humaines disponibles. Bien qu’il puisse exister des oppositions de valeurs aux demandes liées aux obligations religieuses, les fins de non-recevoir ne sont pas usuelles. Le présent article repose sur une étude ethnographique de deux années, commencée à l’automne 2018 et terminée à l’automne 2020, réalisée en collaboration avec les équipes soignantes de quatre salles d’urgence à Montréal et en Estrie, et réunissant un total de 50 participants.
Mots-clés :
- urgences,
- pluralisme des valeurs,
- laïcité,
- liberté de religion,
- ethnographie
Abstract
The objective of this article is to present healthcare professionals’ concrete responses to patients’ religious requests in emergency room settings. There exists what can be called a “practical harmonization” of religious pluralism, insofar as healthcare professionals appear willing to accommodate a significant number of religious obligations. The main limitations to doing so are related to practical constraints such as available material, temporal and human resources. While conflicts of values may arise around religious obligations, requests are rarely refused. This article is based on a two-year ethnographic study conducted in collaboration with healthcare teams in four emergency rooms in the City of Montreal and in Estrie. Involving a total of 50 participants, the study began in the fall of 2018 and was concluded in the fall of 2020.
Keywords:
- Emergency room,
- value pluralism,
- secularism,
- freedom of religion,
- ethnography
Resumen
El objetivo del presente artículo es dar a conocer las respuestas concretas formuladas por las personas prestadoras de cuidados en relación con las manifestaciones de obligaciones religiosas expresadas por los pacientes en una sala de urgencias. Existe lo que podría denominarse una “armonización práctica” del pluralismo religioso, en el sentido de que las personas prestadoras de cuidados parecen dispuestas a aceptar un gran número de obligaciones religiosas, cuyos principales límites son de índole práctica, por ejemplo, los recursos materiales, temporales y humanos disponibles. Aunque pueden existir valores opuestos a las solicitudes relacionadas con las obligaciones religiosas, no es habitual negarse. Este artículo se basa en un estudio etnográfico de dos años de duración, que comenzó en otoño de 2018 y finalizó en otoño de 2020, realizado en colaboración con los equipos asistenciales de cuatro salas de urgencias de Montreal y la región de l’Estrie (localidades del este), en el que participaron 50 personas.
Palabras clave:
- Urgencias,
- pluralismo de valores,
- laicidad,
- libertad religiosa,
- etnografía
Corps de l’article
Adoptée en juin 2019, la Loi sur la laïcité de l’État reconnaît le caractère laïque de l’État québécois. On y précise que la laïcité repose notamment sur le principe de liberté de conscience et de religion[1]. En droit québécois et canadien, cette liberté fondamentale a été définie pour la première fois par la Cour suprême du Canada en 1985. Selon le plus haut tribunal au pays, le droit à la liberté de religion se définit entre autres par « le droit de manifester ses croyances religieuses par leur mise en pratique[2] ». La jurisprudence constitutionnelle subséquente a confirmé que ce droit de manifester ses croyances pouvait se traduire par la mise en pratique d’obligations religieuses, c’est-à-dire des activités ou des comportements qui se veulent en phase avec le respect de préceptes reconnus et généralement admis parmi une communauté de croyants (p. ex. : des rituels, des fêtes ou encore des interdits)[3].
À l’exception notable du port de signes religieux pour plusieurs catégories d’employés de l’État, la Loi sur la laïcité de l’État n’empêche pas l’expression d’obligations religieuses au sein des divers organismes gouvernementaux visés par la loi, ce qui inclut les établissements de santé[4]. En ce sens, le soignant qui travaille dans un hôpital se trouve alors à être une personne qui doit, d’une part, respecter le caractère laïque de l’État et, d’autre part, respecter en même temps le droit à la liberté de religion des usagers qui s’y présentent. Dans le quotidien hospitalier, il existe en effet une multitude de situations où le personnel soignant doit gérer des obligations religieuses de patients et de leur famille, que l’on pense à des demandes pour prier (Christensen, Cook et Arnold, 2018), à des reports de rendez-vous afin de respecter des fêtes religieuses (Dinham, 2018), à des pratiques de rituels in situ (Frush, Brewer Eberly et Curlin, 2018) ou encore à des refus de soins (Diekema, 2004).
À l’échelle hospitalière, un seul service accueille quotidiennement des centaines de personnes ayant des parcours de vie différents, tout en étant continuellement ouvert : les salles d’urgence[5]. Celles-ci représentent des milieux fort intéressants pour l’étude de la gestion du pluralisme religieux. Plusieurs études, notamment ethnographiques, se sont penchées sur les urgences, s’intéressant par exemple au temps comme dimension structurante des actions (Zerubavel, 1979), à l’importance de la culture départementale par le biais de valeurs professionnelles particulières (Person, Spiva et Hart, 2013), à la place des aumôniers (Cadge, 2012), aux relations de pouvoir entre les médecins et les autres soignants (Fry, 2012 ; Hillman, 2014), à l’influence des rôles professionnels sur les soins aux patients (Peneff, 1992), à la prise de décision médicale (Nugus, 2019) ou encore à la collaboration interdisciplinaire (Paquin et al., 2017). Malgré l’intérêt des chercheurs pour les enjeux sociaux touchant aux urgences, aucune étude à ce jour n’a porté sur la gestion des obligations religieuses des patients de la part de soignants d’urgence. Pourtant, l’obtention d’un portrait plus détaillé des réponses données au pluralisme religieux permettrait de mieux comprendre comment les soignants participent à la gestion publique de la laïcité et de saisir par là la réalité vécue du pluralisme des valeurs religieuses dans le quotidien hospitalier.
Comment des soignants travaillant dans une salle d’urgence répondent-ils à des demandes formulées par des patients au sujet de leurs obligations religieuses ? Afin de répondre à cette question, une étude ethnographique de deux années a été menée, de l’automne 2018 à l’automne 2020. Elle a été réalisée en collaboration avec les équipes soignantes de quatre salles d’urgence à Montréal et en Estrie, au Québec. Quarante-cinq entrevues semi-dirigées d’une durée moyenne de 40 minutes[6] ainsi que 241 heures d’observation[7]in situ ont permis d’avoir un accès privilégié à l’ensemble des espaces des urgences participantes, au moyen de 32 jumelages ethnographiques[8] avec des infirmières et des médecins. Au total, 50 participants ont pris part à la présente enquête (voir tableau 1).
Selon les résultats obtenus, il semble exister ce que l’on peut nommer une « harmonisation pratique » du pluralisme religieux dans une salle d’urgence, en ce sens où le soignant d’urgence semble prêt à accommoder un nombre important d’obligations religieuses, ayant pour principales limites des contraintes pratiques, telles que les ressources matérielles, temporelles et humaines. Bien qu’il puisse exister des oppositions de valeurs aux demandes liées aux obligations religieuses, les fins de non-recevoir ne sont pas usuelles. Afin de détailler ce propos, il sera question dans un premier temps de situer la présente enquête au sein des études portant sur la laïcité. Dans un second temps, nous expliciterons les données récoltées en proposant des pistes de réflexion interprétatives qui ont pour but de contribuer aux connaissances portant sur la réalité vécue de la laïcité dans le quotidien hospitalier.
1. la laïcité vécue et les obligations religieuses à l’hôpital
Au Québec, la laïcité constitue un objet de pouvoir présent au sein de la législation tout en étant en même temps un objet d’étude discuté dans le milieu universitaire. Depuis le milieu des années 2000[9], la laïcité est un objet de pouvoir hautement débattu dans la sphère publique, que l’on pense à l’affaire du kirpan à l’école publique[10], à la crise des accommodements raisonnables[11], aux divers projets de loi portant sur les signes religieux[12] et, bien sûr, à la Loi sur la laïcité de l’État. Selon certains, la laïcité est devenue un tel objet de pouvoir qu’elle fait désormais partie de l’environnement politique québécois, participant de la consolidation des forces nationalistes (Bilge, 2010 ; Eid, 2016). Ces débats publics ont propulsé des recherches universitaires sur la laïcité au Québec, qui se sont intéressées à cet objet d’étude de manière plus importante depuis les quinze dernières années. Toutefois, malgré l’importante production scientifique portant sur la laïcité, David Koussens a remarqué que celle-ci s’est attachée le plus souvent à définir les contours juridiques, philosophiques ou historiques de la laïcité, négligeant des études empiriques portant sur la gestion quotidienne du pluralisme religieux (Koussens, 2016).
On peut certes souligner que des études portant sur l’évolution sociale et historique de la laïcité ont permis de mieux comprendre le processus évolutif de mise à distance des pouvoirs étatiques par rapport aux pouvoirs religieux au Canada (Zubrzycki, 2016), contrastant avec des analyses juridiques détaillant les contours plus précis des divers aspects de la laïcité dans les institutions québécoises (Bosset, 2017 ; Lampron, 2014). Toutefois, ces études portant sur le sujet au Québec ont négligé ce que nous avons nommé ailleurs la laïcité vécue, soit une perspective scientifique sur la laïcité qui s’intéresse aux pratiques et aux actions d’acteurs placés en situation réelle et soumis aux exigences juridiques s’y rapportant (voir Lavoie, 2018 : 126). La laïcité vécue permet d’examiner les réponses concrètes données par ces derniers à des demandes liées au pluralisme religieux dans des établissements publics laïques. Selon cette perspective, que nous rapprochons des recherches dites « sociojuridiques[13] », il s’agit de privilégier l’étude des événements sociaux où se déploient des pratiques révélant la « légalité[14] » des formes que prend un concept juridique comme celui de la laïcité dans la vie quotidienne. Suivant cette perspective, on peut étudier la manière dont des soignants réagissent lorsque des patients révèlent leurs obligations religieuses, lesquelles font l’objet d’une protection juridique, dans la réalité quotidienne d’une salle d’urgence.
Comme nous le mentionnions plus haut, ces obligations religieuses renvoient à des activités ou à des comportements qui se veulent en phase avec le respect de préceptes reconnus et généralement admis parmi une communauté de croyants (p. ex. : des rituels, des fêtes ou encore des interdits). En sociologie des religions, ces obligations religieuses s’étudient par l’entremise du concept de « religion vécue », qui correspond aux croyances telles que les individus les imaginent et les matérialisent dans les circonstances de la vie quotidienne (Asad, 2012 ; Orsi, 1997, 2003 ; Schielke et Debevec, 2012)[15]. En ce sens, ce qui est intéressant dans le cadre de la présente étude tient à la manière dont des patients matérialisent leurs obligations religieuses aux urgences, afin de voir comment réagissent des soignants à ces manifestations de la religion vécue.
Les obligations religieuses sont non seulement protégées en droit québécois et canadien par le biais du droit à la liberté de religion, mais elles le sont également au regard du droit à l’égalité. Ce droit constitutionnel est protégé par les chartes québécoise et canadienne des droits et libertés[16]. La religion est en effet un motif illicite de discrimination prévu à la loi, ce qui signifie qu’on ne peut pas interdire de facto l’expression d’obligations religieuses au sein des établissements publics[17]. Les services publics, à l’instar des urgences, ont ainsi l’obligation d’accommoder leurs usagers lorsque ceux-ci manifestent leurs croyances religieuses. Toutefois, bien qu’il constitue une obligation juridique, l’accommodement raisonnable pour motif religieux est limité par une autre notion, celle de la contrainte excessive. Cela signifie qu’une demande d’accommodement raisonnable peut être refusée si elle représente soit : a) un coût excessif pour l’établissement ; b) une entrave au bon fonctionnement de celui-ci ; ou c) une atteinte au droit d’autrui[18]. La présente étude permet ainsi d’entrevoir la réalité vécue de cette contrainte excessive opposable par des soignants à des manifestations d’obligations religieuses aux urgences.
Dans le quotidien hospitalier, ces enjeux liés au pluralisme religieux se vivent au sein de relations soignantes, lesquelles représentent des relations d’aide. Ce type de relation survient lorsque les patients sont en situation de vulnérabilité, en particulier dans une salle d’urgence, où l’incertitude, l’anxiété et le doute ponctuent les gestes et les paroles des patients. Selon Sylvie Fortin, l’espace clinique est non seulement un espace de soins — et dans le cas de l’urgence, de soins critiques —, mais également un espace relationnel traversé par des réalités différentes sur le plan culturel ou social (Fortin, 2008). Ce type de relation est parfois conceptualisé sous la forme d’un conflit, d’une distance entre les valeurs du soignant et celles du patient. Cependant, comme le mentionne Marguerite Cognet, la volonté d’aider en contexte de soins est souvent vécue par les soignants dans une perspective individuelle (Cognet, 2013 : 202)[19]. C’est dans ce contexte pluraliste, où plusieurs valeurs religieuses peuvent se retrouver et où la relation d’aide est souvent perçue comme étant une rencontre avec un « autre culturel » (Marguerite Cognet, 2013 : 201)[20], que les soignants participant à notre étude ont répondu aux manifestations des diverses obligations religieuses qui se sont présentées à eux.
2. les soignants face aux obligations religieuses des patients aux urgences
Parmi les quatre urgences participant à la présente enquête, les trois sises à Montréal ont une population de patients plus diversifiée sur le plan religieux que celle en Estrie, avec une fréquence plus importante de situations où un patient ou sa famille manifestent leurs croyances religieuses durant un épisode de soins. D’ailleurs, l’un de ces sites montréalais se trouve dans un secteur de la ville nettement plus multireligieux, ce qui a contribué à l’observation de plus de situations où le pluralisme religieux a teinté les relations soignantes. Dans l’ensemble, les soignants rencontrés expriment clairement une volonté de négocier les obligations religieuses pouvant être manifestées par les patients, en objectivant en même temps leur volonté de respecter des contraintes pratiques inhérentes à la réalité clinique d’une salle d’urgence.
La salle d’urgence est un lieu où des dizaines, voire des centaines, de relations interpersonnelles sont vécues quotidiennement. En contexte d’incertitude, une des difficultés relativement à la confiance que les médecins et les infirmières sollicitent des patients est la nécessité d’établir rapidement un contact avec ceux-ci. Comme le révèle une étude menée dans un département d’urgence en Suède, l’établissement d’un lien de confiance en contexte d’urgence nécessite pour les soignants de se présenter rapidement en allant droit au but, sans détour, de façon franche et claire (Andersson, Jakobsson, Furåker et Nilsson, 2012). L’expérience des patients en contexte de soins d’urgence est souvent perçue par ceux-ci comme étant stressante et inquiétante, en raison du haut degré d’incertitude et de la vitesse à laquelle se déroulent les événements (Frank, Asp et Dahlberg, 2009). Pour le personnel soignant, un des problèmes existants tient à la volonté de « s’approcher » des valeurs du patient, lesquelles sont parfois éloignées de celles du soignant, tout en conservant une certaine distance permettant de travailler (Cognet, Couturier, Rhéaume et Bertot, 2010).
Chez les soignants avec qui nous avons discuté, il semble y avoir une disposition a priori favorable à composer avec des demandes ou des manifestations découlant des obligations religieuses de patients, sans pour autant présumer du résultat de cette démarche. Cette ouverture à la négociation s’applique notamment dans les cas d’obligation religieuse exprimée par certains patients musulmans au sujet du jeûne durant le ramadan, comme le précise ce médecin :
Pour ce qui est de la communauté musulmane, lorsque le ramadan commence, on le sait. Soudainement, il y a plusieurs personnes qui viennent avec des faiblesses spécifiques. [Elles]sont faibles. Pour ceux qui sont plus pratiquants, ça prend une dispense médicale pour ne pas faire le ramadan, le jeûne. Plusieurs vont dire : « Bon aujourd’hui, je n’ai pas fait le jeûne, et je vais reprendre cette journée-là plus tard. » Mais, il y a plusieurs patients qui viennent parce qu’ils veulent avoir une dispense écrite de cela. Donc, je prescris de manger. Ils me le demandent, je dis oui, je peux vous faire cela, pas de problème.
L’une des équipes rencontrées a fait preuve de cette même ouverture avec une famille ayant vécu un décès dans la salle d’urgence, comme le précise cet intervenant :
Sa mère aurait souhaité qu’il ne soit pas amené à la morgue, que le corps soit laissé là pendant un certain temps. Je suis intervenu, j’ai vu que la personne était musulmane, et là on a parlé un peu. Au début, la mère m’a dit qu’elle n’était pas pratiquante. Mais, finalement, elle a commencé à parler en se demandant pourquoi Allah était venu chercher son fils. Et là, elle a demandé qu’on lui donne un drap. Faque on lui a donné un drap. Elle a déchiré le drap pour en faire de longues languettes, pour attacher les deux pieds de son fils ensemble, pour attacher les deux mains de son fils ensemble, et pour fermer sa bouche en faisant aussi un noeud au niveau de la tête. Clairement, elle procédait elle-même à un rituel funéraire. Donc, nous, on l’a accommodée en lui donnant les ciseaux et le drap, qui n’était pas fait pour cela. Ça n’a pas posé problème du tout pour l’équipe.
— Intervenant en soins spirituels
Il nous a été donné de voir un autre exemple ayant trait aux interdits religieux, cette fois chez des patients juifs hassidiques. Il s’agit du respect du sabbat, commençant le vendredi soir peu avant le coucher du soleil pour se terminer le samedi soir, peu après le coucher du soleil. Ils doivent notamment réduire leurs activités extérieures et s’abstenir de tout ce qui est considéré comme du « travail » : signer des documents, ou encore actionner certaines choses (par exemple un ascenseur ou une porte coulissante), etc.[21] Lors de nos observations dans l’une des salles d’urgence, un système informel d’obtention verbale du consentement aux soins nous a été confirmé par plusieurs agents administratifs de l’équipe, celui-ci étant même enseigné aux nouveaux employés lors de leurs premières soirées du vendredi à l’urgence[22].
Ces observations permettent de mieux comprendre les contours et les détails de cette volonté, chez les soignants rencontrés, de négocier les diverses manifestations d’obligations religieuses exprimées par des patients dans le feu roulant de la réalité quotidienne d’une salle d’urgence. Par ailleurs, il nous a été possible de comptabiliser plusieurs situations, lors des observations et des entretiens réalisés, qui illustrent des réponses positives données par les équipes de soins à des demandes particulières en lien avec le pluralisme religieux, incluant celles mises en exergue plus haut (voir tableau 2).
Ces situations révèlent la créativité dont les soignants font preuve dans leur gestion pratique et concrète du pluralisme religieux, par leur inventivité quotidienne qui n’est pourtant pas répertoriée officiellement. Toutefois, il convient de relever que malgré cette volonté de négocier observée chez plusieurs soignants, des refus sont opposés aux patients dans certaines circonstances. En effet, ce sont surtout des contraintes pratiques au moment précis où les patients font des demandes d’accommodement qui motivent un refus de la part des soignants. Ces contraintes sont de trois ordres : celui des ressources humaines d’abord (la disponibilité du personnel) ; celui des ressources matérielles (la disponibilité des espaces ou du matériel, le cas échéant) ; et celui des ressources temporelles (les contraintes de temps). Une des explications le plus souvent formulées aux patients pour ne pas acquiescer à une demande particulière en lien avec le pluralisme religieux tient à la réalité physique d’une salle d’urgence, c’est-à-dire son exiguïté, comme le précise cette infirmière-cheffe :
On a beaucoup de demandes qui sont gérées sur le moment par l’équipe, pas rapportées. Mais, il y a des accommodements qu’on peut faire, d’autres qu’on ne peut pas faire. Un cas qui a été refusé par exemple, un patient qui a voulu installer un tapis de prière dans le corridor de l’urgence. Pour des raisons de sécurité, autant pour le patient que pour le personnel, qui doit passer en situation d’urgence, on ne peut pas le faire, ça pourrait peut-être être accepté aux étages. Cependant, pour nous, dans notre réalité physique de l’emplacement de l’environnement de l’urgence, on ne peut barrer aucun corridor pour des raisons comme cela.
Une autre situation vécue illustre de quelle manière des exigences matérielles concernant la sécurité des lieux hospitaliers ont motivé un refus concernant un rituel de fin de vie avec une famille hindoue, malgré la présence de certains efforts d’accommodement :
Un cas avec une famille hindoue, pour qui le corps devait être incinéré par l’aîné de la famille, qui, habituellement, allume le bûcher funéraire. La famille voulait incinérer le corps sur place. Évidemment, les règles ne permettent pas cela. L’équipe soignante a tout de même réussi à trouver un accommodement pour cette famille, on a organisé un déplacement au crématorium, là où on brûle les corps. Et c’est l’aîné qui a appuyé sur le bouton qui a fait avancer le corps dans les flammes. Ça, c’est une demande où l’on a accommodé dans la mesure de ce que l’on peut faire.
— Intervenant en soins spirituels
Nous avons ici aussi été en mesure de récolter diverses situations ayant rapport à des demandes impliquant des obligations religieuses de patients (voir tableau 2).
Ces observations confirment que ce sont principalement des contraintes d’ordre pratique qui motivent les soignants à ne pas accéder aux désirs des patients d’exprimer ou manifester leurs croyances religieuses dans le quotidien de la salle d’urgence. Bien que ces cas ne soient certes pas fréquents aux urgences — plusieurs heures d’observation ayant été réalisées sans qu’il en arrive —, lorsqu’ils surviennent, ils constituent des événements uniques où se déploie une laïcité vécue au quotidien.
L’« invisibilité » de cette harmonisation pratique des différences religieuses contraste assurément avec la teneur des débats publics au sujet de la laïcité au cours des vingt dernières années au Québec. Comme le mentionne Lori Beaman, ces débats sont souvent truffés d’histoires négatives (Beaman, 2014 : 89). Pourtant, les résultats exposés supra illustrent plutôt le déploiement de stratégies afin de concilier les diverses valeurs religieuses en présence. À rebours des discours publics présentant la religion comme un problème important, les multiples formes de réponses offertes par les soignants analysées ici se révèlent être plutôt des expériences positives. Ces résultats contribuent aux recherches sur la laïcité en soulignant les écarts perceptibles entre les représentations sociales et les aménagements concrets vécus dans les urgences participant à la présente étude. Le contexte contemporain semble traversé par des dynamiques sociopolitiques peu favorables à la poursuite des idéaux d’ouverture au pluralisme religieux (Jensen et Mouritsen, 2017). Dans ce contexte, on remarque que c’est souvent la visibilité du religieux qui paraît s’avérer un problème, alors que des demandes sont régulièrement adressées aux autorités publiques afin de rendre plus étanches les établissements publics à certaines pratiques religieuses minoritaires (Koussens, 2009, 2013 ; Laborde, 2008).
À l’inverse, les réponses pragmatiques au pluralisme religieux des soignants rencontrés dans la présente étude s’éloignent d’un modèle d’opposition entre le caractère laïque des établissements publics et les manifestations d’obligations religieuses de patients. Cette harmonisation pratique des différences aux urgences correspond davantage au modèle « navigation/négociation » proposé par Selby, Barras et Beaman ; un modèle qui favorise des avenues pratiques par lesquelles les personnes règlent leurs enjeux de différences religieuses entre elles, en ayant rarement besoin d’emprunter des voies officielles — d’où l’absence de formalisation de certains cas décrits plus avant (Selby, Barras et Beaman, 2018 : 5). Cette manière d’incarner la laïcité vécue mise sur des solutions réalistes et immédiates, contrairement aux discours publics sur la laïcité.
conclusion
Dans cet article, nous présentons des réponses concrètes offertes par des soignants travaillant dans des salles d’urgence à des situations vécues où des patients désiraient exprimer leurs croyances religieuses. Selon les résultats obtenus, il semble y avoir une harmonisation pratique du pluralisme religieux, qui démontre la présence d’une laïcité vécue où ce sont principalement des contraintes pratiques qui motivent des refus relativement aux demandes particulières formulées par des patients. En conclusion, il convient toutefois de souligner les limites de notre enquête. Elle ne porte pas sur le point de vue des patients, mais bien sur celui des soignants. Plus précisément, sur les modalités de réception et de gestion de certaines valeurs religieuses des patients par les soignants. Cette perspective du soignant limite l’étude d’une relation soignante, en n’en observant qu’une partie.
De plus, il est raisonnable de penser que les patients entrant dans une salle d’urgence, en situation de vulnérabilité, sont sûrement disposés à adopter une approche plus conciliante, contribuant à cette harmonisation pratique des différences. Toutefois, cela n’empêche pas de constater les efforts déployés par le personnel, par ses attitudes ou ses comportements qui ont mérité d’être étudiés. Par cette enquête, nous espérons contribuer aux études empiriques portant sur la gestion du pluralisme religieux au sein des établissements publics, en envisageant ces soignants comme étant de véritables acteurs de la laïcité. Ces derniers participent quotidiennement aux orientations concrètes données à la laïcité et, bien que celles-ci ne soient pas officiellement publicisées à l’extérieur des urgences, elles n’en constituent pas moins les contours d’une laïcité qui cadre réellement les situations vécues par les soignants avec leurs patients.
Parties annexes
Notes
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[1]
De manière plus précise, l’article 1 de la loi prévoit quatre principes : la séparation de l’État et des religions ; la neutralité religieuse de l’État ; l’égalité de tous les citoyens et citoyennes ; la liberté de conscience et de religion.
-
[2]
R. c. Big M. Drug Mart Ltd., 1985, p. 336.
-
[3]
Bruker c. Marcovitz, 2007 ; Multani c. Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, 2006 ; R. c. N.S., 2012 ; Syndicat Northcrest c. Amselem, 2004.
-
[4]
L’interdiction de porter un signe religieux est prévue à l’article 6 et l’interdiction de se couvrir le visage pour des raisons religieuses est prévue à l’article 8.
-
[5]
Au sein de plusieurs urgences urbaines québécoises, on remarque en moyenne entre 250 et 300 visites chaque jour, pour un total annuel de plus de 85 000 visites. Il existe aussi des urgences en dehors des hôpitaux, des urgences dites de « première ligne », comme les centres locaux de services communautaires (CLSC) et les centres hospitaliers de soins de longue durée (CHSLD), mais ce n’est pas l’objet du présent article. Depuis l’adoption de la Loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales, les hôpitaux sont situés administrativement dans de nouvelles entités nommées centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) ou centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS).
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[6]
Les entretiens ont porté sur deux grandes catégories de sujets, soit le travail aux urgences (rôles et responsabilités, fonctionnement, travail d’équipe, relation avec les patients) et le pluralisme religieux (situations avec des obligations religieuses, enjeux d’accommodement).
-
[7]
Les observations ont porté sur cinq catégories de situations : les interactions avec les patients, les interactions entre collègues, les situations liées au pluralisme religieux, les interactions avec l’ethnographe et des événements marquants.
-
[8]
Cette méthode du jumelage ethnographique (appelée aussi shadowing) a été perfectionnée en grande partie par Barbara Czarniawska, en particulier dans son ouvrage Shadowing and Other Techniques for Doing Fieldwork in Modern Societies (Czarniawska, 2007). Correspondant à une relation personnalisée dans un esprit de proximité (Czarniawska, 2008), le jumelage ethnographique nécessite une posture personnelle exigeante, et qui commande de faire des choix méthodologiques avant et pendant la collecte de données (Ferguson, 2016). Sans prendre part aux activités, le jumelage ethnographique permet de développer une proximité avec le participant, avec qui on passe plusieurs heures. Cela autorise à lui poser de nombreuses questions au cours de la journée, puisqu’il agit en quelque sorte comme un « passeport » pour l’ethnographe. Cette méthode justifie la présence de ce dernier dans la salle d’urgence, même si une carte d’identité, devant être toujours portée sur soi, est requise. Ce type d’ethnographie a permis une prise de notes standardisée in situ dans un hôpital où de nombreux professionnels prennent eux-mêmes de nombreuses notes.
-
[9]
La laïcité au Québec a bien évidemment fait l’objet de discussions publiques avant les années 2000. Prenant racine dans la période dite de la Révolution tranquille dans les années 1960, c’est notamment par la création du ministère de l’Éducation en 1962 et par l’institutionnalisation de l’assurance-maladie en 1970 que la laïcité a d’abord été le fait d’une reconnaissance tacite au sein des établissements publics (Bosset, 2014 ; Koussens, 2011).
-
[10]
Dans cette affaire, la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys a refusé d’accommoder un jeune élève qui voulait porter son kirpan à l’école. Le débat judiciaire s’est conclu par une décision de la Cour suprême du Canada, en 2006, autorisant l’élève à porter son kirpan sous conditions, et reconnaissant en même temps une obligation d’accommodement raisonnable. Pour plus de détails, on peut consulter Potvin, Audet et McAndrew, 2008.
-
[11]
À la suite de cette affaire du kirpan, on a assisté au Québec à la médiatisation de plusieurs cas d’accommodement reliés aux différences culturelles et religieuses jugés déraisonnables. La controverse publique a pris une telle ampleur que le gouvernement du Québec a décidé, en 2007, de créer une commission de consultation, coprésidée par Gérard Bouchard et Charles Taylor. Dans leur rapport remis au gouvernement en mars 2008, les auteurs relèvent la présence d’une crise des perceptions, où la situation au sein des établissements publics est jugée sous contrôle. Sur ce sujet, on peut consulter Brodeur, 2008 ; Gaudreault-DesBiens, 2009 ; Tremblay, 2010.
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[12]
Il s’agit du projet de loi 94 (2011), portant sur l’interdiction de se couvrir le visage ; du projet de loi 60 (2013), aussi appelé « Charte des valeurs », portant sur l’interdiction de porter des signes religieux dans l’ensemble des établissements publics québécois ; et de la Loi sur la neutralité religieuse de l’État, adoptée en 2018, codifiant les demandes d’accommodements raisonnables pour motifs religieux. Au sujet de ce parcours législatif, on peut consulter notamment Chung, 2014 ; Laniel, 2018 ; Lavoie, 2016 ; Rousseau, 2014.
-
[13]
Selon l’approche développée par Brian Z. Tamanaha, approche dite sociojuridique qui cherche à faire discuter dans une même étude des savoirs juridiques et sociologiques, dans le but de produire des connaissances pouvant être significatives pour les deux disciplines (Tamanaha, 1997, 2001, 2006). Selon Jean-Guy Belley, les études sociojuridiques s’intéressent à la fois aux normes officielles et non officielles, plus particulièrement à la distance pouvant être observée entre celles-ci, en ayant un intérêt pour l’existence de différents systèmes de normes parfois concurrents dans un même contexte sociétal (Belley, 2011 ; Bernheim, 2011 ; Delmas-Marty, 2006 ; Macdonald, 2003 ; Rocher, 1996). Ces études s’intéressent également à la perception des normes officielles par des personnes étant liées à des normes non officielles (Belleau et Cornut St-Pierre, 2012 ; Engel, 1998 ; Lavoie, 2019).
-
[14]
Selon les sociologues du droit Patricia Ewick et Susan Silbey, la légalité renvoie aux diverses formes que prend le droit au sein des relations sociales quotidiennes, en recouvrant de multiples rapports entre le droit formel (le droit des textes) et le droit vivant (le droit tel qu’il se matérialise concrètement au quotidien) (Ewick et Silbey, 2009).
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[15]
Les études sur la religion vécue mettent l’accent sur les valeurs religieuses mises en situation. Il s’agit d’étudier la religion « en mode mineur » (Piette, 2003) par la prise en compte des croyances se traduisant par des pratiques quotidiennes formelles ou informelles, telles que des prières, des rituels, la possession d’objets ou des expressions d’accord ou de désaccord ; pratiques qui peuvent alors interférer avec le cours attendu des activités (Bender, 2003 ; Frankenberg, 2004 ; McGuire, 2008).
-
[16]
Le droit à l’égalité est prévu à l’article 10 de la Charte québécoise des droits et libertés et à l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.
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[17]
Comme nous le mentionnions plus haut, à l’exception du port de signes religieux pour certaines catégories de fonctionnaires en position d’autorité, selon la Loi sur la laïcité de l’État.
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[18]
Selon le Guide d’accompagnement. Traitement d’une demande d’accommodement de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), le critère du coût excessif renvoie notamment au coût réel de l’accommodement demandé, qui s’évalue selon le budget d’exploitation total de l’organisation, la santé financière de celle-ci et la conjoncture économique. Le critère de l’entrave au bon fonctionnement de l’organisation fait référence notamment à l’adaptabilité des lieux, des installations et des équipements de travail, à la disponibilité des locaux, à l’effet sur la productivité ou sur le rendement et la charge de travail. Le critère du droit d’autrui fait référence notamment aux risques pour la santé et la sécurité d’autrui ou celles du demandeur, à l’ampleur du risque et à l’effet préjudiciable sur l’exercice concret des droits d’autrui, ce qui fait référence au droit à l’égalité entre les hommes et les femmes (Imbeault, Auger, Carpentier et Poirier, 2012).
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[19]
L’hôpital n’est d’ailleurs pas en soi un espace qui favorise d’emblée l’expression de la religion vécue des patients, qui ne s’y présentent pas explicitement pour manifester leurs croyances. Comme le montre l’étude de LeGall et Xenocostas auprès de plusieurs intervenants du milieu de la santé au sujet de leur réception des valeurs religieuses des patients, la majorité de ceux-ci « le font de manière indirecte, c’est-à-dire si [les patients] l’introduisent dans la discussion ou, parfois, si leurs croyances apparaissent comme un enjeu » (Le Gall et Xenocostas, 2011 : p. 174). Tout en n’étant pas a priori en désaccord avec l’expression de la religion vécue des patients à l’hôpital, les soignants sont souvent préoccupés par des considérations pratiques liées à l’accommodement de celle-ci, tout en se sentant souvent mal à l’aise avec la dimension religieuse qui peut teinter la relation soignante, en particulier en contexte de soins critiques.
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[20]
Bien que la présente étude ne porte pas sur les enjeux de discrimination vécus par des Autochtones dans le système de santé, on peut tout de même mentionner que le dépôt des rapports de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (2015) ainsi que de la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec (commission Viens) (2019) a interpellé tous les acteurs de l’administration publique, en particulier les établissements de santé, pour une meilleure adaptation aux réalités culturelles autochtones. Le décès tragique de Joyce Echaquan en septembre 2020, survenu à l’hôpital de Joliette, a révélé de manière criante le racisme systémique qui sévit toujours dans le système de santé envers les personnes autochtones. Par ailleurs, le rapport final de la commission Viens en 2019 avait relevé la présence de nombreux problèmes à plusieurs niveaux quant à la qualité des soins et à l’accès à ceux-ci pour les Autochtones, de même que quant à la nature des interventions en santé et services sociaux (CERP, 2019 : 389-432).
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[21]
Bien sûr, cela peut varier selon les interprétations personnelles. Au sujet des juifs hassidiques de Montréal, on peut consulter notamment Anctil et Robinson, 2019.
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[22]
Une des agentes administratives nous a par ailleurs remis un exemplaire d’un formulaire de consentement, utilisé notamment lorsqu’il y a un suivi de dossier par un médecin référent. Sur le formulaire, on trouve la phrase suivante : « J’autorise les professionnels de cet établissement à faire les examens et les traitements nécessaires. » Dans ce cas, il convient de préciser que le formulaire de consentement ne constitue pas un consentement en tant que tel. C’est le processus de consentement, fondé sur des explications clairement fournies, qui constitue le consentement en soi. Le formulaire constitue simplement une confirmation écrite de ce processus. Les modalités d’obtention du consentement diffèrent toutefois en situation d’urgence. À ce sujet, on peut consulter Ménard, 2018, p. 389.
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