Résumés
Résumé
La nappe d’eau superficielle appartenant au système hydrogéologique fluvio-lacustre et volcanique d’âge plio-quaternaire est située dans une zone subsidente, à effondrement récent, allongée entre Timahdite et Almis Guigou du Moyen Atlas, Maroc. La région d’étude est occupée essentiellement par des zones agricoles caractérisées par une utilisation importante d’engrais chimiques et de pesticides qui représentent, en plus des rejets domestiques, un risque permanent sur la qualité des eaux souterraines. Nous avons étudié la vulnérabilité à la pollution de la nappe d’eau de cette région, en utilisant deux méthodes, DRASTIC et SI, avec l’utilisation des logiciels ArcGIS 9.3 et Erdas Imagine 8.4. La validation de ces deux méthodes a été testée en comparant la répartition des nitrates dans les eaux souterraines et les différentes classes de vulnérabilité. Trois classes de degré de vulnérabilité à la pollution ont été identifiées par les deux méthodes (faible, moyenne et élevée). La classe de degré de vulnérabilité moyenne est la plus dominante avec 60 % pour la méthode DRASTIC et 49,81 % pour celle de SI. Le taux de coïncidence des concentrations en nitrates des eaux souterraines avec les différentes classes de vulnérabilité établies est de 76,92 % et 61,54 % respectivement pour les méthodes SI et DRASTIC. De ce taux de coïncidence, la méthode SI parait mieux évaluer la vulnérabilité à la pollution aux nitrates.
Mots-clés:
- méthode DRASTIC,
- méthode SI,
- vulnérabilité,
- occupation du sol,
- ETM+,
- nappe superficielle,
- nitrates,
- Timahdite-Almis Guigou,
- Moyen Atlas,
- Maroc
Abstract
The fluvio-lacustrine and volcanic Plio-Quaternary hydrogeological aquifer system is located in a recently collapsed subsidence zone between Timahdite and Almis Guigou in the Moroccan Middle Atlas. The study area is essentially occupied by agricultural areas, characterized by a high use of chemical fertilizers and pesticides which represents, in addition to domestic sewage, a permanent risk to groundwater quality. We have studied the vulnerability to pollution of the regional superficial groundwater using two methods, DRASTIC and SI, with the software ArcGIS 9.3 and Erdas Imagine 8.4. The validity of these two methods was tested by comparing the distribution of nitrates in groundwater and the different classes of vulnerability. Three classes of pollution vulnerability degrees were identified by the two methods (low, average and high). The middle degree of vulnerability class is most dominant with 60% for the DRASTIC method and 49.81% for SI method. The coincidence rate of the groundwater nitrate concentrations with the different vulnerability classes established is 76.92% and 61.54%, respectively for the SI and DRASTIC methods. From this coincidence rate, the SI method seems better for assessing the vulnerability to nitrate pollution.
Key words:
- DRASTIC method,
- SI method,
- vulnerability,
- land use,
- ETM+,
- Timahdite-Almis Guigou,
- superficial aquifer,
- nitrates,
- Middle Atlas,
- Morocco
Corps de l’article
1. Introduction
Le contexte hydrogéologique de la région d’étude montre que les ressources en eau souterraine disponibles dans la région sont localisées dans les formations fluviolacustres et volcaniques d’âge plioquaternaire, et dans les calcaires liasiques. Dans cette région, le risque de pollution est lié à des facteurs agricoles causés par l’emploi des engrais et des pesticides agricoles et des facteurs anthropiques tels que le rejet des déchets et l’utilisation des fosses septiques. Pour prévenir les risques de pollution de l’eau souterraine, une des approches adoptées est la connaissance et la cartographie des zones vulnérables à la pollution (AKE et al., 2010). La notion de vulnérabilité à la pollution d’un aquifère est définie comme sa susceptibilité intrinsèque à la modification de la qualité et de la quantité d’eau souterraine dans l’espace et dans le temps à cause des processus naturels et/ou de l’activité anthropique (CIVITA, 1994). Ce travail a été réalisé dans le but d’établir des cartes de vulnérabilité à la pollution par les nitrates en utilisant les méthodes paramétriques suivantes: la méthode DRASTIC (ALLER et al., 1987) et la méthode SI (RIBEIRO, 2000).
La méthode DRASTIC prend en compte les sept paramètres suivants : profondeur de la surface de la nappe (D), la recharge nette (R), nature lithologique de l’aquifère (A), sol (granulométrie et faciès) (S), topographie des terrains (T), impact de la zone non saturée (lithologie et épaisseur, I) et conductivité hydraulique (perméabilité, C). En revanche, la méthode SI prend en compte les paramètres suivants : profondeur de la surface de la nappe (D), la recharge nette (R), sol (granulométrie et faciès) (S), topographie des terrains (T), et l’occupation du sol (OS).
Le calcul de l’indice DRASTIC et SI correspond à la somme des cotes attribuées aux différents facteurs influençant le système hydrogéologique de la région d’étude multipliée par leur poids.
2. Présentation de la zone d’étude
La région d’étude, située à l’ouest du méridien de Boulemane, longe la zone de passage de l’accident nord moyen atlasique dont la direction est N20 à N70. Elle est limitée au nord par les causses de Sefrou et de l’Anoceur, à l’est par le Moyen Atlas plissé, au sud par le synclinal de Baqrit et à l’ouest par le causse d’Azrou-Ifrane. Elle comprend les éléments structuraux suivants (Figure 1) :
la zone de passage de l’accident nord moyen atlasique, dont la manifestation la plus évidente est d’ordre morphologique : la première ride anticlinale (COLO, 1961);
les unités de Timahdite et de Guigou, qui font partie de la structure synforme de Baqrit-Timahdite-Guigou, présentent des dépôts détritiques plio-quaternaires dans l’unité de Timahdite et carbonatés du Lias dans l’unité de Guigou. Les deux unités sont recouvertes par des coulées volcaniques récentes;
la partie nord de la structure synforme de Bou Anguer, qui est séparée de celle de Baqrit-Timahdite-Guigou par la première ride anticlinale (COLO, 1961). Les formations crétacées et éocènes sont développées sur les flancs méridional et oriental de cette structure (CHARROUD, 1990; CHARRIÈRE, 1990; ENSSLIN, 1992; HERBIG et TRAPPE, 1994). La terminaison sud-ouest de la structure synforme d’Ain Nokra est séparée de celle de Bou Anguer par l’accident de Felledi (CHARROUD, 1990). L’essentiel des affleurements de cette structure est d’âge paléogène (AÏT SLIMAN, 1989). Toutefois, sur le flanc méridional de cette structure synforme d’Ain Nokra, affleurent des dépôts crétacés (CHARROUD, 1990).
3. Matériels et méthodes
Le matériel de travail se compose de données multisources. Il s’agit des données piézométriques issues de la campagne piézométrique que nous avons réalisée pendant les mois de juin, juillet et août 2012. Les fiches techniques des forages disponibles fournies par l’agence du bassin hydraulique du Sebou, nous ont permis d’utiliser les données des profondeurs des forages, des logs stratigraphiques et des essais de pompages. La carte pédologique de la région d’étude est fournie par le Haut Commissaire aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la Désertification du Maroc (HCEFLCD, 1996). Ces données nous ont aidées à la réalisation des différentes cartes de vulnérabilités.
Nous avons utilisé deux types d’images :
l’image satellitaire de type Shuttle Radar Topography Mission (SRTM) de résolution 90 m obtenue au cours d’une mission du 11 au 22 février 2000 de la navette spatiale Endeavour (STS-99) (provenant du site : http://srtm.csi.cgiar.org/srtmdata/) pour avoir une idée générale de la morphologie de la région d’étude;
l’image Landsat 7 ETM+ (2012) pour réaliser la carte d’occupation du sol.
Le traitement de toutes ces données s’est effectué sur ArcGIS 9.3 et Erdas Imagine 8.4.
3.1 Méthode d’évaluation de la vulnérabilité
Nous avons utilisé dans la présente étude deux méthodes différentes, mais complémentaires, la première évaluant la vulnérabilité intrinsèque (DRASTIC) (ALLER et al., 1987) et la deuxième la vulnérabilité spécifique (SI) (SCHNEBELEN et al., 2002). Ces deux méthodes utilisées se présentent sous forme de cotation numérique des différents facteurs influençant le système hydrogéologique de la région d’étude (Tableaux 1, 2, 3, 4, 5 et 6).
3.1.1 Profondeur de la nappe d’eau (D)
Le paramètre D a été déterminé pendant nos relevés piézométriques en juin, juillet et août 2012 sur plus de 400 puits bien répartis sur la région d’étude. Le toit de la nappe d’eau par rapport à la surface topographique varie en moyenne de 3 à 120 m de profondeur (Figure 2).
3.1.2 Recharge nette (R)
Pour estimer la recharge nette Rn, nous avons calculé la différence entre les niveaux statiques relevés au niveau des forages et puits pendant les saisons sèches (n1) et pluvieuses (n2) rapportée à la valeur de recharge la plus élevée (a). Un coefficient (P) a donc été déterminé et multiplié par l’infiltration calculée à partir des données pluviométriques (DIBI et al., 2013) :
où Rn : la recharge nette calculée et R : la recharge déterminée sur l’ensemble de la zone d’étude est égale à 62,435 mm (Figure 3).
3.1.3 La zone saturée et type d’aquifère (A)
L’identification du paramètre A est basée sur les logs des forages réalisés pour le captage de la nappe d’eau, et sur l’étude du terrain. La corrélation entre les forages réalisés et les observations des coupes sur le terrain montrent que l’aquifère est formé essentiellement de dolomies, conglomérats, sables et basaltes (Figure 4).
3.1.4 Type de sol (S)
Le paramètre S est obtenu à partir de la carte pédologique de la région d’étude (HCEFLCD, 1996). Quatre types de sols ont été ainsi identifiés (Figure 5). La classification du sol selon la méthode DRASTIC, a permis d’identifier quatre classes pédologiques. Les cotes affectées à ce paramètre sont en fonction de la structure des sols. De point de la vulnérabilité, plus le sol est riche en argile, plus l’absorption des polluants et la protection des eaux souterraines sont importantes. Les zones de forte vulnérabilité pour ce paramètre correspondent aux zones constituées de minéraux bruts et celles de faible vulnérabilité aux sols complexes.
3.1.5 Topographie (T)
La pente topographique du terrain a été calculée en utilisant les cartes topographiques couvrant la région d’étude (Azrou, Timahdite, Boulemane et Achlouj au 1/50 000), et à partir de son MNT (modèle numérique de terrain). Les zones de forte vulnérabilité pour ce paramètre correspondent aux zones constituées des pentes du terrain dont les valeurs sont situées entre 0 et 2 %. Ces dernières valeurs se répartissent sur la grande majorité de la région d’étude. Le reste de la zone présente des valeurs de 2 à 6 % (Figure 6).
3.1.6 La zone non saturée (vadose) (I)
La lithologie de l’aquifère a été déterminée en se basant sur les données des forages effectués par l’Agence du bassin hydraulique du Sebou (ABHS) et sur les données de profondeur de la nappe en 2012 (les épaisseurs de la zone saturée ont été ajustées en fonction de la variation du niveau piézométrique de la nappe).
La corrélation montre que la zone vadose est formée essentiellement de basaltes, calcaires lacustres, calcaires éocènes, conglomérats et dépôts détritiques variés (Figure 7). Son identification a été basée sur les logs des forages (ABHS). La conversion de la carte vectorielle en carte matricielle, la classification et la cotation selon la méthode DRASTIC seront basées sur la lithologie de l’aquifère.
3.1.7 Conductivité hydraulique (perméabilité) (C)
La conductivité hydraulique de l’aquifère a été calculée en utilisant les données de la transmissivité calculée et les données de l’épaisseur de l’aquifère. Les valeurs de conductivité hydraulique déterminées variant entre 10,7 x 10-4 m∙s-1 dans la région d’Almis Guigou au NE et 4 x 10-7 m∙s-1 dans la région de Timahdite au SO (Figure 8). Quatre intervalles de valeurs ont été différenciés.
3.1.8 Occupation du sol (OS)
Le paramètre occupation du sol a été obtenu par le traitement de l’image landsat 7 ETM+ (2012). Nous avons utilisé cette image pour établir la carte thématique de l’occupation du sol dans la région d’étude par :
interprétation visuelle des indices de télédétection (NDVI, BI);
classification dirigée de la composition colorée 5, 4 et 3 de l’image landsat 7 ETM+;
traitements post-classification.
La visite du terrain est nécessaire pour valider la nomenclature des classes d’occupation du sol.
3.2 Traitement des données
Le traitement des données que nous avons utilisées pour ces méthodes paramétriques est basé sur l’utilisation des techniques de numérisation et d’interpolation à l’aide de l’ArcGIS 9.3. Ceci a permis de constituer une base de données de la région d’étude.
3.3 Évaluation de la vulnérabilité
3.3.1 Par la méthode DRASTIC
La méthode DRASTIC a été élaborée par l’EPA (Environmental Protection Agency) aux États-Unis en 1985, puis utilisée et développée par ALLER et al. (1987). Cette méthode consiste à estimer le potentiel de pollution des eaux souterraines (SCHNEBELEN et al., 2002). Elle permet d'évaluer la vulnérabilité verticale en se basant sur les sept paramètres hydrogéologiques suivants (BÉZÉLGUES et al., 2002) :
D : profondeur de la surface de la nappe (ou depth);
R : recharge nette;
A : nature lithologique de l’aquifère;
S : sol (granulométrie et faciès);
T : topographie des terrains;
I : impact de la zone non saturée (lithologie et épaisseur);
C : conductivité hydraulique (perméabilité) de la zone saturée.
Pour chaque paramètre hydrogéologique critique, une note variant de 1 à 10 et un poids allant de 1 à 5 ont été attribués d’après son importance dans le modèle DRASTIC. L’index de vulnérabilité final Id est la somme pondérée des sept paramètres hydrogéologiques selon la formule suivante (ALLER et al., 1987) :
où D, R, A, S, T, I et C sont les sept paramètres hydrogéologiques de la méthode DRASTIC, n : note accordée à chaque paramètre et p : poids accordé à chaque paramètre.
3.3.2 Principe de la méthode DRASTIC
L’évaluation de la vulnérabilité par la méthode DRASTIC repose sur trois hypothèses fondamentales (KACHI, 2007) :
la source de contamination potentielle est localisée en surface du sol;
les contaminants sont entrainés depuis la surface du sol jusqu’à l’aquifère par l’infiltration efficace, soit verticalement;
le type de contaminant n’intervient pas dans la définition de la vulnérabilité, c'est-à-dire que le contaminant est considéré comme possédant la même mobilité que l’eau.
Les défauts de cette méthode résident dans le fait qu’elle ne prend pas en considération la présence des fractures, des cours d’eau permanents ou temporaires, de la karstification et le type de végétation développée en surface (une forêt est différente d’une ferme ou d’un pâturage), etc.
3.3.3 Par la méthode SI (Susceptibility Index)
La méthode SI ou méthode d’indice de susceptibilité est une méthode qui estime la vulnérabilité verticale spécifique à la pollution agricole. Elle a été développée par RIBEIRO (2000) et prend en considération cinq paramètres. Les quatre premiers paramètres sont identiques aux quatre paramètres de la méthode DRASTIC (D : profondeur de la surface de la nappe [ou depth], R : la recharge nette de l’aquifère, A : la nature lithologique de l’aquifère et T : la topographique des terrains). Le cinquième paramètre est l’occupation du sol (OS). Les cotes correspondantes aux quatre paramètres dans la méthode DRASTIC ont été conservées.
L’indice de vulnérabilité (ISI) est calculé en faisant la somme des produits des cotes par les poids des paramètres correspondants :
où D, R, A, T et OS sont les cinq paramètres hydrogéologiques de la méthode de SI, p : le poids du paramètre et c : la cote associée.
Le paramètre occupation du sol (OS) a été obtenu par le traitement de l’image landsat 7 ETM+ 2012. Cette image a été utilisée pour établir la carte de l’occupation du sol de la zone d’étude (Figure 9).
3.4 Validation des cartes de vulnérabilité à la pollution
L’élaboration d’une carte de vulnérabilité est testée et validée par des mesures sur le terrain et l’analyse des données chimiques des eaux souterraines (AKE et al., 2010). Nous avons testé la validité de l’évaluation de la vulnérabilité à la pollution par les données de concentration aux nitrates dans les eaux souterraines de la région d’étude. En effet, plusieurs auteurs (ISABEL et al., 1990, CHAMPAGNE et CHAPUIS, 1993, MOHAMED, 2001 et JOURDA et al., 2006), ont vérifié la validité des méthodes d’évaluation de la vulnérabilité à la pollution en se basant sur des données chimiques des eaux souterraines. La validation des cartes de vulnérabilité obtenues a porté sur l’analyse de la répartition des nitrates dans les eaux souterraines de la région d’étude.
4. Résultats
La validité de l’évaluation de la vulnérabilité à la pollution de la nappe superficielle de la zone étudiée par les méthodes DRASTIC et SI, a été testée par les données des teneurs en nitrates dans les eaux souterraines. Cette validité a été réalisée en effectuant une comparaison entre la répartition des nitrates dans les eaux souterraines de la nappe et la distribution des classes de vulnérabilité.
4.1 Niveau de vulnérabilité suivant la méthode DRASTIC
Les résultats révèlent que l’indice de valeur de vulnérabilité varie entre 88 et 165. Trois plages d’indice de vulnérabilité ont été mises en évidence (Tableau 3). L’analyse des plages d’indice de vulnérabilité fait ressortir trois classes de surface de vulnérabilité (Figure 10) :
La classe de vulnérabilité élevée, occupant 21 % de la zone d’étude. Elle coïncide avec l’axe de la nappe où la profondeur de la surface piézométrique est très faible et parfois même nulle. La nature de la couche non saturée possède également une influence sur cette vulnérabilité.
La classe de vulnérabilité moyenne qui correspond à la majorité de la superficie de la nappe aquifère. Cette classe de vulnérabilité représente 60 % de la superficie de la région d’étude. Ces valeurs sont dues essentiellement à la faible profondeur de la surface piézométrique et à la nature de la couche vadose (calcaires éocènes, basaltes, conglomérats et dépôts détritiques variés).
La classe de vulnérabilité faible qui représente 19 % de la superficie de la région d’étude. Cette classe de vulnérabilité faible est due à la profondeur élevée de la nappe et à la nature lithologique de la zone vadose (calcaires éocènes, basaltes et conglomérats).
4.2 Niveau de vulnérabilité suivant la méthode SI
Les résultats révèlent que l’indice de valeur de vulnérabilité varie entre 26 et 71. Trois plages d’indice de vulnérabilité ont été mises en évidence (Tableau 6). L’analyse des plages d’indice de vulnérabilité fait ressortir trois classes de surface de vulnérabilité (Figure 11) :
La classe de vulnérabilité élevée occupant 9,54 % de la zone d’étude. Elle traduit une vulnérabilité élevée à la pollution. Cette vulnérabilité élevée est due à l’occupation du sol par les habitations, à la faible profondeur de la surface piézométrique de la nappe et à la nature de la couche non saturée (calcaires éocènes, basaltes, conglomérats et dépôts détritiques variés).
La classe de vulnérabilité moyenne qui correspond à la majorité de la superficie de la nappe aquifère. Cette classe de vulnérabilité représente 49,81 % de la superficie, soit la moitié de la région d’étude. Ces valeurs sont dues essentiellement à la faible profondeur de la surface piézométrique et à la nature de la couche vadose (calcaires éocènes, basaltes et conglomérats).
La classe de vulnérabilité faible qui représente 40,65 % de la superficie de la région d’étude. Cette classe de vulnérabilité faible est due à la profondeur de la nappe et à la nature lithologique de la zone vadose (calcaires éocènes, basaltes et conglomérats).
4.3 Niveau de validité des cartes de vulnérabilité à la pollution
La répartition des teneurs en nitrates dans la zone d’étude est liée aux facteurs polluants, en particulier à l’activité agricole. Pour mettre en évidence les effets provoqués par les activités agricoles sur les eaux souterraines de cette zone, 13 échantillons d’eau sont prélevés pendant le mois de février 2013 à partir des puits captant la nappe phréatique cantonnée dans l’aquifère plio-quaternaire.
Les analyses effectuées au niveau des laboratoires de la faculté polydisciplinaire de Taza et à l’Agence du bassin hydraulique de Sebou (ABHS), suivant les techniques standard de RODIER (1996), montrent que dans les eaux souterraines de la zone d’étude, les nitrates sont présents avec des concentrations qui varient entre 10 et 77 mg∙L-1. Ces concentrations semblent diminuer suivant l’axe d’écoulement des eaux souterraines, du SO au NE, le long de la région d’étude.
4.3.1 Pour la carte obtenue par la méthode DRASTIC
La carte de validité de la vulnérabilité à la pollution obtenue par la méthode DRASTIC (Figure 10), présente :
deux valeurs comprises entre 12 et 20 mg∙L-1 en nitrates, dont une valeur coïncide avec la zone de vulnérabilité faible et l’autre avec la zone de vulnérabilité moyenne;
trois valeurs comprises entre 20 et 36 mg∙L-1 en nitrates, dont deux valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité moyenne et une avec la zone de vulnérabilité faible;
cinq valeurs comprises entre 36 et 49 mg∙L-1 en nitrates, dont deux valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité faible. Deux de ces valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité moyenne et l’une de ces valeurs coïncide avec la zone de vulnérabilité élevée;
trois valeurs comprises entre 50 et 77 mg∙L-1 en nitrates. Ces valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité élevée.
4.3.2 Pour la carte obtenue par la méthode SI
La carte de validité de la vulnérabilité à la pollution par la méthode SI (Figure 11), présente :
deux valeurs comprises entre 12 et 20 mg∙L-1 en nitrates. Ces valeurs coïncidentes avec la zone de vulnérabilité faible;
trois valeurs comprises entre 20 et 36 mg∙L-1 en nitrates. Ces valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité faible;
cinq valeurs comprises entre 36 et 49 mg∙L-1 en nitrates, dont deux valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité faible. Deux de ces valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité moyenne et l’une de ces valeurs coïncide avec la zone de vulnérabilité élevée;
trois valeurs comprises entre 50 et 77 mg∙L-1 en nitrates. Ces valeurs coïncident avec la zone de vulnérabilité élevée.
L’analyse des différentes valeurs de nitrates et de leurs positions sur les cartes de vulnérabilité montre que les teneurs en nitrates supérieures à 50 mg∙L-1 (norme de qualité de l’eau de boisson de l’Organisation mondiale de la santé) sont regroupées dans les zones de vulnérabilité moyenne et élevée.
4.4 Comparaison des cartes de vulnérabilité à la pollution obtenue
La cartographie de la vulnérabilité à la pollution de la nappe superficielle de la région d’étude nous a permis d’obtenir trois classes de vulnérabilité identique avec les deux méthodes utilisées DRASTIC et SI :
une classe de vulnérabilité faible;
une classe de vulnérabilité moyenne;
une classe de vulnérabilité élevée.
La classe de vulnérabilité moyenne couvre la plus grande superficie pour ces deux méthodes, soit 60 % pour la méthode DRASTIC et 49,81 % pour la méthode SI, illustrant que la région d’étude est dominée par une vulnérabilité moyenne.
La vulnérabilité à la pollution des eaux souterraines de la région d’étude a été confirmée par le taux de nitrates dans les puits de la zone d’étude. La répartition des teneurs en nitrates dans la zone d’étude est liée aux facteurs polluants, et en particulier à l’activité agricole. Les concentrations semblent diminuer suivant l’axe d’écoulement des eaux souterraines, du SO au NE, ce qui nous laisse à penser à une dilution des nitrates.
5. Discussion
La région de Timahdite-Almis Guigou est occupée essentiellement par des zones agricoles caractérisées par une utilisation importante des engrais chimiques et des pesticides qui représentent, en plus des rejets domestiques, un risque permanent pour la qualité des eaux souterraines.
La cartographie de la vulnérabilité à la pollution de la nappe superficielle de la région d’étude a permis d’obtenir trois classes de vulnérabilité identique avec les deux méthodes utilisées : une classe de vulnérabilité faible, une classe de vulnérabilité moyenne et une classe de vulnérabilité élevée qui mérite une attention particulière de protection. La classe de degré de vulnérabilité moyenne a la plus grande superficie pour ces deux méthodes, soit 60 % pour la méthode DRASTIC et 49,81 % pour la méthode SI, illustrant que la région d’étude est dominée par une vulnérabilité intrinsèque moyenne. Des résultats similaires montrant trois classes de vulnérabilité ont été obtenus par HAMZA et al. (2010) lors de l’étude de la pollution agricole diffuse dans deux régions phréatiques aquifères d'une région semi-aride (nord-est de la Tunisie), et par BATCHI et al. (2017) lors de l’étude comparative de deux modèles (DRASTIC et SI) pour l'évaluation de la sensibilité de la nappe phréatique de Mnasra (Maroc nord-occidental) à la pollution d'origine agricole.
Les valeurs de l’indice DRASTIC obtenues dans cette étude varient de 68 à 165. Elles s’apparentent à celles obtenues par SADKAOUI et al. (2013) au niveau du bassin de Saïs (53 à 136), par AZZI et al. (2016) au niveau de la nappe phréatique du causse moyen atlasique (région El Hajeb - Ifrane) (95 à 190) et par BATCHI et al. (2017) au niveau de la nappe phréatique de Mnasra (Maroc nord-occidental) (70 à 173).
En ce qui concerne la cartographie de la vulnérabilité à la pollution par la méthode SI, les indices calculés varient de 26 à 71. Ces résultats s’apparentent à ceux obtenus par BATCHI et al. (2017) au niveau de la nappe phréatique de Mnasra (Maroc nord-occidental) (40 à 82). Les tendances de la vulnérabilité à la pollution des eaux souterraines de la région de Timahdite-Almis Guigou ont été confirmées par le taux de nitrates des puits de la zone d’étude.
Le taux de coïncidence des concentrations en nitrates des eaux souterraines avec les différentes classes de vulnérabilité établies est de 76,92 % et 61,54 % respectivement pour les méthodes SI et DRASTIC. De ce taux de coïncidence, la méthode SI parait mieux évaluer la vulnérabilité à la pollution aux nitrates. Plusieurs travaux abordant le sujet ont abouti à des résultats similaires. En effet, les études de HAMZA et al. (2007), AKE et al. (2010) et BATCHI et al. (2017) ont montré que la vulnérabilité par les nitrates est mieux exprimée par la méthode de vulnérabilité spécifique SI.
6. Conclusion
Les cartes de la vulnérabilité à la pollution, obtenues selon les méthodes DRASTIC et SI mettent en évidence trois classes de vulnérabilité dont la répartition est la suivante :
pour la méthode DRASTIC : 19 % de la zone d’étude ont une vulnérabilité faible, 60 % moyenne et 21 % élevée;
pour la méthode SI : 40,65 % de la zone d’étude ont une vulnérabilité faible, 49,81 % moyenne et 9,54 % élevée.
La validation de ces deux méthodes de vulnérabilité utilisées a été faite par la répartition spatiale du taux de nitrates dans les puits de la région d’étude.
Les résultats obtenus révèlent que le taux de coïncidence des concentrations en nitrates des eaux souterraines avec les différentes classes de vulnérabilité établies est de 76,92 % et 61,54 % respectivement pour les méthodes SI et DRASTIC. De ce taux de coïncidence, la méthode SI parait mieux évaluer la vulnérabilité à la pollution aux nitrates.
Parties annexes
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