Résumés
Résumé
Dans la ville de Biskra, l’alimentation en eau potable des habitants et l’irrigation des cultures reposent sur l’exploitation des eaux souterraines des aquifères du Sahara Septentrional. L’un des enjeux majeurs pour la durabilité de l’utilisation de cette ressource est la qualité des eaux de certains aquifères (Phréatique et Miopliocène). Ces dernières sont fortement minéralisées (entre 2 et 3 g∙L‑1 de sel dissous). Leur faciès chimique dominant est le sulfaté-chloruré avec un excès de chlorures, supérieur à la norme de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) de 250 mg∙L‑1. Afin de remédier à ce problème de salinité et dans le but de développer une technique d’adoucissement fiable et économiquement soutenable, nous avons dans ce travail expérimenté deux procédés d’adoucissement partiel, la coagulation-floculation au sulfate d’aluminium d’une part et la précipitation à la chaux éteinte Ca(OH)2 d’autre part. Les principaux résultats confirment que l’élimination des ions chlorures est plus ou moins faible, pour les deux procédés testés et sont respectivement de 29,7 % et de 19,1 %. Nous avons également mis en évidence que le traitement des eaux à la chaux éteinte était plus efficace, les ions sulfates étant réduits à 73,3 %. Toutefois, ce procédé a augmenté le pH des eaux traitées, ce qui a nécessité en aval un ajustement de ce dernier. De même, la concentration en ions bicarbonates a diminué d'environ 85 % car l'emploi de la chaux agit non seulement sur les chlorures et les sulfates associés aux ions calcium et magnésium, mais aussi sur les bicarbonates. Ces essais ont également permis de justifier le choix de la méthode la plus adaptée techniquement et économiquement pour l’adoucissement des eaux de la région d’étude.
Mots-clés:
- Sahara septentrional,
- salinité,
- adoucissement,
- coagulation-floculation,
- chaux hydratée,
- potabilité
Abstract
In Biskra drinking water supply for inhabitants and the irrigation of crops are based on the exploitation of the groundwater aquifers of the northern Sahara. One of the major challenges for the sustainability of use of this resource is water quality of some aquifers (phreatic and Miopliocene). These are highly mineralized (between 2 and 3 g∙L‑1 of dissolved salt), the dominant chemical facies being sulphate-chloride with an excess of chlorides higher than the World Health Organization (WHO) standard (250 mg∙L‑1). To remedy this problem of salinity and in order to develop a reliable and economically sustainable softening technique, we have tested two partial softening processes in this work, coagulation-flocculation with aluminum sulphate on the one hand and precipitation with slaked lime Ca(OH)2 on the other. The main results confirm that the removal of chloride ions is low for both tested processes, 29.7% and 19.1% respectively. We have also demonstrated that water treatment with slaked lime was more efficient, sulphate ions being reduced to 73.3%. However, this process increased the pH of the treated water and required a subsequent pH adjustment. Similarly, the concentration of bicarbonate ions decreased by about 85% because the use of slaked lime acts not only on chlorides and sulphates associated with calcium and magnesium ions, but also on the bicarbonate ions. These tests were also used to justify the choice of the most appropriate method technically and economically for softening water in the study area
Key Words:
- Northern Sahara,
- salinity,
- softening,
- coagulation-flocculation,
- slaked lime,
- potability
Corps de l’article
1. Introduction
À Biskra l’agriculture est le premier secteur porteur. D’ailleurs, la production agricole représente 7 % de la valeur de la production nationale. Les principales productions sont les dattes et le maraîchage avec respectivement 4 et 7,6 millions de quintaux produits annuellement (DSA, 2015). Trois aquifères sont exploités principalement dans la ville (le Quaternaire, le Miopliocène et l’Éocène). Ces derniers sont très sollicités pour l’agriculture (75 %), l’industrie (10 %) et l’alimentation en eau potable (15 %) (SEDRATI et al., 2008). Les nappes du Miopliocène et de l’Éocène restent les plus sollicitées, totalisant à elles seules 745 ouvrages avec un débit extrait de 303,76 hm3∙an‑1. Les eaux de ces nappes se caractérisent par une dureté excessive due principalement aux taux élevés en calcium et magnésium, ainsi que par de fortes teneurs en chlorures, sulfates et sodium (BOUCHAHM, 2011). Selon le sens de l’écoulement des nappes, les faciès chimiques des eaux sont en amont sulfatées-sodique; suite au lessivage et dissolution des calcaires, gypses et anhydrites deviennent en aval chlorurées-calcique. Ces caractéristiques chimiques ont un impact déterminant au niveau de la qualité de l’eau, tel que le goût salé; BOEGLIN (2000) note que la saveur d’une eau potable peut provenir des chlorures ou des sulfates.
La salinité élevée des eaux de la nappe du Miopliocène constitue un obstacle majeur pour l’utilisation de cette ressource par les différents secteurs socio-économiques. Ces eaux nécessitent un adoucissement préalable. Actuellement, il existe plusieurs techniques d'élimination partielle des sels des eaux de consommation qui garantissent toutefois un apport en sels conforme aux normes. Parmi les différents procédés de traitement des eaux existants, nous avons dans ce travail opté pour deux procédés en raison de leur efficacité potentielle et de la simplicité de leur utilisation : le traitement par coagulation-floculation au sulfate d’aluminium hydraté et la précipitation à la chaux éteinte Ca(OH)2.
2. Matériels et méthodes
2.1 Géographie et géologie de la région d’étude
Biskra est limitée au Nord par la wilaya de Batna, au Sud par les wilayas d’Ouargla, d’El Oued, et de Laghouat, à l’Est par la wilaya de Khenchela et à l’Ouest par les wilayas de Djelfa et Msila (Figure 1). Elle se caractérise par des terrains sédimentaires, allant du Barrémien à la base jusqu’au quaternaire calcaro-gypseux avec des alluvions sableuses et argileuses, tandis que le Tertiaire est formé de bancs de grès et d’argiles sableuses ainsi que de formations carbonatées. La tectonique de la région est très cassante avec la présence de failles et de plis (UNESCO, 1972; SEDRATI, et al., 2011).
2.1.1 Qualité des eaux de la région d’étude
La région de Biskra présente plusieurs réservoirs aquifères d’importances bien distinctes de par leur constitution lithologique, leur structure géologique et les facilités d’exploitation qu’ils présentent. Ces aquifères sont le Quaternaire (la nappe superficielle (phréatique), le Complexe terminal (nappe des sables du Miopliocène et la nappe des calcaires d’Éocène inférieur à Sénonien supérieur) et l’Albien (nappe des grés du continental intercalaire).
La nappe des sables est constituée par une alternance de niveaux d’argile, sable, et cailloutis d’âge Miopliocène et elle couvre une grande superficie de la région. Cette nappe est fortement exploitée dans la partie Est de Biskra. La profondeur de cette nappe varie de 100 à 900 m, avec un débit qui oscille entre 20 et 60 L∙s‑1 (BEL et CUCHE, 1970; SEDRATI, 2011).
Les eaux souterraines de la nappe des sables sont de qualité globalement médiocre, très chargées en sels dissous, avec une dominance des eaux de mauvaise qualité chimique sur celles de bonne qualité. En effet, ces eaux de potabilité mauvaise sont caractérisées par des teneurs élevées en certains ions (SO42‑, Mg2+, Cl‑,Ca2+ et F‑) dépassant largement les normes fixées par l’OMS. Deux faciès chimique dominent : le sulfaté sodique et le sulfaté magnésien (BOUCHAHM et ACHOUR, 2004; BOUCHAHM, 2011).
D'après les normes de l'OMS (2008), la majorité des eaux analysées de la nappe du Complexe Terminal de la ville de Biskra, appartiennent à la classe de potabilité momentanée (94 % des eaux de la nappe des sables et 82 % pour ceux des calcaires) (Tableau 1). Le diagramme de Piper (Figure 2), pour la nappe du Miopliocène, montre que le facies des eaux est le chloruré sodique et potassique avec une dominance des ions sulfates (BOUCHEMAL et al., 2011)
2.2 Méthodes d’analyse
Le prélèvement est effectué manuellement dans des flacons de 1 500 cm3 de capacité. Les flacons d’échantillonnage en plastique sont traités à l’acide nitrique, rincés à l’eau distillée et égouttés avant d’être rincés trois fois et remplis par l’eau à analyser. Au moment du prélèvement la javellisation est arrêtée et la conduite est vidangée pour que l’échantillon soit représentatif de l’eau du forage.
Les analyses des différentes caractéristiques physicochimiques de l’eau que nous avons étudiée ont été effectuées au sein du laboratoire central du Centre de Recherche Scientifique et Technique sur les Régions Arides (CRSTRA) de Biskra (Algérie) selon les méthodes standard d’évaluation de qualité décrites par RODIER et al. (2009) :
Le pH, la conductivité et la température ont été mesurés in situ chaque fois qu’il a été possible à l’aide d’un Multiparamètre de type Multi 3430 SET K;
La dureté totale (TH) : méthode complexométrique par titrage à l'ethylènediamine tétra-acétate (EDTA) en présence de noir Ériochrome T;
Le dosage du calcium : par complexométrie à l'EDTA en présence d'un indicateur coloré (Murexide);
L’alcalinité : par volumétrie. La mesure de l’alcalinité est basée sur la neutralisation d’un certain volume de l’échantillon par l’acide sulfurique (N/50);
Le dosage des chlorures : par volumétrie, selon la méthode de Mohr;
Le dosage des sulfates : (méthode néphélométrique) par utilisation d'un spectrophotomètre DR 5000 (HACH) à une longueur d'onde de 420 nm pour une suspension obtenue par réaction des sulfates avec le chlorure de baryum;
Le sodium et le potassium sont dosés par photométrie à émission de flamme sur un photomètre à flamme (JENWAY);
L’étude des différentes structures au rayon X par diffractomètre D8 Advance (Bruker) avec anticathode en cuivre ( = 1,5426°, configuration Ɵ-Ɵ).
2.3 Réactifs utilisés
Les réactifs utilisés respectivement pour la précipitation à la chaux et la coagulation-floculation sont la chaux hydratée, Ca(OH)2, et le sulfate d'aluminium, Al2(SO4)3.18H2O. La solution-mère de chaque réactif est préparée en faisant dissoudre 10 g du coagulant dans un litre d'eau distillée. Cette solution permet un ajout de faibles quantités pour les doses voulues de coagulant (YOUCEF et ACHOUR, 2001).
2.4 Description des essais de traitement
Pour l'ensemble des essais d’adoucissement réalisés, nous avons utilisé un floculateur de laboratoire (FC4S jar tester, Velp Scientifica) constitué d'une série d'agitateurs à palette de 3,5 x 1,5 cm2, qui tournent de 10 à 200 tr∙min‑1. Ce floculateur permet de réaliser simultanément quatre essais dans des béchers en verre de 1 000 L. Les essais ont été réalisés selon les étapes suivantes :
une agitation rapide à 200 tr∙min‑1 durant 3 min;
une agitation lente à 45 tr∙min‑1 durant 17 min;
une décantation durant 30 min.
Après décantation, le surnageant est récupéré pour être filtré sous vide sur membrane Osmonics Inc. de porosité 0,45 μm, et ensuite, les concentrations des paramètres de potabilité tels que TH, Ca, titre alcalimétrique complet (TAC), SO4, et Cl ainsi que le pH final et la conductivité sont déterminés. Le pourcentage d’abattement est évalué par le rendement qui s’exprime par la relation suivante :
où C0 et Cf représentent respectivement les concentrations initiales et finales en éléments minéraux exprimés en mg∙L‑1.
2.5 Origine et qualité des eaux pour l'expérimentation
Le tableau 2 présente les résultats des principales caractéristiques physicochimiques du forage Boukhalfa qui alimente la zone sud d’El Alia. Ce forage est exploité depuis 1982 dans la nappe Miopliocène à la profondeur 100 m, avec un débit de 35 L∙s‑1. L’eau du forage est très dure, car elle traverse des couches géologiques riches en calcaire (SEDRATI, 2011).
Les teneurs en éléments minéraux des eaux de forage échantillonnées (Tableau 2) montrent des valeurs élevées en chlorures (1 205 mg∙L‑1), près de six fois supérieures à la norme (200 mg∙L‑1), et de sulfates (988 mg∙L‑1), près de quatre fois supérieures à la norme de l’OMS (250 mg∙L‑1).
3. Résultats et discussion
3.1 Adoucissement par coagulation-floculation
Afin d'observer l'effet de la dose de sulfate d’aluminium sur l'abattement des différents paramètres physicochimiques par coagulation-floculation, nous avons introduit des doses croissantes de sulfate d’aluminium variant de 20 à 220 mg∙L‑1 dans des béchers ronds contenant 500 mL d’eau de forage. D’après la figure 3, nous pouvons constater que le rendement d'élimination des paramètres suivants (TAC, Mg, TH, Ca) augmente avec l'accroissement de la dose de Al2(SO4)3 pour atteindre respectivement 69 %, 41 %, 30 %, et 16 %, pour une dose optimale de coagulant égale à 220 mg∙L‑1 et avec des coefficients de variations des rendements respectivement de 13 %, 36 %, 35 % et 28 %.
La réaction de base, lors de l’ajout de l’ion Al3+ dans l’eau, est la formation d’un précipité d’hydroxyde d’aluminium avec libération d’une certaine acidité :
Cette acidité peut réagir sur certaines espèces en solution, notamment sur les ions bicarbonates (LETTERMAN et VANDERBROOK, 1983) selon la réaction 3 :
Pour cet effet, l’amélioration des rendements est appréciable surtout pour le TAC, où il favorise la formation de l’hydroxyde d’aluminium selon la réaction suivante :
La figure 4 présente l’évolution des chlorures et des sulfates des eaux traitées en fonction du sulfate d’aluminium. L’allure de ces deux courbes montre que pour les ions chlorures, le pourcentage d’élimination augmente au fur et à mesure de l’accroissement de la dose du coagulant à 220 mg∙L‑1; le pourcentage d’élimination de ces ions est de 29 % à ce dosage.
En revanche, le graphe des ions sulfates présente une courbe alternative et le coefficient de variation du rendement est égal à 6,1. Le rendement d’élimination de ces ions diminue au cours de l’addition progressive de 25 mg∙L‑1 de sulfate d’aluminium (25-75-125-175-225 mg∙L‑1) et ce à cause de la libération des ions sulfates dans le milieu selon la réaction 5 (DEGRÉMONT, 2005) :
D’autre part, le rendement d’élimination des ions sulfates a augmenté légèrement (20-30 %) au cours de l’addition progressive de 50 mg∙L‑1 du coagulant (50-100-150-200 mg∙L‑1) lorsque ces ions vont précipiter sous forme de gypse (CaSO4) selon la réaction 6 :
Selon GUESBAYA (1998), les anions minéraux tels que les sulfates, les phosphates ou les chlorures peuvent être considérés comme des ligands concurrents des ions hydroxyles. Ils peuvent interférer sur la précipitation des hydroxydes d’aluminium en déplaçant les ions OH‑.
L’accroissement de la dose du coagulant se traduit par une diminution progressive du pH avec un coefficient de variation atteignant une valeur de 3,7. Ce résultat était prévisible compte tenu des réactions d’hydrolyse du sulfate d’aluminium, qui permettent la libération d’ions H+ dans le milieu (AYECHE et BALASKA, 2010; HECINI et ACHOUR, 2008). Le suivi de l'évolution de la conductivité électrique (Figure 5) au cours du traitement, avec un coefficient de variation égal à 13,4, montre que la conductivité des eaux diminue lors de l’ajout du coagulant, ce qui peut s’expliquer par la diminution des concentrations de certains éléments minéraux.
À la lumière de ces résultats, on note qu’au fur et à mesure que la dose du coagulant augmente, on enregistre de meilleurs rendements pour l’abattement des paramètres qui limitent la potabilité de l’eau testée. Néanmoins, ces rendements restent faibles puisqu’inférieurs à 50 %.
3.2. Adoucissement à la chaux
Cette deuxième phase de l’étude avait pour but d’examiner l’efficacité de l’ajout de la chaux éteinte sur l’amélioration des paramètres de potabilité des eaux. Le procédé est basé sur la précipitation du calcium lié aux Cl et SO4. Pour visualiser cette efficacité, nous avons effectué des essais sur notre échantillon avec l’introduction des masses croissantes de Ca(OH)2, allant de 10 à 200 mg. La figure 6 présente l’évolution du rendement de la dureté des eaux en fonction du dosage de la chaux éteinte. D’après les graphiques de cette figure, nous constatons que le rendement d’élimination de TH et Mg augmente avec l’accroissement de la masse de la chaux (optimal). Par contre, le rendement pour le Ca2+ atteint 28 % à 100 mg de chaux introduite. Au-delà de cette dose, le rendement diminue.
Lorsqu’on utilise la chaux éteinte, des précipités de CaCO3 (pH 8 à 9) et de Mg(OH)2 (pH 9 à 11) se forment. Le potentiel zêta du CaCO3 est négatif et celui du MgO est positif, ceci étant vrai dans toute gamme de pH dans laquelle on les retrouve. Le bicarbonate de magnésium peut être employé comme coagulant, la vitesse de réaction de MgCO3 avec la chaux est plus rapide que celle du Mg(HCO3)2 avec la chaux (NEZLI, 2004). Sa mise en oeuvre technique implique une double précipitation de CaCO3 et la formation de calcium ce qui explique la diminution du rendement de l’ion calcium au-delà de 100 mg de chaux hydratée ajoutée selon les réactions :
Le calcium, lorsqu'il est présent en excès en présence d’un pH neutre, permet d'aboutir à la formation d'un précipité peu soluble qui est le carbonate de calcium, CaCO3. Ainsi, l'augmentation de la teneur initiale des ions calcium permet davantage la précipitation de ce composé (DJELLOULI et al., 2010). La détermination des structures au rayon X a été réalisée dont le but de confirmer l’hypothèse énoncée précédemment et de vérifier la présence de structures cristallines telle que CaCO3 (phase majeure) et d’autres telles que CaCl2 (phase en trace). Une nouvelle structure, C8H4CaO4.3H2O, le calcium téréphthalate trihydrate (phase en trace) est apparue comme illustré dans la figure 7.
Nos résultats sont conformes à ceux cités dans la littérature. Selon DEGRÉMONT (2005), la précipitation à la chaux est le procédé le plus utilisé dans le traitement pour adoucir l’eau en éliminant sa dureté. Sa mise en oeuvre est très simple – il suffit d’ajouter la chaux à l’eau afin de précipiter le CaCO3 (carbonate de calcium) ou Mg(OH)2 (hydroxyde de magnésium) (KEMMER, 1984).
La figure 8 montre que l’addition progressive de la chaux a entraîné l’augmentation du pH de la valeur de 7,9 à 11. On observe que le pH, avec la chaux comme adjuvant, est situé dans une zone totalement basique, car les réactions d’adoucissement sont réalisées à des valeurs de pH basiques. La zone optimale est caractérisée par le pH isoélectrique. Le pH augmente avec l’augmentation de la masse de la chaux. Ceci est dû à la nature des fonctions chimiques qui existent dans la structure de la chaux.
Pour la figure 9, on constate que le rendement d’élimination des paramètres (TAC et SO4) augmente jusqu'à la dose optimale de 50 mg de chaux et celui du chlorure augmente jusqu'à la dose optimale de 80 mg de chaux; au-delà de ces doses, il se produit l’effet inverse. Alors, dans les graphiques de cette figure, on peut voir une augmentation très marquée du rendement pour le TAC pour des doses de ≤ 50 mg de chaux, cette augmentation étant provoquée par la formation des précipités du carbonate et/ou du bicarbonate de calcium selon les réactions suivantes :
En revanche, si le dosage de la chaux est tel que le pH atteint 10,5, le magnésium quel que soit l’anion complémentaire, précipite sous forme de Mg(OH)2 (BEAUDRY, 1984) :
Pour les parties descendantes et stationnaires des courbes dans la figure 9, des reminéralisations sont apparues selon les réactions suivantes :
3.3 Évaluation des méthodes de traitement utilisées
Nous présentons dans la figure 10 ainsi que dans le tableau 3 les résultats des deux différents procédés testés. On peut aisément noter la différence entre ces deux méthodes, la coagulation-floculation par le sulfate d’aluminium et la précipitation à la chaux éteinte.
Le résultat des analyses des eaux traitées par les coagulants sulfate d’aluminium et la chaux montrent que l’on arrive à des rendements de potabilité pour une dose optimale de 220 mg∙L‑1 de sulfate d’aluminium à 50 % pour le TAC, et à des pourcentages inférieurs à cette valeur pour les autres paramètres. Pour une masse de 40 mg de chaux, on obtient des rendements de potabilité à 73 % et 75 % respectivement pour les sulfates et les bicarbonates, et avec 200 mg de chaux un rendement de 80 % pour le magnésium. Après le traitement par la chaux, les teneurs en sulfates des eaux du forage Boukhalfa deviennent proche de la valeur guide recommandée par l’OMS (250 mg∙L‑1). Les faibles taux d’abattement de chlorure (19 %) peuvent être expliqués par le fait que le précipité de magnésium associé à des ions sulfates est plus important que celui impliquant les ions chlorures. Les teneurs en calcium passent de 232 mg∙L‑1 avant traitement à des teneurs de 196 mg∙L‑1 ou de 168 mg∙L‑1, respectivement, en utilisant le sulfate d’aluminium et la chaux éteinte (Ca(OH)2). Ainsi, la dureté totale passe de 128 °f à 93 °f pour le traitement au sulfate d’aluminium et à 68 °f en utilisant la chaux. La dureté des eaux du forage Boukhalfa devient après traitement proche à la valeur guide recommandée par l’OMS (50 °f) par la décarbonatation à la chaux. Pour la quantité de résidus métalliques produits lors de la précipitation pour les deux procédés testés, la coagulation-floculation ou la précipitation à la chaux éteinte, le tableau 4 présente les quantités pour chaque précipité après filtration et séchage dans une étuve à 50 °C pendant 24 h. Les résultats obtenus montrent que la quantité produite lors de la précipitation à la chaux pour la dose optimale de 40 mg est inférieure à la masse précipitée lors de la précipitation au sulfate d’aluminium pour la dose optimale de 220 mg∙L‑1.
Afin de donner le coût de traitement pour les deux coagulants testés, les prix d’achat du sulfate d’aluminium et de la chaux éteinte sont représentés dans le tableau 5. Les résultats montrent que le coût de traitement par la chaux éteinte est moins cher et plus économique (2 euros par10 kg) par rapport au coût de traitement par le sulfate d’aluminium (15 euros par 10 kg).
4. Conclusion
Les deux procédés utilisés en vue d’une amélioration de la qualité de l’eau distribuée dans la région de Biskra montrent qu’on arrive à des rendements de potabilité acceptable pour une dose optimale de 220 mg∙L‑1 de sulfate d’aluminium, ces rendements étant de 50 % pour le TAC et inférieurs à cette valeur pour les autres paramètres. Pour une masse de 40 mg de chaux, on obtient des rendements de potabilité de 73 % et de 75 %, respectivement, pour les sulfates et les bicarbonates, et avec 200 mg de chaux on obtient un rendement de 80 % pour le magnésium. Les procédés de traitement expérimentés se complètent et nous suggérons le traitement des eaux de la région étudiée en utilisant de la chaux hydratée associée au sulfate d’aluminium pour un meilleur rendement et pour remédier aux changements du pH et de la teneur en bicarbonate.
Parties annexes
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