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Introduction

Il se crée présentement un consensus autour de l'idée que l'éducation des jeunes est une affaire de société. Selon plusieurs auteurs, l'école ne peut assumer seule la lourde tâche d'éduquer les jeunes; d'autres institutions éducatives doivent mettre l'épaule à la roue et collaborer de près avec l'institution scolaire (Carnegie council on adolescents development, 1994; Gardner, 1991; Lemerise, 1994). Tout en restant l'institution éducative centrale, l'école est appelée à devenir un point de jonction entre les différentes ressources et les divers contextes d'apprentissage disponibles dans une communauté. Déjà, dans divers pays occidentaux1, des alliances sont régulièrement créées entre les écoles et les autres institutions du milieu tels les musées, les bibliothèques, les médias ou les industries. Ces alliances ont généralement pour but d'offrir aux jeunes des environnements d'apprentissage riches et variés, complémentaires à ceux déjà offerts à l'école. L'établissement de relations de partenariat est jugé souhaitable puisqu'il permet, entre autres, de multiplier les portes d'accès au savoir, de contextualiser les apprentissages et de faciliter le transfert des connaissances d'un milieu d'apprentissage à un autre (Conseil supérieur de l'éducation, 1986; Fantini et Sinclair, 1985; Gardner, 1991).

Parmi les institutions non scolaires reconnues pour leur rôle éducatif, les musées occupent une place particulière. La complémentarité entre le musée et l'école est depuis longtemps reconnue autant par les chercheurs et théoriciens en éducation que par les spécialistes et les intervenants en milieu muséal (Allard et Boucher, 1991; American Association of Museums, 1992; Gardner, 1991). Plusieurs projets de collaboration entre le musée et l'école sont rapportés dans les publications récentes. Les projets répertoriés concernent tantôt le primaire, tantôt le secondaire (Allard, 1993; Allard et Boucher, 1991; Education Extra, 1999; Lemerise, 1998a, 1999). La petite histoire de la relation musées-écoles tend cependant à montrer que les enseignants[2] du primaire ont adhéré en plus grand nombre à l'orientation de partenariat avec les musées que ne l'ont fait leurs collègues du secondaire (Lemerise, 1995, À paraître). Quelques projets novateurs reposant sur un partenariat musées-écoles secondaires ont toutefois récemment vu le jour: des jeunes du secondaire suivent des cours au musée (Allen, 1997; Lemerise, 1999); d'autres reçoivent des crédits scolaires pour des stages réalisés en milieu muséal (Morton Weizman et Evenden, 1995); des groupes classes viennent à quelques reprises au musée pour mener des ateliers (Coiffard, 1995). Ces types de projets sont encore trop peu nombreux et plusieurs environnements scolaires ne sont pas prêts à y participer. Beaucoup de conditions doivent être mises en place avant qu'on puisse songer à en généraliser l'application à tous les établissements scolaires du secondaire. Concernant les projets de partenariat musées-écoles, il est clair que les enseignants constituent des acteurs clés. Il est donc important de connaître leurs perceptions, leurs intérêts et leurs attentes face aux musées, si l'on désire promouvoir des liens plus étroits et plus fréquents entre les deux institutions. Selon nous, encore très peu d'études ont été réalisées auprès de la cohorte des enseignants du secondaire sur la question du partenariat avec les musées. Comment ces enseignants perçoivent-ils les musées? Quel rôle leur accordent-ils dans le processus d'apprentissage de leurs élèves? Quels types de besoins ou d'attentes ont-ils face aux musées? Quelles sont leurs pratiques actuelles de visite avec leurs groupes classes? Pour quelles raisons utilisent-ils ou n'utilisent-ils pas les musées? Autant de questions auxquelles il est important d'apporter des réponses si l'on veut que le partenariat musées-écoles secondaires s'appuie sur les attentes, les besoins et les intérêts des principales personnes concernées.

Une récente recension d'écrits sur la question de la relation que les enseignants du secondaire entretiennent avec les musées s'est soldée par une maigre récolte. Pour la période allant du début des années 1990 à nos jours, seules sept études ont été répertoriées. Les données en provenance des enseignants sont donc rarissimes. Le volet[3] du projet d'enquête3 de l'équipe de Lemerise s'adresse directement à ce groupe et son objectif est d'étudier la relation que les enseignants du Québec entretiennent avec les musées dans le cadre de leur travail. Le présent article fait état des résultats obtenus dans la première phase de ce troisième volet d'enquête[4]. Avant de décrire notre étude plus en détail, il convient de rappeler brièvement les données disponibles quant aux perceptions et aux attitudes des enseignants du secondaire concernant le partenariat musées-écoles.

Les enseignants du secondaire et les musées

Les études recensées abordent tantôt la question des intérêts, des besoins et des attentes des enseignants du secondaire face aux musées, tantôt celle de leurs habitudes de visite avec leurs groupes d'élèves.

Intérêts, besoins et attentes des enseignants du secondaire face au musée

Eidelman, Peignoux et Bergeron (1997) rapportent les propos d'enseignants du secondaire et du primaire réunis pour échanger en groupes de discussion. Les enseignants expriment clairement leurs souhaits et leurs attentes concernant l'implantation prochaine d'un nouveau centre de culture scientifique dans leur région. Ils s'attendent à ce que le nouveau musée aborde des thèmes de la vie quotidienne qui font réfléchir les élèves. Ils souhaitent aussi que les activités proposées soient concrètes, en lien avec le curriculum et animées par des experts que les jeunes peuvent voir en action et qu'ils peuvent questionner. Dans une étude menée par la Cité des sciences et de l'industrie (1993), des accompagnateurs de groupes scolaires dont un sous-groupe est composé d'enseignants du secondaire, sont interrogés relativement à leurs attentes et à leurs besoins dans le cadre de leurs visites. Parmi les recommandations formulées, trois concernent particulièrement la population adolescente. Les accompagnateurs souhaitent 1) que certaines des activités et animations proposées soient spécifiquement conçues pour les adolescents et qu'elles soient courtes et souples; 2) que plus d'un parcours de l'exposition ou du musée soit proposé, et ce, dans le but de mieux répondre au besoin d'autonomie des jeunes; 3) que la préparation de la visite soit toujours très soignée. Clive et Geggie (1998) étudient, quant à eux, les différents modes d'utilisation que font ou pourraient faire les enseignants des documents pédagogiques mis à leur disposition par chaque musée. Les enseignants du secondaire souhaitent des brochures conçues en prévision d'une utilisation par les jeunes eux-mêmes pour préparer, en classe, leur visite au musée ou encore des documents qui leur fournissent des informations difficilement accessibles autrement.

La présence au musée des enseignants du secondaire

Seulement quatre études font état des fréquences de visite au musée telles que rapportées par les enseignants eux-mêmes[5]. Hooper-Greenhill (1991) commente une étude de l'ILEA[6] dans laquelle 41 représentants d'écoles secondaires londoniennes répondent à un questionnaire sur les visites au musée. Trente-neuf pour cent (39%) des écoles répondantes rapportent avoir organisé d'une à cinq sorties au cours de la dernière année et 61% signalent en avoir organisé de six à quinze. Ces données correspondent évidemment aux fréquences de visite par institution; elles ne traduisent pas des pratiques individuelles, mais des pratiques de visite annuelles à l'échelle de toute une école. Trois autres études questionnent directement les enseignants. Schaub (1994) énonce les données d'une enquête commandée par le Direction des musées de France. Au total, 189 enseignants d'écoles primaires, de collèges et de lycées parisiens, répondent au questionnaire proposé. Les données révèlent que 70% des répondants des collèges et 60% de leurs homologues des lycées ont déjà organisé au moins une sortie dans un musée[7]. Aux États-Unis, Stone (1993) décrit les réponses de 540 spécialistes en arts plastiques au secondaire, à la suite d'un questionnaire, acheminé par la poste, de leur association nationale. Soixante-sept pour cent (67%) des répondants disent avoir recouru aux services ou aux tours guidés des musées au cours de la dernière année et 42% rapportent avoir emprunté du matériel éducatif à plus d'une reprise. Enfin, Peignoux et Eidelman (1998) ont mené une consultation auprès d'enseignants du secondaire et du primaire de la région des Pyrénées. Les autrices indiquent que parmi les répondants du secondaire (n=65), 86% disent avoir visité un musée avec leurs élèves durant la dernière année. L'équipe de Lemerise à l'Université du Québec à Montréal consacre son troisième et dernier volet d'enquête aux enseignants du secondaire. Ce volet intitulé «À travers l'oeil des enseignants et des enseignantes du secondaire» tente de faire le point sur les perceptions, les intérêts et les habitudes de visite au musée des enseignants québécois du secondaire. Il vise aussi à recueillir leurs propos et leurs suggestions sur le partenariat entre les musées et les écoles secondaires.

Méthodologie

Le questionnaire

Le questionnaire utilisé dans ce troisième volet d'enquête s'inspire de ceux déjà construits pour les volets 1 et 2 (Lemerise, 1998b; Lemerise et Soucy, 1999), et de questionnaires conçus par d'autres chercheurs oeuvrant dans le domaine (Cohen, 1998; Peignoux et Eidelman, 1998; Stone, 1993).

La version initiale du questionnaire a été soumise à une trentaine d'experts pour analyse critique. Grâce aux commentaires qu'ils ont formulés, des changements sont apportés et une nouvelle version de l'outil est proposée. Cette version est préexpérimentée auprès d'une trentaine d'enseignants. Les commentaires ainsi recueillis permettent de reformuler certaines questions. De plus, à la suite des observations émises par quelques répondants concernant le temps requis pour remplir le questionnaire (une trentaine de minutes), deux versions sont offertes aux répondants: la version intégrale comprend 28 questions et la version abrégée ne retient que 6 des 28 questions[8]. Les 6 questions retenues pour la version abrégée sont choisies en fonction de leur pertinence par rapport à la problématique étudiée et de leurs propriétés discriminantes vérifiées lors de la préexpérimentation.

Le questionnaire doit être rempli individuellement par écrit. La plupart des questions sont à choix de réponses (échelle de type Likert, mise en ordre de préférence, choix de réponses multiples). Parfois, les répondants sont invités à justifier leur réponse. Cinq questions requièrent des réponses écrites.

Le questionnaire se divise en quatre grandes sections. La première section porte sur les perceptions du rôle éducatif des musées et sur la nature des informations muséales disponibles en milieu scolaire; elle compte 15 questions (par exemple, Le musée est-il, selon vous, un environnement d'apprentissage? À votre école, les enseignants montrent-ils de l'intérêt pour des projets de partenariat avec les musées?). La deuxième section examine, au moyen de 7 questions, les intérêts et les préférences muséales des enseignants (par exemple, Quel type de musées seriez-vous le plus enclin à fréquenter? Quels objectifs souhaiteriez-vous atteindre lors d'une visite au musée? Indiquez votre niveau d'intérêt pour différents projets muséaux.). La troisième section porte sur les habitudes de visite au musée depuis les cinq dernières années; elle comporte 3 questions (par exemple, Au cours des cinq dernières années, avez-vous participé à des sorties ou à des projets au musée avec vos élèves? Quelles raisons vous incitent à participer à des visites au musée? Quelles raisons expliquent le fait que vous n'ayez pas participé à des sorties ou à des projets au musée?). Enfin, la quatrième section vise à recueillir les points de vue des enseignants quant à l'intérêt et à la faisabilité d'implanter, au Québec, des projets de partenariat musées-écoles secondaires. Cette section contient trois questions dites à développement (par exemple, Y a-t-il un intérêt pour des projets de partenariat? Quels moyens sont à mettre en oeuvre pour favoriser une meilleure collaboration musées-écoles secondaires?).

La procédure de distribution des questionnaires

Pour cette toute première phase du volet 3, 16 écoles secondaires francophones de la région de Montréal sont sollicitées. Les écoles participantes comptent plus de 800 élèves et sont situées en milieu socioéconomique moyen ou pauvre (Conseil scolaire de l'Île de Montréal, 1994).

Dans chaque école, une personne-ressource est nommée par la direction pour assurer la diffusion, auprès des enseignants, de tous les documents liés au projet[9]. Les questionnaires, accompagnés d'une lettre décrivant les objectifs du projet sont distribués aux enseignants des 16 écoles. Ceux-ci disposent de huit à dix jours pour répondre au questionnaire. Après ce délai, un rappel vient encourager ceux qui n'ont pas encore répondu. Les questionnaires remplis sont remis à la personne-ressource de chaque école et le chercheur principal les recueille auprès de celles-ci.

Les répondants

Au total, 202 questionnaires sont retournés. Le tableau 1 résume les principales caractéristiques des répondants. L'échantillon comprend des enseignants de différentes matières et de divers niveaux. La plupart enseignent au régulier (72%); les autres travaillent en classe d'accueil (9%) ou en cheminement particulier (17%). Plus de la moitié (60%) ont moins de 20 ans d'expérience au secondaire, 30% ont de 20 à 40 ans d'expérience (10% n'ont pas répondu à cette question).

Tableau 1

Description de l'échantillon

Description de l'échantillon

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Au total, 994 questionnaires sont remis aux différentes personnes-ressources des 16 écoles participantes. De ce nombre, 202 sont retournés dûment complétés. Ainsi, le taux de réponse théorique[10] est de 20%.

Résultats

Différents types d'analyses sont appliqués aux données recueillies. À la base, des analyses descriptives (fréquences et proportions) sont utilisées. Des croisements de données et des analyses corrélationnelles sont occasionnellement réalisés. Enfin, des analyses non paramétriques, de type chi-carré, sont effectuées afin de vérifier la présence de différences significatives en lien avec certaines variables jugées susceptibles d'influencer la nature des réponses (par exemple, le sexe, la matière enseignée, le nombre d'années d'expérience). Une analyse de contenu manifeste est appliquée aux questions à développement. Le présent article trace un tableau des données jugées les plus importantes. Les données détaillées pour l'ensemble des 28 questions sont présentées dans Matias et Lemerise (2000).

La perception du rôle des musées en éducation

Le musée: un lieu d'apprentissage

La presque totalité des répondants (96%) considère que le musée est un environnement d'apprentissage (67% totalement d'accord, 29% assez d'accord). Un grand nombre (94%) juge aussi que le musée est un environnement intéressant pour consolider les enseignements faits en classe (53% totalement d'accord, 41% assez d'accord). Un plus petit pourcentage de répondants (60%) accorde au musée un statut d'environnement d'apprentissage au même titre que l'école (16% totalement d'accord, 44% assez d'accord). En ce qui concerne ce dernier énoncé, une différence significative observée en fonction de l'expérience d'enseignement (χ2= 20,107; dl=9; p=0,02). Les enseignants de moins de 10 ans d'expérience sont moins en accord que les autres avec l'idée que le musée est un environnement d'apprentissage au même titre que l'école. Les enseignants de plus de 30 ans d'expérience sont plus en accord avec un tel énoncé.

L'importance de participer à des sorties au musée

Quarante-trois pour cent (43%) des répondants jugent qu'il est primordial de participer à des activités au musée, 56% rapportent que cela est intéressant sans que ce soit primordial et 1% des répondants trouvent que les visites au musée ne sont aucunement souhaitables. Les raisons le plus souvent évoquées à l'appui des réponses favorables à des visites sont: a) l'importance de sensibiliser les jeunes à la culture et à l'art; b) la reconnaissance de l'apport du musée à l'enseignement et à l'apprentissage; c) l'impact positif de la visite au musée sur la motivation et la curiosité des adolescents; d) l'ouverture sur le monde et la transmission des valeurs qu'une visite peut susciter. Notons que 10% des répondants soulignent et maintiennent l'intérêt de visiter un musée malgré la présence de facteurs qui, à l'école, rendent difficile la réalisation de ces visites (par exemple, problèmes liés aux coûts, difficultés concrètes d'organisation, lourdeur des curriculums, etc.).

La pertinence et l'intérêt des projets offerts par les musées

Pour un peu plus du tiers des répondants (38%), les projets offerts aux groupes du secondaire correspondent aux intérêts des élèves: 28% affirment que les projets rejoignent peu les intérêts de ces derniers et 1% estiment que le musée n'est aucunement lié aux intérêts des élèves. Le tiers restant (33%) rapporte ne pas savoir. En ce qui concerne les besoins des enseignants, 40% jugent que les musées offrent des activités bien adaptées à leurs besoins: 32% ne peuvent se prononcer et 27% disent que les programmes offerts ne correspondent pas à leurs besoins. Le taux de corrélation entre ces deux dernières questions est assez élevé (γ=0,82): les répondants qui estiment que les projets muséaux correspondent aux intérêts des adolescents jugent qu'ils correspondent aussi à leurs propres besoins.

L'intérêt des collègues et de la direction pour le partenariat musées-écoles secondaires

Les deux tiers des répondants perçoivent, chez leurs collègues, de l'intérêt pour des projets de partenariat avec les musées (16% beaucoup d'intérêt; 51% moyennement d'intérêt). L'autre tiers estime plutôt que leurs collègues ont peu (31%) ou pas d'intérêt (2%) pour ce genre de projets. Du côté de la direction d'école, plus des trois quarts des répondants (78%) jugent que leur direction démontrera de l'enthousiasme si des enseignants souhaitent s'impliquer dans des projets de partenariat avec le musée; 20% signalent que leur direction sera tolérante et 2% estiment qu'elle en sera plutôt agacée.

Les intérêts et les préférences concernant les musées

Les types de musées préférés

Six types d'institutions muséales sont proposés comme choix de réponses. On demande aux répondants d'identifier ceux qu'ils seraient le plus enclins à fréquenter avec leurs groupes d'élèves (donnant la cote 1 au type de musées préférés et la cote 6 au moins pertinent pour eux et leurs élèves). Les musées d'histoire et d'archéologie occupent, ex aequo, la première place au palmarès avec une cote moyenne de 2,5. Les musées de sciences naturelles et ceux de sciences pures se partagent la seconde place (2,9); suivent les musées d'art (3,6) et les centres d'interprétation (3,7). Enfin, les centres d'exposition sont au dernier rang des préférences (4,5). L'analyse croisée des données indique un lien étroit, mais non exclusif, entre la matière enseignée et le musée préféré. En général, les enseignants préfèrent conduire leurs élèves dans des musées directement liés à la matière enseignée. Il arrive toutefois qu'ils choisissent des musées aucunement liés à la matière enseignée. Les enseignants de langues (français et anglais) accordent leurs préférences aux musées d'art et aux musées d'histoire. De même, mais le phénomène est plus rare, des enseignants de sciences optent pour des visites en musées d'art ou d'histoire.

Les objectifs visés par les enseignants dans le cadre d'une visite

À la question sur les objectifs que les enseignants souhaitent ou souhaiteraient réaliser dans le cadre d'une visite au musée, les répondants doivent de nouveau donner une cote de 1 à 6 à une série d'objectifs suggérés[11]. Les enseignants privilégient des objectifs reliés au curriculum scolaire (cote moyenne de 2,2) de même que ceux reliés au développement général de l'élève (2,4). L'objectif le moins prisé (4,8) est celui de détente (sortir pour le plaisir ou le divertissement).

Les modalités de visite préférée

Cinq grandes modalités de visite sont décrites; les répondants doivent attribuer des cotes à chacune (1 à 5). Les visites guidées par un animateur du musée (1,8) et les activités à court terme conçues pour les élèves du secondaire (1,9) sont les modalités privilégiées. Les projets à plus long terme impliquant une collaboration continue avec les musées (par exemple, la création d'oeuvres pour une exposition au musée ou la participation à un événement relié à une exposition) sont moyennement populaires (3,1). La visite guidée par l'enseignant ou encore les visites libres – où les élèves sont appelés à visiter librement le musée pour partager ensuite leurs découvertes et leur appréciation – sont les options les moins prisées (3,7 chacune).

Les sorties au musée avec les élèves

Les pratiques de visite au musée depuis les cinq dernières années

La figure 1 reproduit les taux de fréquentation rapportés. Un peu moins de la moitié des répondants (47%) signale avoir effectué au moins une visite au musée au cours des cinq dernières années.

Figure 1

Distribution des enseignants selon les pratiques de visite rapportées au cours des 5 dernières années et selon les niveaux de satisfaction exprimés par les enseignants visiteurs

Distribution des enseignants selon les pratiques de visite rapportées au cours des 5 dernières années et selon les niveaux de satisfaction exprimés par les enseignants visiteurs

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Douze pour cent (12%) des répondants rapportent y être allés 1 fois, 16% de 2 à 3 fois et 19%, 4 visites ou plus. La moitié des répondants (50%) ne rapporte aucune sortie; 3% s'abstiennent de répondre. La quasi-totalité des répondants (90%) qui ont fréquenté un ou des musées se déclarent satisfaits de leur visite: 44% sont très satisfaits et 46%, satisfaits; 8% sont peu satisfaits et 2% très peu satisfaits. Les habitudes de visite varient en fonction des matières enseignées [χ2=29,366; dl=5; p<0,01]. Les enseignants en arts rapportent aller significativement plus souvent au musée avec leurs élèves que leurs collègues enseignant d'autres matières. Ceux qui enseignent des matières relevant des sciences humaines et sociales sont plus nombreux à répondre qu'ils ne fréquentent pas les musées.

Les raisons justifiant la participation à des visites au musée

Une liste de neuf éléments représentant des raisons susceptibles de justifier la participation à des visites au musée est proposée aux répondants ayant préalablement rapporté avoir fait des visites au cours des dernières années. Les répondants peuvent cocher ou ajouter autant d'éléments justificatifs qu'ils le souhaitent. Les cinq éléments les plus fréquemment choisis sont en ordre décroissant de fréquences rapportées: a) l'importance pour les élèves d'expérimenter d'autres environnements d'apprentissage que l'école; b) l'aide que peut apporter le musée à la compréhension de ce qui est enseigné en classe; c) la présence au musée de ressources que l'école ne possède pas; d) l'offre d'activités qui favorisent l'apprentissage d'habiletés telles l'observation, l'analyse, l'expérimentation et la discussion; e) la possibilité pour les élèves d'apprendre dans plusieurs domaines ou sur plusieurs sujets.

Les raisons justifiant la non-participation à des visites au musée

Une liste de treize éléments susceptibles d'expliquer la non-participation à des visites au musée est parallèlement proposée à ceux qui n'ont signalé aucune visite durant les cinq dernières années. Aussi, plusieurs réponses peuvent être cochées ou ajoutées au besoin. L'élément le plus fréquent est le manque d'information sur les activités offertes dans les musées. Puis, en ordre décroissant de fréquences, on trouve les coûts de sortie trop élevés, le manque d'appui des collègues, des curriculums scolaires déjà chargés, la difficulté de planifier et d'organiser de telles visites.

Les pratiques passées et les perspectives d'avenir

Les enseignants du secondaire ont-ils augmenté, diminué ou maintenu leurs habitudes de visite au musée depuis qu'ils sont en poste? Et à l'avenir, souhaitent-ils hausser, diminuer ou maintenir leurs habitudes de visite avec leurs élèves? Assez peu d'enseignants (17%) affirment avoir haussé la fréquence de leurs visites depuis leur entrée en fonction au secondaire. Ils sont plus nombreux à avoir diminué (39%), ou maintenu (44%) leur rythme de fréquentation. Quant à leur souhait pour l'avenir, 80% désirent augmenter leur fréquence de sorties; 18% désirent la maintenir au niveau actuel et 2% annoncent vouloir la diminuer.

L'analyse croisée des données sur les tendances passées et sur les perspectives d'avenir montre que parmi les 80% de répondants qui souhaitent hausser leur fréquence de visites, 67% sont des enseignants qui, dans le passé, ont maintenu stable ou diminué leur taux de visites au musée. Seulement 3% des répondants déclarant des tendances passées à la baisse, désirent toujours les maintenir ainsi dans le futur. Le croisement des données permet aussi de déceler des différences significatives concernant les tendances passées en fonction du nombre d'années d'expérience et du sexe des répondants. La majorité des enseignants plus expérimentés affirment avoir diminué leur pratique de visites, ceux de moins de 10 ans d'expérience sont plus nombreux à avoir maintenu leur taux stable (χ2=23,76; dl=6; p<0,01). Les enseignantes déclarent une augmentation du taux de visites alors que les hommes, en plus grand nombre, signalent une diminution (χ2=6,131; dl=2; p<0,05).

Le partenariat en éducation: réflexions et suggestions

L'intérêt pour un partenariat entre les musées et les écoles secondaires

Plus de 150 des 202 enseignants participants ont répondu à la question concernant l'intérêt pour des projets de partenariat musées-écoles. L'analyse des réponses est réalisée en deux temps. Dans un premier temps, les réponses sont classées en deux catégories: celle traduisant un intérêt pour des projets de partenariat avec les musées et celle signalant peu ou pas d'intérêt. Dans un second temps, les principales raisons à l'appui d'un intérêt (ou non) pour le partenariat sont identifiées par un codage libre. Les réponses sont regroupées en catégories et ces dernières, à leur tour, en supracatégories. Un contrecodage est effectué par deux juges indépendants pour s'assurer de la clarté des catégories initialement proposées.

La grande majorité des répondants (91%) souligne l'intérêt de créer des liens de partenariat entre les musées et les écoles secondaires. Parmi ceux-ci, un faible taux (8%) émet toutefois des réserves, voire un certain pessimisme quant à la possibilité de réaliser de tels projets dans le contexte scolaire actuel. Seuls 9% des répondants ne manifestent aucun intérêt à développer des projets de partenariat musées-écoles. Dans cet article, nous présentons seulement les raisons évoquées à l'appui d'un intérêt pour le partenariat. Les raisons les plus fréquemment mentionnées relèvent de l'une ou l'autre des catégories suivantes: a) cela est favorable aux apprentissages des élèves (25%); b) cela est un atout dans le processus de développement des jeunes (22%); c) cela est intéressant pour l'enseignement et les enseignants (20%); d) cela offre la possibilité de fréquenter un autre environnement d'apprentissage (8%); e) cela est favorable aux musées (8%).

Le tableau 2 dresse la liste de ces catégories et des principales sous-catégories de réponses obtenues. Il identifie également les trois supracatégories permettant de regrouper l'ensemble des réponses. Globalement, les enseignants qui jugent positivement les projets de partenariat musées-écoles secondaires, font référence à l'intérêt que cela représente pour les élèves, pour les écoles, ou pour les musées.

Discussion

Avant de procéder à la synthèse des données recueillies et de passer à la discussion proprement dite, il convient de souligner certaines limites méthodologiques de la présente étude.

Quelques limites de la présente phase de l'enquête

Les enseignants sollicités sont uniquement de la région de Montréal; ceux des autres régions du Québec seront sollicités dans une seconde phase. Le nombre de répondants au questionnaire est relativement petit compte tenu du nombre de questionnaires distribués. Le taux de réponses (théorique) est de 20%, un taux relativement faible par rapport à celui rapporté (62%) par Stone (1993), mais par ailleurs supérieur à celui des autres enquêtes (15% chez Schaub, 1994; 11% chez Clive et Geggie, 1998).

Tableau 2

Catégories et supracatégories identifiées à partir des réponses d'enseignants favorables à l'implantation de projets de partenariat musées-écoles secondaires

Catégories et supracatégories identifiées à partir des réponses d'enseignants favorables à l'implantation de projets de partenariat musées-écoles secondaires

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Il convient aussi de rappeler que certaines caractéristiques de l'échantillon ne correspondent pas nécessairement à celles de la population enseignante du Québec. Par exemple, selon les données récentes du ministère de l'Éducation (1997a), le nombre moyen d'années d'expérience des enseignants au secondaire est de 21,3 ans. Le nombre moyen d'années d'expérience de notre échantillon est de 14,4 ans. Notre échantillon correspond donc à une population d'enseignants plus jeunes ou, à tout le moins, plus récemment en poste que la moyenne de la population enseignante du Québec (43% des répondants ont moins de 10 années d'expérience en enseignement au secondaire). Une telle caractéristique a pu avoir un effet sur les réponses obtenues. Eildelman et Peignoux (1993) et Peignoux et Eidelman (1998) notent à ce sujet que les enseignants en début de carrière ont tendance à moins sortir avec leurs élèves, étant trop occupés à maîtriser leur nouveau métier.

Pour toutes les raisons mentionnées plus haut, le présent échantillon ne peut pas être représentatif de la population québécoise des enseignants du secondaire. Toutefois, la présente étude ne reflète pas moins les points de vue de 202 enseignants présentant des caractéristiques diversifiées: répondants des deux sexes; enseignants des cinq niveaux d'enseignement au secondaire; spécialistes de différentes matières scolaires; enseignants de divers échelons d'ancienneté; etc. De plus, les points de vue colligés ne proviennent pas uniquement d'utilisateurs fidèles des musées (plus de 50% des répondants n'ont pas visité un musée avec leurs élèves depuis les cinq dernières années). Les données rapportées proviennent d'une population variée et sont à cet égard garantes d'une certaine validité. C'est à ce titre que, dans les sections subséquentes, elles sont brièvement rappelées aux lecteurs. De plus, elles sont discutées à la lumière des quelques rares données provenant d'autres études menées auprès d'enseignants du secondaire.

Les perceptions, les intérêts et les attentes des enseignants: synthèse et discussion

La majorité des répondants à l'enquête ont une conception positive du rôle éducatif des musées. Ils leur attribuent des fonctions éducatives importantes en lien avec l'apprentissage et le développement des élèves ainsi qu'avec l'enseignement. Au regard de l'apprentissage et du développement, les répondants reconnaissent que la visite au musée permet de contextualiser ce qui est abordé en classe, d'établir des liens entre différents apprentissages (réalisés en classe et à l'extérieur de la classe), de développer des habiletés cognitives et sociales importantes. Ils soulignent aussi que ces visites ajoutent une dimension différente au processus d'apprentissage, en le rendant plus vivant et plus motivant pour les jeunes. Enfin, comme plusieurs le mentionnent, c'est une ouverture aux arts et à la culture. Au regard de l'enseignement, les musées offrent, selon les répondants, la possibilité de diversifier les environnements d'apprentissage, de concrétiser les enseignements théoriques et de rendre plus accessibles certaines ressources non disponibles dans les écoles.

Ces données québécoises confirment globalement celles rapportées dans les études françaises (Cité des sciences et de l'industrie, 1993; Eidelman et al., 1997; Peignoux et Eidelman, 1998). Les répondants québécois et français sont en effet d'accord avec l'idée que le musée est un environnement d'apprentissage complémentaire à l'école, susceptible d'offrir des activités concrètes liées aux programmes scolaires et à la vie quotidienne. Par ailleurs, même si plusieurs répondants de l'enquête québécoise considèrent les musées comme des environnements ouverts et stimulants, la plupart semblent plutôt privilégier une participation à des activités encadrées (visite avec guide, atelier avec un expert, activité en lien avec le curriculum). Les enseignants accompagnateurs français (Cité des sciences et de l'industrie, 1993) demandent plutôt la mise en place de parcours multiples et flexibles qui répondent mieux au besoin de choix et d'autonomie des adolescents.

D'autres résultats de notre étude qui ne figurent pas dans la documentation méritent d'être mentionnés. Plusieurs répondants rapportent percevoir de l'intérêt pour le partenariat musées-écoles secondaires auprès de leurs collègues et de leur direction. Le tiers des répondants estime que les projets muséaux qu'ils connaissent correspondent bien à leurs attentes et à celles des élèves. Un autre tiers avoue ne pas suffisamment connaître les projets pour se prononcer. Enfin, pour un dernier tiers, les projets muséaux sont jugés peu liés à leurs intérêts ou à ceux de leurs élèves. Le croisement des données indique que l'évaluation plus négative faite par ce dernier tiers n'est pas en lien avec leurs habitudes de visite. Un nombre équivalent d'enseignants visiteurs et non visiteurs notent le peu de liens entre l'offre muséale et les intérêts des utilisateurs scolaires. Un phénomène analogue est observé chez le tiers qui juge l'offre des musées plus en lien avec leurs besoins ou ceux de leurs élèves.

Les habitudes de visite des enseignants: synthèse et discussion

Les taux de fréquentation rapportés par les enseignants montréalais sont assez faibles (seuls 47% des enseignants ont visité au moins une fois le musée au cours des cinq dernières années et parmi ceux-ci, 12% n'ont fait qu'une seule visite). Les raisons invoquées à l'appui de ces faibles taux d'utilisation sont principalement d'ordre logistique: le peu d'information disponible à l'école sur les activités offertes aux jeunes par les musées, la structure de la grille horaire au secondaire, la lourdeur des curriculums et les coûts élevés de déplacement. Ces contraintes semblent aussi influencer le choix du milieu visité ainsi que le type d'activités chaque fois privilégié: les enseignants choisissent surtout de visiter les musées dont les thématiques sont en lien direct avec la matière enseignée et favorisent des activités de courte durée dont les objectifs sont en lien avec les curriculums scolaires. En dépit des difficultés vécues lors de la planification d'une sortie au musée, les enseignants n'en déclarent pas moins un niveau de satisfaction assez élevé lors de la visite. Malgré une tendance passée à maintenir une stabilité dans leurs habitudes de visite, les enseignants expriment clairement le souhait de pouvoir augmenter éventuellement leur présence dans les musées. Enfin, la majorité des répondants reconnaît l'intérêt de développer un lien plus étroit entre les musées et les écoles secondaires; un lien de partenariat qui, selon eux, profitera aux élèves, aux enseignants, aux écoles et aux musées.

Comparativement à leurs homologues français ou américains, les enseignants québécois ont de faibles taux d'utilisation des musées. Ici, moins de 50% des enseignants disent avoir fréquenté les musées durant les cinq dernières années; en France, 86% des enseignants, selon Peignoux et Eidelman (1998), rapportent une visite durant la dernière année et entre 75% et 60%, selon Schaub (1994). Stone (1993) rapporte des taux presque aussi élevés (67%) aux États-Unis. Devant ces données, on est en droit de s'étonner du grand écart observé entre les pratiques de visite des enseignants québécois et des enseignants français ou américains; d'autant plus que les obstacles liés à la rigidité de la grille horaire, aux coûts de déplacement ou aux curriculums déjà trop chargés, sont aussi évoqués par chacun des autres chercheurs (Eidelman et al., 1997; Peignoux et Eidelman, 1998; Schaub, 1994; Stone, 1993).

Il est trop tôt pour porter un jugement définitif sur ce décalage observé dans les pratiques de visite des uns et des autres. Les données présentement disponibles, qu'elles soient québécoises, françaises ou américaines, sont en effet tirées d'études encore très exploratoires. En général, les échantillons des études citées sont petits, locaux et non représentatifs des populations d'enseignants. De plus, chaque étude présente ses limites spécifiques. Celles reliées à la présente étude sont précisées plus haut. Une limite propre à l'étude de Stone (1993) est de s'adresser uniquement à des enseignants en arts, une cohorte ayant déjà la réputation d'être particulièrement active quant aux sorties culturelles (AQESAP, 1999). Les données de notre étude vont aussi dans ce sens (les pratiques de visite des enseignants en arts sont significativement plus élevées que celles rapportées par les enseignants des autres matières). Chez Peignoux et Eidelman (1998), les répondants du secondaire sont non seulement peu nombreux (n=69), mais ils font partie, comme le soulignent les autrices, «d'un échantillon représentatif d'enseignants mobilisés par rapport à la question de la sortie au musée» (Peignoux et Eidelman, 1998, p. 6). Enfin, chez Schaub (1994), l'échantillon de répondants est également assez petit (n=167); de plus, la question posée «Organisez-vous des sorties dans les musées? Si oui, Combien?» (Schaub, 1992, en annexe) rend difficile l'interprétation des réponses fournies. Les enseignants répondent-ils ici en fonction de la dernière année, en fonction des deux ou trois années précédentes, voire des cinq ou dix dernières années? Toutes ces réserves méthodologiques évoquées pour l'une ou l'autre des études disponibles appellent évidemment à la prudence pour toute comparaison des pratiques de visite québécoises, françaises ou autres.

À défaut de pouvoir tirer des conclusions définitives, il y a malgré tout matière à s'interroger, voire à s'inquiéter face aux taux d'utilisation particulièrement faibles des enseignants montréalais du secondaire. De toute évidence, les données de l'enquête traduisent une sous-utilisation des environnements muséaux. Ce constat est d'autant plus troublant qu'une grande proportion des répondants à notre enquête jugent favorablement le rôle éducatif des musées et émettent le souhait de pouvoir utiliser plus souvent ces institutions dans l'avenir. Une sérieuse réflexion s'impose, selon nous, quant aux moyens à mettre en oeuvre pour favoriser au Québec la création de liens de partenariat stables et solides entre les musées et les écoles secondaires.

Conclusion

La présente conclusion se veut un regard optimiste sur les perspectives d'avenir pour un partenariat musées-écoles secondaires au Québec. Différentes initiatives récemment implantées ou en voie d'implantation, permettent d'anticiper un avenir plus favorable à l'émergence et à la consolidation de ce type de partenariats. À titre de premier exemple, rappelons la récente collaboration de la Société des musées québécois et du ministère de la Culture et des Communications, qui a mené à l'élaboration de la toute première politique muséale au Québec (Ministère de la Culture et des Communications, 2000). Puis, du côté de l'éducation, la réforme en cours des programmes scolaires – dont l'implantation au secondaire est prévue pour 2003 – donne un appui de taille au partenariat de l'école avec d'autres institutions de la communauté. Cette réforme ne vise-t-elle pas, entre autres objectifs, à assurer l'intégration de la dimension culturelle dans les disciplines scolaires et à favoriser l'utilisation, par l'école, des ressources culturelles de la communauté (Ministère de l'Éducation, 1999). D'autre part, du côté du musée, un nouveau courant projeunes est venu stimuler le contexte muséal québécois et a directement influencé le développement de nouveaux projets dédiés aux 12-17 ans (Lemerise, 1998a; 1998b). Les musées de la Civilisation à Québec, Pointe à Callière à Montréal ou encore le Centre canadien d'architecture à Montréal, pour ne mentionner que ceux-là, ont récemment proposé des projets impliquant une étroite collaboration avec des groupes classes du secondaire. Rappelons ce projet pour lequel les adolescents ont construit en classe des marionnettes géantes et sont venus les installer au musée dans le cadre d'une exposition dédiée aux jeunes; ou encore ce projet dans lequel des adolescents ont élaboré avec l'aide de leur enseignant en informatique et en français, un site web sur la drogue qu'ils ont mis à la disposition des visiteurs dans le cadre d'une exposition sur le même thème. Dans d'autres contextes, des jeunes sont appelés à tenir des rôles d'archéologues, d'artistes ou d'architectes et présentent au musée ou à l'école le fruit de leur travail et de leurs découvertes. Ces initiatives traduisent bien le nouveau courant projeunes qui est en voie de s'installer dans plusieurs musées québécois. Elles illustrent bien aux enseignants d'ici la variété des contextes d'apprentissage qu'un organisme tel que le musée peut offrir aux jeunes du secondaire. Enfin, comme dernier exemple d'initiatives récentes prises en faveur de la consolidation du lien musées-écoles, mentionnons le programme «Soutenir l'école montréalaise» (Ministère de l'Éducation, 1997b). Ce programme a pour but d'aider les enseignants à mettre sur pied des projets susceptibles d'améliorer la réussite scolaire des jeunes provenant de milieux défavorisés de l'Île de Montréal. Parmi les projets déjà développés, plusieurs sont en lien avec la communauté dans laquelle vivent les jeunes et parmi ces projets, certains sont en lien avec des institutions muséales de la métropole. Quelques écoles secondaires ont déjà profité des supports financiers et logistiques offerts et ont pu ainsi participer à des projets de partenariat avec les musées (Lemerise, 2000; Ministère de l'Éducation, 2000).

Ces initiatives traduisent des efforts certains pour instaurer au Québec des politiques et des programmes facilitant la création de projets de partenariat musées-écoles. Ces projets visent à aider la cause des apprenants et celle des enseignants.