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Destiné aux personnels scolaires, ce traité aborde tous les aspects de la diversité susceptibles d’intéresser les directions d’école, les enseignants et toutes les personnes jouant un rôle dans le système d’éducation au Québec aujourd’hui. L’ouvrage est divisé en vingt-trois chapitres, dont la rédaction a été confiée à des spécialistes, pour la plupart reconnus, et qui sont répartis en six grandes sections thématiques. Disons-le d’emblée, il s’agit d’un ouvrage de référence qui fera date, car on y trouve non seulement une synthèse de la recherche qui présente tous les faits, mais également un ensemble de travaux de pointe sur les pratiques relatives à la diversité et la formation des personnels scolaires.
La première partie (1. Le visage de la diversité dans le contexte québécois) présente un portrait remarquablement documenté de la situation actuelle dans les écoles du Québec : données relatives à la diversité ethnoculturelle, scolarisation des élèves issus de l’immigration, situation des jeunes autochtones, portrait du système public de langue anglaise et des écoles religieuses et ethno-spécifiques. Les exposés de cette partie sont accompagnés de nombreux tableaux et repères chronologiques utiles, ainsi que d’encadrés présentant des aspects du dossier avec plus de détail.
La deuxième partie (2. Les concepts et les fondements) ne regroupe que trois chapitres, mais elle offre une réflexion indispensable sur des concepts fondamentaux, tels que ceux de migration, d’identité, de racisme et d’ethnicité et d’accommodement raisonnable. Malgré sa brièveté, cette partie fournit tout l’arrière-plan théorique nécessaire pour les discussions toujours complexes sur l’intégration et l’acculturation. Dans la troisième partie (3. Le développement des compétences du personnel scolaire pour agir en contexte de diversité), cinq chapitres permettent d’aborder les sujets qui sont le coeur de l’entreprise. La présentation doit tenir compte ici de la diversité des approches théoriques et pratiques, et les auteurs distinguent l’éducation interculturelle, l’éducation antiraciste, l’éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits humains et l’éducation inclusive. Ces distinctions permettent de poser la question : comment viser le développement d’une compétence interculturelle et inclusive pour tous les enseignants du Québec? Les différents chapitres de cette riche partie abordent les échanges interculturels, l’adaptation du curriculum à la diversité ethnoculturelle (chapitre 12, où est présenté le programme ÉCR, et chapitre 13, sur les programmes d’histoire et éducation à la citoyenneté).
La cinquième partie (5. La prise en compte des réalités et des besoins des élèves issus des minorités dans les pratiques scolaires) illustre les défis pédagogiques, tels que la reconnaissance de la diversité et la pédagogie du français en contexte de diversité. Mais on trouve également dans cette partie des chapitres très substantiels sur l’accueil scolaire des jeunes réfugiés et enfants de la guerre (chapitre 16), la pédagogie autochtone (chapitre 17), l’accommodement en contexte scolaire (chapitre 18) ainsi que sur les diverses approches de l’évaluation en contexte de diversité (chapitre 19). Quelques pages sur des pratiques musicales novatrices complètent cet ensemble très riche, dans lequel on trouvera autant le portrait sociologique des milieux concernés qu’une discussion critique, marquée par une ouverture vers une pédagogie d’inclusion. La dernière partie (6. Les interactions scolaires et les relations écoles-familles-communautés) aborde les questions complémentaires relatives aux espaces éducatifs et aux activités parascolaires et communautaires.
Il faut féliciter les trois directrices de cet ouvrage de l’avoir préparé en tenant compte du nouveau contexte pluraliste qui se développe aujourd’hui dans l’école : ce ne sont plus en effet seulement les enjeux culturels qui dominent la problématique, comme dans les deux décennies précédentes, mais aussi et peut-être surtout les questions relatives à l’égalité et à l’équité. La perspective s’est déplacée de la rencontre des cultures à la question de la justice, rendant ainsi possible une approche objective de défis tels que le racisme, le stéréotype, le préjugé. Dans ce contexte, des questions comme celle de la culture publique commune et le développement d’une citoyenneté québécoise partagée par tous deviennent centrales et la formation des personnels scolaires, en particulier les enseignants de formation initiale, doit s’ouvrir à tous les aspects théoriques et pratiques susceptibles d’enrichir leurs compétences. Ce ne sont pas seulement les cours spécifiquement consacrés à ces questions qui doivent être renouvelés, mais toute la formation qui doit être repensée en prenant en compte l’évolution du pluralisme social, religieux et linguistique. L’ouvrage fait état pour chacun de ces aspects des nombreux débats et controverses relatifs au degré d’ouverture du système d’éducation québécois et à sa capacité de s’adapter. Plaidant pour une ouverture inclusive à la diversité, cet ouvrage montre l’importance du travail qui reste à faire sur le terrain pour accéder à une approche authentiquement pluraliste, c’est-à-dire une approche pour laquelle la diversité est une richesse et non un handicap. Considérant l’ampleur des sujets abordés et la qualité scientifique des exposés, on peut dire que ce traité doit être salué comme une contribution de toute première importance à la synthèse de la recherche sur la diversité dans nos écoles. Chaque chapitre est accompagné de questions d’approfondissement et l’ouvrage est complété par une très intéressante bibliographie.