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Quel merveilleux livre, bien écrit et à la portée de tous, valable pour des chercheurs de plusieurs disciplines aussi bien que pour des lecteurs intéressés par des études linguistiques et culturelles ! Des aspects propres aux études postmodernes et culturelles sont présents, mais le jargon des initiés est à peu près absent. L’ouvrage de Simon analyse les interactions linguistiques et culturelles des groupes anglophone, francophone et allophone (surtout juif/yiddish) de Montréal. Le livre contient six chapitres en plus d’une introduction qui nous incite à poursuivre la lecture. Quoiqu’il y ait des thèmes récurrents, chaque chapitre est autonome et peut être extrait de l’ensemble pour des besoins universitaires. L’ouvrage contribue grandement au domaine de la traduction et ouvre des perspectives intéressantes pour les études canadiennes, québécoises, ethniques et juives aussi bien que pour les études culturelles et, plus spécifiquement, littéraires. On y reconnaît le travail sérieux et créatif de Sherry Simon, une sommité dans le domaine de la vie culturelle au Québec. Cette étude sur Montréal se rattache plus spécifiquement à celles sur d’autres villes diversifiées, marquées par l’apport de populations variées qui façonnent autant la culture que le paysage urbain. En ce sens, Montréal est la Prague (Tchèques, Allemands et Juifs) de l’Amérique du Nord.

Le thème de cet essai concerne les passeurs linguistiques et culturels, ces écrivains audacieux qui traduisent, au sens propre et au sens figuré, les ouvrages et les expériences des diverses communautés de Montréal. Le premier chapitre porte sur deux auteurs, d’abord Malcolm Reid et son ouvrage The Shouting Signpainters qui trace, pour les anglophones du Québec et du Canada, le portrait du nationalisme militant québécois à partir de divers articles de la revue Parti pris et, ensuite, le poète et avocat Frank R. Scott qui a fréquenté assidûment les auteurs du Québec français et les a accueillis dans sa maison de Westmount. Les deux chapitres suivants analysent l’évolution du monde littéraire yiddish/juif à Montréal par l’entremise des poèmes d’A. M. Klein (écrits en anglais), de Chava Rosenfarb (écrits en yiddish) et d’autres auteurs yiddish. Aussi, Simon parle longuement de la contribution significative de l’anthropologue Pierre Anctil, aujourd’hui directeur des Études canadiennes à l’Université d’Ottawa qui, grâce à ses recherches, a fait connaître aux lecteurs et universitaires francophones du Québec les multiples péripéties de la vie des immigrants juifs. Les trois derniers chapitres présentent un bon nombre d’auteurs, de critiques, d’architectes et de traducteurs issus des trois groupes linguistiques. Ces derniers intéresseront davantage les professionnels, surtout ceux qui sont familiarisés avec les aspects techniques et théoriques de la traduction et de la critique littéraires.

Comme le sous-titre le suggère, l’ouvrage est construit à partir de divers épisodes linguistiques et culturels. Au lieu de développer une seule perspective théorique, il dévoile tout simplement les sources de tensions et d’avantages liées à la vie quotidienne dans une ville diversifiée et cosmopolite telle que Montréal. Les lecteurs retireront des bénéfices divers selon leur formation et leur bagage culturel, mais tous reconnaîtront la valeur de ce travail scientifique et l’attachement de l’auteure envers la dynamique ville de Montréal. Il est à espérer que cet ouvrage soit traduit rapidement en français. L’agitation vivifiante de la diversité cosmopolite de Montréal décrite par Simon contraste en effet fortement avec le débat, parfois aux vues étroites, qui débute sur l’accommodement raisonnable au moment d’écrire ces lignes. En ce sens, Montréal et Hérouxville sont tout à fait représentatifs de ce nouveau champ de bataille.

(Traduction Jeanne Valois)