Résumés
Résumé
La littérature enseigne que certaines normes sociales sont enracinées dans l’utilité, d’autres dans la désirabilité. Pour les premières, les chercheurs ont montré que les personnes conformes étaient valorisées sans pour autant que les personnes déviantes soient dévalorisées. Pour les normes enracinées dans la désirabilité, nous faisons l’hypothèse d’un processus inverse, avec plus de dévalorisation des conduites déviantes que de valorisation des conduites conformes. Nous faisons plus précisément l’hypothèse que la civilité est une norme enracinée dans la désirabilité, avec de la dévalorisation en cas de déviance, sans pour autant conduire à de la valorisation en cas de conformisme. Trois études quasi expérimentales, centrées sur l’utilité et la désirabilité de la civilité en milieu professionnel, corroborent globalement notre hypothèse. Les comportements de civilité sont systématiquement plus désirables que les comportements incivils, avec plus de dévalorisation des seconds que de valorisation des premiers. Il est également constaté que les comportements incivils, jugés plus indésirables qu’inutiles, sont davantage ancrés dans la désirabilité que dans l’utilité.
Mots-clés :
- civilité,
- désirabilité sociale,
- utilité sociale
Abstract
Literature shows that some social norms are linked to utility, others to desirability. For the former, the researchers showed that conforming people were positively valued without deviants being devalued. For norms linked to desirability, we make the assumption of an inverse process, with more devaluation of deviant behaviors than positive valuation of compliant behaviors. More specifically we make the hypothesis that civility is a norm linked to desirability, with devaluation in case of deviance without positive valorization in case of conformity. Three quasi-experimental researches, focused on utility and desirability of civility in the workplace, corroborate overall our hypothesis. Civility behaviors are systematically more desirable than uncivil behaviors, with more devaluation of the latter than of the former. It has also been observed that uncivil behaviors, considered more undesirable than unnecessary, are rooted more in desirability than in utility.
Keywords:
- civility,
- social desirability,
- social utility
Corps de l’article
Introduction
À l’instar de Sherif (1936), Dubois souligne (1994, p.28) qu’« une norme définit un ensemble d’événements jugés comme bons, comme désirables par le collectif dont elle émane, par opposition à un autre ensemble d’événements considérés comme moins bons, comme moins désirables, voire même franchement mauvais ». Les jugements que nous portons sur autrui sont ainsi fréquemment basés sur l’examen de la normativité des conduites de cet autrui : la cible que l’on évalue respecte-t-elle les normes sociales ou les transgresse-t-elle? De cet examen découlera une appréciation neutre (voire positive) en cas de conformisme ou négative en cas de déviance (Blake et Davis, 1964; Janowitz, 1975; Schachter, 1951). De nombreux auteurs ont considéré que les réactions négatives, qui correspondent à ce que l’on appelle, dans son acceptation restreinte, le contrôle social (Gibbs, 1981b), pouvaient être considérées comme un indice de perception d’un comportement déviant, c’est-à-dire comme un critère permettant de juger de la normativité d’une conduite. Ainsi, pour Kitsuse (1962), c’est le contrôle social qui permet de distinguer ce qui est normatif de ce qui ne l’est pas : une conduite suivie de contrôle social signifiera que cette conduite est déviante, l’absence de contrôle social témoignant au contraire de sa normativité. Comme le note Lenoir (1997, p. 295), « on sait – au moins depuis Emile Durkheim – que cette dernière [la norme] ne se révèle jamais aussi bien qu’à l’occasion des transgressions auxquelles elle donne lieu ». De même, Osgood et al. (1996) définissent la déviance par l’adoption de comportements allant à l’encontre des normes et provoquant des conduites de contrôle social (p636). Ceci étant, certains auteurs ont une conception plus large de la notion de contrôle social, en y intégrant les réactions d’approbation et en considérant que la nature du contrôle social exprimé serait fonction de la norme considérée. Channouf et Mangard (1997) considèrent ainsi que pour certaines normes, le contrôle social se manifesterait par des sanctions positives (le contrôle social n’interviendrait qu’en cas de conduites normatives), alors que pour d’autres, seules des sanctions négatives seraient employées (seules les conduites déviantes seraient l’objet de contrôle social). Existeraient ainsi deux types de normes : les prescriptives (correspondant aux conduites que l’on doit adopter, par exemple, aider une personne en difficulté) et les proscriptives (renvoyant aux conduites à éviter, comme ne pas nuire à autrui). Selon Janoff-Bulman et al. (2009), qui parlent de moralité proscriptive et prescriptive, les normes proscriptives seraient plus impératives, plus strictes, porteraient sur des conduites plus précisément définies que les prescriptives et seraient essentiellement basées sur la notion de devoir, alors que les prescriptives, plus discrétionnaires, feraient autant référence au devoir qu’aux désirs, aux préférences personnelles de l’évaluateur. Les travaux réalisés par ces auteurs mettent également en évidence que la sanction négative d’une déviance à une norme proscriptive, est plus intense que la sanction positive à laquelle donne lieu le respect d’une norme prescriptive. La revue de Baumeister et al. (2001) souligne elle aussi cette asymétrie entre événements négatifs (non-respect d’une norme) et événements positifs (respect) : les premiers sont plus inattendus, plus énigmatiques et plus complexes à interpréter que les seconds, suscitant donc davantage d’attention et d’émotion (selon ces auteurs, il y aurait d’ailleurs davantage de mots pour désigner les émotions négatives comparativement aux positives). On s’attend en effet très généralement à ce que les personnes que l’on croise attendent leur tour dans un magasin, que nos collègues de travail n’occupent pas notre place de parking, sans pour autant les féliciter lorsqu’ils adoptent de telles conduites. Par contre, le non-respect de ces principes nous interpelle et est, lui, susceptible d’entraîner une réaction (en l’occurrence négative). Comme le résume Kellermann (1984), le non-respect d’une norme entraîne davantage de désapprobation par rapport à l’approbation suscitée par son respect. En d’autres termes, on accorderait plus de valeur aux conduites négatives comparativement aux positives, plus de valeur au non-respect d’une norme qu’à son respect. Cela signifie qu’un critère de distinction entre événements positifs semble pouvoir reposer sur la notion de valeur.
Dubois (1994, p. 28-29) précise que toute norme est fondée sur une attribution informelle de valeur et que cette valeur serait liée à l’utilité et/ou à la désirabilité attribuées à la norme dans le cadre du fonctionnement social. Un ensemble de recherches fait en effet état d’une conception bidimensionnelle de la valeur sociale (Cambon, 2006; Gallay, 1992; Leyens, 1983; Rosenberg et Sedlack, 1972; White, 1980). Nous jugerions ainsi les personnes selon deux dimensions distinctes : l’utilité et la désirabilité sociales (Beauvois, 1995, 2003). L’utilité sociale correspond à la probabilité de réussite versus d’échec d’une personne dans la société dans laquelle elle évolue. Quant à la désirabilité sociale (ou agréabilité sociale), elle exprime la probabilité qu’a une personne de susciter chez autrui des affects positifs versus négatifs. Il apparaît par ailleurs que certaines normes seraient principalement ancrées dans l’utilité, alors que d’autres le seraient dans la désirabilité. À titre d’exemples, on peut, pour les premières, citer les normes d’internalité (Beauvois et Dubois, 1988), d’autosuffisance (Beauvois et Dubois, 2001), ou encore, de citoyenneté organisationnelle (Grimault et Gangloff, 2018), notamment étudiées en contexte professionnel, et pour les secondes, la norme de respect de l’environnement (Becker et Félonneau, 2011). Nous faisons ici l’hypothèse qu’entre aussi dans ce second cadre une norme de civilité multidimensionnelle (par exemple éviter de se garer sur un trottoir. cf. Goffman, 1973, 1974; Filisetti, 2009; Picard, 2014).
Les actes d’incivilités conduisent fréquemment à des réactions plus ou moins virulentes de désapprobation (Black, 1984; Collins et Frey, 1992; Gibbs, 1981a, 1981b; Liska, 1997; Meier, 1982), l’intensité de cette désapprobation étant fonction de l’intensité des émotions négatives engendrées par la non-conformité de ces incivilités (Cabin, 2009; Nugier et al., 2009). Ainsi, dans la recherche de Chaurand et Brauer (2008), il est demandé à des volontaires tout-venant croisés dans la rue d’indiquer quelle réaction ils auraient face à une personne commettant diverses incivilités, en répondant sur une échelle en 7 points (0 = aucune réaction, 1 = regard désapprobateur, 2 = soupir audible, 3 = alerter une figure d’autorité, 4 = commentaire poli au déviant, 5 = commentaire sur un ton agressif au déviant et 6 = insulte sur un ton agressif au déviant). Il est alors constaté que les participants déclarent qu’ils réagiraient par des réponses de niveau 4, 5 ou 6 dans 80 % des cas s’ils sont témoins d’une « destruction de biens publics », 65 % des cas pour « jeter des détritus sur la voie publique », etc. Utilisant une échelle similaire en 7 points, Brauer et Chekroun (2005) ont examiné les réactions à cinq incivilités : 1) masquer les horaires de bus par une affiche publicitaire, 2) passer devant autrui dans une file d’attente, 3) jeter successivement dans la rue le contenu de sa poche (un vieux mouchoir, un paquet de cigarettes vide, …), 4) jeter une bouteille de pastique dans un parc après en avoir bu le contenu, 5) faire des graffiti sur l’ascenseur d’un centre commercial. Il a été observé que chacune de ces incivilités conduisait à des réactions de désapprobation, aussi bien en termes d’intentions (en moyenne dans 69 % des cas) que de réactions effectives (en moyenne dans 48 % des cas), les variations d’intensité de ces réactions étant fonction de l’importance accordée à la transgression et de l’implication de l’observateur. Les travaux de Brauer et Chekroun (2005) ou de Chaurand et Brauer (2008), nous conduisent à faire l’hypothèse de l’existence d’une norme de civilité, ancrée dans la désirabilité, norme qui conduira, en cas de déviance (i.e. actes d’incivilité), à des sanctions négatives, alors que croiser quelqu’un qui respecte cette norme semblera tellement naturel, tellement en accord avec le script des événements attendus (Abelson, 1976; Forgas, 1982; Langer, Blank et Chanowitz, 1978) que nous n’y prêterons aucune attention, la civilité (c.-à-d. actes de civilité) ne donnant ainsi lieu à aucune approbation particulière. Ceci étant, ces travaux ayant été réalisés en milieu urbain, nous avons souhaité examiner s’ils ne pouvaient pas être étendus au domaine professionnel, avec même amplification, si l’on considère que dans la sphère professionnelle, la civilité est une norme d’une utilité secondaire.
Plus globalement, nous faisons l’hypothèse de l’existence d’une norme de civilité davantage ancrée dans la désirabilité sociale que dans l’utilité sociale, ce qui traduirait par plus de dévalorisation que de valorisation. Trois études ont été menées, en contexte professionnel, afin de tester cette hypothèse générale.
Première étude
La première étude concernait un recrutement professionnel. Après avoir pris connaissance du dossier d’un candidat à un emploi, les participants étaient invités, d’une part à se comporter comme des consultants en recrutement et ainsi à fournir un pronostic de recrutabilité du postulant, d’autre part à l’évaluer à partir de divers descripteurs personnologiques utiles et désirables.
Considérant que la civilité est une norme avantage ancrée dans la désirabilité que dans l’utilité, nous nous attendons à ce que les cibles respectant la norme fassent l’objet d’évaluations de recrutabilité et d’utilité similaires à celles des cibles ne la respectant pas; par contre, en termes de désirabilité, nous escomptons des jugements positifs pour les cibles normatives et négatifs pour les déviantes, avec une intensité de négativité plus importante pour les secondes comparativement à l’intensité de positivité attribuée aux cibles normatives.
Méthode
Participants
60 étudiants (30 hommes, 30 femmes, âge moyen : 22,4 ans) inscrits en premier cycle à l’école supérieure de commerce ICN School of Business de Nancy et contactés sur le campus de leur école, ont, sur la base du volontariat, participé à cette étude.
Plan d’expérience
Le plan factoriel 3 × 2 comportait deux variables indépendantes : une variable indépendante intersujets (la civilité : civil, incivil, non renseigné) et une variable indépendante intrasujet (le critère de jugement : utile versus désirable). Quant aux variables dépendantes, il s’agissait de la recrutabilité et de la valeur (utilité et désirabilité) attribuée aux cibles.
Procédure
Les étudiants ont été répartis en trois groupes de 20 (un groupe pour chacun des trois profils de candidats présentés, avec dans chacun une répartition hommes / femmes équivalente). Leur tâche, individuelle, consistait à prendre connaissance d’un dossier comportant une offre d’emploi, le CV d’un candidat possédant les compétences requises et les réponses de ce dernier à un questionnaire de civilité, pour ensuite juger ce dernier d’une part quant à sa recrutabilité, d’autre part en termes d’utilité et de désirabilité sociales. Avant la passation, qui durait environ 15 minutes, il était précisé aux participants l’anonymat des réponses.
Matériel
Le matériel tenait en un dossier comprenant une offre d’emploi, le CV d’un postulant et les réponses de celui-ci à diverses questions. Ces dernières, désignées aux participants comme étant une sélection représentative des réponses du candidat à un test de compétences sociales (le test de Thapenis, 1995, en réalité fictif), mesuraient en fait le degré de civilité. Une situation contrôle où les participants prenaient uniquement connaissance du CV du candidat était également instaurée. Le poste à pourvoir était celui de responsable marketing dans un groupe de cosmétique.
Le questionnaire dit de Thapenis, élaboré pour l’étude, était constitué de 4 items : 1) Vous avez l’habitude de travailler dans votre bureau en écoutant de la musique. Vous réglez le son surtout pour avoir une bonne écoute sans trop vous préoccuper de vos collègues, ou vous réglez le son afin d’éviter toute nuisance sonore pour les autres; 2) Vous déjeunez souvent au restaurant d’entreprise. Vous n’oubliez jamais de déposer votre plateau sur le tapis roulant comme le règlement l’exige, ou vous laissez systématiquement votre plateau sur la table au lieu de le déposer sur le tapis roulant à la sortie; 3) Votre bureau est encombré toutes les semaines par des circulaires diverses. Vous allez les déposer dans le conteneur prévu ou vous les mettez par terre; 4) Les places du parking de votre entreprise sont toutes occupées, sauf celles pour handicapés qui sont la plupart du temps libres. Vous vous y garez délibérément, ou vous les respectez et allez vous garer dans un autre parking plus éloigné.
Les candidats, civil comme incivil, avaient répondu à chacun de ces items sur une échelle en neuf points : pour deux items (items orientés vers la civilité) le chiffre 1 correspondait au maximum de civilité et le chiffre 9 au maximum d’incivilité, l’ordre étant inverse pour les deux autres items (items orientés vers l’incivilité). Le postulant civil avait coché le 2 et le 3 pour les échelles orientées vers la civilité, et le 7 et le 8 pour les échelles orientées vers l’incivilité; le candidat incivil avait répondu de manière inverse (en ayant choisi le 2 et le 3 pour les échelles orientées vers l'incivilité et le 7 et le 8 pour les échelles orientées vers la civilité). Trois profils de candidats ont été ainsi constitués : civil, incivil et de la condition contrôle connu uniquement par son CV.
Pour le pronostic de recrutabilité, les participants étaient confrontés à la consigne suivante : « Après avoir pris connaissance de l’offre d’emploi, du CV du candidat et de ses réponses au test de compétences sociales de Thapenis (1995), il vous est demandé d’indiquer votre degré d’accord pour que le candidat soit recruté pour le poste à pourvoir en entourant sur l’échelle de 0 à 5 le numéro de votre choix sachant que 0 signifie pas du tout d’accord et 5 tout à fait d’accord ». Pour les descriptions personnologiques, la consigne était : « Il vous est demandé d’entourer, parmi la liste des 12 traits de personnalité ci-dessous, les trois qui, selon vous, caractérisent le mieux le candidat ». Cette liste, présentée alphabétiquement, a été élaborée à partir de l’étude de Gallay (1992) : trois se référaient à des traits de désirabilité positive (honnête, sensible et sympathique), trois à des traits de désirabilité négative (hypocrite, prétentieux et vantard), trois à des traits d'utilité positive (ambitieux, dynamique et travailleur) et trois à des traits d’utilité négative (étourdi, instable et naïf). Le dépouillement a consisté à calculer, pour chaque cible (civil, incivil ou de la condition contrôle), le nombre de traits de personnalité (positifs et négatifs) désirables et utiles, octroyé. Chaque trait positif a été codé +1 et chaque négatif -1. À partir de cette cotation, pour chaque candidat, la différence entre les traits positifs et les traits négatifs attribués a été calculée, d’une part pour les adjectifs désirables, et d’autre part pour les adjectifs utiles. Les scores de désirabilité ou d’utilité obtenus pouvaient ainsi fluctuer de -3 (si les trois traits sélectionnés s’avéraient être tous négatifs) à +3 (si les trois traits choisis étaient tous positifs). Si, pour un jugement de valeur utile ou désirable, un participant n’avait opté pour aucun trait, le chiffre 0 était appliqué.
Hypothèses
Pour les jugements de recrutabilité et d’utilité, on escomptait un jugement positif pour les trois profils de candidats présentés (civil, incivil et de la condition contrôle) qui ne seraient pas différenciés.
Pour le jugement de désirabilité, on s’attendait à ce que le candidat incivil soit moins bien jugé que les candidats civils et de la condition contrôle qui ne seraient pas distingués, ce qui se traduirait par un jugement positif pour les candidats civils et de la condition contrôle et un jugement négatif pour le candidat incivil, ce jugement négatif étant d’une intensité supérieure à celle du jugement positif des candidats civils et de la condition contrôle.
Résultats[2]
Les données obtenues en termes de recrutement et de valeur figurent au Tableau 1.
Jugements de recrutabilité
L’analyse de variance montre un effet du niveau de civilité [F(2,57) = 18,56, p < 0,001, η² = 0,39]. On remarque plus précisément que le candidat civil est mieux évalué que les candidats incivils [F(1,38) = 6,01, p < 0,001, η² = 0,14] et de la condition contrôle [F(1,38) = 2,11, p = 0,039, η² = 0,05], l’incivil étant également déprécié par rapport au postulant de la condition contrôle [F(1,38) = 3,90, p < 0,001, η² = 0,09].
Les comparaisons à la moyenne théorique (qui correspond à la réponse intermédiaire) montrent que le candidat civil a une appréciation positive [F(1,38) = 4,72, p < 0,001, η² = 0,11], que le candidat de la condition contrôle [F(1,38) = 1,28, p = 0,209] ne s’en différencie pas, et que l’incivil est évalué négativement [F(1,38) = 5,67, p < 0,001, η² = 0,13], avec autant de valorisation pour le civil que de dévalorisation pour l’incivil [F(1,38) = 0,58, p = 0,566][3].
Jugements d'utilité et de désirabilité
Les résultats révèlent la significativité de la civilité [F(2,57) = 19,45, p < 0,001, η² = 0,41], du critère de jugement [F(1,57) = 12,42, p < 0,001, η² = 0,18] et de l’interaction civilité * critère de jugement [ F(2,57) = 4,26, p = 0,019, η² = 0,13] : les deux profils (incivil et civil) ont obtenu des jugements différenciés en termes d’utilité et de désirabilité (Tableau 2 et Figure 1).
Pour le jugement d’utilité, le civil est mieux évalué que l’incivil, mais aucun des deux ne se différencie du candidat de la situation contrôle. Par rapport au jugement intermédiaire, les candidats civils et de la condition contrôle ont une évaluation positive, mais l’incivil ne s’en distingue pas et n’est donc pas dévalorisé. On observe ainsi plus de valorisation pour le civil que de dévalorisation pour l’incivil [F(1,38) = 4,45, p < 0,001, η² = 0,10].
Pour le jugement de désirabilité, les comparaisons réalisées indiquent que le civil et le candidat de la condition contrôle ne se différencient pas et sont tous ceux plus appréciés que l’incivil. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une appréciation positive, l’incivil négative et le candidat de la condition contrôle ne s’en distingue que marginalement. On obtient autant de valorisation pour le civil que de dévalorisation pour l’incivil [F(1,38) = 1,03, p = 0,311].
Discussion
Pour le jugement de recrutabilité, contrairement à ce qui était attendu, les trois candidats ont été distingués : le candidat civil a obtenu le meilleur pronostic (et une évaluation positive), vient ensuite le candidat de la situation contrôle (avec une évaluation intermédiaire), et en dernier lieu, l’incivil (avec une évaluation négative qui est de même intensité que la valorisation attribuée au civil). Nous pensions également qu’ayant opérationnalisé un contexte professionnel, l’indésirabilité de l’incivil n’aurait pas d’influence. Or, il est tout à fait possible qu’un tel contexte soit précisément un domaine (voire le domaine dominant) dans lequel la variable civilité/incivilité fasse l’objet d’une évaluation aussi bien en termes de désirabilité que d’utilité. Il est cependant impossible de vérifier la validité de cette interprétation, la variable « recrutabilité » ne permettant pas de distinguer le poids respectif de ces critères. Nous avons donc choisi, dans les deux études suivantes, de ne pas reproduire cette variable afin de nous centrer exclusivement sur les deux dimensions de la valeur prises séparément.
Pour le jugement d’utilité, les postulants civils et incivils n’ont pas été distingués du candidat de la condition contrôle; la civilité (versus l’incivilité) n’a donc pas apporté de valorisation (versus de dévalorisation) pour ce jugement. Ce résultat montre que, comme prévu, la norme de civilité a peu d’incidence sur le jugement d’utilité. On remarque cependant, contrairement à ce que nous attendions, d’une part que l’incivil ne se différencie pas du jugement intermédiaire, alors que les deux autres postulants font l’objet d’une appréciation positive, et d’autre part que le candidat civil est mieux évalué que l’incivil, avec une valorisation plus intense que la dévalorisation dont l’incivil fait l’objet.
Pour le jugement de désirabilité, comme escompté, l’incivil est déprécié par rapport aux candidats civils et de la condition contrôle (ces deux derniers n’étant pas différenciés). Ainsi, par rapport au groupe contrôle, la civilité n’apporte pas de plus-value, mais l’incivilité engendre de la dévalorisation. Il apparaît cependant que, comparativement au jugement intermédiaire, le civil a une évaluation positive et l’incivil une évaluation négative de niveau identique.
Du fait de ces résultats mitigés par rapport à nos hypothèses, nous avons mené une deuxième étude, avec les mêmes hypothèses et la même opérationnalisation, sauf sur les points suivants : seules l’utilité et la désirabilité étaient mesurées, le postulant de la situation contrôle a été supprimé et, prenant en compte les travaux de Bertrand-Cassignol (2008) concluant à un probable manque de validité de l’utilisation d’adjectifs pour mesure la valeur, nous avons confronté les participants à un questionnaire dont les réponses ont été analysées item par item.
Deuxième étude
Méthode
Participants
120 étudiants inscrits en premier et deuxième cycle à l'université Paris Ouest Nanterre La Défense (60 femmes, 60 hommes, âge moyen : 22,55 ans), contactés sur le campus de l’université, ont participé à l’étude sur la base du volontariat.
Plan d’expérience
Il s’agissait d’un plan factoriel 2 × 2 à deux variables indépendantes intersujets : la civilité (civil, incivil) et le critère de jugement (utile versus désirable). Les variables dépendantes portaient sur la valeur (utilité et désirabilité) attribuée aux cibles.
Procédure
Les participants furent confrontés aux quatre comportements de l’étude précédente et répartis en quatre groupes : 30 participants ont évalué chaque comportement de civilité sur l’utilité et 30 autres sur la désirabilité; de même, 30 participants ont jugé chaque comportement d’incivilité sur l’utilité et 30 autres sur la désirabilité. Avant la passation, qui durait environ 15 minutes, il était précisé aux participants l’anonymat des réponses.
Matériel
Le matériel proposé aux participants tenait en la lecture des quatre comportements de l’étude précédente. La consigne était la suivante : « Vous trouverez ci-dessous les réponses cochées par une personne à un questionnaire de recrutement. Votre tâche consiste à prendre connaissance de cette réponse et à partir de cette seule réponse, de donner votre impression sur les échelles en entourant le numéro de votre choix ». Pour le jugement de désirabilité, les participants répondaient sur une échelle allant de 0 (« je pense que cette personne sera détestée de ses collègues ») à 10 (« je pense que cette personne sera adorée de ses collègues »), et où 5 correspondait à un jugement intermédiaire (« je pense que cette personne ne sera ni détestée ni adorée de ses collègues »). Pour le jugement d’utilité, les participants répondaient sur une échelle allant de 0 (« je pense que cette personne, dans son entreprise, sera considérée comme quelqu'un de nuisible) à 10 (« je pense que cette personne, dans son entreprise, sera considérée comme quelqu'un d'utile »), et où 5 correspondait à un jugement intermédiaire (« je pense que cette personne, dans son entreprise, ne sera considérée ni comme quelqu'un de nuisible ni comme quelqu'un d'utile »)[4].
Hypothèses
Pour le jugement d’utilité, on s’attendait à ce que le civil et l’incivil ne soient pas distingués, avec des jugements intermédiaires pour chacun.
Pour le jugement de désirabilité, on s’attendait à ce que le civil soit mieux considéré que l’incivil, avec un jugement positif pour le civil et négatif pour l’incivil, un degré de dévalorisation de l’incivil plus important que le degré de valorisation du civil, et un jugement de l’incivil plus négatif en termes de désirabilité que d’utilité.
Résultats
Une analyse de variance effectuée selon un plan 2 (civilité : civil versus incivil) * 2 (critère de jugement : désirable versus utile), où les deux variables indépendantes ont été manipulées en intersujets, révèle un effet de la civilité [F(1,116) = 352,50, p < 0,001, η² = 0,752], du critère de jugement [F(1,116) = 8,66, p = 0,004, η² = 0,07] et de l'interaction critère de jugement * civilité [F(1,116) = 3,80, p = 0,054] de façon marginale (Tableaux 3 et 4 et Figure 2).
Effet de la civilité
Les comparaisons effectuées révèlent que le civil est mieux évalué que l’incivil [F(1,118) = 17,96, p < 0,001, η² = 0,13]. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a un jugement positif [F(1,118) = 17,08, p < 0,001, η² = 0,13] et l’incivil négatif [F(1,118) = 7,51, p < 0,001, η² = 0,06], la dévalorisation étant supérieure à la valorisation [F(1,118) = 8,56, p < 0,001, η² = 0,07][5].
Effet de la civilité selon les critères de jugement (d’utilité et de désirabilité)
Pour le jugement d’utilité, le civil obtient une meilleure appréciation que l’incivil. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a un score positif et l’incivil négatif, la dévalorisation étant supérieure à la valorisation [F(1,58) = 3,84, p < 0,001, η² = 0,06]. Notre hypothèse n’est donc pas vérifiée.
Par contre, comme attendu, pour le jugement de désirabilité, le civil est mieux évalué que l’incivil. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une évaluation positive et l’incivil négative, la dévalorisation étant supérieure à la valorisation [F(1,58) = 9,58, p < 0,001, η² = 0,14].
Le civil n’est pas différencié sur les jugements de désirabilité et d’utilité [F(1,58) = 0,70, p = 0,483], néanmoins l’incivil est plus indésirable qu’inutile [F(1,58) = 3,46, p < 0,001, η² = 0,06], ce qui correspond également à ce que nous escomptions.
Résultats pour chaque comportement d’après les critères de jugement (d’utilité et de désirabilité)
Pour l’utilité, et dans chacun des 4 comportements : 1) le civil est évalué plus favorablement que l’incivil (Tableau 5), et 2) par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une appréciation positive et l’incivil négative (Tableau 6), avec plus de dévalorisation que de valorisation pour trois des quatre comportements [F(1,58) = 2,85, p = 0,006, η² = 0,05 pour le premier comportement; F(1,58) = 1,89, p = 0,064 pour le deuxième; F(1,58) = 2,34, p = 0,023, η² = 0,04 pour le troisième; F(1,58) = 3,11, p = 0,003, η² = 0,05 pour le quatrième].
Pour la désirabilité, et dans chacun des quatre comportements : 1) le civil est évalué plus favorablement que l’incivil (Tableau 5), et 2) par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une appréciation positive et l’incivil négative (Tableau 6), avec plus de dévalorisation que de valorisation [F(1,58) = 6,56, p≈.000, η² = 0,10 pour le premier comportement; F(1,58) = 6,50, p < 0,001, η² = 0,10 pour le deuxième; F(1,58) = 7,90, p < 0,001, η² = 0,12 pour le troisième; F(1,58) = 5,61, p < 0,001, η² = 0,09 pour le quatrième].
Dans chacun des quatre comportements, le civil n'est pas différencié sur les jugements de désirabilité et d'utilité [F(1,58) = 0,39, p = 0,694 pour le premier comportement; F(1,58) = 1,06, p = 0,291 pour le deuxième; F(1,58) = 1,88, p = 0,063 pour le troisième; F(1,58) = 0,66, p = 0,510 pour le quatrième].
Dans trois des quatre comportements, l’incivil est plus déprécié en désirabilité qu’en utilité [F(1,58) = 2,05, p = 0,043, η² = 0,03 pour le premier comportement; F(1,58) = 2,80, p = 0,006, η² = 0,05 pour le deuxième; F(1,58) = 2,58, p = 0,011, η² = 0,04 pour le quatrième]. Pour le troisième comportement, l’incivil est évalué identiquement [F(1,58) = 1,88, p = 0,063].
Trois des quatre comportements sont ainsi davantage ancrés dans la désirabilité que dans l’utilité.
Discussion
Concernant l’utilité, notre hypothèse n’est pas vérifiée, le civil et l’incivil étant différenciés. Par contre, comme attendu, en matière de désirabilité, le civil est effectivement plus apprécié que l’incivil, avec un degré de dévalorisation plus important pour ce dernier par rapport à la valorisation dont le civil fait l’objet (tout ceci aussi bien tous comportements regroupés que dans chacun des quatre comportements). On remarque également, comme attendu, que l’incivil est jugé plus indésirable qu’inutile, aussi bien tous comportements confondus que pour trois des quatre comportements, ce qui signifie que l’incivil est effectivement davantage ancré dans la désirabilité que dans l’utilité.
La désirabilité et l'utilité sont généralement considérées comme deux dimensions distinctes (Beauvois, 1994). Néanmoins, dans notre étude, le fait de se comporter de façon indésirable s’est répercuté sur le jugement d'utilité : les participants ont considéré que si la personne agit de façon indésirable, elle ne réussira pas.
Dans l’étude qui suit, considérant que le contexte recrutement pouvait à lui seul expliquer l’emprise de la désirabilité sur l’utilité, nous avons à nouveau examiné la valeur accordée à la civilité versus à l’incivilité, mais dans une situation référant à la conduite d’un collègue de travail et non plus comme relevant d’un recrutement. Bolster et Springbett (1961) soulignent en effet que, dans le cadre d’un recrutement, il est plus coûteux d’accepter un mauvais candidat que de rejeter un bon, d’où le fait que peu d’informations négatives suffisent au rejet (alors qu’il en faut davantage pour une acceptation). Par ailleurs, dans les deux études précédentes, les participants étaient des étudiant(e)s et les conduites des cibles à évaluer étaient parfois des conduites de la vie sociale en général, débordant du contexte de travail. Nous avons, dans cette troisième étude, choisi de nous adresser à des salariés et, nous inspirant des comportements de citoyenneté organisationnelle, nous les avons confrontés à des comportements susceptibles d’être adoptés par un salarié vis-à-vis de ses collègues. Nous avons également choisi d’utiliser des échelles évaluatives plus classiques (issues de Le Barbenchon, Cambon et Lavigne, 2005) que celles de la deuxième étude, en les présentant sur un continuum plus fin, allant de 0 à 20. Nos hypothèses sont quant à elles restées identiques à celles de la deuxième étude.
Troisième étude
Méthode
Participants
80 salariés (36 femmes, 44 hommes, âge moyen : 30,06) sollicités individuellement au parc de la Pépinière à Nancy ont participé à cette étude.
Plan d’expérience
Il s’agissait, comme dans l’étude précédente, d’un plan factoriel 2 × 2 à deux variables indépendantes intersujets : la civilité (civil, incivil) et le critère de jugement (utile versus désirable). Les variables dépendantes concernaient à nouveau la valeur (utilité et désirabilité) attribuée aux cibles.
Procédure
La tâche des participants consistait à prendre connaissance de cinq comportements et pour chacun à exprimer un jugement soit d’utilité soit de désirabilité. Les participants furent répartis en quatre groupes : 20 participants ont eu à évaluer les comportements de civilité sur l’utilité, 20 autres sur la désirabilité; 20 participants ont eu à juger les comportements d’incivilité sur la désirabilité, 20 autres sur l’utilité. Avant la passation, qui durait environ 5 minutes, il était précisé aux participants que leurs réponses resteraient anonymes.
Matériel
Le matériel tenait en la lecture de cinq comportements civils vs incivils. Ces cinq comportements étaient supposés être normatifs dans le monde du travail. Les phrases ont été rédigées afin que les participants arrivent à bien visualiser une scène pour pouvoir ensuite établir pour chaque comportement leur jugement soit de désirabilité soit d’utilité.
Les comportements étaient : 1) arrivé au travail, croise des collègues et leur dit bonjour (vs ne leur dit pas bonjour) 2) remercie (vs ne remercie pas) un collègue qui vient de lui venir en aide, 3) parle de façon agréable (vs désagréable) à son collègue, 4) dans son bureau, met de la musique en tâchant de ne pas gêner ses voisins (vs en ne se préoccupant pas de la nuisance sonore pour ses voisins), 5) lors d’une discussion, écoute (vs n’écoute pas) son interlocuteur.
La consigne était la suivante : « Dans la vie quotidienne, il est fréquent de porter un jugement sur quelqu'un sans que l’on connaisse la personne. C'est précisément ce que nous étudions. Vous allez trouver ci-après plusieurs comportements réalisés à chaque fois par une personne différente, dont vous imaginerez que c’est un collègue de travail, sur lequel vous n'avez aucune autre information que ce comportement qu’il réalise sur le lieu du travail. Votre tâche va consister à prendre connaissance de ce comportement et ensuite, à porter un jugement sur ce collègue en répondant à une question simple. Il n’existe ni bonne ni mauvaise réponse. C’est votre première impression qui nous intéresse».
Pour le jugement d’utilité, cette question était : « Ce qui vous est demandé est, par rapport au comportement réalisé, de donner l’impression que vous donne ce collègue en l’évaluant sur une note de 0 à 20, 0 signifiant que la personne n’a rien pour réussir dans la vie et 20 signifiant que la personne a tout pour réussir dans la vie. La note de 10 correspond au jugement intermédiaire, c'est-à-dire au vu du comportement réalisé, cette personne vous donne l'impression qu'elle n'a ni rien pour réussir dans la vie ni tout pour réussir dans la vie ».
Pour le jugement de désirabilité, cette question était : « Ce qui vous est demandé est, par rapport au comportement réalisé, de donner l’impression que vous donne ce collègue en l’évaluant sur une note de 0 à 20, 0 signifiant que la personne n’a rien pour être aimée et 20 signifiant que la personne a tout pour être aimée. La note de 10 correspond au jugement intermédiaire, c'est-à-dire au vu du comportement réalisé, cette personne vous donne l'impression qu'elle n'a ni rien pour être aimé dans la vie ni tout pour être aimé ».
Résultats
Une analyse de variance, avec un plan 2 (civilité : civil versus incivil) * 2 (critère de jugement : désirable versus utile), où les deux VI ont été manipulées en intersujets, révèle un effet de la civilité [F(1,76) = 456,84, p < 0,001, η² = 0,86] et du critère de jugement [F(1,76) = 6,10, p = 0,016, η² = 0,07], sans aucune interaction critère de jugement * civilité [F(1,76) = 0,56, p = 0,81] : les deux profils (incivil et civil) ont obtenu des jugements indifférenciés sur l’utilité et la désirabilité (Tableaux 7 et 8).
Effet de la civilité
D’après les comparaisons, le civil est mieux jugé que l’incivil [F(1,78) = 17,79, p < 0,001, η² = 0,19]. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une évaluation positive [F(1,38) = 9,53, p < 0,001, η² = 0,20] et l’incivil une évaluation négative [F(1,38) = 16, p < 0,001, η² = 0,30], avec plus de dévalorisation que de valorisation [F(1,78) = 3,65, p < 0,001, η² = 0,04][6].
Effet de la civilité d’après les critères de jugement (d’utilité et de désirabilité)
Pour le jugement d’utilité, le civil a une meilleure appréciation que l’incivil. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une évaluation positive et l’incivil négative, avec autant de valorisation que de dévalorisation [F(1,38) = 0,09, p = 0,928].
Pour le jugement de désirabilité, le civil est mieux considéré que l’incivil. Par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une appréciation positive et l’incivil négative, avec plus de dévalorisation que de valorisation [F(1,38) = 5,81, p < 0,001, η² = 0,13].
Le civil est mieux évalué sur le jugement d’utilité que sur celui de désirabilité de façon marginale [F(1,38) = 1,91, p = 0,059] et l’incivil est plus déprécié sur le jugement de désirabilité que sur celui d’utilité [F(1,38) = 3,98, p < 0,001, η² = 0,09].
Résultats pour chaque comportement selon les critères de jugement (d’utilité et de désirabilité)
Pour l’utilité, et dans chacun des 5 comportements : 1) le civil est également évalué plus favorablement que l’incivil (Tableau 9), et 2) par rapport au jugement intermédiaire, le civil est évalué positivement et l’incivil négativement (cf. tableau 10), avec autant de valorisation que de dévalorisation [F(1,38) = 0,56, p = 0,577 pour le premier comportement; F(1,38) = 0,25, p = 0,806 pour le deuxième; F(1,38) = 0,49, p = 0,628 pour le troisième; F(1,38) = 0,94, p = 0,355 pour le quatrième; F(1,38) = 0,47, p = 0,641 pour le cinquième].
Pour la désirabilité, et dans chacun des cinq comportements : 1) le civil est évalué plus favorablement que l’incivil (Tableau 9), et 2) par rapport au jugement intermédiaire, le civil a une appréciation positive et l’incivil négative (Tableau 10), avec plus de dévalorisation que de valorisation [F(1,38) = 4,10, p < 0,000, η² = 0,10 pour le premier comportement; F(1,38) = 3,73, p < 0,001, η² = 0,09 pour le deuxième; F(1,38) = 4,21, p < 0,001, η² = 0,10 pour le troisième; F(1,38) = 3,77, p < 0,001, η² = 0,09 pour le quatrième; F(1,38) = 2,92, p = 0,006, η² = 0,07 pour le cinquième].
Dans chacun des cinq comportements, le civil fait l’objet des mêmes appréciations pour l’utilité et la désirabilité [F(1,38) = 1,35, p = 0,181 pour le premier comportement; F(1,38) = 0,96, p = 0,339 pour le deuxième; F(1,38) = 1,52, p = 0,133 pour le troisième; F(1,38) = 0,97, p = 0,335 pour le quatrième; F(1,38) = 1,86, p = 0,066 pour le cinquième].
Dans quatre des cinq comportements, l’incivil est plus mal jugé en désirabilité qu’en utilité [F(1,38) = 3,45, p < 0,001, η² = 0,08 pour le premier comportement; F(1,38) = 2,83, p = 0,006, η² = 0,07 pour le deuxième; F(1,38) = 3,33, p < 0,001, η² = 0,08 pour le troisième; F(1,38) = 2,57, p = 0,012, η² = 0,06] pour le quatrième. Pour le dernier comportement, il fait l’objet d’une évaluation identique [F(1,38) = 1,86, p = 0,066].
Discussion
Notre hypothèse, pour le jugement de désirabilité, est bien vérifiée. En faisant la moyenne des scores pour tous les comportements, pour la désirabilité, le civil est considéré plus désirable que l’incivil, avec un jugement positif pour le civil et un jugement négatif pour l’incivil. Par ailleurs, comme attendu, on obtient plus de dévalorisation pour l’incivil que de valorisation pour le civil. Et ces deux constats sont également valables pour chacun des comportements.
Pour le jugement d’utilité, contrairement à ce que nous escomptions, les résultats sont similaires à ceux obtenus sur la désirabilité, excepté le fait que le civil et l’incivil font respectivement l’objet d’autant de valorisation que de dévalorisation aussi bien pour chaque comportement que pour tous les comportements confondus.
Il apparaît cependant que si tous les comportements civils sont autant ancrés dans l’utilité que dans la désirabilité, par contre, suivant notre hypothèse, tous les comportements incivils sont davantage ancrés dans la désirabilité que dans l’utilité, excepté un comportement (le cinquième) où nos résultats montrent un ancrage autant dans l’utilité que dans la désirabilité.
Conclusion générale
Nous référant à Channouf et Mangard (1997), nous avons considéré que certaines normes, comme la norme de civilité, engendreraient des réactions négatives en cas de déviance, mais que, du fait de sa correspondance avec le script attendu (Abelson, 1976; Forgas, 1982; Langer et al., 1978), la conduite normative ne conduirait à aucune approbation particulière. Et nous avons examiné ces réactions sous deux angles : la désirabilité et l’utilité. Nous nous attendions alors, pour le jugement de désirabilité, à ce que la civilité, en tant que norme ancrée dans la désirabilité, ait plus à voir avec la dévalorisation qu’avec la valorisation, ce qui devait conduire à une dévalorisation de l’incivil supérieure à la valorisation dont le civil pourrait faire l’objet, et nous escomptions, pour le jugement d’utilité, une indifférenciation du civil et de l’incivil.
Dans une première étude, les participants étaient amenés à évaluer, d’une part la probabilité d’un candidat à être recruté, et d’autre part à juger celui-ci par l’intermédiaire d’une liste de descripteurs personnologiques désirables et utiles. Le but était de déterminer ce qu’apporte la civilité versus l’incivilité par rapport à la condition contrôle (CV uniquement). Comme escompté, pour le jugement de désirabilité, le civil a été plus valorisé que l’incivil. À surplus, par rapport à la condition contrôle, l’incivil a été déprécié et le civil ne s’en est pas distingué, ce qui signifie que l’information supplémentaire de l’incivilité de la personne a amené à le déprécier alors que l’information supplémentaire de la civilité n’a pas permis de le valoriser. Concernant l’utilité, le fait que le civil et l’incivil n’aient pas été distingués du groupe contrôle montre que la civilité a eu peu d’incidence sur les jugements l’utilité, ce qui va aussi dans le sens de notre hypothèse. Pour autant, et là contrairement à ce que nous attendions, le civil a été considéré plus utile et plus recrutable que l’incivil, avec une valorisation du civil plus intense que la dévalorisation de l’incivil.
Nous avons donc mené une deuxième étude en demandant notamment alors aux participants d’exprimer leurs jugements au moyen d’échelles. Pour le jugement de désirabilité, notre hypothèse a à nouveau été vérifiée : dans tous les cas, le civil a été jugé plus désirable que l’incivil, avec un jugement positif pour le premier et négatif pour le second, et davantage de dévalorisation de l’incivil que de valorisation du civil. Il a également été constaté que l’incivil était jugé plus indésirable qu’inutile. Ces données, comme le fait que le civil fasse l’objet des mêmes jugements en termes d’utilité et de désirabilité, confirment donc l’ancrage de la variable civilité dans la désirabilité. Par contre, notre hypothèse d’identité d’utilité du civil et de l’incivil a à nouveau été infirmée.
Considérant que la situation de recrutement, présentée dans ces deux premières études, pouvait être à l’origine des résultats inattendus en matière d’utilité (voir Bertrand-Cassignol, 2008), nous avons mené une troisième étude en demandant à des salariés en poste de formuler leurs jugements à partir des conduites d’un collègue de travail. Pour le jugement de désirabilité, notre hypothèse a une nouvelle une fois été validée. Dans tous les cas, le civil a été systématiquement plus valorisé que l’incivil, avec plus de dévalorisation pour l’incivil que de valorisation pour le civil. Et là encore, sur quatre des cinq comportements proposés, l’incivil a été jugé plus indésirable qu’inutile, avec donc un ancrage dans la désirabilité et non dans l’utilité. Pour autant, même si le civil a été, comme dans la deuxième étude, autant valorisé en matière d’utilité et de désirabilité, il a aussi été considéré plus utile que l’incivil.
Si nos résultats sont donc conformes à notre hypothèse sur le plan de la dévalorisation dont l’incivil fait l’objet pour la désirabilité, ils s’en écartent cependant pour l’utilité, le civil étant jugé plus utile que l’incivil.
Une interprétation peut provenir du fait que nous avons directement interrogé nos participants sur la valeur qu’ils attribuaient à des conduites; c’est-à-dire que nous les avons soumis à une activité cognitive les conduisant à la recherche et à l’énonciation d’une logique étrangère à leur fonctionnement habituel lors de leurs confrontations à des actes de civilité. Va-t-on, dans la vie courante, féliciter quelqu’un qui évite de se garer sur une place réservée aux handicapés ou qui jette ses détritus dans une poubelle plutôt que n’importe où? Peut-être aurait-il été préférable de procéder en débutant par un amorçage, c’est-à-dire de commencer par une stimulation des scripts habituellement adoptés par nos participants face aux incivilités (à l’instar de Brauer et Chekroun, 2005 ou Chaurand et Brauer, 2008), mais aussi face aux civilités pour, ensuite, et seulement ensuite, les interroger sur la valeur de ces civilités et incivilités. En d’autres termes, et cela peut constituer une limite à nos travaux, il est possible que nous ayons stimulé un raisonnement générant artificiellement une prise de conscience de l’utilité des conduites civiles. Cette prise de conscience témoignerait d’une possible indissociation des deux éléments constitutifs de la valeur qui serait fonction de l’ancrage de la norme considérée : une norme ancrée dans l’utilité ne serait pas nécessairement désirable (ex les travaux sur la norme d’internalité), par contre, une norme ancrée dans la désirabilité serait nécessairement utile. On pourrait alors se demander, dans d’ultérieurs travaux, si cet ancrage dans la désirabilité, qui conduit à une emprise de la désirabilité sur l’utilité, ne provient pas du domaine considéré, c’est-à-dire de l’inclusion de la civilité dans ce que l’on appelle les questions sociétales, et ne serait pas ainsi extensible à toute norme entrant dans ce domaine. Janoff-Bulman et al. (2008) différencient en effet ce qu’ils nomment lifestyle issues et equity issues, que l’on peut faire respectivement correspondre en France par questions sociétales (avortement légal, recherche sur les cellules souches, mariage homosexuel) et questions sociales (programmes gouvernementaux d'aide sociale pour les pauvres, taxe environnementale sur les véhicules de sport et les voitures de luxe). Ils ont alors observé que les scores relatifs au facteur de style de vie étaient associés à une moralité proscriptive, générant davantage de sanctions négatives en cas de déviance que de sanctions positives lors de conduites conformes, alors que les scores relatifs au facteur d'équité étaient associés à une moralité prescriptive aux conséquences inverses. Comme on le constate, la civilité, et plus globalement la recherche sur la valeur des normes et leur ancrage, est encore porteuse de nombreuses études, notamment en milieu professionnel. Comme nous l’avons en effet signalé en introduction, si la littérature fait état de plusieurs travaux consacrés à des normes ancrées dans l’utilité, par contre nous n’avons relevé qu’une seule étude portant sur des normes ancrées dans la désirabilité : l’étude de Becker et Félonneau (2011), relative à la norme de respect de l’environnement, mais étude dont les items examinent ce respect dans la vie de « privée », hors situation de travail. La présente étude, avec des instruments référant systématiquement à des situations professionnelles, complète ainsi les données de la littérature.
Parties annexes
Notes
-
[1]
Laboratoire Parisien de Psychologie Sociale, Université Paris Nanterre, 200, avenue de la République, 92000 Nanterre, France. Téléphone : 02.35.14.64.45. Courriel : bernard.gangloff@univ-rouen.fr
-
[2]
Dans cette étude comme dans les deux suivantes, les données obtenues ont été traitées par anova (le test de normalité Shapiro-Wilk a été effectué au seuil de .05 et a permis d’en légitimer l’utilisation).
-
[3]
La valorisation a été calculée par la différence entre le score du civil (M = 3,50) avec le jugement intermédiaire (M = 2,50). On obtient ainsi un score de valorisation de M = 3,50-2,50 = 1. De même, la dévalorisation correspond à la différence du score de l’incivil (M = 1,65) avec le jugement intermédiaire (M = 2,50). Le score de dévalorisation est de M = 2,50-1,65 = 0,85. Puis nous avons comparé les scores de valorisation (M = 3,50-2,50 = 1) et de dévalorisation (2,50-1,65 = 0,85), différence qui s’est avérée non significative [F(1,38) = 0,58, p = 0,566].
-
[4]
Les cotations 0 correspondent à ce que Beauvois (1976) a appelé les conduites « perverses » (i.e. se situant à l’opposé des conduites désirables ou utiles).
-
[5]
Pour le calculer, le score du civil par rapport au jugement intermédiaire (M = 6,03-5 = 1,03) a été comparé au score en valeur absolue de l’incivil par rapport au jugement intermédiaire (M = |2,10-5| = 2,90), différence qui s’est révélée significative en faveur de l’incivil [F(1,118) = 8,56, p < 0,001, η² = 0,07].
-
[6]
Le score du civil par rapport au jugement intermédiaire (M = 13,64-10 = 3,64) a été comparé au score en valeur absolue de l’incivil par rapport au jugement intermédiaire (M = |4,48-10| = 5,52), différence qui s’est avérée significative en faveur de l’incivil [F(1,78) = 3,65, p < 0,000, η² = 0,04].
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