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L’économie sociale
ESS genevoise
En Suisse, les Genevois aussi ont leur chambre de l’économie sociale et solidaire (ESS) : l’Après-GE, qui fédère plus de 270 entreprises et organisations. Cet organisme vient de publier une enquête statistique sur l’ESS [1] à Genève, qui insiste notamment sur « la mise en évidence de toute une série de bonnes pratiques répandues dans l’ESS genevoise. Ainsi, les femmes représentent près de la moitié des membres des directions exécutives. Les entreprises et organisations de l’ESS intègrent trois fois plus d’apprenti(e)s que la moyenne observée dans le canton de Genève. Elles sont 80 % à offrir des prestations sociales supérieures au minimum légal. Quatre-vingt-dix pour cent des entreprises et organisations de l’ESS ont adopté des mesures concrètes pour réduire l’impact environnemental de leurs activités et de leurs salarié(e)s. L’étude statistique confirme que les entreprises et organisations de l’ESS constituent une économie locale, non délocalisable et à fort impact sociétal ».
Les statistiques présentées, portant sur 208 des organismes membres de la chambre, présentent des chiffres dans les domaines suivants : les caractéristiques générales de l’ESS (domaines d’activité, formes juridiques, volume financier, etc.) ; l’emploi (salaires, prestations sociales, bénévolat, etc.) ; l’égalité des sexes (proportion de femmes dans les structures, les organes stratégiques, les directions exécutives, etc.) ; la responsabilité sociétale (double qualité, placements éthiques, transparence, etc.) ; la responsabilité environnementale ; et, enfin, le financement (public, privé, autofinancement, etc.).
De l’Europe aux régions : quels financements pour l’ESS ?
Le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RTES) et l’Agence d’ingénierie et de services pour entreprendre autrement (Avise) ont présenté, en janvier dernier, les résultats d’une étude sur la place de l’ESS dans l’utilisation des fonds issus des programmes opérationnels régionaux Feder-FSE (Fonds européen de développement régional-Fonds social européen) en 2014[2]. Ce sigle désigne deux des fonds structurels européens débloqués pour la période 2014-2020 dans le cadre de la stratégie Europe 2020, dont l’objectif est de soutenir une « croissance intelligente, durable et inclusive ». Ces fonds totalisent 960 milliards d’euros pour les vingt-huit pays, sur sept ans. La France bénéficie d’un total de 26,7 milliards d’euros, dont 8,4 milliards pour le Feder et 6 milliards pour le FSE. Sur ce total, pas moins de 20,5 milliards d’euros sont gérés au niveau régional. C’est donc bien dans les régions qu’il est intéressant d’observer comment ces fonds sont utilisés.
Concrètement, chaque conseil régional détermine un programme opérationnel (PO), divisé en plusieurs axes, définis selon les onze objectifs retenus par la Commission européenne. A titre d’exemple, voici trois des sept axes du PO des Pays de la Loire : améliorer l’accès aux technologies de l’information et de la communication, leur utilisation et leur qualité ; améliorer la compétitivité des petites et moyennes entreprises ; soutenir la transition vers une économie à faibles émissions de carbone dans l’ensemble des secteurs.
Il ressort de l’analyse du RTES et de l’Avise que seules cinq des vingt-sept régions (avant réforme territoriale) ont un objectif spécifique dédié à l’ESS (l’Alsace, l’Aquitaine, l’Ile-de-France, la Picardie et Rhône-Alpes). A noter cependant que, dans les autres régions, un soutien explicite peut être donné à des projets portés par des entreprises d’ESS, identifiées comme telles. L’étude mentionne également qu’apparaissent dans certains programmes opérationnels des thématiques proches, telles que l’innovation sociale ou l’insertion par l’activité économique.
Il est en tout cas manifeste, au vu des sommes engagés, que le secteur a un fort intérêt à faire reconnaître au niveau régional son positionnement par rapport aux grandes orientations communautaires.
Un guide sur l’utilité sociale
Etre capable de mesurer les effets de son activité est un enjeu crucial pour l’ESS. Comme le montre l’exemple européen déjà cité, il est essentiel de se rendre visible auprès des acteurs externes, notamment les pouvoirs publics. Pour un secteur qui revendique des actions ne se réduisant pas à leur impact économique, l’évaluation de l’utilité sociale prend une importance toujours plus grande [3]. Cette notion a cependant des contours flous, et aucune méthode de mesure n’est universellement reconnue. C’est à cette problématique qu’un groupe d’universitaires et d’acteurs de l’ESS se sont attaqués, dans le cadre du projet Connaissance et reconnaissance de l’utilité sociale en ESS (Corus ESS), porté par l’association Acteurs pour une économie solidaire (Apes), le laboratoire Clersé (Centre lillois d’études et de recherches sociologiques et économiques) de l’université de Lille 1 et l’Institut du développement et de la prospective (IDP) de l’université de Valenciennes. Leur travail a abouti à l’écriture d’un « alter’guide » titré Evaluer l’utilité sociale de l’économie sociale et solidaire [4] et paru début 2015. Les auteurs, V. Branger, L. Gardin, F. Jany-Catrice et S. Pinaud, précisent bien que leur travail (une recherche-action menée sur trois ans) ne visait pas à donner une « méthode clés en main pour mesurer l’utilité sociale d’une activité », cette dernière ne pouvant pas « être définie de manière extérieure aux acteurs ». En revanche, l’alter’guide a l’ambition d’« [éclairer] le lecteur sur les origines de la montée en puissance de cette notion d’utilité sociale. Il fournira quelques clés de compréhension autour des enjeux de méthodes. Plusieurs ont été expérimentées dans trois filières prises pour exemple : les circuits courts alimentaires […], la finance solidaire […] et l’habitat participatif […]. Chacune comporte ses atouts et ses biais, qui ont été analysés. Au final, on retiendra que c’est dans la négociation collective sur un territoire que les dimensions de l’utilité sociale doivent être dessinées ».
La finance participative a le vent en poupe
L’association Financement participatif France (FPF) a publié un baromètre 2014 du crowdfunding, établi sur la base d’une enquête effectuée auprès de quarante-six plateformes de financement [5]. On y apprend que 152 millions d’euros ont été investis de cette façon en 2014, par 1,3 million de financeurs en France. Leurs contributions se partagent en trois types : 25,4 millions d’euros d’apport au capital, 38,2 millions de dons et 88,4 millions de prêts. Les contributions moyennes par financeur sont de 4 470 euros pour le capital, 58 euros pour le don sans récompense, 62 euros pour le don avec récompense, 87 euros pour le prêt non rémunéré et 561 euros pour le prêt rémunéré. On retrouve également dans ce baromètre des données sur les domaines d’action des projets soutenus, les catégories d’âge des financeurs ou encore une typologie des porteurs de projet.
Ce secteur, tout neuf, affiche une très forte progression (78 millions d’euros collectés en 2013, 27 millions en 2012) et cherche à se structurer. Nicolas Lesur, président d’Unilend et de l’association FPF, affirmait ainsi au Monde le 18 février dernier : « Le marché va encore doubler, et le secteur va commencer à se structurer. Nous assisterons aussi à plus de porosité avec la finance traditionnelle, ce qui prouve que notre jeune industrie gagne en maturité. » Une porosité qui ne va pas sans soulever également quelques inquiétudes, comme le souligne dans le même article Vincent Ricordeau, président de Kisskissbankbank : « Aujourd’hui, les acteurs de la finance classique se jettent sur le secteur du prêt et importent leur méthode. Certains vont jusqu’à créer des fonds de titrisation tout en se revendiquant de la finance participative. Pour nous, le crowdfunding est une autre façon de concevoir le financement de l’économie, pas un nouveau segment de la finance. »
On retiendra, comme indice des rapprochements en cours, la signature en janvier dernier par le Crédit coopératif – en pointe sur la question – d’une convention de partenariat avec Wiseed, plateforme de financement participatif.
Paris se met au vert
En février dernier, le Conseil de Paris a voté un plan de promotion de l’économie circulaire. Selon l’adjointe au maire chargée de l’économie sociale et solidaire, de l’innovation sociale et de l’économie circulaire, Antoinette Guhl, « l’économie circulaire, c’est inéluctable avec la hausse du coût des matières premières, et c’est indispensable en temps de crise. Il faut arriver à réduire notre consommation de ressources de 15 %. C’est aussi un gisement d’emplois durable : si nous parvenons à structurer la filière, 50 000 emplois pourraient être créés en Ile-de-France » (Les Echos, 26 février 2015).
La rédaction d’un livre blanc est annoncée pour mi-septembre. Celui-ci détaillera des objectifs tels que la réduction, le tri et la valorisation des déchets ou encore l’écoconception, grâce notamment à un partenariat avec une quarantaine d’entreprises, et bien sûr l’incitation par la commande publique. Comme le souligne encore le quotidien Les Echos, plusieurs outils législatifs pourront venir à l’appui de ces ambitions : la loi sur la transition énergétique bien sûr, mais aussi la loi sur l’ESS. En effet, celle-ci « prévoit d’encourager, par la commande publique, les entreprises socialement responsables qui font de l’insertion. Or “c’est souvent le cas des structures de l’économie circulaire, dont beaucoup emploient des salariés en insertion”, précise-t-on au cabinet de la secrétaire d’Etat à l’Economie sociale et solidaire, Carole Delga ». De fait, les entreprises sociales sont incontournables sur ce secteur depuis plus de trente ans.
Les parlementaires votent pour de nouveaux indicateurs de richesse
En janvier dernier était présenté devant l’Assemblée nationale un projet de loi sur « la prise en compte des nouveaux indicateurs de richesse dans la définition et l’évaluation des politiques publiques ». Le 2 avril, le Sénat a voté le texte sans en changer une ligne. La loi est donc adoptée. La députée EELV auteure du projet du loi, Eva Sas, s’en est félicitée sur son site : « L’enjeu de cette loi est que la réussite d’un gouvernement ne soit plus mesurée à l’aune de la croissance du PIB, mais de nos véritables objectifs : l’emploi, la qualité de vie, le revenu réel de nos concitoyens, la préservation de notre environnement. Grâce à cette loi, le gouvernement mettra en place des indicateurs qui nous permettront deux choses : d’une part, d’avoir une image précise du quotidien des Français pour pouvoir l’améliorer et, d’autre part, de remettre du long terme dans nos politiques en évaluant notamment le patrimoine naturel et économique que nous laissons aux générations futures. On a eu trop souvent des décideurs politiques qui pensaient “après moi, le déluge”, avec les nouveaux indicateurs de patrimoine naturel et économique, cela sera plus difficile. » Qu’un Sénat de droite ait voté sans coup férir un tel projet peut étonner. Cela tient peut-être au fait que le texte ne donne aucune définition précise des indicateurs en question. Autant dire qu’à ce stade, on ne sait pas de quoi on parle. Eva Sas précise qu’« un travail sur la définition de ces indicateurs a d’ores et déjà commencé dans une commission conjointe du Conseil économique, social et environnemental et de France Stratégie. Cette initiative débouchera sur une consultation citoyenne : c’est aux citoyens de s’approprier cette loi en déterminant collectivement quelles sont les indicateurs de progrès de notre société. Qu’est-ce qu’une société qui va bien ? Est-ce une société qui améliore son espérance de vie ? Qui réduit les inégalités de revenus ? Qui diminue son empreinte écologique ? Qui continue à investir dans l’avenir ? Qui améliore son niveau d’éducation ? Qui permet à tous d’accéder à un logement décent ? C’est à toutes ces questions que les Français vont devoir répondre. Ce sera ensuite au gouvernement de s’emparer du sujet et d’évaluer les progrès ou les reculs de la France sur tous ces indicateurs lors du budget 2016 ». Avis à toutes les forces susceptibles de se mobiliser sur un tel enjeu, afin de donner un peu de contenu à cette disposition.
Loi ESS : premier accroc
Il n’aura pas fallu longtemps après le vote de la loi ESS, en juillet dernier, pour que l’une de ses dispositions les plus combattues – en particulier par le Medef – le droit d’information des salariés en cas de cession de leur entreprise, soit remise en cause. B. Hamon en avait fait une mesure symbolique, E. Macron entend y mettre un terme. Le Premier ministre a missionné la députée Fanny Dombre-Coste pour étudier la mise en oeuvre de ce droit et en a conclu qu’il était impraticable. C’est à la faveur du vote de la loi croissance et activité, dite loi Macron, que les sénateurs entendent supprimer cette mesure de la loi Hamon. Un des proches du ministre de l’Economie a également déclaré au Figaro : « Personne ne l’a remarqué, mais on a introduit dans le projet de loi initial des éléments qui nous permettront d’introduire des amendements nouveaux lors de la dernière lecture à l’Assemblée, que ce soit sur le droit préalable d’information des salariés ou sur les seuils sociaux. Et, si l’on en croit le quotidien, le gouvernement n’en a pas fini avec ce texte : « Si Emmanuel Macron compte édulcorer la loi Hamon, il n’entend pas pour autant bouleverser l’équilibre de son texte. Pas question d’introduire – ou de retenir des modifications radicales des sénateurs UMP – des articles sur les seuils sociaux, les accords de maintien dans l’emploi ou encore la pénibilité au travail. La plupart de ces questions seront abordées lors de la loi travail de François Rebsamen, en session extraordinaire cet été. Et pourront être votées le cas échéant, comme la loi Macron en première lecture à l’Assemblée, grâce à l’article 49-3 si la majorité socialiste les trouve, une nouvelle fois, un peu trop libérales… »
La France s’engage
Depuis 2014, la présidence de la République a souhaité, par la promotion d’un label « La France s’engage », soutenir des initiatives répondant à trois critères : l’innovation, l’utilité sociale et la capacité à acquérir une dimension nationale et internationale. Il s’agit officiellement d’« identifier, de mettre en valeur, de soutenir et de faciliter l’extension d’initiatives socialement innovantes, portées bénévolement par des individus, des associations, des fondations, au service des défis nouveaux de notre société auxquels les modes d’intervention classiques de la puissance publique n’ont pas encore suffi à répondre ».
Sur les 500 initiatives candidates pour l’année 2015, quinze ont été retenues, déployant des activités d’insertion, d’éducation, d’écologie, de culture et même une alternative psychiatrique. On notera cependant que le caractère bénévole et associatif ne saute pas aux yeux pour toutes ces initiatives, peut-être un peu rapidement qualifiées par l’Etat d’entreprises d’économie sociale et solidaire (ainsi une « conciergerie de quartier » qui commercialise des services de proximité ou encore une « plateforme client » proposant des audits sur l’accessibilité aux sourds et aux malentendants).
On remarquera également que la démarche est dotée d’un fonds de 50 millions d’euros sur tout le quinquennat, financé en partie par l’Etat et en partie par le groupe Total. L’entreprise a en effet conclu en 2009 un partenariat avec la puissance publique « en faveur de la jeunesse », au nom duquel elle abonde un fonds d’expérimentation servant, notamment, au financement de « La France s’engage ». C’est donc en grande partie au géant du pétrole que nous devons le soutien à « une belle ambition, celle de la solidarité, du bien-être, de l’égalité », selon les mots du président.
La coopération
La Fédération du commerce associé défend son modèle de coopération
Le gouvernement Valls 2 déploie tous ses efforts pour annuler certaines mesures prises par la loi Hamon adoptée en juillet dernier. Un autre angle d’attaque a fait réagir très fortement le monde des coopératives de commerçants. C’est par la voix de Michel-Edouard Leclerc, fortement relayée par la Fédération du commerce associé (FCA), que l’on a appris le 30 janvier dernier que le statut des coopératives de commerçants était menacé par une disposition de la loi Macron limitant à neuf ans la durée des contrats entre les magasins et leur tête de réseau. Comme le rapporte le quotidien Les Echos, « la limitation de la durée des contrats est préconisée par l’Autorité de la concurrence, qui estime qu’elle rendra plus facile les changements d’enseigne et renforcera la concurrence, pour le plus grand profit des consommateurs ». Mais, pour la FCA, c’est une décision qui « risque de fragiliser, voire de faire disparaître, plus de 30 000 entrepreneurs indépendants qui emploient plus de 500 000 salariés », et M.-E. Leclerc n’y va pas par quatre chemins en prédisant sur son blog « la mort des coopératives de commerçants détaillants, au profit des groupes capitalistiques ».
Les commerçants coopérateurs reprochent au ministre de l’Economie d’ignorer les différences entre leur modèle et celui de la franchise. Comme le détaille Eric Plat, président de la FCA, « le législateur ne semble pas avoir compris l’ADN du commerce coopératif et associé et mélange les modèles d’organisation. En particulier, dans notre modèle, le commerçant est à la fois actionnaire et utilisateur des services de sa société. Lorsqu’il quitte le groupement, il perd sa qualité d’actionnaire, entraînant de facto la résiliation des contrats sous réserve du préavis prévu. Par conséquent, vouloir imposer une durée maximale du contrat à neuf ans aux groupements coopératifs et associés, d’une façon monolithique, sans distinguer les impératifs financiers et organisationnels de chacun, est inconcevable ».
Au coeur de la polémique, la FCA a également annoncé qu’elle se rebaptisait « Fédération du commerce coopératif associé », histoire sans doute de bien mettre les points sur les i.
Jean-Louis Bancel élu à la tête de Coop FR
Coop FR, l’association représentative des coopératives en France, a changé de président. Le 26 janvier dernier, le bureau a élu Jean-Louis Bancel (directeur du Crédit coopératif) à sa tête. Le communiqué officiel précise que, pour le nouveau président, « la priorité sera de faire évoluer Coop FR d’une vision statutaire, consacrée ces dernières années au travail législatif autour de la loi ESS, à une vision plus centrée sur les pratiques et l’émergence de nouvelles idées pour le renforcement et le développement de la coopération. L’ouverture vers la jeunesse sera au coeur de cette problématique ». Il rend également hommage au travail réalisé par son prédécesseur, Jean-Claude Detilleux (président de la Fondation du Crédit coopératif ainsi que de la Recma).
Libérons les machines
L’open hardware désigne ces objets ou machines dont les plans ont été rendus publics afin qu’ils puissent être modifiés par tout utilisateur qui le souhaite. Cet esprit, calqué sur celui du logiciel libre, est naturellement très présent dans le domaine de l’informatique et des nouvelles technologies. Mais pas seulement : voilà que des agriculteurs s’y intéressent et s’approprient les notions de matériel libre et d’autoconstruction. La société coopérative d’intérêt collectif (Scic) L’Atelier paysan (Rhône-Alpes) est pionnière en la matière en France. Elle diffuse des plans qui peuvent être utilisés directement, comme des notices de montage de matériel agricole, ou bien modifiés pour répondre à des besoins spécifiques. La structure propose également des formations pour ceux qui ne se sentent pas de talents innés de bricoleurs. Elle peut aussi accompagner des projets de développement pour des agriculteurs souhaitant créer une toute nouvelle machine.
En dehors de l’aspect extrêmement adaptable de la démarche et de l’autonomisation des agriculteurs par rapport à l’outil, l’avantage financier est conséquent. Un exemple : une machine qui coûterait de l’ordre de 6 000 euros à l’achat peut être fabriquée par son futur propriétaire moyennant 2 000 euros de matériel et une semaine de travail. Néanmoins, sur son site Internet, la coopérative inscrit sa démarche dans une tradition d’éducation populaire et de réappropriation des savoirs techniques, enjeux de pouvoir. « Savoirs paysans », « biens communs » ou encore « ingénierie collective », autant de termes de son argumentaire qui décrivent clairement un projet : « la réappropriation de savoirs paysans et l’autonomisation dans le domaine des agroéquipements adaptés à l’agriculture biologique. »
Les associations
Les associations sportives mesurent les conséquences de la rigueur budgétaire
En ces temps de rigueur budgétaire, les dotations de l’Etat aux collectivités locales sont en baisse. En octobre dernier, Libération annonçait : « Prévue pour s’étaler sur trois ans entre 2015 et 2017, la baisse atteindra 3,67 milliards d’euros chaque année, répartis en 2,071 milliards pour le “bloc communal” (communes et intercommunalités), 1,148 milliard pour les départements et 451 millions pour les régions. »
Six mois plus tard, les conséquences se font-elles déjà sentir ? Voilà ce dont s’est inquiétée l’Association nationale des élus en charge du sport (Andes), qui a mené une étude sur les subventions versées par les communes aux associations sportives pour la saison 2014-2015. Avec 280 000 associations sportives actives recensées (chiffre donné par le Mouvement associatif en 2012), le secteur est un témoin important des évolutions en cours.
La conclusion principale de l’enquête, menée auprès de 582 communes, est que 24 % d’entre elles ont effectivement baissé les subventions aux associations sportives, 66 % les ont maintenues et 10 % les ont augmentées. Selon le site Localtis, « l’enquête nous apprend en outre que, lorsqu’il y a effectivement baisse des subventions, cette baisse est le plus souvent limitée à 5 % (11 % des répondants) ou à 10 % (9,8 % des répondants). Seules 3,6 % des communes annoncent une baisse des subventions supérieure à 10 %. Parallèlement, les hausses de subventions sont également restreintes. [Ainsi] 7,1 % des communes annoncent une hausse de 5 %, contre 2,8 % seulement qui déclarent une hausse de 10 % ou plus ».
L’Andes a également cherché à savoir si les aides indirectes pouvaient constituer une compensation pour ces pertes de financement. Il ressort que, « si l’on évoque la mise à disposition de matériel, 18,6 % des communes déclarent avoir augmenté leur soutien, contre 4,5 % qui l’ont diminué et 76,9 % pour lesquelles ce soutien n’a pas changé. En revanche, quand il s’agit du soutien en personnel, il y a de nouveau plus de diminution (11,2 %) que de hausse (7,6 %) des aides, tandis que la grande majorité des communes (81,2 %) n’a pas fait évoluer ce type de soutien ». Malgré ces résultats mitigés, l’Andes considère que ce type de soutien pourra aider à amortir le choc dans les deux années à venir.
Les associations face à la conjoncture
Le réseau associatif Recherches et solidarités a publié en janvier dernier sa huitième note sur « les associations face à la conjoncture ». Elle présente les résultats d’une enquête semestrielle auprès d’un panel représentatif de 1 375 responsables associatifs, interrogés entre le 2 et le 19 décembre 2014. Le réseau en résume les conclusions : « Fragilisation, inquiétudes, résistance… Ce sont les trois mots qui résonnent à la lecture des résultats de la dernière enquête auprès des responsables d’association. Fragilisation tout particulièrement de la situation financière : en une année, la proportion des responsables la jugeant favorable est passée de 60 % en décembre 2013 à 52 % en décembre 2014. Inquiétudes accrues pour demain, surtout sur deux sujets intimement liés : l’évolution des politiques publiques était mentionnée par 33 % des répondants en décembre 2013 ; elle l’est par 43 % d’entre eux en décembre 2014. Dans le même temps, la situation financière préoccupait 43 % des dirigeants ; elle figure aujourd’hui au premier rang, avec 52 % des répondants, devant la question du bénévolat. Ces tensions apparaissaient déjà dans l’enquête du printemps dernier. S’ajoutent aujourd’hui des inquiétudes plus fortes en ce qui concerne les relations avec les collectivités territoriales (32 % contre 27 %), depuis que les réformes territoriales commencent à se traduire dans les faits.
« Et résistance des dirigeants : ils ne sont que 52 % à se dire satisfaits des finances et 48 % du bénévolat, ils sont pourtant 63 % à juger positivement la situation générale de leur association, et ce au prix d’une adaptation constante à la réalité du moment. Par ailleurs, malgré un contexte difficile et tendu, ils sont 53 % à se dire optimistes pour les premiers mois de 2015, et plus nombreux encore à envisager de nouvelles actions. »
A noter cependant que, malgré « un contexte général empreint de morosité, de difficultés économiques et sociales, le nombre de créations d’associations se situe toujours à la hausse, en particulier pour des activités socio-éducatives, culturelles et de plaidoyer. Signe de dynamisme, mais aussi risque de concurrences… » et que « l’emploi associatif parvient à se maintenir : les chiffres de l’Acoss-Urssaf pour le troisième trimestre 2014 affichent une évolution de 0,1 %, contre – 0,1 % pour l’ensemble du secteur privé. Sur un an (octobre 2013-septembre 2014), la progression associative a été plus forte que pour l’ensemble du secteur privé : + 0,6 % contre 0 % en termes d’emplois, et + 2,2 % contre 1,4 % en termes de masse salariale »…
Les mutuelles
En Grèce, le secteur mutualiste à genoux
Alexis Krauss est un ancien banquier mutualiste athénien. Le 10 mars dernier, il racontait à L’Humanité dans quel état se trouve le secteur mutualiste grec, dans un pays où la crise n’en finit pas : « Les premières caisses mutuelles d’entraide autogérées apparaissent en Grèce à la fin du xixe siècle. Cela concerne les maîtres d’école, les ouvriers, les mineurs et les employés de banque. Il s’agit alors de pouvoir payer les retraites. Dans les années 1930, une nouvelle vague de caisses d’entraide apparaît avec l’arrivée massive des réfugiés d’Asie mineure. En tout, un million et demi de personnes doivent s’intégrer dans un pays de cinq millions d’habitants. […] Au départ, la plupart de ces caisses se constituent en personnes juridiques de droit privé. En 1933, alors à la tête de son dernier gouvernement, Eleftherios Venizelos lance la sécurité sociale, et les nouvelles catégories de mutuelles qui accompagnent la sécu deviennent donc des personnes juridiques de droit public.
« Quatre-vingts ans plus tard, la Grèce a fait un bond en arrière considérable. Les politiques d’austérité ont tué un système déjà fragile. Officiellement, 30 % des Grecs n’ont plus de couverture sociale et doivent payer intégralement l’ensemble de leurs frais de santé. Avant la mise en place des politiques d’austérité, la sécurité sociale possédait une vingtaine de caisses. Il n’en reste plus qu’une seule. […] Avec les fonds de pension, les caisses de sécurité sociale possèdent 20 milliards d’euros d’obligations d’État, soit quelque 10 % de la dette grecque.
« […] Derrière, une guerre sourde menée par certains lobbies dans l’Union européenne fait rage. Ils militent pour que ce soit le secteur privé et non les mutuelles qui prenne en main tout ce qui dépasse le seuil de la sécurité sociale. […] Aujourd’hui, seules cent mille personnes sont concernées par les mutuelles en Grèce [pour 40 millions d’habitants]. Il faudrait redonner du souffle à ce mode de solidarité. »
Le Gema satisfait après l’intégration de Solvabilité 2
La transposition de la directive Solvabilité 2 en droit français s’est achevée le 31 mars dernier. Le Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (Gema) a exprimé sa satisfaction après avoir longtemps bataillé sur deux points : la reconnaissance des présidents de mutuelle comme dirigeants effectifs (exerçant donc l’un des deux « regards croisés » de la règle de bonne gouvernance dite des « quatre yeux ») ; et la reconnaissance de deux types de groupements : la société de groupe d’assurance mutuelle (Sgam, modèle intégrateur) et le groupement d’assurance mutuelle (Gam, modèle non intégrateur).
Pascal Demurger, président du Gema, a ainsi commenté ces deux points sur le site de l’organisation : « Considérer que le président du conseil d’administration (CA) ne puisse être un dirigeant effectif n’était pas une position acceptable car, issu des sociétaires, il en est le représentant légitime !
« Le texte de transposition fixe quelques critères encadrant la définition d’un dirigeant effectif et mentionne expressément que le président du CA peut en être un s’il y répond : nomination par le CA, compétence et pouvoirs suffisamment larges, disponibilité suffisante, implication dans les décisions ayant un impact important sur l’entreprise. […]
« Initialement, la société de groupe d’assurance mutuelle (Sgam) avait été conçue, à la demande du Gema, comme une structure souple permettant à ses membres de nouer des liens de solidarité importants et durables. Cette souplesse a fait naître, sur le marché, des Sgam plus ou moins intégrées.
« Avec la transposition de la directive Solvabilité 2, la Sgam va être modifiée afin de devenir de manière indiscutable un groupe prudentiel dans lequel l’entreprise de tête exercera une influence dominante au moyen d’une coordination centralisée sur les décisions, y compris financières, des entreprises affiliées.
« Afin de coller à la réalité du terrain et parce que la formation de groupe mutualiste doit rester graduelle, les mutuelles du Gema souhaitaient que ce durcissement des Sgam existantes ne se fasse pas sans la création concomitante d’une autre forme de groupe plus souple, le Gam. Cet autre modèle permettra alors aux Sgam actuelles qui ne seraient pas en adéquation avec la définition de la directive de perdurer sous cette nouvelle forme, sans s’imposer toutes les contraintes liées aux groupes prudentiels. »
Parties annexes
Notes
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[1]
Consultable sur le site de la chambre : www.apres-ge.ch/node/54576.
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[2]
Consultable en ligne : rtes.fr/IMG/pdf/Note_PO_1501.pdf.
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[3]
Sur la question de l’évaluation, lire dans ce numéro l’article d’E. Besançon et N. Chochoy, « Les marqueurs d’innovation sociale ».
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[4]
Consultable en ligne : clerse.univ-lille1.fr/IMG/pdf/AlterGuide-2014.pdf.
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[5]
Consultable en ligne : financeparticipative.org/barometres/annee-2014.