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La lecture nuit grandement à l’ignorance.
Deux événements, à première vue peu liés entre eux m’ont incité à écrire le présent éditorial : la saga de la dernière élection présidentielle américaine et certaines réactions aux propos d’Olivier Bernard dit le « Pharmachien » à la suite de son passage à l’émission Tout le monde en parle sur la chaîne télévisuelle de Radio-Canada. Je tenterai de montrer que le lien entre ces deux événements est constitué de trois éléments : a) la préséance des opinions sur les faits dûment vérifiés, b) l’importance démesurée accordée aux émotions et aux témoignages à titre d’argument et c) le manque de culture scientifique, plus particulièrement en ce qui concerne le processus d’évaluation par les pairs inhérent aux publications scientifiques.
D’une certaine façon, le contenu de cet éditorial s’inscrit dans la foulée de deux catégories de textes publiés au cours des dernières années en Éditorial et dans la rubrique Controverse. Il s’agit de textes qui traitent du fonctionnement de la science, de l’importance de la culture scientifique, mais aussi de textes qui ont trait à l’utilisation d’approches pseudoscientifiques ou paranormales considérées non valides, voire nuisibles, par la communauté scientifique. Cet éditorial constitue également une introduction à deux textes qui paraissent dans la rubrique Controverse du présent numéro : « Les miracles au péril de la science » et « Second regard sur le processus d’évaluation par les pairs ». Il comprend deux parties. La première est consacrée à l’analphabétisme scientifique et la seconde, au processus d’évaluation par les pairs.
Partie 1 – L’analphabétisme scientifique
Cette première partie comprend trois sections consacrées respectivement au règne de l’opinion ou l’ère post-factuelle, à l’agnotologie et aux biais de confirmation.
Le règne de l’opinion ou l’ère post-factuelle
D’abord un constat : pour fonctionner, le cerveau a besoin de sens. Or, qu’est-ce qui produit d’emblée du sens devant un phénomène par exemple? Les croyances de quelque nature qu’elles soient! De fait, nous sommes naturellement crédules, c’est une propriété programmée de notre cerveau. Mais quand il s’agit de dépasser la croyance pour expliquer tel phénomène, on recourt au raisonnement, et celui-ci fait appel à l’esprit critique et à son pendant, le scepticisme. Le travail intellectuel ainsi amorcé requerra des apprentissages, donc un effort volontaire et une vigilance constante pour débusquer les erreurs et répondre aux doutes qui parsèment nécessairement une telle démarche (Dawkins, 1996; Larivée, 2009).
La valorisation de l’opinion au détriment des faits a ouvert la porte à une ère post-factuelle où les faits dûment vérifiés n’ont plus guère importance. Il suffit de répéter ad nauseam une affirmation pour que celle-ci acquière le statut de «vérité» suivant le principe énoncé par Klatzman (1985) : dites n’importe quoi, mais avec assurance, et on vous croira.
La saga de la dernière campagne présidentielle des États-Unis en 2016 en constitue un exemple percutant : Donald Trump et Hilary Clinton pouvaient affirmer à peu près n’importe quoi sans vraiment avoir à démontrer la véracité de leurs dires. Tandis que le NYT (New York Times) et le WaPo (Washington Post) débusquaient toutes les imprécisions, approximations et mensonges proférés par Trump (dont plus de trente en une seule journée), de nombreux journaux en ligne publiaient ceux de Clinton. Bien sûr, mentir n’a jamais empêché un politicien d’être élu. À cet égard, Brousseau (2016, p.B1) rappelle trois citations célèbres qui témoignent du règne de l’opinion à d’autres époques :
« Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose »
Voltaire
« Un mensonge répété dix mille fois devient une vérité »
Goebbels
« Plus le mensonge est gros, plus les gens y croiront »
Lénine
Largement diffusées par les médias sociaux (Facebook, Twitter, Instagram, Snapchat), ces fausses vérités véhiculées durant toute la campagne, ont rapidement envahi l’espace public empêchant du coup toute validation factuelle. Quoi qu’il en soit, même après vérifications, les résultats ne pouvaient guère changer grand chose puisque les partisans de l’un et de l’autre s’informent essentiellement auprès des médias relayant leur discours avec complaisance.
Qui plus est, l’exploitation de l’émotion et le règne de l’opinion au détriment des faits confirme que nous sommes bel et bien dans une ère post-factuelle; par conséquent, pourquoi se préoccuper de la vérité? Le Dictionnaire britannique Oxford a officialisé en quelque sorte ce constat en choisissant le mot « post-vérité » (post-truth) comme mot de l’année 2016 en raison de l’augmentation de son usage (2000 % par rapport à l’année précédente), particulièrement dans le contexte du vote en faveur du Brexit en Angleterre et de l’élection de Donald Trump aux États-Unis. Vinogradoff (2016) rapporte les propos du financier Arran Banks à propos des résultats du Brexit : « Une campagne politique se gagne par l’émotion et non plus par la démonstration […]. Les faits, ça ne fonctionne tout simplement pas. Vous devez vous connecter émotionnellement avec les électeurs. C’est le succès de Trump ». La post-vérité a d’ailleurs pris un tournant majeur lorsque Kellyanne Conway, porte-parole de Trump, a tenté de justifier ses mensonges par l’existence de « faits de remplacement » (alternatives facts) .
Quoi de mieux pour bafouer les faits que de brancher les gens sur leurs émotions plutôt que de faire appel à la capacité de raisonnement (Thibodeau, 2016a, 2016b)? Les réunions animées par les preachers sont à cet égard exemplaires. Pour s’assurer que les émotions priment sur la raison et les faits dûment vérifiés, on survalorise les témoignages, une méthode particulièrement efficace. Dès qu’un témoignage touche une corde sensible, on tend à adhérer aux dires ou aux phénomènes qui font l’objet du témoignage. Certains médias sont passés maîtres dans cet art, sous prétexte de montrer les deux côtés de la médaille. Dans la plupart des cas, il ne s’agit pas des deux côtés d’une même médaille, mais bien de deux médailles : l’une concerne des faits et l’autre, une opinion fondée sur des croyances jamais validées (Larivée, 2014).
D’autre part, on connaît aussi les thèses des constructivistes et autres relativistes mises de l’avant dès le début des années 1980 par Bloor et Barnes (Bloor, 1991; Barnes et Bloor, 1981) dont des échos ont retenti au début du XXIe siècle (Dufour, 2010; Schinckus, 2008). Ces auteurs sont d’avis que toutes les connaissances se valent et que la science serait un mode de connaissance parmi d’autres, au même titre que la magie, l’astrologie ou la religion. Du coup, la démarche scientifique, vidée de son contenu et de ses résultats, ne revêtirait plus que le statut d’une vision du monde parmi d’autres (Thuillier, 1997). Concéder qu’une théorie puisse être mise de l’avant pour des raisons autres qu’objectives ne revient pas à affirmer que rien n’est objectivement vrai. En mettant la science sur le même pied que les mythes, la superstition, l’astrologie ou les « faits de remplacement », on nie ipso facto que la quête objective de la vérité puisse constituer le but de la recherche scientifique (Bogohsian, 1997). Autrement dit, comme tout est relatif, il n’y aurait pas de vérité, mais seulement des opinions, ce qui a permis à Donald Trump de proférer les pires stupidités en matière de science dont Valérie Borde (2016) a dressé une liste :
« Le changement climatique est un coup monté des Chinois pour tuer l’industrie américaine, les vaccins causent l’autisme et rendent les enfants malades, les Centres for Disease Control […] vont répandre l’Ebola et l’anthrax chez les Américains, les éoliennes sont dangereuses pour la santé, les ampoules fluorescentes donnent le cancer et, bien entendu, la théorie de l’évolution est une fumisterie des athées… […] Bref, Donald Trump n’a manqué aucune occasion de surfer sur la vague de l’antiscience et de renforcer les mythes les plus tenaces, décriant le travail des National Institutes of Health […] ou de la NASA […], auxquels il dit vouloir donner un sérieux coup de barre, et en remettant en question l’accord de Paris sur le climat […]». À cet égard, Baillargeon (2016) note que Trump a même expliqué au réseau Fox News que « personne ne sait vraiment si le changement climatique existe ». « Personne? Vraiment? Même les dizaines de milliers de savants qui ont établi ce fait maintenant quasi irréfutable? ».
Pour sa part, après son passage à l’émission Tout le monde en parle, Olivier Bernard, dit le « Pharmachien » a été taxé en moins de 48 heures, par certains citoyens de «charlatan, pauvre type, danger public majeur, épave remplie de produits chimiques, pauvre con, formaté par la grosse pharma, terroriste de la santé publique, membre de la mafia médicale, démagogue, pelleteux de cour (je ne l’ai pas comprise, celle-là), payé pour mentir, Dieu de la propagande, disciple de Pfizer, lobbyiste, pharmachiant et génie de l’épouvante! » (Vadeboncoeur, 2016). Pourtant, les seuls propos raisonnables qu’il pouvait tenir étaient de montrer que les faits présentés découlaient de recherches publiées dans des revues scientifiques avec comités de lecture. Ce qu’Olivier Bernard avait fait. Mais il s’est heurté à l’analphabétisme scientifique, ce qui n’est pas sans conséquence. Lorsque les opinions et l’irrationnel priment sur des faits dûment vérifiés et un sain questionnement, les rouages de la démocratie ne peuvent guère fonctionner. L’absence de culture scientifique laisse en effet le champ libre à toutes sortes de croyances qui peuvent en outre se renforcer mutuellement, que ce soit en politique, en matière religieuse, ou dans le domaine pseudoscientifique.
Le fonctionnement actuel de la société semble formaté pour favoriser le règne de l’opinion. Qu’elles se valent toutes semble elle-même une opinion partagée au premier chef par les médias. Il n’est donc guère surprenant qu’à la radio et à la télévision on incite les citoyens à donner leur opinion : « contactez-nous, votre opinion nous intéresse ». À cet égard, les réseaux sociaux leurs ménagent un terreau fertile. Que les gens aient le droit d’exprimer leurs opinions, soit! Bachelard (1938/1972) rappelle toutefois, dans La formation de l’esprit scientifique, que non seulement une opinion non fondée n’est pas un fait, mais qu’elle est un obstacle épistémologique majeur à la formation de l’esprit scientifique. L’accès à la connaissance scientifique passe par le deuil des opinions, car si toutes les opinions se valent, c’est en fonction de leur plus petit dénominateur commun : elles ne valent rien.
Agnotologie
Le savoir scientifique a émergé parce que l’homme s’est rendu compte qu’il ne savait pas. Selon Harari (2015), « la Révolution scientifique a été non pas une révolution du savoir mais avant tout une révolution de l’ignorance » (p.296) en vue de trouver une réponse à des questions sans réponse. Les scientifiques ont rapidement compris que même si les réponses à leurs interrogations étaient non seulement partielles, mais provisoires, elles allaient quand même permettre d’améliorer certaines conditions de vie et de déboucher éventuellement sur des avancées technologiques impressionnantes.
Par contre, on observe de nos jours la suprématie des opinions sur les faits, favorisant du coup l’ignorance. L’historien des sciences R.N. Proctor (2011; Schiebinger et Proctor, 2008) a fait de l’agnotologie, l’étude des pratiques culturelles de l’ignorance, sa spécialité (Foucart, 2011,2013). Sa dénonciation de l’industrie du tabac, des climato-négationnistes et des anti-vaccins en constituent des exemples. Alors que des connaissances fiables attestées par la recherche scientifique sont disponibles, Proctor (2011) se demande pourquoi « nous ne savons pas que nous ne savons pas ». De toute évidence, avoir davantage accès à plus d’informations grâce à l’Internet, par exemple, ne permet pas de favoriser chez tous les utilisateurs l’accès à une meilleure information. Selon Proctor, l’exploitation de l’ignorance jouerait un rôle important dans le succès de nombreuses industries, c’est dire la force de son pouvoir. Celle-ci « peut, en effet, être créé de toutes pièces par des stratégies de désinformation, de censure, ou bien entretenue par des stratégies de décrédibilisation de la science ». Bref, l’ignorance des populations confère à ces industries ou à des partis politiques un pouvoir sur la population (Firestein, 2012; Girel, 2013).
Deux procédés sont particulièrement prisés par les promoteurs de fausses croyances. Le premier procédé consiste à recourir à un vocabulaire emprunté à la science pour vendre leur approche et à truffer leurs discours de termes spécialisés cités hors contexte qui donnent du brio à leurs propos tout en ayant rien à voir avec la démarche scientifique (Hill, 2012). Le deuxième procédé est encore plus pernicieux : le recours au scepticisme comme stratégie de communication. Les exploiteurs de l’ignorance ont compris que faire appel au doute de manière virulente est une bonne stratégie de communication (Torcello, 2011, 2012). Il s’agit alors, dans un premier temps, de bien mettre en évidence que les scientifiques prônent le doute raisonnable qui débouche rarement sur des certitudes absolues. Si la science est incertaine, alors tout est incertain. Une fois le doute mis en place, il ne reste plus qu’à organiser l’affrontement entre deux camps (Oreskes et Conway, 2012). Les chances favorisent bien sûr le cas de figure suivant : la partie de la population qui n’a pas d’opinion tranchée en conclura qu’au fond rien n’est tout blanc ni tout noir, et que la vérité se situe probablement à mi-chemin entre les deux options. Ils trouveront alors plus raisonnable de tenir compte des deux points de vue. C’est ce que font certains journalistes férus d’équité : ils consacrent le même espace au « pour » et au « contre » de tout sujet controversé, tentant de relier, par exemple, l’astronomie et l’astrologie. Pourtant les lois naturelles ne se démontrent pas en soupesant les arguments des deux procureurs. Comme dit précédemment, science et pseudosciences ne sont pas les deux côtés d’une médaille, mais bien deux médailles distinctes (Larivée, 2014). Noyer les citoyens d’informations contradictoires les empêchant ainsi d’avoir une idée plus juste de la réalité et en faisant fi de toute attitude scientifique, c’est faire la promotion de l’ignorance.
Borde (2016) se demande : « Pourquoi discréditer la science et les experts est-il un discours aussi porteur?» Une partie de la réponse réside probablement dans le fait qu’écarter les experts permet de valoriser la parole du monde qui écoute la radio ou regarde la télévision. En mettant l’accent sur le fait que leur opinion compte c’est une façon de les considérer et de s’assurer de leur fidélité. Une autre partie de la réponse réside probablement dans le manque de culture scientifique d’une frange importante de la population.
J’ai peine à m’imaginer le sort réservé à la science aux États-Unis avec l’élection de Donald Trump. Le rejet ou l’ignorance des connaissances scientifiques dans les décisions politiques risquent de s’amplifier. Espérons toutefois que des questions comme celles que Dan Goldin, l’administrateur de la NASA du temps de George Bush, s’est fait poser lors d’une discussion relative au budget de l’agence spatiale ne surviennent pas à nouveau : « Pourquoi construire des satellites météorologiques alors que nous avons le canal Météo » (Augustine, 1998, p.1640). La nomination de Ben Carson, un neurochirurgien diplômé de l’Université de Yale à titre de Secrétaire au logement et au développement urbain par Trump ne laisse présager rien de bon. Rappelons ici les propos de Carson rapportés par Boucar Diouf (2016) à l’effet que « les pyramides d’Égypte sont en vérité de gigantesques silos à grain construit par Saint-Joseph pour le stockage du blé. Pour étayer sa certitude, le toubib raconte que les pyramides ne peuvent en aucun cas être des tombeaux royaux comme le pensent les archéologues, car cela équivaudrait à dire que les pharaons étaient des géants » (p. A21). L’équipe de Trump est à cet égard bien fournie en ennemis des sciences. Le 27 janvier 2017 « Myron Ebell, chef de l’équipe de transition de Trump à l’agence de protection environnementale (EPA), promettait de couper au moins 50 % dans le personnel de l’agence, surtout dans les postes scientifiques ». Niant la menace des changements climatiques, il a déclaré : « La chaleur, c’est bon, tant qu’on a l’air climatisé » (Côté, 2017). Ces craintes sont maintenant confirmées avec la nomination de Scott Pruitt, un climato-négationniste, à la tête de l’EPA (Shields, 2017).
Le biais de confirmation
Internet a révolutionné la circulation des connaissances. On a alors pensé que les connaissances l’emporteraient sur les croyances mais, tel ne fut pas le cas. En présence d’une pléthore d’informations sur la circulation des connaissances, « toutes les conditions sont alors réunies pour que le biais de confirmation puisse donner la pleine mesure de ses capacités à nous détourner de la vérité » (Bronner, 2013, p.35). Le biais de confirmation survient principalement lorsque confronté à un ensemble d’informations, un individu sélectionne celles qui confirment ses propres croyances et ignore toutes celles qui pourraient les contredire ou les sous-estimer (Guégen, 2016; Nickerson, 1998). Autrement dit, parmi une foule d’informations, certains individus tendent à ne retenir que celles qui apparaissent correspondre à leurs attentes, indépendamment de celles qui pourraient contredire ou nuancer leur pensée.
Ce comportement irrationnel a été bien expliqué par Festinger (1957), qui a clairement montré que le cerveau ne peut tolérer la dissonance cognitive. En d’autres termes, les gens sont en quête de cohérence cognitive et ont donc besoin de penser que leurs opinions et leurs comportements sont compatibles. Lorsqu’une opinion est démentie par les faits, des mécanismes se mettent en place pour réduire la dissonance. L’individu peut alors nier les faits de façon à sauvegarder la valeur de son opinion ou de sa représentation de la réalité (Larivée, 2009, 2014). En fait, même confrontés à la dissonance cognitive, les individus peuvent trouver le moyen de conserver leurs croyances intactes, comme le montrent les résultats du Public Institute de Washington qui a posé la question suivante à l’électorat cible de Trump, les Blancs protestants évangéliques : « Un individu qui a commis des actes immoraux dans sa vie privée, est-il en mesure de se comporter de manière éthique dans sa vie publique et professionnelle? » En 2011, 30 % ont répondu « oui ». À l’automne 2016, au moment de l’élection américaine ce pourcentage a grimpé à 72 %. Évidemment, cet échantillon de Blancs évangéliques n’est pas tombé dans l’immoralité. Ces répondants ont simplement réaménagé leurs croyances pour continuer à favoriser Trump sans se percevoir comme inconhérents: « Dieu a toujours utilisé des gens imparfaits pour réaliser sa gloire » (Ulmi, 2016).
Outre la résistance à la dissonance cognitive, les réseaux sociaux sont paramétrés de manière à garder en mémoire les dernières recherches des utilisateurs. Dans un monde de plateformes, les algorithmes façonnent les services offerts aux internautes en tenant compte de leurs biais cognitifs pour mieux les y enfermer (Benevant, 2016). En effet, forts de la liste des intérêts propres à chaque individu, ils peuvent dès lors dresser leur portrait et les orienter uniquement vers leurs centres d’intérêt, limitant ainsi leur ouverture à d’autres opinions que la leur. Il n’y aurait environ qu’un tiers des internautes qui serait confronté à d’autres opinions ou références que les leurs (Purcel et Rainie, 2014). Par exemple, à la suite d’un achat de livre en ligne sur Amazon, le client recevra des offres d’achat de livres plus ou moins correspondant à son achat, et ainsi de suite. Facebook et Google ont récemment compris qu’il fallait éliminer les fausses nouvelles de leurs sites. Ils ont effectivement lancé des initiatives « pour tenter de freiner la diffusion d’information trompeuse […] Reste à savoir maintenant qui va vérifier le travail des vérificateurs » (Thibodeau, 2017, p. AC21).
Cependant, un individu peut contrer le cloisonnement idéologique créé par les algorithmes. Par exemple, il maintient dans ses « amis » quelques partisans de théories du complot, des membres d’organisations politiques de divers horizons, s’organise pour suivre les contenus de plusieurs journaux (en utilisant la fonction « j’aime ») et ainsi de suite. Mais rien ne garantit que celui qui désire protéger les ponts entre différentes idées ne sera pas rejeté par ceux qui auront voulu garder intactes leurs croyances. Le lien est alors rompu bien malgré lui.
La plupart des individus qui ont une opinion sur un sujet quelconque utilisent spontanément deux stratégies pour renforcer leur adhésion à la dite opinion. Ils consultent d’abord essentiellement les médias qui la confirment et rejettent sans discussion toute information contraire. Il n’est pas rare alors de voir des individus refuser agressivement les faits qui ne correspondent pas à leur vision du monde plutôt que revoir la valeur de leur point de vue à la lumière d’informations contradictoires (Guéguen, 2016). Cette tendance est encouragée par l’utilisation de l’Internet qui est une véritable auberge espagnole considérant toutes les informations sur un pied d’égalité (Thibodeau, 2016a; 2016b). Cette attitude va à l’encontre de ce qui se passe en science où l’on s’efforce d’écouter ceux qui ont des objections, de vérifier les sources d’une proposition, d’évaluer la validité des faits mis de l’avant, la manière dont ils ont été obtenus et la façon dont ils ont été théorisés.
Tel que signalé plus haut, le cerveau humain, façonné par l’évolution, est programmé pour croire. En fait, l’utilité d’une croyance prime sur sa fausseté ou sa véracité (Smith, 2016). Il n’est donc pas étonnant que des individus intelligents, instruits et informés puissent nier les faits qui ne conviennent pas à leurs croyances (Gorman et Gorman, 1984). D’ailleurs, l’activité scientifique n’échappe pas au biais de confirmation (Jelicic et Merckelbach, 2002). On pourrait penser, par exemple, que si Ben Carson était lecteur arbitre d’un article sur l’origine et la nature des pyramides d’Égypte, que sa croyance primerait sur les faits et qu’il rejetterait l’article. La science s’est développée « en passant du surnaturel, du témoignage et de la subjectivité aux faits » (Krivine, 2016, p.11). Un fait n’est dûment vérifié qu’à la lumière de sa conformité à certaines règles. Aussi, les travaux des scientifiques sont-ils, eux aussi, sujets aux diverses possibilités d’un biais. C’est pourquoi ils se sont dotés de mécanismes de régulation dont il sera question dans la deuxième partie de cet éditorial.
Partie 2 - Le processus d’évaluation par les pairs (PÉP)
Cette partie sur le PÉP comprend six sections : une présentation du PÉP et de ses critères d’évaluation, un bref historique du PÉP, l’importance du PÉP pour l’avancement des connaissances, des revues en libre accès aux revues prédatrices, la démonstration de la manière dont les pseudoscientifiques jouent à Galilée et quelques ratés du PÉP.
Présentation du PÉP et de ses critères d’évaluation
Le PÉP constitue un des deux mécanismes de régulation de la science, l’autre étant la reproduction des résultats. Le contrôle par les pairs agit aux deux bouts de la chaine de production scientifique : lors des demandes de subventions de recherche et lors de la soumission des articles dans des revues spécialisées. Seul le deuxième élément illustrera mon propos. Pour faire progresser les connaissances, les scientifiques doivent partager leurs découvertes avec la communauté scientifique et, pour ce faire, s’efforcer de publier leurs résultats dans des revues scientifiques avec comité de lecture. Dès la réception d’un article, le directeur ou le rédacteur en chef en prend connaissance et si le contenu est conforme à la ligne éditoriale de la revue, l’article est alors soumis à au moins deux experts du domaine, appelés lecteurs arbitres, qui en feront l’évaluation. Dans certains cas, leur nombre peut aller jusqu’à six ou sept. On aura compris qu’il est important que le directeur sélectionne des lecteurs arbitres compétents (voir Encadré 1).
Quelques revues procèdent à une évaluation en simple aveugle : les lecteurs arbitres connaissent le nom des auteurs, mais les auteurs ignorent celui des évaluateurs. Toutefois, la majorité des revues procèdent à une évaluation en double aveugle : l’auteur ne sait pas qui a évalué son manuscrit et les lecteurs arbitres ignorent qui a soumis le manuscrit. De cette façon, c’est le contenu qui est évalué et non l’auteur ou son centre de recherche (Moylan, Harold, O’Neil et Kowalezuk, 2014; Mulligan, Hall et Raphael, 2013; Olike, Hug, Koche et Leopold, 2016). Cet anonymat n’empêche toutefois pas, en guise de remerciements, certaines revues de publier une liste annuelle des lecteurs arbitres, sans spécifier quels articles ils ont évalué.
La plupart des revues fournissent également une grille d’évaluation aux lecteurs arbitres. Par exemple, Maggin, Chafouleas, Berggren et Sugai (2016) ont évalué la procédure d’évaluation des articles soumis à 47 revues en special education, les équivalents anglophones de la Revue de psychoéducation. Trente d’entre elles (63,8 %) possédaient une grille d’évaluation. Bien que les critères d’évaluation pour accepter ou refuser un manuscrit peuvent différer d’une revue à l’autre, ils portent normalement à la fois sur le contenu et la forme.
En ce qui concerne l’évaluation du contenu des études empiriques, les lecteurs arbitres doivent habituellement se prononcer sur les aspects suivants :
Le problème abordé est-il clairement formulé?
L’auteur est-il justifié de baser sa recherche sur la théorie présentée?
L’auteur cite-t-il correctement les travaux antérieurs significatifs sur le même sujet?
Les hypothèses sont-elles clairement formulées et bien opérationnalisées?
Les résultats sont-ils suffisamment originaux? Autrement dit, les résultats ne sont-ils qu’une répétition de résultats largement connus sans nouveauté apparente ou des résultats partiels d’une recherche de plus grand envergure que l’auteur se réserve le droit de publier en plusieurs parties, au lieu de publier l’ensemble des résultats. Dans ce cas, la communauté scientifique parle alors de publication « salami » ou The Least Publishable Unit. Concédons ici que les limites de page imposées par les revues encouragent cette pratique.
Au plan méthodologique, le protocole de recherche mis en place est-il approprié?
L’échantillon est-il suffisamment grand pour justifier le type d’analyse utilisé?
Les résultats sont-ils clairement présentés; les figures et les tableaux permettent-ils une meilleure compréhension des résultats?
Les analyses qualitatives ou quantitatives sont-elles pertinentes et bien justifiées?
Les résultats obtenus permettent-ils de tirer les conclusions avancées par l’auteur dans la discussion de ceux-ci?
Les forces et les limites de l’étude sont-elles clairement exposées?
En ce qui concerne la forme, les lecteurs arbitres doivent habituellement se prononcer sur les aspects suivants :
La structure du texte;
La qualité de la langue;
Le respect des normes bibliographiques ainsi que celles qui ont trait à la présentation des tableaux et des figures. Un grand nombre de revues en sciences humaines utilisent les normes de de l’American Psychological Association (APA).
À la suite de la réception du rapport des lecteurs arbitres, le rédacteur en chef envoie habituellement in extenso tous les commentaires à l’auteur. Dans sa lettre, il fera quelquefois une synthèse et insistera, dans le cas de corrections majeures, sur les aspects dont l’auteur devra absolument tenir compte. En fait, la lettre du rédacteur en chef contient habituellement l’une des recommandations suivantes :
L’article est accepté tel quel; en 38 ans à la direction de la Revue de psychoéducation, aucun article n’a été accepté sans corrections;
L’article requiert des corrections mineures;
Des corrections majeures sont requises et dépendamment de la nature de celles-ci, le rédacteur en chef peut soumettre à nouveau le texte au processus d’évaluation en recourant aux mêmes lecteurs arbitres ou à de nouveaux lecteurs arbitres. À la suite de la réception de la nouvelle version du manuscrit, le rédacteur en chef peut le refuser, l’accepter ou demander à nouveau des corrections;
L’article est refusé et l’auteur est alors libre de soumettre son manuscrit à une autre revue.
À titre de rédacteur en chef de la Revue de psychoéducation, j’ai pris l’habitude, au fil des ans, de faire appel à au moins trois lecteurs arbitres, et souvent jusqu’à six, pour au moins deux raisons. Premièrement, la qualité des évaluations peut varier, d’où l’importance de soumettre les manuscrits à plusieurs lecteurs arbitres. Deuxièmement, il n’est pas rare qu’à propos d’un texte évalué, quatre lecteurs arbitres débouchent sur des avis divergents. Par exemple, deux des quatre évaluateurs demandent des corrections mineures, un autre des corrections majeures et le quatrième considère que le texte ne peut pas être publié. Ma décision dépend alors bien sûr de la pertinence et de la qualité des propos des lecteurs arbitres. Dans ce cas de figure, si les évaluations de deux lecteurs arbitres qui demandent des corrections mineures sont mieux justifiées que l’évaluation des deux autres lecteurs arbitres, j’offre l’occasion à l’auteur de soumettre une nouvelle version. L’auteur devra évidemment m’indiquer clairement la manière dont il a tenu compte de l’ensemble des corrections demandées et justifier sa décision d’ignorer certaines d’entre elles si celles-ci lui apparaissent non pertinentes. Les pourcentages de refus varient beaucoup d’une revue à l’autre. Par exemple, au cours des années 2000, Nature refusait 95 % des manuscrits du domaine biomédical. En biologie, la revue Development a passé d’un taux de refus de 50 % dans les années 1990 à 70 % dans les années 2000 (Lawrence, 2003). La majorité des revues auraient, selon Gobert (2008), des taux de refus variant entre 30 % et 50 %. La Revue de psychoéducation a un taux de refus qui oscille autour de 40 %.
Certaines revues ont pris l’habitude de faire parvenir à tous les lecteurs arbitres d’un manuscrit l’évaluation des autres lecteurs arbitres. Il s’agit là d’une forme d’autorégulation leur permettant de valider leur propre évaluation. Cette procédure est particulièrement pertinente pour les chercheurs et les professeurs en début de carrière, ainsi que pour les étudiants au doctorat dont les directeurs profitent de l’occasion afin de les initier au processus d’évaluation par les pairs (DeVries, Marschall et Stein, 2009). Mon expérience à cet égard montre que ces derniers apprennent rapidement à faire de très bonnes évaluations (voir encadré 2).
Bref historique du PÉP
Même si actuellement le PÉP est considéré essentiel par la communauté scientifique pour assurer la qualité et la pertinence des résultats scientifiques publiés, on oublie souvent que cette pratique ne s’est généralisée qu’au début du 20e siècle (Burnham, 1990; Spier, 2002). La création du PÉP dans sa forme actuelle est survenue en mars 1665 lors de la création des Philosophical Transactions of the Royal Society of London (De Silva et Vance, 2017; Gingras, 2014). Plusieurs prix Nobel et des chercheurs célèbres, dont Newton et Einstein, ont eu des manuscrits rejetés. Ainsi, en 1936, Einstein, habitué à les voir acceptés d’emblée fut non seulement surpris d’apprendre que son texte avait été évalué, mais également que le lecteur arbitre considérait que ses calculs étaient erronés. Frustré, il retira son texte, ce qu’il ne l’empêcha pas de publier l’année suivante une nouvelle version qui intégrait les commentaires du lecteur arbitre (Kennefick, 2005).
L’importance du PÉP
Comme nous l’avons développé dans la première partie de cet éditorial, l’opinion règne de plus en plus en maître et, de ce fait, trop peu de citoyens semblent pouvoir faire la distinction entre des faits solidement démontrés et des opinions. Convenons que la compréhension du fonctionnement du PÉP serait un pas dans la bonne direction. Or, celui-ci est loin d’être un sujet à la mode dans la société; il est plutôt réservé au monde de la science. Depuis la venue d’Internet et des réseaux sociaux, où on retrouve de tout, il me semble que la nécessité de distinguer ce qui relève de la science, des pseudosciences, du paranormal ou d’une simple opinion sans fondement empirique s’impose.
Avec la démarche scientifique, on est loin de l’instantanéité des médias sociaux. La confusion entre les données empiriques colligées dans le cadre d’une recherche et de simples opinions est accentuée par les publications sur Internet et les livres dit grand public dans lesquels on présente souvent des approches non validées (Larivée, 2002; Larivée, Sénéchal, Miranda et Vaugon, 2013). De plus, les quotidiens qui raffolent de témoignages et de nouvelles sensationnelles maintiennent la confusion entre l’expertise et l’expérience subjective ou l’anecdote. C’est le cas notamment des promoteurs de thérapies alternatives, qui ne se soucient guère de l’absence de démonstration de leurs approches. Pourtant, Hargreaves, Lewis et Speers (2003) ont bien montré qu’un large public souhaite avoir accès à une information scientifique de qualité de la part des journalistes.
Si exprimer son opinion par l’entremise des réseaux sociaux relève de l’instantanéité, la publication d’un article scientifique dans une revue avec comité de lecture prend du temps. Il y a d’abord la période nécessaire pour obtenir une subvention de recherche, effectuer la recherche, analyser les résultats et rédiger l’article, ce qui se calcule souvent en termes de mois, voire d’années, particulièrement dans le cas des études longitudinales. Par ailleurs, il faut ajouter le délai entre la date de soumission de l’article et sa publication, qui dépasse souvent une année. Tout ce processus est sans compter le temps nécessaire pour effectuer d’éventuelles corrections majeures, ou de soumettre le manuscrit à une autre revue à la suite d’un refus formel (Hagger, 2013).
Des revues en libre accès aux revues prédatrices
Le PÉP traditionnel a, depuis quelques années, connu d’importantes transformations montrant du même coup que la communauté scientifique est prête à revoir ses façons de faire. À cet égard, la venue d’Internet et des médias sociaux a révolutionné le PÉP en permettant un examen plus « ouvert » (Bernatchez, 2012; Guédon, 2002, 2016; Huet, 2013). Dans les années 2000 paraissent de nouvelles revues scientifiques en ligne et gratuites, particulièrement en biologie et en médecine. Ces revues dites en libre accès ont littéralement bouleversé le fonctionnement de l’édition scientifique (Maisonneuve, 2014, 2016).
Même si une bonne évaluation d’un article scientifique demande du temps, convenons que l’édition en libre accès peut accélérer le processus d’évaluation des manuscrits qui peuvent dès lors être révisés par tout un chacun. Contrairement au système traditionnel, l’identité des auteurs et des reviseurs peut être connue, mais selon Tamburri (2012), les résultats, sans être totalement décevants, ne sont pas à la hauteur des attentes. Par exemple, certains directeurs de revue craignaient que l’absence d’anonymat inhibe la franchise des lecteurs arbitres. Ce ne fût pas le cas. Par contre, cet appel à tous a sensiblement allongé le processus. De plus, selon K. Rowe, la rédactrice invitée du Shakespeare Quarterley, qui a tenté l’expérience, a constaté que les jeunes chercheurs n’ont pas participé à cette expérience, un constat qu’elle attribue au fait que ceux-ci ne se seraient pas sentis à l’aise de critiquer les travaux de chercheurs bien établis, peut-être leurs « vieux profs ». Nature a également tenté l’expérience en 2006. Les résultats ont été décevants : peu d’auteurs ont accepté de tenter l’expérience « et seule la moitié des participants a reçu des commentaires. Dans la plupart des cas, ces commentaires manquaient de substance et n’ont pas vraiment facilité la prise des décisions relative à la publication » (Tamburri, 2012, p.25).
Avec le modèle classique, les revues scientifiques payent leurs frais avec les abonnements individuels et surtout institutionnels. Avec le libre accès, certaines revues demandent aux auteurs de payer (de 1 000 à 3 000$ par article), ce qui pose d’entrée de jeu le problème de la qualité des articles publiés. Qu’il y ait d’excellentes revues en accès libre ne fait aucun doute, ce ne sont d’ailleurs pas toutes les revues en libre accès qui demande aux auteurs de payer pour être publié et le PÉP se déroule selon les règles de l’art. Il existe environ 10 000 revues scientifiques en accès libre dont les deux tiers sont gratuites, ce sont pour la plupart des revues de sciences humaines et sociales. Comme la recherche est financée par l’état à partir des impôts payés par les citoyens, il est donc normal que ceux-ci n’aient pas à payer à nouveau pour connaître les résultats des recherches.
Le problème des revues en libre accès survient avec les revues prédatrices, où la règle de l’utilisateur payeur fonctionne à plein régime (Gillis, 2017). Entre 2000 et 2015, le nombre de revues prédatrices est passé de 1 800 à 11 000. En 2014, Shen et Björk (2015) ont montré que ce type de revue avait publié 420 000 articles dont 160 000 qualifiés de généraliste, 100 000 relevant de l’ingénierie, 70 000 en biomédecine et 30 000 en sciences sociales, mais très peu en sciences dite dures (chimique, physique, mathématique) (Chevassus-Au Louis, 2016, chapitre 12). La publication de bons articles ne semble alors plus la priorité. Ce qui compte, c’est d’en publier le plus possible pour gagner le plus d’argent possible (Delahaye, 2016a, 2016b). Les directeurs de revue font alors semblant de faire appel au PÉP, mais dans les faits, les articles sont acceptés d’emblée ou à la suite de corrections mineures. Les chercheurs sont d’ailleurs inondés de courriels les invitant à soumettre des articles à ces revues prédatrices. Pour la seule année 2014, environ 1000 nouvelles revues sont apparues sur le marché (Gillis, 2017). Il est particulièrement difficile dans certains cas de séparer le bon grain de l’ivraie. Par exemple, ces prédateurs utilisent des noms de revues dont le titre est presque similaire à celui de leurs fausses revues en prenant soin, en outre, d’y intégrer le mot « international». Le cinquième exemple de la section « Quelques ratés du PÉP » présente un canular montrant les dangers auxquels nous exposent les revues prédatrices.
Les pseudoscientifiques, les nouveaux Galilée
Les pseudoscientifiques et les défenseurs du paranormal avancent souvent que s’ils ne publient pas dans des revues scientifiques avec comité de lecture, c’est que celles-ci sont fermées aux approches originales. C’est l’argument du génie incompris, rejeté par la science en place. Cela voudrait également dire que la science par définition ne serait pas ouverte aux idées nouvelles et que le système d’évaluation par les pairs est le gardien du phare. Qu’il y ait des scientifiques attachés à leur théorie, soit! Toutefois, il n’y a, sauf erreur, aucun cas qui montre que le fonctionnement des revues scientifiques rejette systématiquement les nouvelles idées. Le sens commun le confirme : si c’était vraiment le cas, il n’y aurait aucun progrès scientifique. Or, les avancées continuelles de la science prouvent exactement le contraire (Brown, 2005). Il n’est pas surprenant en effet d’entendre, particulièrement en qui ce qui a trait aux sciences naturelles, des propos du genre : « nous sommes arrivées au point où il faut admettre que le modèle mis de l’avant depuis plus de 50 ans pour expliquer un tel phénomène doit être changé car il prédit de moins en moins nos observations ». À cet égard, Kuhn (1972) a bien montré dans La structure des révolutions scientifiques, avec la notion de paradigme, la manière dont la science progresse et que les idées nouvelles prennent du temps à s’installer. Loin de limiter la reconnaissance d’idées nouvelles, le système d’évaluation par les pairs assure que les scientifiques, à titre de lecteurs arbitres, puissent lire plusieurs articles dans leur domaine de compétence et en évaluer l’originalité. Par contre, les manuscrits des pseudoscientifiques qui se réclament de la science en usurpant un vocabulaire scientifique sans jamais utiliser la méthode scientifique, devraient être refusés, ce qui n’est pas nécessairement le cas, comme on le verra dans la prochaine partie.
Quelques ratés du PÉP
Personne dans la communauté scientifique ne prétend que le PÉP est parfait. Parmi ses ratés, relevons un phénomène rarement mis au jour par les lecteurs arbitres : la fiabilité et la reproductibilité des résultats ne sont pas toujours au rendez-vous (Maisonneuve, 2016). Même si les cinq exemples qui suivent mettent en évidence des failles dans le PÉP, les publications dans les revues scientifiques avec comité de lecture demeurent néanmoins plus fiables qu’une simple opinion. Ces ratés montrent simplement que toutes les activités humaines sont faillibles.
Dans le premier exemple, Maisonneuve (2016) a bien présenté les conclusions d’un séminaire de 80 experts tenu en Angleterre en 2015 sur la reproductibilité des résultats en ce qui concerne des recherches biomédicales. Six problèmes expliquent les difficultés de reproduction des résultats : « (1) la recherche d’hypothèse a posteriori pour justifier une différence statistiquement significative; (2) l’omission des résultats « négatifs »; (3) les études de puissance insuffisante; (4) les erreurs; (5) les méthodes insuffisamment décrites; (6) les méthodes expérimentales faibles » (p.31).
Il semble bien qu’un certain nombre de lecteurs arbitres oublient dans leurs évaluations que la présentation de la méthode dans un article scientifique doit se traduire, entre autres éléments, par la possibilité de reproduire les résultats, car « des événements singuliers non reproductibles n’ont pas de signification pour la science » (Popper, 1973, p.85). En fait, la reproduction des résultats constitue en science le test décisif pour établir la validité d’un fait et contribuer à la justesse d’une théorie. Malheureusement, le nombre très élevé des publications fait en sorte que seuls les articles de pointe sont reproduits ( Ioannidis; 2005). Dans le domaine des sciences humaines et sociales, un facteur s’ajoute : un large pan de la psychologie est particulièrement victime de cette absence de reproduction, puisque la nature des données colligées et leurs mesures s’y prêtent peu (Ferguson, 2015).
En sciences humaines et sociales ainsi que dans la vie de tous les jours, l’application stricte du critère de réfutabilité n’est certes pas une solution gagnante, même s’il faut tendre à s’en approcher. II est donc plus raisonnable - économie d’énergie oblige - d’utiliser un critère de plausibilité. En somme, un chercheur ou un psychoéducateur qui se méfie de ses préférences idéologiques, optera pour la théorie la plus plausible, c’est-à-dire celle qui s’approche au plus près des critères d’une théorie scientifique (Pour plus d’informations voir Larivée, 2014, p.11-15).
Le deuxième exemple concerne également le problème de la reproductibilité des résultats. Baker (2016) a demandé à 1 576 chercheurs en chimie (n=106), en biologie (n=703), en sciences de la terre (n=95), en médecine (n=203), en physique et ingénierie (n=236) et autres disciplines (domaines) (n=233) s’il y avait une crise concernant la reproductibilité des résultats. Le résultat est clair, 52 % considèrent qu’il s’agit d’un problème majeur et 38 % qu’il y a, certes, un réel problème même s’il est relativement mineur; seul 3 % des répondants avancent qu’il n’y a pas de problème et 7 % n’ont pas d’avis sur le sujet. Devant un tel résultat, Baker préconise des mesures pour corriger la situation dont l’utilisation de plans expérimentaux plus robustes, une meilleure utilisation des statistiques, une meilleure supervision des jeunes chercheurs, une sensibilisation accrue aux biais cognitifs, dont le biais de confirmation. À cet égard, Munafò et al. (2017) ont produit un manifeste qui insiste sur l’importance de la reproductibilité scientifique. Faut-il rappeler que cette procédure constitue en science le test décisif pour établir la validité d’un fait ou la justesse d’une théorie?
Le troisième exemple est celui d’une équipe internationale de plus de 250 chercheurs (Nosek et al., 2015) qui, en novembre 2011, a rassemblé un échantillon de cent études de psychologie sociale et cognitive, sélectionnées parmi trois prestigieuses revues du domaine, soit Psychological Science, Journal of Personality and Social Psychology et Journal of Experimental Psychology : Learning, Memory, and Cognition, puis s’est mis à la tâche de reproduire les résultats de ces études, toutes publiées en 2008. On comprendra dès lors que la conclusion de cette recherche, publiée dans Science, aient eu l’effet d’une petite bombe dans le monde de la psychologie : elle révélait l’incapacité de cette équipe, après quatre ans de travail, à reproduire les résultats de près des deux tiers de ces études, soulevant du coup un sérieux doute sur leur rigueur scientifique.
Le quatrième exemple concerne également les sciences humaines et a fait grand bruit à l’époque (voir Larivée 1999; Sokal et Bricmont, 1997). Le physicien Alan Sokal, partisan de la gauche traditionnellement associée à la science dans son combat contre l’obscurantisme, est exaspéré par le subjectivisme et le relativisme propre au courant post-moderne auquel adhèrent certains intellectuels de gauche. Il décide donc de soumettre à Social Text, une revue très réputée de ce courant postmoderne, un texte délibérément truffé d’absurdités, mais habilement écrit et orienté dans le sens des postulats idéologiques de ses rédacteurs en chef intitulé « Transgresser les frontières : vers une herméneutique transformative de la gravitation quantique » (Sokal, 1996a). Trois semaines plus tard, il révèlera dans une revue concurrente, Lingua Franca, qu’il s’agissait en fait d’un canular rédigé aux dépens d’un certain nombre de postmodernistes qui, au nom du relativisme cognitif, réduisent dans leurs écrits les constats scientifiques à une pure convention sociale, une narration parmi d’autres, niant ainsi les efforts d’objectivité des chercheurs (Sokal, 1996b).
Le canular de Sokal consistait en un collage hallucinant de centaines de citations incompréhensibles, mais authentiques, d’intellectuels français et américains célèbres qui se réfèrent allègrement à la mécanique quantique, à la théorie de la relativité ou à la topologie en mathématiques. Les citations abondamment utilisées servaient à démontrer par exemple que la science moderne prouve que la réalité n’existe pas, que la gravité quantique à de profondes implications politiques, bien entendu progressistes. Sokal imite sans peine le jargon et le style idoine. Impressionnés, la direction de Social Text publient son texte dans un numéro spécial consacré à la querelle entre les sciences dures et les sciences sociales. Le texte de Sokal est absurde, hilarant, sans queue ni tête, et sa publication démontre à quel point les tenants d’une certaine mode intellectuelle – le postmodernisme – se gargarisent de phrases soi-disant savantes, mais dénuées de sens.
En somme, le canular de Sokal met en évidence une forme de mystification inouïe : des critères idéologiques peuvent supplanter les critères scientifiques au point que l’intelligibilité d’un texte ne constitue plus un critère pertinent pour accepter ou refuser un argument. Compte tenu des garanties habituelles qu’offre une revue de ce genre quant à la valeur scientifique des articles, dont le recours à des lecteurs arbitres experts dans le domaine, franchir l’étape de la publication serait éminemment significatif. Autrement dit, soumettre un tel article revient à créer une situation de réfutabilité. Si les défenseurs du discours postmoderne découvrent l’astuce (« ce type se fout de notre gueule »), ils manifestent la pertinence de leurs critères, s’ils tombent dans le piège (il est des nôtres, on publie), ils montrent l’inverse. Ils sont tombés dans le piège du biais de confirmation.
Le cinquième exemple s’apparente à l’affaire Sokal et constitue un exemple du danger que représente désormais les revues prédatrices en accès libre (Huet, 2013, p.139). Bohannon (2013) a publié dans Science les résultats d’une expérience concernant un faux article en pharmacologie. L’auteur a soumis un article bidon à 304 revues en accès libre. Non seulement les données n’ont aucun sens, mais le nom du chercheur (Ocorrafoo Cobange) ainsi que son lieu de travail, un laboratoire du Wassee Institute of Medecine, n’existent pas. Seule la ville où est censée se situer le laboratoire existe, Asmara, la capitale de l’Érythrée. Un tel résultat est inquiétant. Selon Huet (2013), l’article comportait des erreurs détectables par un étudiant en biologie. Pourtant, 157 des 304 revues (51,6 %) auxquelles le manuscrit a été soumis l’ont accepté. Parmi celles-ci, la décision de publier cet article bidon a été prise sans évaluation par les pairs dans environ 60 % des cas. Qui plus est, seules 36 revues (11,8 %) ont procédé à une évaluation par les pairs, comme le veut l’usage, et 16 d’entre elles (44,4 %) l’ont tout de même accepté, même si un des lecteurs arbitres avait recommandé de le rejeter.
Alors que le propos développé dans la deuxième partie vise à présenter un des mécanismes importants de régulation de la science, on pourrait me reprocher d’avoir trop insisté sur les limites du PÉP. Terminer cet éditorial de cette façon peut être perçu contre-productif. En fait, j’ai simplement voulu montrer que la science contient en elle-même les mécanismes qui lui permette de s’autocorriger.
Conclusion
Dans la première partie de cet éditorial, nous avons tenté de décrire un aspect de l’analphabétisme scientifique en montrant qu’un ensemble de phénomènes comme le règne de l’opinion, la valorisation indue des émotions et des témoignages, le biais de confirmation, le relativisme, l’agnotologie ainsi que l’utilisation aveugle sans discrimination d’Internet et des médias sociaux constituent un cocktail explosif dont les éléments s’autoalimentent et débouchent sur une ère post-vérité où les faits dûment vérifiés n’ont plus d’importance. Dans la deuxième partie, nous avons procédé à une présentation du processus d’évaluation par les pairs (PÉP), un élément méconnu d’une grande partie de la population qui, s’il était mieux compris contribuerait peut-être à une réduction de l’analphabétisme scientifique. Rappelons quand même que malgré la présentation de cinq ratés du PÉP, ceux-ci ne devraient en aucun cas discréditer les résultats publiés dans des revues scientifiques avec comité de lecture pour favoriser le règne de l’opinion.
Parties annexes
Note
-
[1]
Je remercie M. Belley, J. Canac- Marquis, G. Chénard, C. Dagenais, J. Désy, F. Filiatrault, C. Gagnon, G. Goupil, S. Parent, A. Quiviger, H. Tardif et Y. Vallée pour leurs critiques d’une partie ou de l’ensemble du texte. Ils ont, chacun à leur manière, permis d’améliorer sensiblement cet éditorial.
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