Résumés
Résumé
En recherche en sciences de gestion, les émotions sont souvent étudiées avec une méthodologie quantitative. Cependant, de nombreux chercheurs sont en accord avec le fait que l’analyse qualitative favorise l’approfondissement. Il s’agit, ici, d’investiguer les inconvénients d’une étude quantitative par questionnaire en ligne sur un sujet tel que celui des émotions et de présenter une méthodologie alternative. Suite à une étude test réalisée par questionnaire en ligne sur le travail émotionnel de groupe dans le cadre du travail collaboratif médié, les réactions des participants et leurs réponses sont révélatrices de problèmes à la fois de compréhension, de conception ou/et d’adhésion. Ces biais sont alors décryptés. Puis, sur le même terrain, une seconde étude utilise la méthodologie netnographique permettant de combiner le quantitatif et le qualitatif. Par les résultats obtenus, il est perceptible que, dans des contextes et pour des sujets spécifiques, cette dernière méthode puisse faire office de solution face aux biais décrits.
Mots-clés :
- combinaison méthodologies quantitative/qualitative,
- travail collaboratif médié par ordinateur,
- travail émotionnel de groupe,
- biais,
- netnographie
Abstract
In management research, emotions are often studied with a quantitative methodology. However, many researchers agree that qualitative analysis provides greater depth. The aim here is to investigate the disadvantages of a quantitative study in an online questionnaire on a subject such as that of emotions and to present an alternative methodology. Following a test study carried out with an online questionnaire on group emotional labour in the context of mediated collaborative work, the reactions of the participants and their answers revealed problems of understanding, design, and/or acceptance. These biases were then deciphered, after which, on the same grounds, a second study used netnographic methodology to combine the quantitative and qualitative. The results obtained show that, in specific contexts and for specific subjects, the latter can help to resolve the biases encountered in the former.
Keywords:
- combination of quantitative/qualitative methodologies,
- computer-mediated collaborative work,
- group emotional labour,
- bias,
- netnography
Resumen
En la investigación en ciencias de gestión, las emociones son con frecuencia estudiadas con una metodología cuantitativa. Sin embargo, numerosos investigadores concuerdan con el hecho de que el análisis cualitativo favorece la profundización en investigación. Aquí, se trata de investigar los inconvenientes de un estudio cuantitativo por cuestionario en línea sobre un tema como el de las emociones y de presentar una metodología alternativa. Posterior a un estudio-test realizado por cuestionario en línea sobre el trabajo emocional de grupo en el cuadro del trabajo colaborativo mediado, las reacciones de los participantes y sus respuestas son reveladoras de dificultades tanto de comprensión, de concepción y/o de adhesión. Estas desviaciones son por lo tanto descifradas. Posteriormente, en el mismo terreno, un segundo estudio utiliza la metodología netnográfica permitiendo combinar lo cuantitativo y lo cualitativo. Por los resultados obtenidos, es perceptible que, en los contextos y por los sujetos específicos, este último método pueda ser una solución frente a las desviaciones descritas.
Palabras clave:
- combinación metodologías cuantitativa/cualitativa,
- trabajo colaborativo mediado por ordenador,
- trabajo emocional de grupo,
- desviación,
- netnografía
Corps de l’article
En Gestion/Management, une large part des recherches utilise la méthode quantitative, très prisée pour l’étude des émotions, notamment, dans certaines revues américaines bien classées. Giordano et Jolibert (2016) indiquent à ce sujet :
« La recherche quantitative a été et est encore dominante dans de nombreux pans des sciences sociales : marketing, psychologie cognitive ou sociale, sociologie, économie, médecine. Pendant longtemps, il était difficile de publier les résultats de recherches qualitatives […,] ce n’est que lors de ces vingt dernières années que l’intérêt pour le qualitatif s’est fortement accru. » (p. 8).
Un fait récent appuie ce constat d’une primauté de la recherche quantitative dans les publications en Gestion/Management. Une revue classée américaine, ‘Journal of organizational behavior’ (H-INDEX[1] 191 en 2002) dont la majorité des articles comportent une recherche quantitative, a commandé une réflexion à deux auteurs : Jean M. Bartunek et Myeong-Gu Seo (2002). Leur objectif était d’étudier ce que pourrait apporter la recherche qualitative au journal. Leur analyse tend à montrer non seulement comment l’analyse qualitative peut approfondir les résultats d’une analyse quantitative, mais aussi les défauts que peut porter une analyse quantitative. Selon ces auteurs, « de nombreuses études quantitatives assument que des variables ont la même signification dans différents contextes » (p. 238).
Prolongeant leur réflexion, ils précisent que les chercheurs utilisant une étude quantitative assument par leur choix que les participants partagent une signification similaire des variables clés. Selon ces auteurs, sans remettre en cause les échelles de mesure et les définitions des concepts en recherche quantitative, la recherche qualitative permet une adaptation à des visions différentes de la signification des concepts par divers chercheurs et participants. L’objectif de cet écrit est de, non seulement, mettre en exergue différents défauts d’une étude quantitative dans une recherche sur le travail émotionnel de groupe dans un contexte de travail collaboratif à distance assisté par ordinateur, mais aussi de repérer une solution de limitation de ces ‘biais’ pour obtenir des résultats plus tangibles. En effet, la recherche quantitative par questionnaire, largement utilisée, a ses limites, notamment celle de devoir correspondre au terrain étudié, Bartunek et Seo (2002) considérant que les questionnaires standardisés ne peuvent être utilisés dans les mêmes contextes. Si la recherche par méthodes mixtes peut, alors, être utilisée, elle reste peu usitée en management et psychologie (Masdonati et Sovet, 2020).
Pour répondre à notre problématique et montrer combien l’analyse de Bartunek et Seo (2002) n’est pas dénuée d’intérêt, notre écrit va reposer sur une étude quantitative test qui a apporté des résultats, mais aussi suscité de nombreux commentaires de participants. Après avoir fait le point littéral des critiques de la méthodologie quantitative et une analyse des raisons probables qui ont induit des réactions de participants, le même terrain est étudié sous l’angle de la netnographie. Cette dernière étude montre une plus grande commodité à étudier le travail émotionnel grâce à la méthodologie utilisée.
1.Méthodologie quantitative : des critiques sociologiques
Bourdieu (1977) fait dans son article une synthèse des discussions autour de l’entretien et de l’enquête. Il y explique que plus les questions posées sur les opinions politiques touchent au quotidien et à la vie privée, plus il y a d’écart dans le nombre de répondants entre les hommes et les femmes, les instruits et les moins instruits. L’hypothèse qui est faite est que certaines normes sociales contraignent certains individus à répondre de façon convenue. Bessière et Houseau (1997), dans une étude sociologique d’observation des enquêteurs de l’INSEE, montrent qu’appliquer des questionnaires standardisés à des personnes fondamentalement différentes, en fonction de leurs savoirs et statuts, ne peut prétendre décrire la réalité du terrain telle que les personnes la vivent. Ces deux critiques peuvent être ajoutées à celles de Bartunek et Seo (2002), qui considèrent que les questionnaires standardisés ne peuvent pas être utilisés dans tous les contextes de manière indifférenciée. Cette standardisation laisse supposer que toutes les variables sélectionnées lors de la construction du questionnaire auront la même signification, quel que soit le contexte. Bessière et Housseau (1997) donnent l’exemple d’une question posée : ‘si vous aviez le choix, quelle profession aimeriez-vous exercer? » (p. 105), question à laquelle les individus de milieu défavorisé ont du mal à répondre.
Au-delà des biais à éviter lors de la construction d’un questionnaire, des biais de réponse peuvent intervenir de façon spontanée et automatique lors d’enquêtes en ligne. Ces enquêtes présentent la spécificité pour le répondant d’assurer un sentiment d’anonymat derrière l’ordinateur. Gavard-Perret et coll. (2008) détaillent, dans leur livre sur la méthodologie de recherche, les procédures à suivre pour réaliser une bonne enquête de terrain. Ils précisent que des biais peuvent apparaitre lors de l’organisation du questionnaire, tels que le biais d’anxiété. Selon Rosenberg (1965, p. 122),
« tout sujet humain aborde la situation de questionnements avec un a priori qui le pousse à croire que l’enquêteur cherche à évaluer sa santé mentale ou plus simplement son degré de maturité intellectuelle. Cette suspicion initiale peut être confirmée ou infirmée par le contact que le répondant aura […] avec les caractéristiques du questionnaire. ».
D’autres biais existent : 1° le biais de désirabilité sociale n’est, d’une part, pas atténué par les enquêtes en ligne, et d’autre part, les sujets sont davantage sensibles aux signes du questionnement et susceptibles de les interpréter lorsqu’ils répondent à une enquête en ligne que lorsqu’ils répondent à une enquête papier-crayon. Les répondants à une enquête en ligne sont davantage concentrés sur les liens qui existent entre les questions que sur le contenu proprement dit de leurs réponses à ces questions; 2° les biais d’acquiescement, lorsque les répondants se sentent enclins à répondre positivement, ou à l’inverse 3° de dissidence, lorsque le répondant n’est pas d’accord avec les questions du sondage; enfin, 4° le biais de réponse extrême, soit par indifférence face au questionnaire, soit par une influence culturelle. (Caslyn et Winter, 1999; Grandy, 1998; Krosnick, 1999; Laperrière, 1999). Pour mieux percevoir l’existence de ces biais, une étude de terrain permet de concrétiser leurs effets.
2.Exemple d’un cas d’étude : le travail émotionnel de groupe en travail collaboratif médié
2.1.Le travail collaboratif médié, une intelligence collective
L’étude porte sur le travail collaboratif à distance ou médié qui compose une entité effective du travail actuel et à venir. Dans l’objectif de mieux en comprendre les rouages pour en améliorer le management, le concept de travail émotionnel de groupe pressenti comme dimension de l’intelligence collective doit être évalué. Un des objectifs est d’investiguer, à l’origine, l’influence du travail émotionnel de groupe médié, sur la performance et la créativité de groupe au travers d’une étude quantitative administrée au groupe en ligne. Étant donné le manque de mesure sur ce concept, c’est l’échelle d’intelligence émotionnelle de groupe qui est utilisée comme proxy de la mesure du travail émotionnel de groupe. Il y a deux raisons à ce choix.
Tout d’abord, 1° le travail collaboratif est envisagé par certains auteurs tels que Drucker (1993) ou Gangloff-Ziegler (2009) comme « une forme d’intelligence collective à l’origine d’une action de co-construction » (p. 11). En effet, le travail collaboratif désigne un mode de travail qui utilise les avancées en matière de technologies et d’outils élaborés qui permettent à l’organisation de diffuser les données et les savoirs, pour être à la portée des collaborateurs (Baudoin et Smadja, 2009). Le Roux (2009) parle de globalisation pour désigner la mise en commun des activités autonomes des participants. C’est un travail qui utilise un système synchrone, communication continue comme le chat, la vidéo conférence et le téléphone, et asynchrone qui transite avec le mail. Ainsi, les technologies collaboratives deviennent des artefacts structurants des configurations organisationnelles (Tran, 2014). L’investigation de ce type de travail d’un point de vue émotionnel reste peu développée, à notre connaissance. Des recherches autour de ce sujet existent. Ainsi, Siegel et coll. (1986), Derks et coll. (2007) ou encore Martinovski (2009), entre autres, étudient le rôle des émotions dans les décisions prises en collectif à distance. Martnosvki (2009) a une réflexion sur l’existence d’émotions dans les décisions et négociations à distance. L’article de Siegel et coll. (1986) montre qu’il n’y a pas de consensus sur une réelle différence entre médié ou en face à face, sauf lorsqu’il y a anonymat. Becker-Beck (2005) étudie l’impact de la régulation des échanges selon leur nature face à face, synchrone et asynchrone sur la performance. Les résultats ne montrent aucune différence entre les modalités concernant le travail de groupe et la satisfaction des membres. Seules les performances de groupe ont été jugées, par le chercheur, meilleures en face à face que dans les groupes assistés par ordinateur. Finalement, Derks et coll. (2007) montrent que la communication à distance n’est pas moins émotionnelle ou impliquante qu’en face à face, laissant supposer une faible différence entre ce type de travail de groupe à distance et en face à face, soit une forme d’intelligence collective plutôt comparable.
Puis, 2° l'exploration formelle du travail émotionnel a généralement utilisé des données qualitatives (ex. : Bolton, 2000; Callaghan et Thompson, 2002; Harris, 2002; Hochschild, 1983; James, 1989; Sutton, 1991; Tolich, 1993), tandis que les mesures et les analyses quantitatives ont été limitées. De plus, dans l'ensemble, les perspectives précédentes du travail émotionnel ont souvent le même thème sous-jacent : les individus peuvent contrôler leurs expressions émotionnelles au travail. Or, le travail émotionnel est aussi un processus de régulation des sentiments et des expressions en vue des objectifs organisationnels. C’est cette seconde vision du travail émotionnel qui intéresse notre étude : l’état interne de régulation des émotions. Mais au vu des différentes échelles sur le sujet, nous ne pouvons pas les utiliser dans notre contexte : elles abordent un point qui pose problème dans notre cas : les manifestations comportementales externes. La solution serait d’étudier les expressions émotionnelles au travers des écrits des individus. Le discours mélange, dans ce cas, le verbal, le gestuel, le phonatoire, le visuel, la mimique, le typographique, etc., éléments qui s’interfèrent afin de donner à ce discours une dimension émotionnelle (Elouni, 2018). Or, il a été démontré que la communication asynchrone permet plus de réflexion et de rationalisation de ses expressions, et moins de spontanéité. Cela complique l’analyse du travail émotionnel, même si elle peut en être révélatrice. Par exemple, le groupe à distance prend plus de temps pour décider (4 à 10 minutes) (Reid, Ball, Morley et Evans, 1997) et 5 à 6 fois plus de temps pour trouver un consensus que le groupe en face à face (Walther, 1996). Il connait également davantage de difficulté à exprimer des émotions (Elouni, 2018).
2.2.Une échelle de mesure collective
Pour l’étude de cette ‘dimension’ du travail émotionnel, certains chercheurs se concentrent sur les processus internes impliqués dans la création d'un affichage émotionnel : généralement des processus d'autorégulation (Grandey, 2000; Brotheridge et Grandey, 2002). Puisque notre étude se situe dans le contexte d’un travail médié, essentiellement réalisé sans contact visuel, mais davantage par contacts écrits, il serait très complexe de considérer certaines dimensions stratégiques du travail émotionnel pour étudier notre groupe de travail. Par exemple, l’échelle de Brotheridge et Grandey (2002) du ‘Travail émotionnel centré sur l'emploi ou Job-focused emotional labor’, mesure la variété de l'expression émotionnelle, son intensité, la durée des interactions interpersonnelles par un item axé sur le nombre moyen de minutes nécessaires pour une transaction typique, et enfin la fréquence perçue des interactions. Malheureusement, cet item, comme les autres utilisés dans cette échelle, ne correspond pas à notre contexte.
Une étude permet de relier le travail émotionnel individuel à l’intelligence émotionnelle de groupe. En effet, l’article de Newman et MacCann (2010) décrit un modèle en cascade qui montre que l’intelligence émotionnelle (IE) de groupe passe par le travail émotionnel individuel, en traçant la relation entre l'IE et le rendement au travail. Plus encore, Cherniss (2010) appelle à accorder plus d'attention au contexte, pendant que Wong et Law (2002) soulignent que le travail émotionnel est un élément contextuel important. Ces points de liaison ne font pas oublier les discussions sur l’intelligence émotionnelle. Chanlat (2003) la voit comme le développement d’une conception normative pour les managers, qui reste au niveau micro (interpersonnel ou équipe) et qui représente fortement la culture américaine de la réussite. Kubiak (2020) alerte que cette dernière peut être vue comme un remède au problème de leadership. Il s’appuie sur Coté et Miners (2006) qui montrent que la force du lien entre l’intelligence émotionnelle, mesurée par le QE (quotient émotionnel), et la performance (QI, quotient intellectuel) d’un individu décroit quand les capacités cognitives de celui-ci augmentent Chamorro-Premuzic et Yearsley (2017) précisent que les individus à fort QE favorisent le relationnel, mais ne savent pas innover et créer le changement. Sans occulter ces critiques, l’objectif, ici, reste d’utiliser une échelle au niveau collectif d’échanges émotionnels et non une mesure de capacités émotionnelles individuelles, sachant que l’intelligence collective, propre au travail de groupe à distance a pour particularité d’être basée sur le réseautage. Le terme réseau désigne, en effet, la notion de communauté ou encore de groupes qui s’unissent par centres d’intérêt ou encore par projet de vie et qui privilégient l’organisation horizontale plutôt que verticale (Peng, 2016).
3.Cas d’étude
3.1.Méthode 1 : pré-test de questionnaire
De fait, dans notre cas, l’échelle de l’intelligence émotionnelle de groupe (Jordan et Lawrence, 2009), ‘Team Emotional Intelligence’, correspondant davantage à des efforts du groupe à travailler ensemble, est utilisée. Cette échelle comporte 8 items :
1. Je peux expliquer les émotions que je ressens aux membres de l'équipe,
2. Je peux discuter des émotions que je ressens avec les membres du groupe,
3. Si je me sens mal, je peux dire aux membres du groupe ce qui fera me sentir mieux,
4. Je peux parler aux membres du groupe des émotions que j'expérimente,
5. Je respecte l'opinion des membres de l'équipe, même si je pense qu'ils ont tort,
6. Quand je suis énervé contre des membres du groupe, je peux exprimer ma frustration,
7. Avant de partir en conflit, j'essaye de voir tous les aspects du désaccord,
8. J'écoute équitablement les idées de tous les membres du groupe.
Sur de nombreux points (1, 2, 3, 4, 6, 7), cette mesure s’accorde avec le travail émotionnel des membres du groupe effectué dans le contexte étudié parce qu’ils abordent un effort ou des échanges pour mieux réguler leurs émotions.
Le terrain étudié est un site d’échanges collaboratifs professionnels et amateurs en botanique ayant pour objet l’aboutissement de projets internationaux, Tela Botanica. Ainsi notre choix se justifie par le fait que ce site, créé en l’an 2000, est un site francophone international qui répertorie plus de 60 000 membres à travers le monde. Tela Botanica a de nombreux partenaires, financeurs publics, privés et opérationnels qui lui assurent une base économique solide, mais aussi des échanges d’expériences et des transferts de connaissances entre à la fois des professionnels et des amateurs avertis. Un collaborateur amateur de Tela Botanica peut, s’il le souhaite, s’inscrire à un projet et participer à la vie et à l’enrichissement du groupe. Grâce à l’aspect volontaire de la collaboration, pour certains membres amateurs avertis, les effets coercitifs sur la performance et la créativité, sans être annihilés, sont limités. Ce terrain permet, ainsi, de davantage révéler les effets fondamentaux de l’équipe de travail collaboratif médié.
Au total nous avons sélectionné une vingtaine de projets au hasard sur les 120 existants. Chaque projet regroupe des collaborateurs (botanistes) qui partagent leurs expériences et leurs connaissances sur un sujet donné, de façon volontaire ou professionnelle. Dans un premier temps, il s’agit d’obtenir quelques premiers résultats tests. D’autres projets seront questionnés ultérieurement. Pour cette étape test du questionnaire, 53 collaborateurs du site ont répondu au questionnaire en l’espace de quinze jours. Finalement, nous avons décidé d’analyser les 40 questionnaires complétés dans une première étape de pré-test, afin d’établir une première tendance sur 8 groupes de projet.
3.2.Résultats : Des réactions surprenantes?
Ce questionnaire pré-test a permis de croiser des données et de constater un lien médiateur entre le ‘travail émotionnel’ et le ‘travail collaboratif’ : une relation s’est montrée significative à 0,023, au travers de statistiques non paramétriques (Chi²). Il s’agit de l’item « Je peux discuter des émotions que je ressens avec les membres du groupe ». Ce pré-test ne comporte pas le nombre de répondants souhaité pour une étude quantitative représentative. Néanmoins, cette étape permet de constater des réactions sur le forum de discussion liées aux biais détaillés dans la section 1 : 23 % des répondants, qui étaient avertis du sujet étudié, mais pas du détail des variables investiguées, n’ont pas complété les questions à propos de l’aspect émotionnel et plusieurs d’entre eux ont précisé leur choix de ne pas compléter : ‘que viennent faire les émotions ici?’, ‘Je ne tiens pas à compléter la partie sur les émotions, elle n’a rien à voir avec ce que nous faisons’…
Selon un article de Platek (1977) :
« on convient généralement que le problème de la non-réponse est fort complexe, puisqu’il subit l’influence d’un grand nombre de facteurs qui, assez souvent, jouent en des sens qui varient selon les situations d’enquête. Il est donc pour ainsi dire impossible de songer à une seule orientation qui soit uniformément applicable à toutes les enquêtes. » (p. 2).
« Les trois grands facteurs sont la perception d’une atteinte à la vie privée, le fardeau de réponse et un sentiment général d’hostilité ou de défiance. » (p. 7).
Ainsi, ces différentes réactions sont ici analysées en fonction d’un type de biais décrits par la littérature.
3.3.Discussion : des biais de réponse
Concernant les items de l’intelligence émotionnelle mesurant le travail émotionnel de l’équipe, les réactions ont été plutôt virulentes sur les forums d’échanges et il y a eu une volonté de ne pas compléter cette partie (8 répondants sur 40 questionnaires complétés). Nous touchons, ici, les biais de réponse. Le questionnaire, s’approchant de l’intimité des individus interrogés en leur posant des questions sur l’aspect émotionnel du groupe, pourrait faire état d’un biais de dissidence étant donné que certains répondants (6 sur les 8 récalcitrants) ont clairement affiché leur désaccord face à la partie du questionnaire à propos des émotions. Ce constat est appuyé par les résultats de la validité des échelles, alpha de Cronbach > à 0,80 pour l’échelle d’intelligence émotionnelle de groupe. L’échelle est valide, pourtant les répondants sont moins nombreux que pour les autres questions (40/52 répondants). Le biais d’anxiété a sûrement joué un rôle. L’individu s’est probablement senti évalué ou en a eu la suspicion au sujet de ses comportements collectifs. Ce biais peut être lié aux autres questions du questionnaire que le travail collaboratif à distance. Dans notre cas, le terme ‘travail’ a fait l’œuvre de critiques également. En effet, étant donné le statut de bénévoles de certains répondants, l’aspect ‘travail’ ne leur correspondait pas. De la même façon, il peut être supposé que ce questionnaire ait pu être perçu comme une évaluation en lien avec le concept de ‘travail collaboratif à distance’. Néanmoins, notre cas d’étude est bien différent. Les sujets traités par les bénévoles de Tela Botanica relèvent du plaisir et de la passion selon leurs écrits. Il s’agit pour eux d’une activité de loisirs. Le biais de réponse extrême serait apparu pour 1 répondant. Ce dernier n’a coché que des cases extrêmes (tout à fait en désaccord ou tout à fait d’accord). Trois individus n’ont pas complété plusieurs parties du questionnaire, dont celle de l’aspect émotionnel de groupe. Cela montrerait davantage un désintérêt pour le questionnaire qu’un biais quelconque.
Face à ces résultats du pré-test, une seconde méthode est utilisée pour analyser ce même terrain : la netnographie. Considérant, tel Pastinelli (2011), que le cyberespace n’entraine pas une transformation majeure de la nature du terrain, les étapes de recherche peuvent y être similaires dans la mesure où les rapports sociaux et « le quotidien ordinaire » (p. 39) ne sont pas dissemblables.
3.4.Méthode 2 : netnographie
La méthode netnographique nous est apparue comme une méthode de recueil qui pourrait aider à compenser ces biais. La « netnographie » vient des mots « network » et « ethnographie » dans une perspective d’étude des environnements virtuels. Comme pour une ethnographie, cette méthode a pour objectif de comprendre les motivations et les comportements des individus ou organisations dans leur milieu naturel, dans notre cas, le travail collaboratif médié. Les objectifs de l’ethnographie classique et la netnographie sont les mêmes. Cette méthode reprend, ainsi, les étapes classiques de la méthode ethnographique et les adapte afin d’étudier les communautés en ligne (Kozinets, 2010). C’est une méthode d’investigation naturelle (Lincoln et Guba, 1985) qui utilise l’information disponible publiquement sur le Web pour identifier et comprendre les comportements ainsi que les décisions des groupes sociaux (Kozinets, 2010). Elle permet, en cela, d’analyser à la fois des sources secondaires en observation indirecte, des sources primaires en observation-participante et d’étudier une multitude de données du terrain, élément clé d’un terrain propice à l’analyse netnographique. La netnographie permet de s’immerger sur le terrain virtuel en devenant membre d’un groupe de discussion ou de travail collaboratif, (forums, blogs, groupes Facebook, Linkedin etc.). Grâce à l’imbrication des deux types de méthodes, approchant une méthodologie mixte, cette dernière peut limiter les biais de l’enquête online seule.
3.5.Terrain étudié : groupe en travail collaboratif médié
Ainsi, toujours dans le cadre du terrain d’amateurs et de professionnels en Botanique en travail collaboratif médié, Tela Botanica, il s’agit de recourir à la retranscription de plus de 500 conversations (dialogue établi entre au moins deux personnes) sur les forums de projets et d’obtenir des informations sur la population, sur la description du travail de groupes, d’établir des connexions entre certains membres pour arriver à cerner au mieux notre sujet. Kozinets (2010) recommande de considérer toute production et tout document susceptibles d’éclairer l’objet étudié (blogs, wiki, articles écrits par les membres de la communauté, …), de réaliser des interviews ou des focus group en ligne ainsi que des sondages pour affiner le travail d’observation. Ainsi, 3 projets représentant chacun une communauté de participants (eflore - moteur de recherche de plantes, 116 membres, détermination de plantes - 1097 membres, base de données de plantes alimentées par les scans de bénévoles et XperBotanica - 11 membres professionnels, recherche et technique) ont été sélectionnés, observés, intégrés et analysés grâce à l’analyse d’échanges sur le forum de discussion, des emails échangés et des posts sur le groupe Facebook. Le choix s’est porté sur des projets qui apportent une contribution essentielle au développement de Pl@ntNet (une intelligence artificielle de recueil de données botaniques, application pour smartphone et web consistant en un moteur d’identification de plantes à partir d’une photographie, créée par la communauté Tela Botanica). L’étude se déroule sur une période totale de 6 mois (en deux périodes) au cours de laquelle nous nous sommes inscrits comme membres contributeurs afin de respecter les principes de l’observation participante avec analyse de discours (aspect ethnographique de la netnographie). Cette étude a utilisé des observations relevées par des échanges directs avec 12 participants, une observation projet et de connexion des données avec les objectifs de l’association. 143 participants ont effectué des échanges sur deux périodes analysées.
3.6.Résultats de la netnographie
Cette étude par netnographie permet d’étudier les comportements, les réactions des acteurs en temps réel. Les résultats observés tant dans les échanges analysés (forum, wiki) que par l’analyse du site web et d’articles de journaux, d’interviews journalistiques sur les efforts effectués par les individus pour réguler leurs émotions dans leur relation avec les autres membres du groupe montrent une régulation élevée des émotions au sein du groupe, liée à des règles de conduite définies par le site. Nous pouvons également constater que la participation suit deux niveaux : le simple membre inscrit sur la plateforme-projet qui se comporte comme ‘bénévole’, et le membre actif dont on peut dire qu’il est véritablement contributeur. Le site web a son personnel gestionnaire. Les tâches du personnel de Tela Botanica consistent à réaliser opérationnellement ce qui a été imaginé par les contributeurs et à gérer les relations entre ces mêmes contributeurs. Ainsi, le personnel en contact, au niveau relationnel, a pour mission de faire respecter les règles de participation (charte de bonne conduite). Il régule le comportement des uns et des autres : « certains des messages postés ont été volontairement supprimés, car n’étant pas en conformité avec les règles de Tela Botanica ». Il organise et mobilise la prise de parole sur les forums « qu’est-ce que Mathieu pense de la proposition de Florian? ». Dans le collectif des contributeurs, les membres se connaissent, échangent régulièrement, et parfois même ont des contacts en dehors de la plateforme : « on finit par se connaître, surtout quand on travaille sur les mêmes projets ». « Les membres du groupe travaillent dur pour accomplir l'objectif du groupe. » De plus, le groupe, comme cela peut être le cas lors d’une ethnographie, a commencé à se livrer et à comprendre l’intérêt de parler de régulation des émotions lors d’échanges informels ou par entretiens :
« On s’entraide beaucoup »
« Quand on perçoit que quelqu’un va lâcher, on parle, on discute »
« Je fais ça pendant mes heures creuses, mais parfois je manque de temps et je n’arrive plus à participer. Ça m’agace, mais je fais ce qu’il faut pour continuer à travailler avec le groupe et rester heureuse de le faire. »
« Il y a peu de disputes, mais ça peut arriver, alors, Tela Botanica intervient pour modérer les échanges. »
« J’ai eu un désaccord sur un projet, on n’était pas d’accord. J’ai pris le temps pour répondre et limiter ma colère. J’avais l’impression de parler chinois, on ne se comprenait pas. […] On a fini par se mettre d’accord, mais il a fallu du temps.
« Sylvie [la modératrice] m’a aidée sur un point qui posait problème. On ne voyait pas les choses de la même façon. Du coup, elle est intervenue pour nous aider à voir plus clair. »
Source de ces données : le Forum.
3.7.Discussion résultats netnographiques
À la vue des multiples discussions entre collaborateurs analysées, des échanges réalisés en direct avec certains d’entre eux, des règles et normes de comportements édictées par le site, le terrain est effectivement propice à la régulation émotionnelle. Le travail émotionnel de groupe est perceptible au travers d’une sorte d’intelligence collective à réguler les émotions du groupe. Comme le montrent ces résultats, la communauté virtuelle procure l’écoute, l’empathie et l’aide nécessaire pour faire aboutir les projets, confortant, en cela, les résultats de Mathwick, Wiertz et de Ruyter (2008), d’une communauté vue comme soutien social. Ils corroborent aussi les résultats de Schau, Muñiz et Arnould, (2009) qui révèlent que la socialisation est une pratique clé des communautés virtuelles incorporant accueil, empathie et gouvernance. Plus encore, nos analyses montrent que chaque équipe de projet s’accorde et s’entraide et a tendance à réaliser un travail émotionnel intra et inter-groupe profond. Ces résultats sont contraires à ceux obtenus par Parush et Zaidman (2023). Ils montrent, par l’analyse d’équipes de travail internationales spécialisées en haute technologie, que chaque sous-groupe à distance étudié agit comme une « équipe à performance émotionnelle » devant le ou les autres sous-groupes en tant que public. Ils révèlent un travail émotionnel de groupe plus répressif qu'expressif et plus superficiel que profond. Dans notre cas d’étude, le caractère collectif, semble alimenter un cercle vertueux qui atténue l’ethnocentrisme et l’éloignement entre les sous-groupes. D’un point de vue méthodologique, lors du processus de recherche netnographique, il n’y a pas à se restreindre à l’observation des interactions entre membres, mais à s’immerger et à s’imprégner de la communauté jusqu’à en devenir un membre à part entière. Cela permet de comprendre et de partager la passion commune qui anime les membres de la communauté. Les biais de réponse disparaissent grâce à une confiance partagée. Pendant ce processus le codage des diverses données capturées révèle des variables qui reflètent le comportement des participants et fait évoluer la manière d’analyser. La conjugaison des sources d’analyse permet de valider les résultats obtenus, mais ne permet pas leur généralisation. Les résultats restent cantonnés à ce contexte particulier.
4.Discussion générale
La méthodologie quantitative test employée pour l’étude du travail émotionnel de groupe au sein d’un travail collaboratif à distance a montré que des biais de réponse ont été mis en évidence. Ainsi, plusieurs biais ont été identifiés dans cette étude par questionnaire : biais d’anxiété, biais de réponse extrême et biais de dissidence. Le biais d’anxiété, voire de dissidence : dans un contexte de questionnement de deux populations différentes, bénévoles et contributeurs actifs, il peut paraitre compréhensible que la population d’amateurs volontaires se soit sentie évaluée comme en situation de travail, alors que leur objectif n’est pas celui de travailler, mais plutôt de pratiquer un loisir. Un autre biais a pu être remarqué : le biais de conception, lié au choix d’une échelle de mesure en proxy parce qu’elle s’approche des questions investiguées. Enfin, dans notre cas, un dernier biais est perceptible : le biais de ce que nous pourrions appeler le biais de motivation intrinsèque tiré de la théorie de Ryan et Deci (2000) sur les motivations. Au vu des échanges, des individus considèrent les autres comme possédant des motivations extrinsèques (pression sociale, une approbation, une récompense ou une punition…) quand eux-mêmes ont des motivations intrinsèques (envie, plaisir, intérêt personnel dénué de quelconque attente ou de récompense externe). Ce biais reposerait sur deux besoins particuliers : les besoins de compétence et d’autodétermination (Ryan et Deci, 2000).
Pour pallier ces biais, la méthode de la netnographie montre des résultats appréciables. Cette méthode permet d’utiliser les résultats de notre étude quantitative test et d’y ajouter l’analyse du site Web de Tela Botanica, d’articles de journaux, des forums de discussion et de participer activement au groupe et aux échanges. En cela, cette méthodologie correspond à une méthode mixte multiniveaux (Creswell et Plano Clark, 2011). Par une inclusion dans le terrain, même à distance, elle permettrait, ainsi, de limiter plusieurs biais (anxiété, dissidence et de réponse extrême). De surcroit, elle se montre parfaitement compatible avec le terrain d’étude du travail émotionnel de groupe au sein d’un groupe collaboratif médié par ordinateur que nous avons choisi d’étudier. Si la méthode quantitative doit correspondre au terrain étudié, Bartunek et Seo (2002) considérant les défauts de questionnaires standardisés à différents contextes, la netnographie, par son ancrage dans un contexte virtuel, permet d’observer des comportements dans un contexte précis, mais ne permet pas d’obtenir des résultats généralisables.
Finalement, les résultats par assimilation des données indiquent que le concept de travail émotionnel n’apparait pas totalement adapté pour une des deux populations étudiées, - les volontaires -, selon sa propre vision des efforts effectués. Cela n’obère pas une omniprésence du relationnel et de sa coordination dans ce type d’activité comme dans les ‘services’ étudiés par Hochshild (1983), mais indique une inadéquation du terme ‘travail’ pour ce type de population. S’appuyant sur Imhoff (2019) qui parle d’« invisibilisation » de la coordination au sein du travail collaboratif, les volontaires ont la perception de vivre une auto-régulation en toute spontanéité. Dumas (2019) parle d’une ‘rationalité émotionnelle’, lorsque les attendus d’ordre émotionnel au sein de l’entreprise s’inscrivent dans des logiques de maitrise et de dissimulation des émotions au travail. Dans le cas de la population des volontaires, spécifiquement et à leurs yeux, il serait préférable de parler d’une « ardeur » émotionnelle de groupe, signifiant dynamisme, enthousiasme, entrain, selon le dictionnaire Larousse. L’aspect contraint du travail émotionnel, vu comme un effort à gérer ses émotions, disparaitrait au profit de la perception d’une forme enthousiaste à accomplir la tâche ou plutôt à participer à l’activité au sein d’une communauté de pratique (Wenger, 1998), exempte de toute règle de conduite vue comme non essentielle, voire incongrue, alors que dans les faits, elle reste nécessaire à la coordination des échanges dans le groupe.
Conclusion
Face à ces résultats, il apparait, donc, insuffisant d’utiliser la méthodologie quantitative par questionnaire seule pour étudier et interroger le travail émotionnel des populations dans des situations différentes, dans le contexte du travail collaboratif médié. Ce type de ‘travail’ possède justement l’avantage de pouvoir unir des compétences et des profils très divers afin de bénéficier des connaissances et forces diverses elles aussi. En cela, la perception des termes et concepts étudiés peut indiquer une inadéquation. L’une des solutions serait de pouvoir discriminer les deux types de populations pour des retours de questionnaires valides assurés. Une solution serait également d’utiliser un terme plus générique pour éviter tout risque de malentendu. Cependant, cette généralisation pourrait favoriser à son tour le biais de standardisation des concepts à tout type de contexte, comme l’indiquent Bartunek et Seo (2002). Proche d’une méthodologie mixte reposant en séquentiel sur plusieurs phases de recherche (Creswell et Plano Clark, 2011), la solution choisie a été de réaliser une étude plutôt qualitative par entretiens et observation participante avec analyse des discours sur les forums d’échanges, articulée à l’étude quantitative test par questionnaire : la netnographie. Au niveau de l’analyse de nos résultats, elle permet une visibilité plus complète des comportements individuels et de groupe. De plus, le concept de travail émotionnel de groupe n’est plus uniquement mesuré par des items spécifiques, issus d’une échelle, mais au travers d’échanges avec les membres qui s’ouvrent sur leurs comportements sans ressentir un jugement quelconque. La condition, propre à une méthodologie mixte multi-phases, pour effectivement pallier les biais décrits serait de débuter l’étude par le qualitatif permettant ainsi la mise en place d’une confiance de la part des participants et d’une ouverture par rapport au sujet étudié, puis, de suivre par une étude quantitative, construite avec une échelle idoine au contexte. Plus spécifiquement, la multiplication des ressources d’étude multiniveaux, comme le permet la netnographie, en immersion dans un cyberterrain permet d’analyser concrètement ce nouveau lieu de vie bondé d’une multitude d’échanges et d’informations. Une limite est à préciser : elle ne permet pas la généralisation des résultats. Cette étude ouvre la voie à de futures recherches qui pourraient s’atteler à investiguer les différentes perceptions du concept de travail émotionnel de groupe selon les contextes.
Parties annexes
Note
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[1]
Le h-index (ou facteur h pour Hirsch), créé par le physicien Jorge Hirsch en 2005, est un indicateur d'impact, fonction du nombre H de lectures et de citations d’un article. L'impact factor ne doit être interprété et comparé que dans un domaine donné.
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