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Nmihtaqs Sqotewamqol / La cendre de ses os, avec Charles Bender, Nicolas Gendron, Roger Wylde et Kyra Shaughnessy. Théâtre La Licorne, Montréal, 2021.

Photographie de Myriam Baril-Tessier.

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Julie-Christina Picher est artiste peintre et la première scénographe atikamekw au Québec. Elle vit et crée en Haute-Côte-Nord, à Sacré-Coeur-sur-le-Fjord-du-Saguenay. Dans ce numéro thématique, il nous semblait essentiel de présenter le travail de cette voix unique dans le paysage théâtral. Notre conversation s’est échelonnée sur plusieurs mois. Les propos recueillis ici sont le fruit de courriels et d’échanges sur Zoom, où l’artiste nous a parlé d’un parcours unique qui l’a amenée, depuis l’obtention de son diplôme en scénographie (option théâtre) au Collège Lionel-Groulx en 2011, à collaborer à plus d’une vingtaine de pièces de théâtre, dont six avec les Productions Ondinnok, ainsi qu’à des projets au cinéma.

Julie Burelle : Julie-Christina, tu es artiste peintre et tu as fait des études en arts plastiques. Comment as-tu découvert le métier de scénographe?

Julie-Christina Picher : J’ai commencé à m’intéresser à la scénographie en 2005. Je venais de terminer une formation en arts plastiques au Cégep de Saint-Jérôme. J’avais des ami·es qui étaient parti·es étudier à Concordia en arts visuels. Moi, j’avais décidé de prendre une pause pour explorer d’autres formes d’arts. Je n’avais pas envie d’aller en arts visuels, je trouvais que c’était, je n’aime pas le mot, mais individualiste? J’avais envie de collaboration, d’échange, de faire partie d’une équipe de travail. J’ai donc pris un an pour aller voir des spectacles, des expositions. Mais je savais que j’avais besoin de retourner à l’école, puisque je n’avais pas envie d’être autodidacte et que le travail d’équipe a toujours été au centre de ma démarche.

Je suis allée au Salon de l’éducation, et c’est là que j’ai vu la maquette et la robe d’époque de l’École nationale de théâtre. C’est en voyant le kiosque, les plans techniques, les images de spectacles que j’ai vraiment pris conscience de l’existence de ce métier et des écoles qui l’enseignent. On dirait que, quand tu es spectateurice, tu ne te rends pas nécessairement compte de tout le travail qu’il y a derrière le spectacle. Tout le mérite va généralement aux comédien·nes et au metteur ou à la metteure en scène, mais il y a des artistes, des artisan·es qui travaillent pour rendre tout ça possible.

J. B. : Qu’est-ce qui t’a amenée à choisir le programme du Collège Lionel-Groulx?

J.-C. P. : La particularité du Collège Lionel-Groulx, c’est qu’on touchait à tout la première année. On apprenait autant les éclairages que la couture et les arts visuels. C’était autant technique qu’axé sur la conception. Ce n’est que plus tard qu’on choisissait dans quel département on voulait se spécialiser et faire la technique. Dès la première semaine, je me suis vraiment sentie à ma place. On nous avait dit que ce serait difficile, nous étions environ cent-vingt personnes dans l’auditorium au début du programme, et on nous a dit : « Dans quatre ans, vous serez à peu près trente ». Mais je ne me suis jamais questionnée : j’étais là où je devais être.

À la fin de ma formation, le Petit Théâtre du Nord m’a proposé de faire une première scénographie. J’étais en plein dans notre production de fin d’année, en préparation d’un voyage pour participer à la Quadriennale de Prague en scénographie, avec ma cohorte. Ça se rajoutait donc à mon horaire déjà chargé, mais en même temps, c’est ça, le métier : gérer de front plein de projets et de contrats. Ce spectacle, La grande sortie (2011) de Mélanie Maynard et Jonathan Racine, a été repris au Théâtre du Rideau Vert en 2014, puis en tournée à travers le Québec. J’ai eu de la chance : ça a démarré ma carrière.

J. B. : Plusieurs des auteurices de ce numéro thématique se penchent sur leur parcours au sein de théâtres institutionnels ou de programmes de formation, et nomment les obstacles structurels et interpersonnels auxquels iels ont dû se frotter. De ton côté, est-ce qu’il y avait de la place pour ta culture atikamekw dans ta formation?

J.-C. P. : En 2008, il y a eu la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR) à Montréal. Ma mère y a participé comme bénévole. Moi, j’y suis allée pour les conférences, les partages, les événements. J’ai compris beaucoup de choses à ce moment-là. Je me suis questionnée, j’ai questionné ma mère… Je m’étais un peu éloignée de certaines personnes de ma famille parce que je les voyais tourbillonner. Je ne comprenais pas pourquoi, pourquoi elles avaient autant mal. Ma mère m’avait un peu parlé des pensionnats, mais c’était tabou. Il y avait eu tellement de souffrance. Je ne la comprenais pas complètement. Il faut dire que j’étais jeune, aussi. De mon côté, j’avais de très beaux souvenirs de mon enfance avec mes grands-parents dans le bois, au camp, mais j’avais aussi des souvenirs un peu plus malheureux, un peu plus tristes… Ma fierté n’était plus là, elle était éteinte. J’avais presque honte de dire que j’étais Atikamekw, Autochtone parce que, aussi, à l’école primaire, au secondaire… [silence] bref, je ne le disais plus. En entrant à l’école de théâtre, je ne l’ai pas dit non plus.

Mais, en 2008, il y a eu la commission, puis, au même moment, mon frère s’est enlevé la vie. Ça a été une année difficile. J’ai fait beaucoup d’introspection en lien avec moi-même, ma famille, qui j’étais, où j’allais. Qu’est-ce qui s’était passé dans la tête de mon frère, de mes cousins et de mes oncles, qui se sont aussi enlevé la vie? La CVR, ça m’a permis de me guérir de quelque chose que je ne savais même pas que je portais. Je comprenais qu’il y avait des gens qui souffraient encore bien plus que moi, qui avaient vécu des choses inimaginables. Je me suis servie de cette rage que j’avais envers certaines personnes de ma famille qui avaient fait des choses difficiles ou blessantes (dépendances à l’alcool, aux drogues, violence conjugale, agressions physiques, mentales), et j’ai commencé à peindre des toiles de grand format en m’inspirant de ma culture. Je faisais ça à part, dans mon atelier, chez moi. Inévitablement, l’art que je développais chez moi a eu des répercussions sur ce que j’apprenais à l’école. Cela dit, ça s’est fait inconsciemment : j’ai subtilement amené ce que je portais dans mon travail. Ça paraissait dans certaines choses, mais mes professeur·es ne me disaient pas d’aller puiser dans ma culture, que c’était riche. Je pense qu’iels savaient un peu ce qui se passait avec mon frère. Je leur avais parlé de la Commission et du fait qu’il y avait plein de gens qui ne comprenaient pas les pensionnats, mais comme beaucoup, mes professeur·es n’étaient pas vraiment au courant et je n’avais pas toujours envie de parler de ça.

J’ai vraiment regagné ma fierté en sortant de l’école. La CVR a eu des effets. J’ai évolué, ma famille aussi, des gens se sont confiés. Ça a fait du bien à beaucoup de personnes. Je me suis plus imprégnée de ma culture en sortant de l’école. C’est dans l’art lui-même que j’ai tout laissé sortir avec la série de toiles Kinokewin. Cette série est assez sombre. J’avais besoin d’évacuer tout ça. J’avais d’abord fait les toiles pour moi, mais un ami galeriste les a vues et m’a fortement encouragée à exposer. Il m’a dit : « Il faut que ça soit vu! » J’ai fait l’expo dans un bar. Je ne faisais pas ça pour l’argent ou pour me faire connaître. J’étais contente de partager avec des ami·es et des inconnu·es. Mais j’ai eu peur après ça, je n’avais pas nécessairement envie de rentrer dans la cour des grand·es. J’ai un ami qui est connu et il ne peignait plus de la même façon à cause de la pression qu’il vivait. Et puis, je voulais me concentrer sur le théâtre. Comme la peinture à l’huile et les laques que j’utilisais étaient nocives et que j’étais enceinte, j’ai mis ça de côté. Mais c’est dans mes projets de m’y replonger.

J. B. : Tu es une collaboratrice de longue date des Productions Ondinnok, longtemps seule compagnie de théâtre autochtone du Québec. Parle-nous de cette relation.

J.-C. P. : À la fin de mes études, en quatrième année, j’ai fait des maquettes de costumes pour le personnage de Perceval dans un travail pour Clément Cazelais, un professeur de Lionel-Groulx. C’était très spirituel, très mythologique, et je m’étais inspirée d’un personnage qui était un chef autochtone parce que pour moi, c’était un personnage fier, sage, qui ne prenait pas position et qui écoutait tout le monde. J’avais déjà dit à Clément : « Je suis Métisse, je suis Atikamekw, ma mère est Atikamekw ». Mon travail l’avait interpellé, mais c’en était resté là. Peu de temps après avoir fini l’école, j’ai reçu un courriel de Clément, qui me disait qu’il travaillait pour les Productions Ondinnok, qu’il avait parlé de moi et que la direction était intéressée à me rencontrer.

Je connaissais déjà Ondinnok, j’étais allée voir plusieurs de leurs spectacles, mais j’étais trop timide pour aller leur dire : « Je suis scénographe et Atikamekw ». Je me disais : « Il faut que je travaille, que je me démarque, et après ça, je pourrai arriver avec du matériel ». Finalement, j’ai rencontré l’équipe et on a passé tout un après-midi à parler. Yves Sioui Durand et Catherine Joncas m’ont parlé de leur prochain projet et, à la fin de la rencontre, iels m’ont dit : « Est-ce que ça t’intéresserait de faire la scénographie de notre Printemps autochtone d’Art à la Maison de la culture? » J’ai sauté sur l’occasion! J’ai embarqué et on a fait plusieurs autres productions par la suite : L’écorce de nos silences (2013), Tu É Moi (2013), Lola (2015), Mokatek et l’étoile disparue (2016, 2017-2018) et Nmihtaqs Sqotewamqol / La cendre de ses os (2019-2020).

Nmihtaqs Sqotewamqol / La cendre de ses os, avec Charles Bender, Nicolas Desfossés, Nicolas Gendron, Marilyn Provost et Roger Wylde. Théâtre La Licorne, Montréal, 2021.

Photographies de Myriam Baril-Tessier.

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J. B. : Qu’est-ce qui est unique ou différent dans le fait de travailler avec Ondinnok, de faire du théâtre interculturel autochtone avec leur équipe?

J.-C. P. : Dans mon travail, j’aime brainstormer avec les autres. J’ai vraiment besoin d’avoir une équipe et ses idées autour de moi, d’être nourrie par lae metteur·e en scène et par la personne qui a écrit le texte, l’auteurice. Le travail final est très important, mais c’est la démarche qui m’allume. C’est pour ça que j’aime m’entourer de personnes créatives, inspirantes, de personnes qui ont du vécu, qui ont souvent quinze ou vingt années d’expérience. Ondinnok, c’est une compagnie qui est là depuis longtemps : elle en a fait, des choses! Des productions époustouflantes, éclatées, originales et très audacieuses. Ce qui m’interpelle le plus, c’est la façon qu’ont Yves et Catherine de réfléchir et d’apporter des idées.

Au niveau de la scénographie, il y a un lien direct avec ma culture quand je travaille avec Ondinnok. Je pense différemment, je réfléchis autrement, je me réfère à des souvenirs, des photos, des anecdotes. Il y a aussi la dimension des échanges interculturels. Dans le processus de création, je vais à la rencontre de ce que je ne sais pas. Par exemple, les Hurons-Wendats, c’était comment pour elleux? J’en apprends toujours… Il y a un partage des cultures des Premières Nations qu’on ne voit pas ailleurs.

Avec Ondinnok, on part vraiment des cultures autochtones et on dit les vraies choses : les points négatifs et positifs. On n’a pas peur de se dire ces choses entre nous. Ailleurs, dans des théâtres non autochtones, on marche souvent sur des oeufs et c’est compréhensible. Il y a de la curiosité, de la bienveillance même, mais il y a peut-être la peur de l’appropriation. Avec Ondinnok, la scénographie, la mise en scène, le jeu, le maquillage, les costumes, tout s’inspire de l’équipe, des personnes, de leur côté éclaté et du côté sombre qui est en chacun·e. Il y a cette grande ouverture d’esprit, mais il y a aussi, comment dire… on n’essaie pas de créer un produit et le focus est d’abord sur le processus commun… Chaque théâtre a sa signature et ce qui me frappe chez Ondinnok, c’est la confiance accordée à cent pour cent aux artistes que la compagnie invite. Elle leur donne carte blanche : « Proposez, on va s’amalgamer autour de ça! » Chaque spectacle est un monde façonné par les artistes qui ont été invité·es à la création. Il y a une liberté totale et il y a une approche profondément humaine. Il n’y a pas de prétention. Il m’est arrivé d’éclater en sanglots en réunion parce que ça n’allait pas dans ma vie, et il y a de la place pour ça. Je peux arriver avec mon enfant de deux ans, qui va courir dans le local de répétition, prendre un tambour, me poser des questions, et c’est comme ça, c’est une famille. Il y a quelque chose de très humain, et ça reste même après le départ d’Yves et de Catherine.

J. B. : J’ai eu le plaisir de voir Mokatek, spectacle d’Ondinnok pour jeune public écrit et joué par Dave Jenniss, directeur artistique d’Ondinnok depuis le départ d’Yves Sioui Durand et de Catherine Joncas. C’était à Ottawa en mai 2018. Pour le spectacle, tu as créé une tente pour les petit·es (deux à six ans) et leurs accompagnateurices, mais aussi une atmosphère intime et magique qui m’a replongée dans mon enfance…

J.-C. P. : Pour Mokatek, je voulais la forme d’un shaputuan (la longue tente innue). Avec mon côté un peu romantique, j’aurais voulu que la structure soit en bois, mais je savais déjà qu’il y aurait une tournée, qu’on serait dans des salles de toutes sortes, avec seulement quatre heures de montage. Il fallait que ce soit rapide. C’était la contrainte de départ.

De plus, notre public serait constitué d’enfants. Donc, il fallait que ce soit très sécuritaire. C’était un défi technique que mon conjoint m’a beaucoup aidée à relever! Pour la structure de la tente, on a pressenti une compagnie qui faisait des serres-tunnels, près de Drummondville. On a ensuite testé des options chez nous sur la Côte-Nord, on a fait usiner des pièces pour que la structure puisse s’ancrer au sol. J’ai été directrice technique à travers le processus créatif parce que ma conception en découlait.

Le tissu de la tente a posé un autre défi technique. Je voulais capturer l’esprit d’une cabane qu’on se construit dans le salon avec des draps, l’esprit d’un lieu magique, organique. On a donc installé les structures qu’on a imaginées sur la Côte-Nord dans les locaux d’Ondinnok, et j’ai installé tous les tissus moi-même. D’un montage à l’autre, certains tissus pouvaient être accrochés différemment, tandis que d’autres devaient rester au même endroit pour les éclairages.

Dans nos plans techniques, tout était plus petit. L’évaluation du public était autre : on comptait en termes de places pour les enfants, avec un espace pour les parents ou les éducateurices en arrière. On s’est beaucoup cassé la tête, mais la démarche était tellement intéressante! Je me sentais comme une enfant qui construisait sa cabane géante. Puis quand les enfants sont entrés dans l’espace, on a vu que ça fonctionnait. En tant que scénographe, j’ai senti que mon équipe et moi avions le temps et l’espace pour explorer parce que nous travaillions avec Ondinnok. Je n’aurais peut-être pas eu la même liberté d’exploration si le mandat était venu d’une autre compagnie.

Mokatek et l’étoile disparue, avec Dave Jenniss et Élise Boucher-DeGonzague. En tournée au Québec, 2018.

Photographies de Marianne Duval.

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J. B. : On parle de protocoles d’engagement et de création mis en place par des artistes autochtones dans ce numéro thématique. Quels sont les éléments du théâtre d’Ondinnok (leurs protocoles et façons d’entrer en relation et de créer) que tu aimerais voir les théâtres institutionnels adopter?

J.-C. P. : Le rapport à la famille, le côté humain de la chose. Les gens auraient intérêt, pas juste en théâtre, mais dans toute forme de travail, à considérer l’être humain, à faire en sorte qu’il y ait de la place pour une personne qui est en retard, en souffrance… Je souhaite qu’on n’ignore pas le côté humain de nos collaborateurices, mais que cette dimension fasse plutôt partie du processus. Chez Ondinnok, les gens sont plus sensibles à ça. Il y a de la place pour le partage, il y a une sensibilité quand il y a une personne en retrait. Il y a de la bienveillance. On se pose des questions humaines avant de commencer un meeting. Au cours d’un processus de création, on aurait intérêt à inviter la personne dans son entièreté et pas seulement ses aptitudes professionnelles.

Il y a des rituels de partage chez Ondinnok. Avant chaque représentation, par exemple, on fait un rituel avec de la sauge. Bien sûr, l’idée n’est pas que tous les théâtres se mettent à brûler de la sauge, mais quels sont les rituels qui pourraient être développés pour indiquer aux artistes que l’invitation est totale, que « tu n’es pas obligé·e de te présenter juste avec tes apports professionnels, que tu peux arriver avec qui tu es, dans ton entièreté »?

Chez Ondinnok, le travail se fait aussi de façon plus instinctive. On travaille avec des gens qui n’ont pas toujours une grande expérience, qui n’ont pas nécessairement quinze ans de travail derrière la cravate. Ça crée beaucoup d’insécurité et de peur parfois, mais Ondinnok a développé une approche qui permet à ces gens d’entrer dans la création en se faisant confiance. Le théâtre d’Ondinnok est plus accessible à des gens qui n’ont pas de formation, mais qui ressentent le désir de créer de l’art vivant. Dans les théâtres institutionnels, il y a des façons de faire qui sont en place, des règles, des approches. Ça a aussi sa place. Il y a de très belles productions dans les théâtres institutionnels, mais Ondinnok rend tout ça plus accessible aux artistes autochtones. Ondinnok a formé plein de jeunes sur le tas.

J. B. : Tu es la première scénographe atikamekw au Québec. Tu fais partie d’un nombre croissant, mais encore restreint d’artistes autochtones oeuvrant professionnellement au Québec. Comment former la relève?

J.-C. P. : Je suis la seule scénographe atikamekw au Québec, il faut une relève. C’est vraiment quelque chose qui me parle. Il y a un manque en scénographie pour les Autochtones. Je pense sincèrement que toute personne qui fait des arts visuels, qui est artiste peintre, qui fait de la sculpture ou des costumes peut s’intéresser à la scénographie et entrer dans ce métier-là, avec un peu de coaching, une petite formation. Dire à ces artistes d’aller faire quatre ans de formation, c’est mettre une barrière. C’est trop, même moi je trouvais ça difficile. Partir de la communauté, de la famille, et travailler soixante-dix heures par semaine dans une formation qui n’est pas si payante si tu fais juste des petits contrats, ce n’est peut-être pas attrayant. Mais du coaching, une formation plus courte? Ça, ça m’intéresse, et je pense que ça conviendrait mieux. À long terme, j’ai un projet de résidence d’artiste avec atelier intégré ici, chez moi. J’inviterais des artistes à venir créer sur place et j’offrirais une formation, des programmes courts. Je suis près de Tadoussac, à Sacré-Coeur.

J. B. : Tu travailles aussi dans le domaine du cinéma indépendant, notamment avec le cinéaste François Delisle, et tout récemment avec Chloé Leriche, pour laquelle tu as fait une première direction artistique pour Soleils atikamekw (2023), un long métrage tourné en 2021. Parle-moi de ton parcours.

J.-C. P. : Le film Soleils atikamekw est en période de montage, et ça va être beau. Côté cinéma, on m’offre des directions artistiques, mais le temps passé loin de ma famille est difficile. Je vais peut-être attendre que mes enfants aient grandi. En attendant, je me concentre sur des projets qui nous font vivre, pas seulement monétairement, mais intellectuellement, émotionnellement. Mes enfants, ma mère, ma famille, mes ami·es sont au coeur de mes projets pour l’année qui vient.

J. B. : Merci, Julie-Christina, d’avoir si généreusement offert ton temps et tes réflexions. Merci d’avoir répondu à l’invitation que Jill et moi t’avons lancée!