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J’avais peu de connaissances sur le fonctionnement du système français concernant l’aide aux gens. Je constate qu’il y a plusieurs similarités avec celui du Québec, notamment l’individualité des programmes et le cercle vicieux de la précarité dans lequel les gens doivent évoluer.
Une de ces similarités paraît se situer sur le plan du logement. Il y a eu historiquement des « concentrations » d’habitation pour les personnes démunies, notamment avec les parcs de HLM. Aujourd’hui, les réaménagements urbains priorisent la construction de logements de type « condominium de luxe » au détriment d’un développement de logements sociaux et abordables. Les gens démunis se retrouvent confinés à des logements qui ne respectent pas tous les critères de salubrité.
Les organisations québécoises venant en aide aux populations défavorisées sont des appareils gouvernementaux ou subventionnés en partie par ceux-ci. En France, le soutien des gens démunis semble aussi relever financièrement de l’État. De plus, le développement des programmes repose sur une perspective individuelle de la problématique même si de multiples études ont démontré la dimension structurelle de la pauvreté et du marché de l’emploi. Même si l’État admet l’importance de cette dimension, les mesures entreprises en font fi et maintiennent les gens dans une certaine précarité.
Je rejoins madame Baudot lorsqu’elle mentionne que c’est l’économique qui gère le politique ; j’ajouterais que le politique « dicte » les règles des programmes sociaux. La partie du texte concernant l’éthique m’a amenée à me questionner sur la viabilité des valeurs, des principes et les marges de manoeuvre qui guident ma profession. On nous apprend des techniques d’intervention, on nous force à développer une vision systémique et une approche globale afin de ne pas réduire nos interventions à des symptômes et on nous oblige aussi à la confidentialité. Au quotidien, nous devons rester dans un état de vigilance et faire des acrobaties pour contourner les règles afin de garder une certaine intégrité professionnelle. Au-delà des grands principes énoncés, j’ai le sentiment que les commandes politiques visent à nous forcer à un double contrôle social, soit de réduire le nombre de fraudeurs et d’acheter une paix sociale.
Je suis en accord avec madame Baudot sur l’importance de revoir l’organisation des programmes afin de sortir les gens de leur survie. En deçà d’un minimum, les gens restent catégorisés et retombent dans le cercle vicieux de la précarité… Peut-être que si les penseurs de programmes s’obligeaient à les concevoir à partir de paramètres (monétaire, devoir…) qu’eux-mêmes seraient prêts à suivre – ou si seulement ils pouvaient les essayer avant de les imposer aux gens – probablement que leur vision changerait et qu’un principe d’équité émergerait. En attendant, Yvon Deschamps (humoriste) a bien résumé la situation : « Vaut mieux être riche et en santé [et le rester] plutôt qu’être pauvre et malade ! »
Parties annexes
Note biographique
Nathalie Pérusse
Nathalie Pérusse est bachelière de l’Université de Montréal en service social depuis 1994 et amorce une maîtrise portant sur l’impact de l’employabilité sur le sentiment de citoyenneté des jeunes en difficultés. Elle est aussi animatrice, intervenante et organisatrice auprès de gens en difficultés depuis 1986. De 1998 à 2006, elle a été coordonnatrice et intervenante sociocommunautaire auprès de jeunes adultes sans abri à l’Auberge communautaire du Sud-Ouest. Ses réalisations principales ont été de collaborer à la mise sur pied du projet Azimut (bases d’employabilité et formations en emploi pour cinq métiers) et du projet Envol (volet posthébergement : soutien communautaire et accès à des logements permanents).