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NPS– Vous avez été l’un des pionniers au sein des ressources alternatives en santé mentale, l’un des plus anciens mouvements au Québec. Pouvez-vous nous donner quelques indications sur la naissance du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ) ?
Au début des années 1980, nous avons eu nos premières rencontres provinciales qui ont réuni des intervenants et des usagers d’organismes comme la Maison Saint-Jacques, la Maison Vivre, Solidarité Psychiatrie, Auto-Psy. À cette époque, il n’y avait rien de structuré, aucun service pour les groupes. Puis, il y avait aussi les usagers qui se posaient des questions, qui avaient des revendications. On s’est alors penché sur les modèles qui existaient ailleurs. Est-ce qu’il devrait y avoir des intervenants ou pas dans ce regroupement-là ? C’est quoi le but du regroupement ? Rapidement, on s’est aperçu que les usagers devaient être dans le processus afin qu’ils récupèrent leur pouvoir, il fallait qu’ils prennent leur place, qu’ils aient leur rôle. En 1982, le Regroupement a été fondé avec un objectif précis : supporter, dans les régions, la naissance d’organismes qui offrent autre chose que l’hôpital et la psychiatrie – « ailleurs et autrement » – et comblent un manque de services. Si on regarde cela avec le recul, on était trois ou quatre organismes ; il y en maintenant 145. Mais il a fallu beaucoup travailler pour créer cet élan-là. Et c’était une belle vague, une bonne vague.
NPS – Est-ce que la politique de santé mentale en 1989 a été un atout pour le développement de ces ressources alternatives ?
Nous n’avons pas eu une entière reconnaissance avec tous les moyens qui viennent avec. Mais on nous a donné une certaine reconnaissance : « ça existe, c’est positif ce qu’ils font. Il y a des milieux plus articulés, d’autres moins articulés. Mais l’existence d’un mouvement parallèle important structuré qui offre autre chose, c’est important ». Je pense qu’ils n’avaient pas le choix parce qu’ils se rendaient compte qu’il y avait des abus de pouvoir en milieu psychiatrique. Ça nous a donné un élan, mais sans vraiment de ressources financières adéquates. Les gens du réseau ont saisi que l’État ne misait plus juste sur le réseau et cela a créé une ouverture entre le milieu communautaire et les intervenants progressistes du réseau public. Cette alliance a fait son petit bonhomme de chemin que l’on peut voir, par exemple, dans les colloques de l’Association québécoise de réadaptation psychosociale (AQRP). Ensemble, on peut bâtir, offrir des choses intéressantes à cette clientèle.
NPS – Qu’en est-il à Montréal ?
Si tu te situes au niveau de l’intervention, oui, il y a des intervenants dans le réseau qui sont prêts à travailler avec nous. Il y a une reconnaissance mutuelle, une complicité. Mais quand on parle des décideurs, on est toujours dans l’ordre d’un rapport de force. Il ne faut pas se le cacher, la psychiatrie de deuxième et troisième ligne domine encore à Montréal et cela se traduit par les sommes considérables qui y sont toujours investies. Dans les départements psychiatriques des hôpitaux généraux, il y a plus de collaboration de travail ; on est impliqué dans les mesures de désengorgement. On travaille très bien ensemble.
Mais la grosse game financière se situe dans les institutions de longue durée comme Louis-Hippolyte-Lafontaine. L’Agence, la Régie régionale, à mon point de vue, a eu de la difficulté pendant des années à mettre sur la table publiquement les enjeux de même que les sommes engagées. Il y a 125 millions à Louis-H ! L’époque asilaire, c’est fini. Il faut faire le deuil de ça, il faut passer à autre chose. Puis dans le monde, il y a plein d’expériences qui montrent que ça ne marche plus, qu’il y a d’autres mesures qui fonctionnent.
NPS – À cet égard, le plan d’action 2005-2010 en santé mentale du MSSS pourrait-il constituer un tournant ?
Effectivement, il y a là une bonne ouverture. Je siège sur un comité aviseur comme porte-parole des centres de crise et les planètes semblent bien alignées pour faire un pas qu’on aurait dû faire il y a une dizaine d’années. Ce plan de santé mentale a resitué que la première ligne, ce n’est pas juste le réseau des CSSS ; c’est aussi tous les organismes communautaires. Ce qui se dessine, c’est que les équipes de santé mentale des CSSS – les équipes de première ligne – vont devoir faire ce qu’ils devaient et ce qu’ils souhaitaient faire voilà quinze, vingt ans, c’est-à-dire donner un service direct en collaboration avec le milieu. Ils ne travailleront donc plus en vase clos. Ces équipes de santé mentale devront s’appuyer sur l’ensemble des services ou des organismes dans un secteur donné. Cela devrait permettre l’accessibilité, la rapidité et une meilleure réponse aux besoins des usagers. Quand les gens auront besoin d’une deuxième, troisième ligne, il y aura un guichet permettant d’avoir une demande de consultation. Il faut dire aussi qu’il y a une implication des omnipraticiens dans le domaine de la santé mentale ; il y en a de plus en plus qui s’intéressent à ça. Cela dit, c’est tout un défi d’arrimer des partenaires qui ont intérêt à travailler ensemble et qui ont le goût de travailler ensemble.
NPS – Qu’en est-il de la spécificité des centres de crise ?
On est là pour accompagner la personne en souffrance ; nous lui offrons un milieu lui permettant de retrouver un équilibre dans son déséquilibre qui lui soit satisfaisant. Prenons les 800 personnes qu’on a accueillies cette année, il y a 568 nouveaux clients cette année qui n’avaient jamais demandé de services au centre. On va les relancer, on va leur demander, avec leur permission bien sûr, six mois après : « Comment tu as trouvé ça ? Veux-tu en parler ? » Évidemment, on n’insiste pas. Les 200 qui restent, ce sont nos 200 clients qui se servent du centre pour éviter d’être hospitalisés puis de déraper. Ils viennent une fois ou deux par année. Ils se voient partir un moment donné : « He, Daniel, il faut, que je vous voie parce que je me sens partir. – Viens t’en ! » Cette personne peut avoir accès à un, deux, trois hébergements par année. Ça lui permet de s’autogérer par rapport à des situations comme ça ; de venir chercher ce dont elle a besoin pendant quelques jours. On la maintient dans la communauté par notre centre de crise en agissant avant, pendant et après. Avant, on agit pour éviter l’hospitalisation. Pendant, c’est quand elles sont à l’urgence, nous disons au psychiatre ou aux gens qui sont là : « Ne vous gênez pas si vous trouvez qu’elle commence à être stabilisée. » Elle peut venir au centre pour ajuster ses nouveaux médicaments ou parce qu’elle se sent trop fébrile, trop suicidaire ; elle n’est pas encore prête à retourner chez elle. Pour d’autres, c’est carrément après : après avoir passé un mauvais coton ou être restées hospitalisées pendant quinze jours, elles peuvent venir au centre où on va faire un suivi à court terme avec elles pour les maintenir dans la communauté. Ce suivi à court terme vise à les aider à objectiver ce qui s’est passé en vue de les outiller pour les prochaines situations à risque et à les aider à se maintenir dans la communauté.
NPS – En ce qui a trait à votre position comme intervenant, comment vous situez-vous quant au discours sur l’importance du rapport égalitaire entre soignant et soigné ?
Ça, c’est intéressant, car j’ai été longtemps intervenant avant d’être directeur d’un centre de crise. Quel que soit l’individu en face de moi, je me trouve dans un rapport égalitaire et inégalitaire. En tant qu’individu, c’est un individu égal à moi avec ses faiblesses et ses points forts. Mais le rapport est inégal parce qu’il vient me demander un service ; j’ai une fonction. Que dois-je faire dans ce rapport inégal ? Être le plus respectueux de la dignité de la personne et le plus accueillant dans ce rapport sans tomber non plus dans un rapport trop subjectif en étant comme un « chum ». En tant qu’intervenant, tu es toujours en train de te poser cette question-là quand tu fais face à des gens qui t’interpellent. Quand ça te touche au niveau personnel – ce qu’on appelle en jargon de psy ton contre-transfert et ton transfert –, tu te dis : « Ça doit être dur à vivre ça. » Ça vient te chercher, mais on est toujours dans un rapport d’aidant.
Il ne faut pas toutefois que tu te prennes trop au sérieux. Tu fais ce que tu as à faire dans le moment. Souvent dans la vie, je me suis rendu compte que des fois, tu penses que tu as fait une super-intervention, tu as été super-aidant pour cette personne-là puis, tu regardes avec le recul, tu as été pas pire. Puis, parfois, tu penses que tu as été pas pire puis, tu rencontres cette personne dix ans plus tard sur le coin de la rue : « He, Daniel, excuse de te déranger. Ce que tu m’as dit ça a été important. » J’ai fait : « Hein ? Ah oui ? » Tu es comme surpris de l’impact que tu as eu. C’est lui qui a pris, à ce moment-là, ce qu’il était disposé à prendre, puis il a continué son petit bonhomme de chemin. Et après ça, ça te relativise dans ton rôle d’intervenant. Tu es un accessoire, tu es là au bon moment puis la personne prend ce qu’elle a à prendre.
NPS – Mais l’intervention de crise peut survenir également dans un contexte d’autorité, n'est-ce pas ?
On a toujours eu comme philosophie qu’on n’a pas à courir après le monde pour les soigner. La grosse caricature que je fais à ce moment-là, je me dis : « si tu le forces à recevoir des soins, il a le droit de réagir puis peut-être… entre guillemets, “ te vomir dessus ” ». Cela dit, quand tu vois quelqu’un qui est très souffrant et dangereux pour lui et pour les autres, je pense que c’est là que ça se joue. En tant qu’intervenant, si j’en arrive à cette conclusion avec des outils appropriés, pas parce que c’est un feeling, mais vraiment sérieusement, je vais alors prendre la décision de le protéger, pour le moment. Pourquoi ? Parce qu’avec le recul, je me rends compte qu’au moment où je l’ai fait, plusieurs personnes m’ont remercié. On leur donne l’occasion de s’arrêter ; à ce moment-là, elles vont à l’hôpital et sont évaluées. Des fois, elles peuvent t’en vouloir toute leur vie d’avoir fait ça, mais en général, elles ne t’en veulent pas parce qu’à ce moment-là, elles n’étaient pas en mesure de prendre une décision pour elles-mêmes.
Mais c’est vraiment l’extrême ; tu n’interviens pas parce que son délire dérange le monde. Il y a une différence entre du contrôle social et la fonction d’évaluer, d’estimer la dangerosité de l’individu. L’intervention de crise par une équipe, quand elle est faite de façon respectueuse et de façon continue avec plusieurs services, permet d’offrir beaucoup de possibilités à un individu afin d’aller chercher son consentement. La personne ne veut pas ; on l’accompagne puis il veut ; tu fais un bout, il se sent apprécié. Tu lui dis le lendemain : « Si tu veux, tu peux téléphoner, tu peux revenir au centre. » Il se sent reçu et compris. Ça, c’est autre chose que de faire une intervention d’urgence. Il ne faut pas mélanger l’urgence avec l’intervention en situation de crise. En urgence, tu ne le connais pas, tu interviens, il n’est pas consentant, pas volontaire. Toi, tu décides à sa place, tu le rentres à l’hôpital. On appelle ça du contrôle social. Dans la majorité des situations « weird » que j’ai vues dans ma vie, il y a eu très peu de personnes dangereuses, complètement décrochées. C’est 1 % ; souvent la personne est intoxiquée, donc effectivement elle n’est pas lucide. Elle n’a pas de repère concret dans le temps et dans l’espace. Si je la laisse, elle va traverser la rue et elle va se faire frapper. Elle ne regarde même pas à côté.
NPS – La question de la toxicomanie est-elle donc si importante ?
Nous, dans le centre-ville, on a effectivement une clientèle itinérante, des gens multiproblématiques – je n’aime pas le mot –, mais, en tout cas, avec plusieurs problématiques, plusieurs difficultés de vie, consommation de drogues illégales et légales. Sauf qu’à un moment donné, ils mélangent tout ça, ils s’automédicamentent. Je pense qu’au moins 25 % à 50 % des gens qui viennent ici – on parle de 800 demandes par année, clients différents, on parle de 10 000 appels par année –, il y en a au moins la moitié qui n’a pas de suivi en santé mentale. Ça veut dire qu’ils ont décroché du réseau, qu’ils ne demandent plus de services au réseau et, ça, c’est inquiétant. Non pas que je veuille qu’ils se branchent sur le réseau, sauf que ce sont des gens qui ont vraiment de gros problèmes de santé mentale, qui ne consomment plus de médicaments ou bien continuent à prendre des prescriptions vieilles de dix, vingt ans, en s’appuyant sur l’un ou l’autre pour se médicamenter. Ils se font du tort physiquement. Puis en plus, s’il prend de la dope…C’est souvent à ce moment-là que tu l’hospitalises de façon involontaire. Et le Denis que tu connais depuis dix ans, lorsque tu le revois dix ans après, il a l’air plus vieux de trente ans. On n’a pas pris soin de lui, de sa santé. On l’a vu juste comme un problème, on n’a pas vu l’ensemble de ses problèmes. Et je trouve ça dommage. Ils sont « laissés pour compte ».
NPS – L’accès à un logement adéquat constitue également l’une de vos préoccupations majeures, n’est-ce pas ?
La question du logement social, du logement pour la clientèle santé mentale, il y a tout un travail à faire parce qu’il y a un problème d’hébergement à Montréal pour la clientèle. J’ai au moins entre 25 % et 30 % de clientèle sans abri au centre de crise comme c’est documenté dans notre rapport d’activités. Il y a plus d’hommes hébergés que de femmes. Pourquoi ? Parce que les hommes, en plus d’avoir des problèmes de santé mentale, des besoins d’encadrement pour X temps pour un support au niveau de la crise, n’ont pas de logement. Ils se retrouvent à se promener de refuge en refuge, de voisin en voisin, d’amis, de collègues… Quand tu as un problème de santé mentale, tu as perdu ta job, tu rames. Si tu es un itinérant depuis des années, tu connais la logique d’itinérance. Mais si tu ne connais pas ce milieu-là, c’est toute une affaire de se ramasser dans un refuge. Tu te rends compte : « Merde, il n’y a pas de logement finalement. » Tu couches chez la belle-soeur de l’autre ; tu es sans abri à ce moment-là, sans domicile fixe. Essayer de trouver une maison de chambres ? Il y a de moins en moins de petits logements. Des logements HLM ou à prix modique, il ne s’en crée presque pas. C’est tout un défi parce que la clientèle santé mentale vulnérable a besoin de stabilité et d’un chez-soi, voire d’une milieu d’appartenance.
NPS – Et vous avez remarqué que c’est de plus en plus important dans votre secteur…
Ah oui, c’est vraiment un problème à Montréal. La peur des gens du réseau de défaire les structures intermédiaires ou de défaire les résidences d’accueil s’appuie sur cette réalité. Ils disent : « La clientèle a plus de difficultés qu’auparavant. » Mais c’est aussi la crainte que l’on grossisse le milieu des itinérants. Il faut s’asseoir avec la FOHM et d’autres organismes afin de mettre sur pied des maisons de chambres, des maisons d’hébergement. Pas de la prise en charge, mais des habitations où les résidents sont autonomes dans leur logement. Cela demande des investissements. Qui va faire cela ? Le fédéral ? Le provincial ? Les organismes communautaires ? On a un gros, gros défi là.
NPS – On a beau vouloir transférer ou fermer des résidences d’accueil, mais encore faut-il planifier cela adéquatement.
Dans ma lecture, il y a eu trois désinstitutionnalisations : il y en a eu une majeure au début des années 1960 lors de la Révolution tranquille. Dans la deuxième et même la troisième, un des problèmes, c’est qu’il n’y a pas eu de processus transitoire. On pensait qu’ils allaient se stabiliser, que tout irait bien, qu’ils allaient fonctionner, travailler. On n’avait pas prévu non plus la récession des années 1980. Ces gens-là ne pouvaient pas vivre avec cinq cents, même huit cents piastres par mois. Il y en a qui disent : « Si j’ai juste cinq cents, qu’est-ce que ça me donne de rester en logement ? Je prends cinq cents, je les donne au propriétaire ? J’aime bien mieux me promener dans les refuges, je suis nourri, logé, couché. J’ai plus d’argent. »
NPS – Les centres de crise ont-ils évolué sur le plan des services dispensés ?
Au début, le MSSS avait mis sur pied les centres de crise pour répondre à la clientèle santé mentale qui demandait des services à l’urgence, mais qu’il n’était pas nécessaire d’hospitaliser. On en a mis partout : Montréal, Hull, Québec, etc., et, graduellement, on nous a donné d’autres mandats afin de répondre à une clientèle « at large ». On a eu, à un moment donné, des vagues de troubles de personnalité sévères parce que personne ne voulaient de ces gens dans les hôpitaux. Il y avait une chicane au sein de la psychiatrie : certains psychiatres voulaient s’en occuper, mais il y en avait d’autres qui ne voulaient pas, donc ils nous les dompaient. Cela faisait qu’on se retrouvait avec toutes sortes de clientèles ; on était obligé de se spécialiser dans toutes sortes de problématiques, y compris la crise psychosociale. Puis, en même temps, les centres de crise ne voulaient pas être l’appendice des hôpitaux, donc ils ont aussi développé des liens avec la communauté. Ils ont commencé à offrir des services directement, en disant aux organismes communautaires : « Vous n’avez pas besoin d’aller à l’urgence, vous pouvez venir ici. Téléphonez-nous, on va aller voir. » Donc, on a développé une intervention, je ne dirais pas préventive, mais une intervention plus précoce dans l’intervention de crise qui faisait en sorte que la personne ne se rendait pas à l’urgence. L’Agence et le Ministère trouvaient ça intéressant parce que cela faisait diminuer les urgences hospitalières. En 1998, ils sont revenus là-dessus en disant : « Aidez-nous à désengorger les urgences. »
NPS – Y a-t-il encore une forme de développement à venir pour les centres de crise ou est-on plutôt dans une phase de consolidation ?
Les deux, il faut se consolider parce qu’on n’est pas complètement 24/7. Il y a des centres qui n’offrent pas les services 24/7 comme une équipe d’évaluation la nuit ou en fin de soirée. On n’est pas tous subventionnés pareil. Le plan de santé mentale 2005-2010 parle du rôle et des services de crise, mais présentement, c’est inégal dans les régions du Québec. C’est pour cela qu’on a formé un regroupement des centres, des services communautaires de crise. On définit ce qu’on doit faire, mais on ne nous donne pas les moyens nécessaires pour le faire. Puis, en même temps, il y a la nécessité d’une consolidation.
Mais le développement, c’est vraiment notre rôle, notre place. Il y a la ligne info sociale qui, dit-on, va se développer un jour, le fameux 811. Cette ligne se veut la ligne qui va faire les premières interventions. Qu’est-ce qui va arriver à toutes nos lignes de crise ? Il y a des choses à clarifier avec le Ministère ; c’est un enjeu important à ce niveau-là. Je suis confiant, mais il va falloir être vigilant par rapport à ça. Un livre sur l’intervention de crise[1] va bientôt paraître et on va en profiter pour lancer un débat sur l’intervention de crise au Québec. Il faut prendre plus de leadership là-dessus parce qu’on se fait récupérer notre expertise. Nous faisons de l’intervention de crise au quotidien et peut-être que le temps est venu d’avoir une formation en intervention de crise accréditée afin de la protéger et de la développer. Permettre à Info-social de développer l’intervention de crise avec notre expertise met en péril le modèle d’intervention de crise qui a fait ses preuves depuis vingt ans, comprenant une gamme de services attachés à une seule organisation, sans coupure avec le client. L’accepter, c’est valider une erreur clinique et prendre le risque de perdre le contact avec le client en crise. De plus, ça ferme la porte à toute création de nouveaux centres de crise (OSBL) dans les régions dépourvues de ce type de service pour demander, voire imposer, au réseau public d’organiser des services de crise à partir de leur organisation de service CSSS.
Parties annexes
Note
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[1]
S. Larose et M. Fondaire (dir.), Mouvement de la crise, sa trajectoire et son territoire, Montréal, Quebecor (à paraître).