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Comme l’indiquent les auteurs, l’intervention sociale auprès des groupes semble vouloir revenir en force dans plusieurs secteurs d’activités du travail social, notamment par le recours de plus en plus important aux réseaux naturels en plus du potentiel d’entraide qu’offrent les groupes. Par ailleurs, l’héritage de Simone Paré, bien qu’il soit intéressant, date déjà de quelques décennies et les écrits en langue française sur le sujet sont rarissimes. Voilà donc un ouvrage attendu répondant à des besoins. Cet ouvrage est un texte d’introduction. Il présente de façon systématique les étapes du processus d’intervention auprès des groupes et les actions à entreprendre pour la réalisation de la démarche. Comme une méthode d’intervention, l’intervention sociale auprès des groupes est spécifique : dans ses buts, ses modalités d’application, les valeurs qu’elle sous-tend (de coopération, de partage, d’entraide, d’autonomie et de solidarité). Elle se compare aux autres méthodes d’intervention en ce qu’elle exige une préparation minutieuse, rigoureuse, une démarche qui s’apprend et qui s’enseigne. Plusieurs chapitres sont consacrés aux différentes phases du processus d’intervention et des stades de développement du groupe, aux rôles et aux tâches du travailleur social, lesquels évoluent à mesure que se développe le groupe. Il est aussi question de coanimation, de gestion de situations parfois difficiles, mais souvent inévitables dans un contexte de groupe.
Ce volume peut facilement constituer le plat de résistance d’un cours de méthodologie en intervention auprès des groupes alors que les chapitres 1 et 7 sont particulièrement pertinents pour l’enseignement d’un cours portant sur les théories et pratiques d’intervention auprès des groupes. De la demande de services à la planification de l’intervention, le lecteur découvre comment se préparer à chacune des étapes et comment aider les membres à participer à une démarche de groupe. Comment et pourquoi évaluer l’évolution du groupe et mieux suivre le processus, voilà les questions soulevées dans le chapitre 7. Le chapitre 8 aidera les praticiens à tenir compte des conditions d’efficacité et des inconvénients de la coanimation tant pour les membres que pour les animateurs et le groupe lui-même.
La présentation du volume est académique, facile d’accès et bien structurée. Les tableaux et les résumés à la fin de chaque chapitre servent de points de repère autant aux étudiants intéressés à revoir rapidement la matière qu’aux intervenants plus expérimentés désireux de revoir certaines étapes de l’intervention. Comme volume d’introduction, l’ouvrage situe très bien l’histoire du travail social auprès des groupes tout en précisant les valeurs qui sous-tendent l’intervention, les nombreux objectifs visés par l’intervention tout en insistant sur la diversité des pratiques. Ce volume sera d’une grande utilité pour les travailleurs sociaux intéressés à se donner une formation disciplinaire spécifique en intervention sociale auprès des groupes ; dans cette perspective, cette publication est un incontournable. L’ouvrage sera utile également aux intervenants sociaux plus ou moins expérimentés qui désirent soit s’initier à la méthode d’intervention auprès des groupes, soit prendre du recul et s’offrir une occasion d’évaluer leur savoir et leur savoir-faire. La tenue d’un dossier de groupe (p. 186-196) peut être un outil de travail très pertinent et utile aux intervenantes et intervenants désireux de documenter l’activité d’intervention, d’assurer la continuité des services ou d’avoir un outil de référence pour favoriser la pratique réflexive. La tenue d’un dossier de groupe peut être utile également aux étudiants, aux superviseurs et aux professeurs-consultants dans les stages de formation pratique pour témoigner de la nature des interventions, du contenu des échanges et de la consignation des informations.
Les chercheurs et les étudiants de deuxième cycle y trouveront aussi un grand intérêt : la phase de travail dans le processus d’intervention impliquant la structuration des rencontres, le choix et la pertinence des activités, la gestion des situations conflictuelles, l’importance du dossier comme outil d’apprentissage et instrument de collecte de données, sont autant de pistes à explorer en recherche en intervention auprès des groupes. Les stades de développement et les phases d’intervention (chapitre 3) concernent davantage les groupes axés sur le développement personnel ou social. Peu d’applications sont transférables avec des groupes orientés vers l’action sociale où la tâche et l’engagement du travailleur social sont particulièrement importants notamment dans le processus décisionnel pour aider le groupe à maximiser son efficacité et soutenir l’intérêt des membres. Ceci constitue sans doute une faiblesse de l’ouvrage, lequel s’adresse autant à des gens bien formés qu’à ceux qui désirent être formés ou se former eux-mêmes.
Sur le plan des applications en faveur de la coanimation, les auteurs passent sous silence la possible collaboration entre travailleur social de groupe et organisateur communautaire alors que les compétences de l’un peuvent facilement compléter et enrichir les compétences de l’autre. À mon avis, les auteurs ont manqué une belle occasion de faire un rapprochement entre la méthode d’intervention auprès des groupes et son utilité et sa pertinence dans une démarche axée sur l’action sociale. L’aide mutuelle, pièce centrale s’il en est une en intervention auprès des groupes, aurait pu être aussi présentée dans une perspective d’aide et de soutien aux intervenants. Dans un contexte où l’organisateur du travail exige beaucoup des individus et permet peu d’échanges et de partage entre les intervenants, un groupe de soutien ou un groupe de supervision peut être une excellente occasion de partager des connaissances et des compétences, de briser l’isolement professionnel, de favoriser le changement organisationnel et de maintenir une structure ouverte aux rapports entre les intervenants et la direction. D’autant plus que ce sont là des valeurs qui sous-tendent l’intervention sociale auprès des groupes.
Pour résumer, la densité de l’ouvrage peut facilement soutenir et enrichir l’enseignement en intervention auprès des groupes tant pour un cours de méthodologie que pour un cours portant sur les modèles théoriques qui sous-tendent les pratiques ; en ce sens, ce volume est plus qu’un livre d’introduction. En s’y référant, les travailleurs sociaux et les autres intervenants sociaux peuvent échanger sur leur pratique, élargir leur discussion et nourrir leur réflexion ou s’en servir comme formation continue. Ce livre a le grand mérite de répondre à des besoins de formation et d’actualisation professionnelle particulièrement comme outil de référence pour une pratique réflexive. Il poursuit la tradition en vigueur à l’École de service social de l’Université Laval, notamment par les écrits de Simone Paré, de soutenir les pratiques de groupes et de favoriser les échanges entre les intervenants et les chercheurs. Cette contribution est particulière et participe à l’évolution des pratiques en intervention auprès des groupes. Les auteurs sont invités à poursuivre leur démarche dans la perspective d’une prochaine publication sur l’étude des groupes restreints ou d’une étude plus approfondie sur les modèles d’intervention. On ne peut que leur souhaiter tout le succès possible pour ce premier volume.