Résumés
Résumé
Cet article questionne l’intégration de pratiques d’innovation sociale par le design dans l’enseignement des arts appliqués dans le second degré. Ces pratiques, souvent qualifiées de design social, s’attachent à la résolution de problèmes sociaux et environnementaux par des approches centrées sur l’humain et la collaboration. De ce point de vue elles constituent une opportunité pour le développement de compétences transformatives. Ces compétences définies par l’OCDE pour le 21e siècle incluent en effet la créativité, la pensée critique, la résolution de problèmes, et la collaboration. Cet article étudie la transposition au lycée professionnel d’un dispositif pédagogique de master en design et innovation sociale à l’Université de Nîmes, explorant l’évolution de l’enseignement des arts appliqués pour mieux préparer les élèves à advenir au monde.
Mots-clés :
- compétences transformatives,
- compétences de conception,
- didactique du design,
- design social,
- lycée professionnel
Abstract
This article examines the integration of social innovation practices through design in the teaching of applied arts in secondary schools. These practices, often referred to as social design, focus on solving social and environmental problems via human-centred, collaborative approaches. As such, they represent an opportunity for the development of transformative competencies. These competencies identified by the OECD for the 21st century indeed include creativity, critical thinking, problem-solving, and collaboration. This article looks at how an instructional program for a master’s degree in design and social innovation at the University of Nîmes can be transposed to vocational high school, exploring the evolution of applied arts teaching to better prepare students to become part of the world.
Keywords:
- transformative competencies,
- design competencies,
- didactics of design,
- social design,
- vocational high school
Resumen
Este artículo cuestiona la integración de prácticas de innovación social mediante el diseño en la enseñanza de las artes aplicadas en el nivel secundario. Estas prácticas, a menudo calificadas como diseño social, se centran en la resolución de problemas sociales y ambientales mediante enfoques centrados en el ser humano y la colaboración. Desde este punto de vista, constituyen una oportunidad para el desarrollo de competencias transformadoras. Estas competencias, identificadas por la OCDE para el siglo XXI, incluyen la creatividad, el pensamiento crítico, la resolución de problemas y la colaboración.Este artículo estudia la transposición al liceo técnico profesional de un dispositivo pedagógico de maestría en diseño e innovación social de la Universidad de Nîmes, explorando la evolución de la enseñanza de las artes aplicadas para preparar mejor a los alumnos para integrarse al mundo.
Palabras clave:
- competencias transformadoras,
- competencias de diseño,
- didáctica del diseño,
- diseño social,
- liceo técnico profesional
Corps de l’article
1. Introduction
La transformation de la voie professionnelle est en cours en France. Elle est marquée par des réformes majeures visant à moderniser l’enseignement professionnel pour «mieux insérer les élèves diplômés et mieux accompagner ceux qui souhaitent poursuivre leurs études dans l’enseignement supérieur» (Ndiaye, cité par Ministère de l’Éducation nationale [MEN], 2023, p. 2). Ces réformes ont entraîné des changements significatifs, notamment la réorganisation du baccalauréat professionnel avec l’introduction de nouvelles spécialités. Ce changement a également mis l’accent sur la promotion de l’apprentissage (Couppié et Gasquet, 2018), sur le developpement de compétences psychosociales (Lugnier et al., 2024) et sur l’orientation professionnelle des élèves pour les guider dans leurs choix de formation et de carrière, et favoriser l’employabilité (MEN, 2023).
L’enseignement du design au lycée professionnel (LP) est dispensé à tous les élèves, indépendamment de leur filière, dans la discipline générale «arts appliqués et cultures artistiques» (AACA). Cet enseignement, inscrit aux niveaux CITE 3 et 4[1], a pour objectifs de favoriser l’intégration professionnelle, sociale, et culturelle par le développement d’une «culture métier enrichie» (Ministère de l’Éducation nationale [MEN], 2019, p. 2), d’élargir cette culture à d’autres contextes, et de faciliter l’acquisition de méthodes de travail argumentées et structurées. Pour y parvenir, les enseignants et enseignantes doivent concevoir eux-mêmes les ressources pédagogiques adaptées à leur discipline et aux filières dont ils sont responsables. Face aux enjeux sociaux et environnementaux actuels, il est essentiel de réorienter l’approche pédagogique traditionnelle vers une intégration plus profonde des arts et de la culture, en promouvant la compréhension interculturelle et en oeuvrant à un avenir juste et durable (UNESCO, 2024). L’une des pistes pour y arriver est de favoriser le développement des «compétences transformatives», ensemble de compétences clés proposées par l’OCDE (2018) pour répondre aux défis du 21e siècle. Ces compétences mobilisent notamment la créativité, la pensée critique, la résolution de problèmes, la communication, la collaboration, la citoyenneté mondiale et la conscience interculturelle (Didier et Tortochot, 2021). On peut considérer que les pratiques de référence en innovation sociale par le design souvent qualifiées de «design social» et reposant sur une activité de création-conception pour résoudre des problèmes sociaux et environnementaux (Catoir-Brisson et Royer, 2017; Le Boeuf, 2015; Manzini, 2015) contribuent à développer de telles compétences et pourraient donc être transposées dans le cadre de l’enseignement d’AACA au LP.
En effet, de telles compétences, associées au métier de designer, sont développées dans les formations supérieures de design qui préparent les étudiants et étudiantes à l’activité professionnelle. C’est le cas dans le master design innovation société (DIS). Les étudiantes et étudiants suivent des enseignements de cultures artistiques, mènent des projets d’innovation sociale par le design et développent des méthodes qui impliquent la participation des usagers[2] dans le processus de création. Des collaborations pédagogiques avec des partenaires de l’action publique, du secteur médico-social, associatif, du développement territorial ou de la culture favorisent le développement de compétences humaines nécessaires pour interagir efficacement avec les autres, d’en comprendre les besoins et les perspectives, et de collaborer avec eux pour atteindre des buts communs.
Des pratiques de design social, impliquant des élèves dans des projets de résolution de problèmes sociaux et environnementaux, pourraient donc enrichir les enseignements de design au LP (Didier et Tortochot, 2021; Moineau et al., 2022; Roy et al., 2023a; Roy et al., 2023b). Cet article envisage cette piste en explorant deux hypothèses.
Premièrement, nous suggérons qu’il existe des similitudes entre les compétences transformatives (OCDE, 2018), celles développées par l’enseignement des pratiques de design social dans la formation supérieure étudiée et celles prescrites dans le curriculum des arts appliqués dans la voie professionnelle en France. Cette hypothèse soulève la question de l’adéquation entre les compétences enseignées dans le cadre des AACA et celles spécifiquement mises en oeuvre dans l’apprentissage du design social, interrogeant la possibilité de reconsidérer par une lecture sociétale les approches pédagogiques pour aborder des problématiques sociales et environnementales complexes. Pour traiter cette première hypothèse, une analyse curriculaire est entreprise puis confrontée aux compétences développées, énoncées par les étudiantes et étudiants de master DIS lors d’entretiens. Deuxièmement, si l’on se réfère au projet mené au sein du master DIS, une approche de design social prend nécessairement la forme d’un projet long et collaboratif. Une telle approche dans le cadre de l’enseignement des AACA en LP semble a priori peu compatible avec les nombreuses contraintes liées à la forme scolaire du LP (Roy et Sido, 2023). Pour aborder cette seconde hypothèse, nous avons confronté les méthodes de design social (et les difficultés afférentes) mises en oeuvre par les étudiantes et étudiants de master DIS au curriculum prescrit des enseignements d’AACA.
2. Les compétences transformatives et la pratique du design
2.1 Les compétences transformatives
La compétence est la capacité d’un individu à mobiliser et à intégrer un ensemble diversifié de ressources pour réaliser des tâches, résoudre des problèmes ou prendre des décisions de manière efficace dans un contexte spécifique (Coulet, 2016; Perrenoud, 1997). Cela inclut non seulement les connaissances et les savoir-faire, mais aussi les savoir-être, tels que les attitudes et les valeurs, dans des situations données (Le Boterf, 1994). Des obstacles épistémologiques, tels que les perceptions traditionnelles, les normes institutionnelles et les idéologies dominantes, peuvent entraver l’émergence et l’application du concept de compétence dans l’éducation (Gottsmann et Delignières, 2016).
En 2018, l’OCDE présente un ensemble de compétences nécessaires pour répondre aux enjeux du 21e siècle. Ces compétences, dites «transformatives», sont considérées comme essentielles pour préparer les élèves à un avenir difficile à prévoir. Elles prennent la forme de trois macro-compétences: créer de la valeur nouvelle, concilier tensions et dilemmes et engager la responsabilité et l’action (OCDE, 2018). Quelque 36 concepts clés mentionnés dans ce rapport aident à définir des sous-compétences pour les trois compétences transformatives principales (Joliat et Terrien, 2021). La première, «créer de la valeur nouvelle» (OCDE, 2018, p. 7), se concentre sur l’innovation, la créativité, et la capacité à envisager des solutions et des voies d’action inédites. Elle encourage les individus à aller au-delà des réponses conventionnelles et à imaginer des solutions alternatives qui apportent de la valeur dans un monde en constante évolution. La deuxième compétence, «concilier tensions et dilemmes» (p. 7), implique une compréhension profonde et nuancée des problèmes complexes. Elle nécessite une pensée critique, la capacité à questionner les hypothèses existantes, et à voir les problèmes sous différents angles pour dégager des solutions plus complètes et efficaces. Enfin, la troisième, «être responsable» (p. 7), est axée sur la conscience et la prise de responsabilité envers les autres et la planète. Elle incite à l’action éthique et durable, la collaboration et la capacité à travailler de manière proactive pour le bien commun.
2.2 Les compétences développées par la pratique du design
Le design est une discipline d’étude et de pratique axée sur l’interaction entre une personne (l’utilisateur ou l’utilisatrice) et son environnement artificiel, en tenant compte des considérations esthétiques, fonctionnelles, contextuelles, culturelles et sociétales (International Council for Design, 2023). La pratique du design favorise le développement de compétences techniques (Cross, 2023) (la recherche, le prototypage, la visualisation, la conception graphique, l’ingénierie et la fabrication, ainsi que la programmation et le développement web). D’autre part, certaines valeurs et compétences socioémotionnelles sont également mobilisées lors d’une activité de design.
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La créativité, reconnue comme essentielle, permet la génération d’idées novatrices et la résolution de problèmes complexes (Amabile, 1983; Bonnardel, 2009; Cropley, 2006).
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La pensée critique contribue à la pertinence des solutions apportées: «[l’]esprit critique se fonde sur le principe d’une posture active de l’élève par le développement de ses capacités intellectuelles et cognitives» (Mahmoudi, 2020, p. 54).
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L’empathie est essentielle pour créer des produits et des expériences qui répondent aux attentes des utilisateurs et des utilisatrices (Brown, 2009; Kouprie et Visser, 2009).
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La résolution de problèmes est également une compétence clé du design (Dorst, 2011). Elle implique la capacité à déceler, décomposer et résoudre des problèmes complexes et mal définis de manière systématique. Les designers utilisent des méthodes telles que le remue-méninges, les représentations et les prototypes pour explorer différentes solutions et les tester avant de parvenir à un modèle d’artéfact ne résultant pas d’un modèle existant (Lebahar, 2007).
Dans un contexte marqué par l’évolution rapide des technologies et les changements sociétaux, il est primordial que ces compétences et valeurs s’allient et progressent (Brosens et al., 2023). L’approche multidimensionnelle devient ainsi centrale, tant dans l’enseignement que dans la pratique du design (Friedman, 2012). En combinant compétences techniques et perspective transformatrice, elle s’harmonise avec les compétences clés mises en avant par l’OCDE (2018), indispensables pour naviguer dans un monde au devenir incertain. L’adoption de cette perspective multidimensionnelle pourrait enrichir l’enseignement du design, favorisant ainsi la création de solutions innovantes et préparant efficacement les élèves à répondre aux réalités contemporaines et à anticiper le futur avec responsabilité (UNESCO, 2024).
2.3 Le design social et son enseignement
Le design social est un terme qui apparaît dans les années 1980 au Royaume-Uni. Il trouve sa genèse avec les travaux de Papanek (1971) et la prise de conscience de la nécessité de consommer autrement et de concevoir différemment. Le design social est une branche du design durable et fait partie de ce que l’on nomme les «nouvelles pratiques du design» (Moineau et al., 2022, p. 111). Pour que le design soit social, il doit notamment répondre à une problématique sociale en travaillant en partenariat avec les bénéficiaires et les parties prenantes (l’État, les collectivités, les associations, les établissements publics, les entreprises, etc.). Cette collaboration prend la forme de méthodes participatives, où les usagers sont activement impliqués dans le processus de conception, ce qui permet ainsi d’envisager des solutions qui prennent réellement en compte leurs besoins et expériences. Catoir-Brisson et Royer (2017) ont introduit quatre indicateurs de compétences propres au design d’innovation sociale: la méthodologie créative (1), le rôle de médiation du designer (2), les spécificités des livrables et leurs différentes itérations (3) et les finalités et la valeur sociale du projet (4). Les compétences particulières associées à ces indicateurs sont les suivantes: la co-construction (et l’implication des parties prenantes); la médiation; la production fabriquée dans une économie de moyens (conception responsable et durable), sous forme itérative, et ayant une valeur sociale. Les étudiantes et étudiants en design social développent une gamme de compétences essentielles pour travailler dans ce domaine comme la pensée systémique ou la collaboration. Ils apprennent à voir les problèmes sociaux comme faisant partie d’un système plus large et complexe (Manzini, 2015) et à travailler en équipe avec des personnes ayant des compétences et des perspectives différentes (Manzini, 2015; Leclercq et Demoulin, 2018). Les travaux de Roy et al. (2023b) mettent en avant le développement de compétences socioémotionnelles et techniques chez les étudiantes et étudiants engagés dans des projets de design social. Ces compétences, qui incluent la médiation, la collaboration et la communication, sont mobilisées pour interagir avec les différents acteurs du projet. C’est parce que l’enseignement de design social favorise le développement des compétences transformatives, incarnées par certains concepts clés (Joliat et Terrien, 2021) tels que l’empathie, la résolution de problème, l’engagement, la collaboration, que se pose la question de l’apport que pourrait avoir une telle pratique dans le cadre de l’enseignement du design au LP.
2.4 L’enseignement d’arts appliqués et cultures artistiques au lycée professionnel
Près de 700 000 élèves sont inscrits au LP et bénéficient d’enseignements généraux et professionnels entrecoupés de périodes de stage en entreprise. Les AACA appartiennent au bloc des enseignements généraux et sont dispensés 55 minutes par semaine à tous les élèves. Ils représentent un champ d’enseignement qui allie créativité, technique et application pratique dans divers domaines d’application du design. Les AACA couvrent ces domaines selon trois axes principaux: le design d’objet, le design graphique et le design d’espace (MEN, 2019; Tortochot et al., 2023). Chacun d’entre eux englobe un ensemble de compétences et de connaissances spécifiques, organisé autour d’activités de création-conception d’artéfacts, de production d’images pour des supports de communication, et de réalisation d’espaces, en relation avec des contextes professionnels ciblés. L’enseignement des AACA met l’accent sur une approche pratique et interdisciplinaire, encourageant les élèves à développer une compréhension approfondie des interactions entre les objets, les espaces et les images dans un monde en évolution.
Rappelons que les compétences transformatives de l’OCDE sont structurées autour de trois dimensions principales: créer de la valeur nouvelle, réconcilier les tensions et les dilemmes et être responsable. Le référentiel d’AACA (MEN, 2019) aborde, de manière indirecte les compétences transformatives définies par l’OCDE (2018). En ce qui concerne la capacité à «créer de la valeur nouvelle», l’importance de l’initiation au design et à ses méthodes doit favoriser la créativité et l’innovation, éléments essentiels pour développer de nouvelles valeurs et approches dans le design (MEN, 2019). Pour la compétence «concilier tensions et dilemmes», le texte met l’accent sur l’ouverture artistique, culturelle et civique. Autrement dit, il a pour visée le développement d’une culture artistique personnelle des élèves. Cette approche encourage la compréhension des diverses perspectives culturelles et permet ainsi de mieux gérer les tensions et les dilemmes qui en découlent (MEN, 2019). L’approche interdisciplinaire, en particulier dans l’étude de l’histoire des arts, aide à appréhender les diversités de points de vue, un aspect primordial dans un monde interconnecté et diversifié (MEN, 2019). Le préambule met en avant l’importance d’«être responsable» en présentant l’enseignement des AACA comme un moyen de construire une culture commune, en développant le travail d’équipe, le sens des responsabilités, l’autonomie et l’esprit critique (MEN, 2019). L’importance de l’expérimentation et de la réalisation dans le processus de conception est également soulignée, incitant à une approche à la fois responsable et réfléchie dans les créations et les travaux (MEN, 2019). Au regard de notre question de recherche, nous pouvons d’ores et déjà avancer que, si le programme d’AACA ne mentionne pas explicitement la prise en charge des besoins sociaux, des professeurs orientent activement leur enseignement vers ces aspects (Moineau et al., 2022). Elles et ils intègrent la résolution de problèmes environnementaux, sociétaux ou sociaux dans la pratique du design pour la rendre plus significative. Toutefois, bien que les méthodes participatives soient encouragées par le programme (MEN, 2019), leur mise en oeuvre dans les scénarios réels d’enseignement est plus souvent observée dans le développement de séquences pédagogiques plutôt que dans les tâches des élèves (Moineau et al., 2022).
En AACA, les enseignants et les enseignantes rencontrent des difficultés à se procurer des ressources pédagogiques adaptées à la discipline et adaptables aux filières dont ils ont la charge (ils sont généralement les seuls représentants de la discipline dans leur établissement et il n’existe aucun manuel). Cela les contraint à développer de manière autonome les outils et méthodes nécessaires pour concevoir un enseignement ajusté à leurs élèves (Roy et Sido, 2023). Il s’agit de transformer, simplifier et adapter les éléments théoriques et les pratiques de références afin de produire un enseignement qui ne soit pas uniquement transmissif, mais aussi appréhendable par les élèves. Ce processus peut être considéré à travers le prisme de la transposition didactique (Chevallard, 1985), mais nuancé par les difficultés de son application lorsqu’il est exporté dans le domaine des pratiques de conception se caractérisant par des résolutions de problèmes mal définis (Anand et Haag, 2013; Lebahar, 2007). En outre, cette transposition induit une fragmentation des savoirs et une segmentation des contenus devant s’inscrire dans une progression pour s’adapter au fonctionnement du système scolaire (Schneuwly, 2008). Enfin, développer un dispositif d’innovation sociale pour l’éducation en design nécessite de délimiter clairement l’étendue du projet, de fixer des objectifs appropriés, d’introduire des interventions de design réalisables, mais aussi de définir des mesures claires de l’efficacité des solutions (Chon et Sim, 2018). Pour ces raisons, nous avons choisi d’envisager une transposition didactique externe en partant non pas des savoirs et pratiques de référence, mais d’un dispositif didactisé pour un enseignement professionnel de design social.
3. Méthodologie
Cette étude examine deux questions de recherche directement induites par notre problématique centrale: est-il envisageable de transposer dans l’enseignement des AACA au LP, des pratiques de résolution de problèmes sociaux et environnementaux, similaires à celles développées dans le cadre d’exercices de design social à l’université? La première hypothèse explore les compétences transformatives développées par les étudiantes et les étudiants de master DIS de l’Université de Nîmes et les compare aux différentes compétences figurant dans le programme d’enseignement des AACA. La seconde hypothèse étudie la faisabilité de l’approche de design social au LP, en tenant compte des contraintes de l’environnement scolaire et en s’appuyant sur les témoignages des étudiantes et des étudiants en master de design social.
La méthodologie adoptée a été réalisée en trois temps:
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l’analyse du programme d’enseignement des AACA;
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la lecture approfondie des données issues des entretiens avec les étudiantes et des étudiants du master DIS;
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l’utilisation des compétences transformatives comme cadre d’analyse pour interpréter et comparer les informations recueillies dans ces deux contextes.
3.1 Recueil des données curriculaires pour l’enseignement d’AACA
Les données curriculaires ont été recueillies dans le référentiel de formation en AACA (MEN, 2019). Pour les examiner, nous avons employé Data Analysis, une extension spécialisée en traitement de données développée par OpenAI (2023). Cet outil d’analyse textuelle emploie des techniques d’extraction de thèmes et de classification de texte. Ces techniques incluent la tokenisation[3] pour décomposer le texte en unités significatives et l’analyse syntaxique pour comprendre la structure grammaticale. L’outil est conçu pour respecter les principes du Règlement général sur la protection des données (RGPD) en matière de traitement et de confidentialité. Data Analysis (OpenAI, 2023) a été utilisé pour quantifier et visualiser des aspects spécifiques des référentiels de formation en AACA, tels que la fréquence et la distribution des termes clés, ainsi que pour repérer des schémas et des tendances au sein du document. Cette analyse a été complétée par des validations manuelles[4] pour assurer la fiabilité et la pertinence des résultats obtenus.
3.2 Contexte, recueil et traitements des données du master DIS
Les entretiens menés dans le cadre de notre étude reposent sur le projet «Design, risques et territoires». Ce dernier offre aux 13 étudiantes et étudiants (répartis en 4 groupes) l’occasion de collaborer avec un commanditaire issu du domaine de la gestion des inondations, dans le cadre d’un programme d’action et de prévention des risques. L’objectif est de valoriser un diagnostic territorial en impliquant les habitants et les habitantes des communes touchées par des épisodes de très fortes précipitations.
Selon Lebahar (2007), pour analyser l’activité d’un designer, il faut accéder aux représentations, raisonnements et procédures qui permettent de la construire. Il s’agit notamment des discours et des modèles, tels que les dessins, des croquis et des maquettes numériques. Les compétences et connaissances énoncées à l’issue de cette activité définissent l’expérience tirée du projet. Nous cherchons à caractériser les compétences que les étudiantes et étudiants disent avoir mobilisées ou développées lors du projet. Pour cela, des données ont été recueillies lors d’entretiens semi-directifs collectifs réalisés avec chacun des quatre groupes (groupe focalisé). Pendant ces entretiens, les étudiants et étudiantes peuvent s’appuyer sur les traces de leur activité: des «carnets de bord», des recherches (planches, prototypes, essais, photographies, recueil de témoignages, articles de presse, etc.), des diaporamas réalisés pour les présentations et un modèle d’artéfact final. Intégralement transcrits, les entretiens sont ensuite analysés au travers du filtre des modèles sémantiques fournis par la linguistique et la sémiologie (Tortochot et al., 2020). Les verbalisations ont été découpées en phrases élémentaires, puis en propositions élémentaires. Cette approche nous a permis de mettre en évidence les connaissances utilisées ou acquises au cours de l’exercice, ainsi que les raisonnements et les stratégies de dialogue, à la fois entre les participants et participantes et en introspection, en utilisant les traces de l’activité (Lebahar, 2007). Par la suite, nous avons analysé comment ces différents éléments – connaissances utilisées ou acquises, raisonnements, et stratégies de dialogue – sont reliés aux compétences développées et aux difficultés rencontrées, en examinant à la fois les connexions directes et les relations plus subtiles ou indirectes entre eux.
3.3 Recensement des compétences transformatives
Pour l’analyse des données recueillies au sein des deux contextes (analyse curriculaire et analyse des entretiens), le recensement des compétences transformatives est fait au moyen des 36 concepts clés (OCDE, 2018) que nous avons distribués de la façon suivante:
Que ce soit dans l’analyse des entretiens avec les étudiantes et les étudiants ou dans l’analyse du référentiel, certaines compétences identifiées dans les verbatim ou dans le curriculum peuvent être classées dans l’une des trois catégories (tableau 1), en fonction de leur nature et de la manière dont elles sont décrites. Pour l’analyse du programme d’AACA (MEN, 2019), il s’agit de soumettre ces différents concepts au logiciel Data Analysis afin qu’ils l’orientent vers les aspects les plus pertinents du curriculum. Pour l’analyse manuelle des verbatim, la présence des différents concepts ou de termes étroitement liés sont repérés dans les quatre entretiens. Ces concepts clés agissent comme des balises qui dirigent l’analyse algorithmique et manuelle, assurant ainsi que les résultats sont non seulement pertinents, mais aussi alignés sur les objectifs spécifiques de l’étude. Par exemple, la référence à la créativité, fréquemment mentionnée dans les entretiens, peut être classée sous «créer de la valeur nouvelle» en raison de son lien direct avec l’innovation et la génération d’idées nouvelles.
4. Résultats
Les résultats sont structurés en deux parties, chacune examinant une hypothèse spécifique. La première partie présente les compétences transformatives développées lors du projet «Design, risques et territoires» au sein du master DIS et les met en lien avec le programme d’enseignement des AACA. La seconde partie est focalisée sur les enjeux d’une pratique de design social dans l’enseignement des arts appliqués, en mettant en lumière les défis structurels, pédagogiques et pratiques rencontrés par les étudiants et étudiantes, ainsi que les stratégies déployées pour les surmonter.
4.1 Compétences transformatives: de l’enseignement professionnalisant du design social à l’enseignement des arts appliqués en lycée professionnel
Lors des entretiens avec les groupes d’étudiantes et d’étudiants, des compétences transformatives sont évoquées ou perçues, soit parce qu’elles sont parfaitement explicitées, soit parce qu’elles peuvent être associées à la description d’une activité ou encore dans la façon dont les problèmes ont été résolus.
4.1.1 Compétence «créer de la valeur nouvelle»
Chaque groupe a développé la compétence «créer de la valeur nouvelle», mais pas exactement de la même manière. Le groupe 1 a employé «remue-méninges», «recherche» et «ateliers» pour transformer ses idées et celles des habitants et habitantes en solutions pratiques. Le groupe 2 a combiné «immersion terrain», «analyse de données» et «prototypage» pour élaborer des propositions. Le groupe 3 a mis l’accent sur l’«immersion», la «synthèse d’informations», et l’«itération de prototypes». Enfin, le groupe 4 a approfondi sa compréhension du sujet, puis a mis en place une collecte d’informations et la conception d’ateliers, aboutissant à un produit final répondant aux objectifs qu’il s’était fixé. L’extrait 1 du verbatim de Camélia (les prénoms ont été modifiés) illustre concrètement comment la compétence a été mise en pratique par son groupe.
4.1.2 Compétence «concilier tensions et dilemmes»
Chaque groupe a également travaillé la compétence «concilier tensions et dilemmes». Les membres du groupe 1 ont navigué entre leurs incertitudes professionnelles et celles du commanditaire, leurs aspirations personnelles et celles des usagers. Le groupe 2 a jonglé entre les exigences techniques et la créativité. Le groupe 3 a équilibré approche théorique et pratique, adapté ses compétences à divers contextes et a concilié les attendus du commanditaire et des usagers (extrait 2). Le groupe 4 a allié compréhension approfondie du sujet et innovation, alliant recherche sur le terrain et conception d’ateliers interactifs.
4.1.3 Compétence «être responsable»
Enfin, dans chaque groupe, la compétence «être responsable» est décelable de différentes façons. Yann, Camélia et Céline (groupe 1) ont montré de la compassion et de l’empathie dans leur approche, tout en s’engageant activement dans leur travail collaboratif. Ils et elles ont respecté la diversité culturelle et se sont montrés conscients de leur responsabilité au sein du projet. Le groupe a adapté son prototype en prenant en considération les retours des participants et des participantes. Cette adaptation comprenait la simplification de l’utilisation des QR codes pour les personnes âgées et l’amélioration de la lisibilité des informations. Par ailleurs, il et elles ont mis en place un atelier centré sur une carte des zones inondables, permettant aux participants de localiser leurs habitations. Le groupe 2 a démontré une forte conscience de soi et une autodiscipline dans la gestion du projet. Ses membres ont également fait preuve d’empathie et de respect pour les différentes parties prenantes impliquées. Le groupe 3 a intégré l’équité dans son approche, en prenant en compte les besoins de tous les habitants et habitantes. Les membres le constituant ont montré leur capacité à travailler en équipe et à collaborer. Dans le groupe 4, les participants et les participantes ont fait preuve de responsabilité, respect et confiance, tant envers eux-mêmes qu’envers les autres (extrait 3). Leur travail a été guidé par un sens aigu de l’engagement et de la communication.
4.1.4 Les sous-compétences spécifiques liées aux concepts de l’OCDE dans l’enseignement du design social et leur développement en LP
Nous avons vu précédemment (cf. 2.4) que certaines compétences transformatives apparaissent modestement dans le programme d’AACA du LP, nous venons également de voir que chaque groupe du master DIS évoque le développement de chacune des trois compétences dans le projet pédagogique mis en place. Poursuivant cette analyse, nous examinons maintenant comment des sous-compétences spécifiques, liées à l’un des 36 concepts, sont abordées par les étudiants et étudiantes de master DIS et pourraient être développées dans un enseignement au LP.
Évoquons premièrement la pensée systémique. Elle implique de comprendre et d’analyser les systèmes complexes au sein desquels le design social opère. Elle est associée à la compétence transformative «concilier tensions et dilemmes», car elle nécessite de naviguer pour résoudre des problèmes complexes et de jongler avec des facteurs interconnectés (OCDE, 2018). Cela peut être illustré par Céline qui indique:
Le tableau 2, extrait de l’analyse réalisée à l’aide de Data Analysis et ensuite vérifiée manuellement, indique que le référentiel d’AACA (MEN, 2019) ne mentionne pas explicitement l’importance de la pensée systémique. Or, il s’agit d’une compétence essentielle, car elle favorise pour un élève de LP la compréhension des interconnexions complexes dans des environnements professionnels variés. Son intégration explicite dans les curriculums est essentielle pour préparer les élèves à aborder de manière efficace les complexités professionnelles qu’ils rencontreront.
Deuxièmement, la pratique de design social est participative, elle implique les usagers et les parties prenantes dans le processus de conception. Cette compétence correspond à la capacité à «créer de la valeur nouvelle» et «être responsable», en encourageant l’innovation collaborative et la prise en compte des perspectives et besoins divers. Bien que le référentiel (MEN, 2019) recommande le travail en équipe qui implique le développement des communications (tableau 3), ces points pourraient être renforcés par des pratiques de design social. Il s’agit en effet des compétences énoncées comme fortement développées par les étudiants et étudiantes en design.
Troisièmement, la compétence de conception liée à la résilience sociale se concentre sur des créations qui aident les communautés à s’adapter aux changements. Elle se rapporte à la compétence transformative «être responsable», en mettant l’accent sur la durabilité et les conséquences à long terme des décisions de conception. Le référentiel d’AACA promeut également la responsabilité et les pratiques d’enseignement pourraient y répondre en abordant les questions de résilience sociale (tableau 4).
Quatrièmement, la capacité à reconnaître et à valoriser la diversité culturelle et sociale dans les projets de design social est en lien avec la compétence «concilier tensions et dilemmes», car elle nécessite une compréhension approfondie des différentes identités et contextes. C’est une compétence évoquée plusieurs fois par les groupes interrogés comme l’illustre Lilly:
Si le référentiel encourage l’ouverture culturelle, y compris l’intégration spécifique de la diversité culturelle et sociale (tableau 5), il reste à définir comment les pratiques d’enseignement des AACA au LP peuvent concrètement contribuer au développement de cette compétence transformative.
Les compétences «créer de la valeur nouvelle», «concilier tensions et dilemmes» et «être responsable» sont observées sous différentes formes au sein de chaque groupe, montrant ainsi la diversité des approches et des stratégies employées. Le référentiel actuel des AACA aborde indirectement certaines de ces compétences notamment en favorisant la créativité, la compréhension des diverses perspectives culturelles et le sens des responsabilités. Il est possible de renforcer davantage l’intégration de ces compétences dans les pratiques d’enseignement (Lugnier et al., 2024). Les méthodes du design social mises en oeuvre et les compétences afférentes développées par les étudiants et étudiantes du master DIS pourraient être intégrées au curriculum d’AACA pour permettre aux enseignants d’aider les élèves à développer des compétences liées à la pensée systémique, au design participatif, à la résilience sociale et à la reconnaissance de la diversité culturelle et sociale.
4.2 Les défis structurels et pédagogiques face à une approche de design social dans l’enseignement des arts appliqués au lycée professionnel
La deuxième hypothèse suppose qu’une pratique de design social dans l’enseignement des arts appliqués au LP se traduirait par la mise en oeuvre de projets longs et collaboratifs, adaptés aux contraintes spécifiques de l’environnement scolaire du LP. Pour explorer cette hypothèse, nous recensons les difficultés rencontrées par les étudiantes et les étudiants en design social et nous interrogeons la mise en oeuvre de la pratique du design social dans le cadre de situations d’enseignement de niveaux CITE 3 et 4.
Premièrement, les étudiants et étudiantes en design social rencontrent souvent des difficultés techniques, telles que la maîtrise des outils et des technologies nécessaires à la réalisation de leurs projets, comme l’explique Sonia:
Au LP, les élèves peuvent avoir un accès limité à ces outils et technologies, en outre, leur niveau de compétence technique peut être moins avancé, rendant l’apprentissage et l’utilisation de ces outils plus complexes, voire dangereux.
Deuxièmement, en matière de collaboration, les étudiants et étudiantes doivent prendre en charge des dynamiques de groupe complexes et gérer constamment leur communication, aussi bien au sein de l’équipe qu’avec les parties prenantes, Rania explique d’ailleurs:
La collaboration au LP pourrait être entravée par un niveau inégal de motivation des élèves d’un même groupe (Jellab, 2020).
Troisièmement, la gestion du temps est une autre contrainte majeure pour les étudiants et étudiantes. Ils doivent tenir compte des échéances strictes tout en préservant la qualité du travail final, souvent dans un contexte de ressources limitées et de changements imprévus, ce qui exige une grande flexibilité et une capacité d’adaptation rapide. Il s’agit là peut-être du plus grand frein: l’enseignement d’AACA des élèves de LP ne dure que 55 minutes, une fois par semaine, ce qui complique la gestion du temps pour les longs projets.
Quatrièmement, les défis contextuels, tels que l’appréhension parfois difficile des besoins spécifiques des utilisateurs et des utilisatrices ainsi que l’adaptation aux conditions culturelles et environnementales locales, sont également au coeur des préoccupations des étudiants et des étudiantes. Ainsi, Amel raconte:
Cette situation, difficile à gérer pour Amel et son groupe, âgés de 22 à 25 ans, serait sans doute encore plus complexe à appréhender pour un élève de LP qui n’a pas encore 18 ans.
Enfin, les étudiants et étudiantes font face à des limites de ressources, qu’il s’agisse de financement ou de matériel. Ces contraintes les obligent à innover et à être créatifs dans la gestion et l’utilisation des moyens disponibles, tout en visant à maximiser l’impact et l’efficacité de leurs projets. Les ressources au LP et l’accès à celles-ci peuvent être encore plus limités qu’au niveau universitaire.
Pour toutes les raisons présentées précédemment, l’introduction de pratiques de design social dans l’enseignement des AACA en LP nécessiterait de surmonter un certain nombre d’obstacles. Les contraintes en matière de ressources, de compétences techniques, de gestion du temps, de collaboration et de compréhension des contextes culturels et sociaux exigent des adaptations structurelles et systémiques importantes. Cependant, elles offrent aux instances éducatives et aux enseignants l’opportunité de promouvoir des méthodes d’apprentissage innovantes et de favoriser le développement de compétences essentielles pour les élèves et préconisées par l’OCDE.
5. Discussion conclusive
Par l’analyse des liens entre les compétences transformatives et les compétences développées par la pratique du design social à l’université, cette étude interroge la pertinence de l’introduction de cette pratique dans le cadre de l’enseignement des arts appliqués au lycée professionnel. L’analyse a révélé des similitudes et des rapprochements possibles entre ces compétences et celles prescrites dans le curriculum de la voie professionnelle. Cependant, les méthodes de design social induisent des complexités, notamment quant aux ressources, aux compétences techniques, mais aussi aux contraintes scolaires (calendrier, emploi du temps, segmentation disciplinaire, etc.). Les quelques préconisations que nous pouvons faire émerger de cette étude sont dans le prolongement de celles menées dans d’autre pays et à d’autres niveaux (Anand et Haag, 2013; Chon et Sim, 2018): encourager l’adoption de méthodes de design participatif et collaboratif, intégrer ces approches dans les curriculums pour sensibiliser et préparer les élèves à aborder les enjeux sociaux complexes, et enfin utiliser les technologies pour renforcer l’engagement communautaire et la co-création dans les projets de design social. Pour y parvenir, ces dispositifs, par le biais d’un travail de transposition didactique (Chevallard, 1985), devraient être adaptés et intégrés de manière à refléter les spécificités culturelles et sociales des contextes locaux. Mais au lieu de transformer radicalement le curriculum pour adapter l’enseignement des arts appliqués aux exigences du design social, cette étude suggère de développer des projets adaptés qui peuvent être intégrés de manière pragmatique au LP. Au regard des dernières réformes, l’adoption d’une telle approche dans le cadre de l’épreuve certificative de projet (chef-d’oeuvre), ou dans celui des pratiques pédagogiques de co-intervention, pourrait enrichir significativement l’enseignement des arts appliqués en LP, en dotant les élèves de compétences adaptées aux exigences du monde contemporain (Lugnier et al., 2024). Pour l’avenir, il serait pertinent d’aborder également cette approche par le projet et ces pratiques de co-intervention au sein de la formation des futurs enseignants et enseignantes de design et de poursuivre la recherche sur des méthodes pédagogiques innovantes qui facilitent l’intégration des compétences transformatives aux niveaux CITE 3 et 4. Une attention particulière pourrait être accordée à la manière dont les élèves peuvent développer et mobiliser ces compétences dans des projets concrets et socialement inscrits. Cette démarche contribuerait non seulement à l’enrichissement de l’enseignement des arts appliqués, mais aussi à la préparation des élèves à devenir des acteurs réfléchis et proactifs dans une société en constante évolution.
Parties annexes
Notes
-
[1]
La CITE est une nomenclature construite pour produire dans l’ensemble des pays des statistiques comparables sur l’enseignement et la formation. Elle a été conçue par l’UNESCO au cours des années 1970, puis a été révisée en 1997 et en 2011.
-
[2]
Ici, le terme «usager» est employé dans un sens inclusif. Il désigne toutes les personnes, indépendamment de leur genre, qui utilisent ou interagissent avec un produit, un service ou un système.
-
[3]
La tokenisation est un processus de décomposition d’un texte en mots, phrases et/ou paragraphes: des tokens. Elle facilite l’analyse et l’interprétation du texte par les algorithmes.
-
[4]
Chaque étape de l’analyse a été soigneusement supervisée et validée, garantissant ainsi que nos conclusions sont à la fois éthiques et fondées sur une interprétation précise et objective des données.
Bibliographie
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