Résumés
Résumé
L’article porte sur un aspect peu étudié des pratiques et des manières de vivre des retraités : les mobilités résidentielles de « milieu de retraite », qui se distinguent à la fois des déménagements d’entrée dans la retraite et des mobilités (par défaut) vers les institutions pour les personnes en perte d’autonomie. Des données recueillies auprès de personnes âgées de 70 à 84 ans vivant à domicile sur des territoires contrastés, il apparaît que la mobilité résidentielle en « milieu de retraite » est fonction de deux vecteurs : le besoin d’être protégé pour contrer les signes de la vieillesse, et le besoin d’agir pour que le vieillissement ne soit pas assimilé à la vieillesse. Après une présentation de la recherche, les auteurs montrent comment les forces de ces deux vecteurs dépendent, non seulement des ressources du territoire, mais également de la conjugalité, du genre et de la trajectoire sociale des personnes.
Abstract
This article examines a little-studied aspect of the practices and lifestyles of retirees : mid-retirement residential mobility. It can be distinguished from both moving upon retirement and, at some later point in retirement, being forced to move into an institution owing to a loss of autonomy. On the basis of data collected from seniors aged 70 to 84 living at home in a variety of different geographic settings, mid-retirement residential mobility would appear to be a function of two vectors : the need to be protected in order to cope with signs of old age, and the need to act to ensure that aging remains distinct from old age. After presenting the research project, the authors show how the strength of these two vectors depends not only on an area’s resources, but also on the married life, gender and social situation of the individual.
Corps de l’article
Autour du moment d’entrée dans la retraite, la plupart des individus se maintiennent dans le même domicile. D’autres, principalement en couple, effectuent une mobilité résidentielle les conduisant parfois à un changement de département ou de région (autour de 17 % entre 55 et 65 ans en 2006 selon l’enquête logement de l’INSEE). D’autres mobilités sont observées plus tard au cours du cycle de vie. Elles ne sont pas à confondre avec ces déménagements d’entrée dans la retraite, ni avec les mobilités vers les institutions pour personnes âgées qui ont lieu à un âge de plus en plus élevé, et qui sont essentiellement des mobilités par défaut.
L’objet de cet article est de s’intéresser à ces mobilités résidentielles de « milieu de retraite[1] » réalisées à un moment où les personnes peuvent encore exprimer des choix non contraints par une incapacité physique ou psychique. Elles sont certes moins importantes que celles observées en début de retraite, mais concernent encore 8 % des ménages ayant à leur tête une personne de référence âgée de 70 à 84 ans (Driant, 2008 : 8). S’agissant de personnes n’ayant pas de pertes d’autonomie majeures, on peut se demander ce qui motive ces déménagements. La recherche que nous avons effectuée dans le cadre du programme « Vieillissement de la population et habitat » du Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA) montre qu’elles s’initient à partir de deux vecteurs : le besoin d’être protégé des effets du vieillissement individuel, et le besoin d’avoir une place dans le monde socialafin que le vieillissement ne soit pas assimilable à la vieillesse (Nowik et Thalineau, 2008). Après une brève présentation de cette recherche, l’article vise à présenter en quoi la conjugalité, le genre et la position sociale donnent plus ou moins de force à l’un et l’autre de ces vecteurs.
Les spécificités des mobilités en « milieu de retraite »
La mobilité résidentielle en début de retraite a déjà fait l’objet de plusieurs travaux qui ont décrit, notamment, des déplacements de longue distance (Cribier, 1995 ; Godet et Mousli, 2006 ; Bésingrand et Soumagne, 2006). La littérature est plus discrète sur les mobilités qui surviennent plus tardivement dans le cycle de vie et qui relèvent de choix non contraints par une dépendance forte. Qui sont ces personnes « installées dans la retraite » qui décident de changer de domicile ? On sait qu’elles cherchent parfois à se rapprocher de leur famille, que le veuvage peut induire la mobilité, que cette dernière concerne davantage les femmes (Bonnet et Gobillon, 2007). On sait en outre qu’au cours de la retraite, les personnes vieillissantes ont tendance à effectuer des mobilités résidentielles de plus courte distance (Thomsin, 2000).
Pour approfondir la nature des mobilités résidentielles des retraités « installés » dans la retraite, nous avons supposé que le contexte local dans lequel vivent ces personnes oriente leur aspiration au changement résidentiel. Toutefois, si des territoires constituent un attrait et offrent des opportunités pour s’y installer, et d’autres territoires incitent au départ, nous considérons que leurs caractéristiques ne suffisent pas à déclencher la décision d’un changement de résidence. La configuration sociale dans laquelle l’individu évolue influe aussi sur le changement de résidence. Plus particulièrement, nous pensons que la forme des liens au sein du groupe familial, différente selon les milieux sociaux, et vécue différemment selon le genre, a un impact sur la décision prise.
Afin d’avoir des données permettant d’évaluer l’impact des dynamiques territoriales sur les comportements, nous avons fait le choix d’étudier un territoire ayant une force attractive pour les personnes à la retraite (Communauté de communes des Sables d’Olonne) et un autre territoire caractérisé par une forte présence de personnes âgées résultant d’un déficit d’apport de populations actives (canton de La Souterraine dans la Creuse). Nous avons également choisi de prendre deux sites moins contrastés, le canton d’Amboise en Indre-et-Loire et la commune de Villeneuve-d’Ascq en banlieue lilloise. À partir de l’observation des caractéristiques économiques, sanitaires et sociales des quatre territoires, nous avons cherché à mieux connaître les populations retraitées ayant effectué des déménagements depuis leur mise en retraite. En abordant différents registres, nous avons élaboré un questionnaire administré en face à face à une population de 286 personnes âgées de 75 ans à 84 ans inclus, réparties sur les quatre territoires (soit quatre sous-populations comparables), ayant effectué au moins une mobilité depuis l’âge de 55 ans. En ne focalisant pas notre attention uniquement sur les mobilités récentes, notre objectif a été d’avoir un corpus permettant de saisir les différences dans les motivations selon les déménagements à deux moments du cycle de vie à la retraite : lors de la période d’entrée dans la retraite ou lors des déménagements effectués en « milieu de retraite ». Enfin, pour approfondir les différents sens des déménagements effectués par des retraités « installés », nous avons réalisé 42 entretiens auprès de personnes déjà rencontrées dans le cadre de l’enquête quantitative ayant eu une mobilité récente (donc de « milieu de retraite »).
Les quatre sous-populations étudiées ont permis de montrer que plusieurs variables distinguaient clairement nos terrains : l’origine géographique des retraités interrogés (avant 55 ans ou dans leur jeunesse), l’origine sociale, l’âge auquel ils ont effectué leur dernière mobilité, et enfin le nombre de mobilités comptabilisées depuis 55 ans.
Les territoires lillois et creusois sont ceux qui s’opposent le plus. D’un côté, Villeneuve-d’Ascq, avec son environnement urbain, ne permet de repérer que des mobilités de proximité où les qualités du lieu de vie par rapport au précédent jouent un rôle important, et plus marqué encore quand le déménagement est récent. D’un autre côté, le canton de La Souterraine, dans son environnement rural, concentre des mobilités résidentielles réalisées dans le contexte temporel immédiat de la retraite, avec la part des origines franciliennes la plus importante. La recherche des racines culturelles et familiales l’emporte alors parmi l’ensemble des déterminants de la mobilité ; la mobilité résidentielle entre 70 et 85 ans est plus faible sur ce terrain. Entre ces deux pôles, les deux autres territoires (Amboise et Les Sables) se ressemblent davantage. On y observe des populations de retraités migrants plus hétérogènes, tant du point de vue des origines géographiques et sociales, que des raisons pour lesquelles elles ont emménagé en Touraine ou sur le littoral vendéen.
Sur l’ensemble des terrains, par la comparaison entre les personnes ayant déménagé uniquement avant 70 ans et celles ayant déménagé après cet âge, il apparaît que les mobilités de « milieu de retraite » ont une spécificité. L’analyse du questionnaire montre que les déménagements entre 70 et 84 ans s’apparentent plutôt à des « mobilités d’ajustement », alors que ceux enregistrés plus jeunes dans la retraite relèvent d’aspirations à vivre autrement, avec des justifications qui renvoient au caractère plaisant du cadre de vie, aux loisirs, au retour sur les terres de l’enfance et de la famille […] : à la retraite idéalisée. En « milieu de retraite », les mobilités résidentielles sont d’abord des ajustements faisant suite à un événement déclencheur. La prise de conscience que les forces physiques s’affaiblissent, l’apparition d’un problème de santé qui concerne la personne ou son conjoint, le décès du conjoint en constituent des exemples ordinaires.
Le nouveau contexte conduit alors les personnes installées dans la retraite à rechercher un nouveau lieu de vie, dont le logement en tant que tel n’est que l’une des composantes : le plus grand nombre privilégiera les infrastructures qui entourent les besoins élémentaires et sociaux ; une autre partie activera les liens forts en cherchant à se rapprocher de certains membres de la famille. Dans tous les cas, les personnes cherchent donc à être « plus proches de », à réduire le sentiment « d’insécurité » attaché à la résidence quittée. Elles reconsidèrent leur présent en effectuant le bilan de leurs propres ressources (économiques, familiales, culturelles, sanitaires) pour se projeter dans l’avenir. L’ajustement pour faire face à la vieillesse est donc bien le vecteur premier suscitant la mobilité résidentielle, même s’il est possible de déménager en souhaitant simultanément avoir un cadre de vie agréable.
Déménager pour contrer les effets du vieillissement
Des personnes « installées » dans la retraite et conservant leur autonomie cherchent, par le déménagement, à retrouver une sécurité ontologique[2] qu’elles ont le sentiment d’avoir perdue. La décision est prise lorsqu’elles sont confrontées à un événement provoquant un surcroît d’incertitude quant à la possibilité d’être. Il s’agit principalement de problèmes de santé. Ici, tous les éléments de l’espace de vie, que ce soit le logement, le lieu géographique d’habitation (proche ou non des services de santé et des commerces), la configuration du lieu (un appartement avec des escaliers, des étages…), les relations de voisinage, les relations intergénérationnelles constituent des facteurs pouvant intervenir dans l’expression du besoin de changer. Toutefois, l’appréciation de cette nécessité, suite à l’événement, diffère selon la structure du ménage.
Partir pour préserver la vie conjugale
Quand le logement devient inadapté mais que rien d’extérieur au domicile (distance d’un centre urbain, des services et des commerces) ne constitue une gêne au quotidien, le changement de domicile pour un couple vieillissant constitue une épreuve qu’il s’agit de repousser le plus longtemps possible. Lorsque le domicile incarne la vie conjugale, voire la vie familiale, la décision de la mobilité résidentielle s’avère très difficile à prendre. Le fait d’être ou non propriétaire intervient ici de façon secondaire. Ce qui compte avant tout, c’est le lieu en soi ; y demeurer est une source d’énergie vitale.
Si l’habitat n’est pas chargé de cette dimension symbolique, la possibilité de déménager peut être envisagée quand le lieu habité apparaît inadapté pour assumer les différentes activités de la vie quotidienne. Il s’agit généralement d’un déménagement de proximité, offrant la possibilité de conserver les relations présentes et de se rapprocher des services. Il est cependant des situations où le couple vieillissant décide d’un changement de région. À l’analyse des entretiens, il apparaît que ce type de décision est lié à la trajectoire sociale et genrée des deux partenaires.
Les femmes que nous avons rencontrées, tout particulièrement celles qui sont nées dans les années trente, n’ont pas pleinement bénéficié des transformations des rapports sociaux de sexe qui ont eu lieu au cours des quarante dernières années. Elles ont été moins fréquemment salariées que les générations suivantes. Leur propre aspiration à s’épanouir dans une activité autre que celles ayant trait à l’éducation des enfants, aux soins et au soutien des plus âgés, à l’entretien du foyer, a été placée au second plan (Attias-Donfut, 2000 : 656). À la retraite, elles n’ont pas nécessairement pu se défaire de l’emprise tant du conjoint que de l’ensemble de l’entourage. Du côté des hommes, les transformations sociétales dans la période dite des « trente glorieuses » se sont traduites par une possibilité d’avoir une mobilité sociale, qui résultait souvent d’une mobilité professionnelle. Gravir les échelons nécessitait que toute la famille suive. Henri Jaspers[3], 78 ans, employé devenu directeur de pompes funèbres, incarne cette posture : « À l’époque, on ne discutait pas. Maintenant, on demande l’avis du gamin qu’à trois ans. J’étais le chef de famille. On me suit. » À la retraite, la continuité de la domination masculine apparaît dès lors que le choix du lieu s’effectue dans la volonté de satisfaire « ego ». Cependant, le vieillissement de l’homme « égocentrique » peut être une opportunité de libéralisation du désir de la compagne, un désir qui est en relation avec la domination subie. Se rapprocher de membres de la famille de la conjointe, à condition qu’ils habitent en milieu urbain, est souvent le choix effectué. Dans le cas du couple Jaspers, la mobilité résidentielle effectuée récemment l’a conduit à quitter Bourges pour se rapprocher de la famille de madame qui demeure aux Sables d’Olonne : « À Bourges, c’était parfait pour nous. Le logement était aménagé pour une fin de vie. J’avais fait modifier la salle d’eau, j’avais mis des barres pour se lever, tout ça, c’était parfait. Mais là (Les Sables), c’était le lieu que ma femme voulait venir. […] Elle avait ses soeurs, elles étaient heureuses de se retrouver ».
La décision prise par les couples est différente lorsqu’ils demeurent en milieu rural et que les enfants sont éloignés ou peu présents. C’est un événement tel qu’une hospitalisation d’urgence, ou la nécessité d’un traitement obligeant à se déplacer à l’hôpital, qui peut provoquer l’envie d’être au plus près des services de soin. La difficulté à prendre la décision de mobilité avant ce type d’incident est liée au fait que l’envisager consiste à penser sa propre mort ou celle de son partenaire. L’événement constitue alors un tournant. Soit le couple prend le risque de rester dans le lieu, et l’un des deux partenaires peut alors devenir rapidement veuf, soit ils décident de retrouver un nouveau domicile pour prolonger la vie à deux, une vie qui sera somme toute différente : l’événement fait basculer l’individu vieillissant dans la vieillesse, entendue ici comme confrontation à la mort (Clément, 2007). Il n’est pas un incident intervenant dans la carrière d’un être en bonne santé. Il est le début de la carrière de « vieux », où les petits maux se succèdent et ne peuvent devenir que des grands maux. La stratégie visant à venir en ville pour limiter les risques de la fin du couple ne permet pas d’enrayer le processus. Parfois il peut même l’accentuer, car se séparer d’un lieu habité, se défaire des biens et des objets qui ont été une fierté de vie symbolisent l’agonie de sa propre vie sociale.
Si la décision de déménager, quand il s’agit d’un couple confronté à l’impossibilité de se maintenir durablement dans son logement, est prise par nécessité et dans l’objectif de vivre plus longtemps à deux, la situation se présente différemment pour les personnes vivant seules à domicile.
Partir pour pouvoir vivre seul(e)
Pour la génération dont il est question, vivre seul(e) est majoritairement une réalité sociale vécue par les femmes : en 2003, parmi les femmes situées dans les tranches d’âge de naissance 1924-1928 et 1929-1933, respectivement 49 % et 34 % sont veuves. Pour les hommes, respectivement 13 % et 8 % sont veufs[4]. Bien entendu, le veuvage ne signifie pas nécessairement l’absence de remise en couple. Cependant, selon les mêmes sources, si 11 % des hommes devenus veufs entre 65 et 69 ans vivaient à nouveau en couple cinq ans après, seulement 2 % des femmes de la même tranche d’âge et devenues veuves étaient dans cette même situation. Être femme de 75 et plus, et vivre seule au domicile après avoir vécu en couple, conduit à faire face à des difficultés, non seulement économiques, mais aussi liées à la répartition sexuée des activités lors de la vie en couple, tout particulièrement celle de la conduite automobile et de l’entretien du jardin. Le critère économique est un aspect qui intervient principalement à l’occasion du décès du conjoint. Les enquêtes quantitatives indiquent que la situation de veuvage provoque une baisse des revenus de l’ordre de 10 % par rapport au revenu de femmes en couple[5]. Dès lors, la question du coût du logement se pose. Comme le soulignent L. Gobillon et A. Laferrère, il s’opère un calcul qui tient compte des coûts d’un déménagement, du maintien dans le logement actuel en étant seul (Gobillon et Laferrère, 2006). Toutefois, la décision de déménager n’est pas seulement le résultat de cette rationalité économique.
L’emplacement géographique d’un domicile choisi en couple peut s’avérer être la source de difficultés lorsque les veuves n’ont pas de permis de conduire. Parmi les femmes de 65 ans et plus, 70 % n’ont pas le permis (Delbès et Gaymu, 2002 : 906). Au demeurant, sa possession ne dit rien de la conduite effective : bien des femmes de ces générations ont accédé au volant seulement lorsque le conjoint le souhaitait[6]. L’absence de permis de conduire pose un problème tout particulièrement en milieu rural, lorsque le domicile est éloigné des lieux d’approvisionnement et de services, et que le voisinage ne permet pas de suppléer durablement l’impossibilité de se déplacer. Dans l’enquête visant à qualifier les quatre territoires étudiés, on constate que la présence de voies routières rapides et de transports en communs ne comble pas l’absence de commerce et de services à proximité immédiate du domicile. Dans les entretiens, ce souci de déménager pour faire face, alors qu’on ne peut pas conduire, s’effectue en prenant en compte le réseau de sociabilité. La mobilité va s’effectuer en tenant compte de la localisation d’un proche, dans une ville proche du domicile présent, ou dans une autre ville qui n’est pas nécessairement connue. Après le décès du conjoint, si le recours aux proches est difficile, la décision de déménager est prise rapidement en raison de la confrontation quotidienne aux difficultés d’approvisionnement. C’est ce que fit Odette Paret, âgée de 77 ans. Lorsque son mari est décédé en 1999, ils vivaient dans un hameau situé à une vingtaine de kilomètres de Poitiers, éloigné de quatre kilomètres du premier village. Originaires l’un et l’autre du canton, ils ont habité la même maison pendant quarante ans. Ils en étaient propriétaires. Odette Paret a travaillé « comme femme toute main » dans la boulangerie du village et son mari était ouvrier agricole. Mais au décès de son mari, Odette a accepté de changer de domicile : « Il y avait que ma soeur qui était pas loin. Mais enfin, après venir tout le temps me chercher pour faire les courses, c’est pas évident. Alors c’est pour ça que je me suis décidé à venir ici ». « Ici », s’avère être un appartement qui appartient à sa fille unique situé aux Sables d’Olonne.
Pour les veuves confrontées à l’inadaptation de l’emplacement du domicile ou aux caractéristiques spatiales du domicile (grand jardin, surface du logement trop importante), le déménagement est vécu positivement si le passé peut s’actualiser au temps présent. Il est nécessaire que la personne puisse reconsidérer son rapport aux objets et à l’espace qu’elle a investi parfois depuis plusieurs décennies, que ce soit par des retours sur le précédent lieu de vie, par des visites aux amis du lieu quitté, par des communications téléphoniques avec les proches. Quitter le lieu parce que l’on ne peut plus y rester, sans être dans une situation d’insécurité, oblige à se défaire de tout ce qu’il symbolise. Souvent plus petit que le précédent (dans notre enquête, 62 % des personnes ayant effectué leur dernier déménagement à 70 ans ou après ont un logement plus petit que le précédent, contre 35 % de celles ayant déménagé avant 70 ans), le nouveau logement contraint à se séparer de certains objets, de meubles accumulés au cours du temps. Cela oblige aussi à vendre un bien que l’on a acquis péniblement et qui a été le « foyer » familial. Mais ce n’est pas nécessairement vécu négativement. Comme nous le verrons ultérieurement, tout dépend de la façon de ce que signifie « posséder », une notion fortement marquée par l’histoire sociale et individuelle de la personne.
Dans tous ces cas de confrontation des personnes à une inadaptation du lieu suite au décès du conjoint, la destination choisie est principalement urbaine et proche des commodités. L’offre de services des territoires, les possibilités de déplacement, les types d’habitat disponibles jouent un rôle dans le choix du nouvel habitat. Il en est de même lorsque la décision de déménager vise prioritairement le désir que le vieillissement ne soit pas assimilé à la vieillesse.
Déménager pour que le vieillissement ne soit pas la vieillesse
Un autre vecteur de la mobilité résidentielle, certes moins important, existe et semble, à priori, plus autocentré sur la personne. Il s’agit de la mobilité des retraités en « milieu de retraite » avec pour intention de vivre de façon permanente dans un cadre plus plaisant. Sept personnes sur les quarante-deux retraités « installés » interviewés disent avoir effectué le changement de résidence pour cette raison. Cette mobilité que nous qualifierons de « mobilité hédoniste » se distingue des mobilités temporaires (vacances chez les enfants ou dans la famille, séjours dans la résidence secondaire, voyages de différentes formes). Le choix du lieu, le type de logement choisi relèvent de l’assouvissement d’un désir d’être dans un univers plaisant.
De notre recherche, il ressort que les retraités « installés » effectuant une mobilité résidentielle pour vivre dans un espace géographique qui leur semble plus plaisant, sont principalement des personnes de professions et de catégories supérieures à qui leur trajectoire individuelle et sociale a donné un goût prononcé pour la recherche de leur épanouissement personnel. Deux facteurs semblent orienter ces types de mobilités « hédonistes » : le changement de la configuration relationnelle qui conduit les personnes à renouer avec leur mode de vie antérieur « égocentrique » ; une posture vis-à-vis des biens immobiliers qui rend possible la mise en oeuvre de stratégie d’optimisation des plaisirs.
Retrouver la liberté de choisir un lieu de vie plaisant
Quand la personne a eu un parcours marqué par la possibilité d’effectuer des déménagements au gré de ses aspirations, et qu’elle a dû, au moment de sa mise à la retraite, se résigner à prendre un logement qui ne correspondait pas à ses souhaits, elle renoue avec ses choix antérieurs dès que cela est possible. Dans ce schéma, le choix de résidence au moment de la retraite constitue une rupture dans le parcours résidentiel, comparable à un turning point (Hareven et Masaoka, 1988). Le changement de domicile que la personne met en évidence dans son récit est provoqué par des motifs différents des précédents : il n’est plus question de se promouvoir mais d’agir pour satisfaire un proche. Ce décentrement de soi peut apparaître lorsque la personne est confrontée à la souffrance d’un proche ; elle a alors la volonté de faire le maximum pour que l’autre passe au premier plan.
François Baclin, âgé de 80 ans vit en Touraine dans un pavillon qu’il loue depuis 2005. Il a été médecin généraliste puis cardiologue. Pour faire cette carrière, il a changé plusieurs fois de domicile. Il est allé vivre à Brest, Manosque, Annecy. Parmi ses quatre enfants qui demeurent à plus de 300 kilomètres de chez lui, l’un d’eux habite encore à Annecy. Pour la retraite, il avait comme projet, en accord avec sa femme, de venir en Touraine. Ils appréciaient cette région et y étaient venus plusieurs fois en vacances. Mais sa femme étant gravement malade, François Baclin décide d’arrêter son activité à 60 ans (et non pas à 65 ans comme généralement dans la profession). Son objectif est de passer le plus de temps possible auprès d’elle. Dans ce contexte difficile, le couple décide de quitter Annecy pour se rapprocher de sa fille qui demeure à Limoges. Finalement, François s’installe en Corrèze, trouvant la région plus agréable que celle du Limousin. Mais le nouvel habitat s’avère vite inadapté à la maladie de sa conjointe : « Malheureusement l’hôpital de Brive-la-Gaillarde, le service de néphrologie, s’est trouvé très insuffisant. Elle était mal dialysée. Elle était dans un état épouvantable. J’ai tout plaqué et on est allé à Montpellier où j’avais des amis qui dirigeaient une clinique de dialyse ». Le choix effectué est ici indissociable de sa profession. Ancien médecin, François a une connaissance des institutions qui peuvent apporter l’aide indispensable à sa femme. Cette manière de gérer l’événement est fonction des ressources que la position sociale et le parcours social de l’acteur octroient (Voegtli, 2004 : 150).
L’événement est aussi une rupture dans la manière de se situer par rapport aux proches. Il provoque une mise en retrait de soi. Le maintien du couple est désormais au coeur du projet de vie. Pour autant, cela ne modifie pas nécessairement durablement les manières de se situer vis-à-vis des autres. Lorsque la femme de François meurt quatre ans plus tard, celui-ci décide de retourner dans les Alpes, près de ses enfants et de son ancien cercle d’amis. Il y reste jusqu’en 2005. Que se passe-t-il pour qu’il décide de nouveau, à 78 ans, de changer de région ?
En fait, les proches ne sont pas si proches (« Mon fils, il travaillait dans un cabinet d’architecte, on ne se voyait presque plus. Les amis je les voyais mais l’hiver, c’était peu agréable. Ma fille, avec la route, c’était pas facile, pareil pour mon fils qui est à Lille ») et le climat des Alpes est rude. François Baclin privilégie de nouveau sa propre personne : qu’importe l’éloignement des enfants et des amis ; le principal est de se faire plaisir. La Touraine n’est pas très loin de Paris où il a quelques amis et des cousins, ni de Limoges où demeure sa fille. Le choix du nouveau lieu de vie n’est pas ici défini prioritairement en fonction des proches, de ceux qui « comptent ». C’est une composante qui renforce un choix établi sur la volonté d’être dans un lieu plaisant. Il trouve une petite maison avec jardin qu’il loue. Il peut désormais se rendre facilement à Paris (« Je fais des journées à thèmes, je revisite un quartier de Paris »). L’été, il reçoit des amis à qui il fait visiter la région. Il projette cette année de partir voyager aux États-Unis.
Pour François, la parenthèse que constitue l’accompagnement de fin de vie de sa conjointe a pour effet de renforcer le désir d’autonomie. Cela est possible à la condition que les biens acquis ne constituent pas en soi un frein à la mobilité.
Moins avoir, ou avoir autrement, pour mieux être
Dans son analyse des données de l’enquête « Biographies et entourage », Catherine Bonvalet indique qu’il existe des trajectoires résidentielles de propriétaires qui se terminent par une location (Bonvalet, 2007 : 296). Dans la situation des personnes âgées ayant eu une trajectoire marquée par la recherche d’un épanouissement personnel, qui sont principalement, pour cette génération, des cadres supérieurs ou des professions libérales, et plutôt des hommes, la rupture que constitue la fin de la vie de couple (décès ou séparation) peut entraîner un détachement vis-à-vis des biens matériels accumulés au cours de l’existence, au profit des plaisirs personnels. La donation est alors l’expression d’une volonté de transmettre entre vifs pour « contrôler » le partage des biens, pour éviter les éventuelles tensions entre héritiers (Accardo, Laferrère et Verger, 1996). Comme le soulignent C. Baudelot et M. Gollac[7], pour des personnes ayant eu des modes de vie leur permettant d’avoir des espaces / temps pour exprimer leur désir « d’être », leur rapport à « l’avoir » (ici le bien immobilier) est spécifique. Pour elles, la question n’est plus d’avoir. Elles ont eu des biens et en ont encore. Il s’agit surtout de jouir pleinement de la vie.
Décider de vendre un bien, devenir locataire ou propriétaire d’un autre bien afin d’avoir la possibilité d’être, et surtout de ne pas être un « vieux », s’effectue en fonction des opportunités. C’est ainsi qu’Aude Gerland, âgée de 80 ans, s’est décidée à se séparer de la maison familiale. Aude est fille unique, célibataire, sans enfant. En 1951, son père, notaire dans les Ardennes s’est installé avec sa femme, au moment de la retraite, dans une maison près d’Amboise, une maison qu’ils occupaient antérieurement pour les vacances. Aude Gerland est restée pendant 52 ans dans cette maison. Son jardin était avant tout un espace d’agrément qu’elle faisait entretenir par un jardinier (« Jele faisais entretenir, ce qui me revenait très cher »). Aude a travaillé comme comptable, puis responsable du service comptabilité, dans une entreprise locale pendant toute sa période active. Depuis la retraite, elle apprécie particulièrement de pouvoir effectuer des activités créatives et de découvertes (elle fait de la broderie, voyage souvent).
En 2003, il suffit qu’une occasion se présente pour qu’elle décide de vendre (« Puis j’ai eu cette opportunité, d’ici, ça s’est construit. J’ai donc acheté sur plans, ici. Alors j’ai fait faire des aménagements parce que il y avait des trucs qui me plaisaient pas. Mais bon, maintenant, je suis installée et maintenant je m’y plais beaucoup »). À 75 ans, Aude Gerland ne veut pas devoir se limiter dans ces moyens financiers en s’attachant à un bien hérité. Elle ne veut pas être contrainte par des activités domestiques, et emploie une femme de ménage quelques heures par semaine (« J’ai une femme de ménage parce que moi, j’aime pas faire le ménage »).
Une autre configuration concerne la situation des personnes ayant plusieurs biens immobiliers qu’elles peuvent ajuster à leur mode de vie et à leur vieillissement en modifiant la fonction de ses différents biens immobiliers. Si après 70 ans, la tendance est à la transmission ou à la vente du bien immobilier, il n’en demeure pas moins que des retraités « installés » conservent leur résidence secondaire et l’utilisent pour des séjours plus ou moins longs (Caradec, Petite et Vannienwenhove, 2007 : 87). La maison secondaire peut devenir tellement agréable au fur et à mesure qu’ils avancent en âge, qu’ils décident de s’y installer à demeure. Ce qui est remarquable, c’est le changement progressif de l’appréciation du lieu au fur et à mesure du vieillissement. Pierre et Yvonne Vercours, âgés respectivement de 80 et de 77 ans, présentent la caractéristique d’avoir acheté leur résidence secondaire en 1999 et de s’y être installés définitivement en 2000. Quant à Roger Certert, âgé de 75 ans, il a décidé en 2005 de s’installer dans la maison qu’il avait héritée de ses parents en 1986, et qu’il utilisait jusqu’alors comme maison secondaire. Ces deux singularités (achat tardif et installation rapide / héritage ancien et installation tardive) mettent en scène l’importance d’être en mesure de choisir entre différentes résidences pour atténuer l’assimilation du vieillissement à la vieillesse.
Pierre Vercours (ancien haut fonctionnaire) et son épouse se sont installés dans leur maison située à Amboise en 2000. Antérieurement, et cela depuis leur retraite prise en 1993, ils habitaient dans une maison située dans un petit village à vingt kilomètres d’Amboise, qui est désormais leur résidence secondaire. Il ne s’agissait pas de se défaire de ce bien pour deux raisons essentielles. D’une part, cette maison de campagne avait été héritée des parents d’Yvonne. Son père, qui était directeur général d’une société multinationale, l’avait achetée pour y venir les week-ends en famille. D’autre part, elle est actuellement le lieu de détente de la famille lorsque le temps est ensoleillé. Les enfants et les petits enfants y viennent régulièrement. Par ailleurs, Pierre s’occupe du verger, en se faisant aider d’une personne qu’il rémunère. Il s’agit là d’un lieu de la « secondarité » dans le sens où il est ludique. Il est marqué « par le plaisir, le bonheur d’être ensemble ou de jouer du ‘différent’ » (Membrano, Mantovani, Clément, 2008 : 149). En investissant sur Amboise, le couple s’offrait non seulement un pied-à-terre en ville, près d’une gare TGV, près des services ; il s’offrait également un espace de distinction, « une belle adresse » qui rappelle l’appartement occupé au coeur de Paris avant la retraite, et la possibilité de le meubler en mettant en valeur leur héritage. Pour autant le changement a des conséquences sur les activités quotidiennes. Celles-ci sont moins tournées vers l’extérieur mais plus adaptées à leur vieillissement (« On est abonné à la bibliothèque, ici. On lit et puis on écoute un peu de musique, et puis quelques DVD, quelques CD, des choses comme ça. On est abonné au Point, qu’on reçoit toutes les semaines. Donc de la lecture, la télévision, la cuisine, les courses, les mots croisés, des choses comme ça »). Il s’agit de faire à deux des activités qui ont un sens au regard de leur mode de vie. Par ailleurs, tout en étant plus replié sur l’espace domestique, des activités de « secondarité » telles qu’Internet et la communication par courriel avec les enfants délient l’espace et le temps. En étant sur Internet, il s’agit pour Pierre d’être en « communication », de « sortir ». Par cette activité, il s’inscrit dans une continuité. Il est toujours au fait de l’innovation technique et peut ainsi ne pas se sentir relégué dans la catégorie des « vieux ».
Si le choix d’habiter tardivement dans la maison secondaire peut être associé au fait de vouloir conserver des activités qui ne soient pas associées à la vieillesse, cela peut s’accompagner d’une volonté de s’ancrer dans une histoire familiale au moment où les signes de la vieillesse se font ressentir. Roger Certert était, dans le passé, ingénieur en région parisienne. Il est divorcé depuis 1980 et a deux enfants qui vivent en Bretagne. Il demeurait, jusqu’en 2005, dans un appartement où il vivait seul. Roger venait régulièrement dans sa propriété située dans un petit village de la Creuse. Fils unique, il l’avait héritée en 1986 de ses parents, un couple d’agriculteurs. Cette maison, c’est « la maison familiale ». Il y passa toute son enfance, jusqu’à son départ en région parisienne à la suite de sa réussite au concours d’entrée aux Télécoms. Depuis sa retraite en 1991, il y venait très régulièrement. Puis, il attend d’avoir 73 ans pour se décider à vendre son appartement en région parisienne et à venir s’installer en permanence dans cette maison. Pour lui, il devient important de renouer avec les copains d’enfance et de faire vivre le village. Un cousin a effectué exactement la même opération à la même période : quitter le Val d’Oise pour revenir aux sources à La Souterraine. Un couple d’amis, toujours à la même période, a quitté Paris pour s’installer à Salbris, en Sologne. « Je me suis dit, après tout, c’est peut-être pas si idiot que ça ». Parallèlement à cette aspiration à revenir aux sources, il se confronte à la solitude dans son appartement. Ces enfants ne viennent que très rarement le voir, il n’a pas beaucoup d’amis et ressent quelques difficultés à effectuer les déplacements dans la Creuse et en Bretagne. Ce retour aux sources est pour lui une façon de rompre avec la solitude et la peur qu’elle suscite avec le vieillissement. Il n’évoque pas la mort. Comme le souligne J.-F. Clément, si elle peut être évoquée à propos des proches, elle l’est moins facilement dès qu’il s’agit de soi (Clément, 2007). Pourtant la confrontation à la mort en solitaire, sans « accompagnants », fait peur (Déchaux, 2001). Roger veut partir s’installer dans la Creuse pour réduire ce sentiment de solitude. Il le peut parce qu’il a cette maison secondaire et que son rapport aux biens, construit socialement au cours de sa trajectoire, le lui permet.
Ces différentes modalités de la mobilité « hédoniste » en milieu de retraite apparaissent plus fréquente chez les personnes qui ne se posent pas la question de l’avoir, qui sont en mesure d’agir pour eux-mêmes, sans être prisonniers de la vulnérabilité d’un proche, et qui ont eu un parcours de vie où leurs activités au sein des différents espaces-temps sociaux ont été une source d’accomplissement de leur être.
Conclusion
En nous interrogeant sur la mobilité résidentielle des personnes en « milieu de retraite » par rapport à celle des « jeunes » retraités et par rapport à celle des personnes rencontrant une forte perte d’autonomie, il s’agissait de saisir les effets de l’augmentation de la longévité sur les modes d’habiter. Même si notre recherche reste dépendante des caractéristiques des quatre territoires étudiés, il apparaît que le changement de domicile vise dans tous les cas un ajustement entre le désir de protection de soi ou du couple, et le désir de trouver un cadre de vie dans lequel la personne puisse s’épanouir. Cet ajustement résulte d’une tension entre le vieillissement et la vieillesse. Le vieillissement est le lot de tout un chacun. Il est une limitation de la capacité d’agir qui correspond à une perte objective de la capabilité, c’est-à-dire de « la liberté dont les individus jouissent réellement de choisir la vie qu’ils ont des raisons de valoriser » (Sen, 2000 : 122). Dans le même temps, le vieillissement est assumé comme tel lorsque cette perte objective de la capabilité est subjectivement effacée, en transformant les renoncements en des choix de vie. Pour les personnes « installées » dans la retraite et non dépendantes, le changement de domicile participe de cette aspiration. Il se veut non pas un renoncement, mais l’expression d’une volonté d’être. Pourtant, il résulte objectivement le plus souvent d’un événement qui réduit la capabilité et, qui plus est, est lié à la vieillesse comme moment de la confrontation de soi à sa propre finitude. Vivre ou non le déménagement comme un renoncement dépend à la fois des ressources économiques et sociales de la personne, de son état de santé, et des ressources du territoire habité.
Parties annexes
Notes
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[1]
La notion de « milieu de retraite » est théorique par rapport au cycle de vie de la retraite, où nous pouvons concevoir qu’il existe un début, un milieu et une fin. Il est évident qu’aucun individu ne sait à l’avance si à 75 ans, il se situe au milieu de sa retraite ou à son terme. En définissant le milieu de la retraite comme une période pouvant se situer (arbitrairement) entre 70 et 84 ans, notre intention est de distinguer cette période de l’existence de la période d’entrée dans la retraite (qui se situe encore pour la grande majorité des individus autour de 60 ans) et de la grande vieillesse. En « milieu de retraite », les personnes que nous étudions sont donc « installées dans la retraite ».
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[2]
La sécurité ontologique est ici conçue comme « la confiance des êtres humains dans la continuité de leur propre identité et dans la constance des environnements d’actions sociaux et et matériels » (Giddens, 1994 : 98).
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[3]
Les noms et prénoms des interviewés sont fictifs.
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[4]
Source : INSEE, Résultats et Société, 2004, n° 34.
-
[5]
Selon le Conseil d’orientation des retraites, séance plénière du 27 juin 2007, « le niveau de vie des veuves et des divorcées », document de travail n°05, et à partir des données INSEE-DGI, le niveau de vie médian par UC pour les couples est de 150 363 , et de 13 349 pour les femmes en situation de veuvage.
-
[6]
Aujourd’hui, cela a évolué, notamment du fait de l’augmentation du salariat féminin. Toutefois, même si les ménages possèdent de plus en plus fréquemment deux véhicules, et que la diversification des formes de mobilité des femmes est l’expression « d’une diminution de la dissymétrie dans les rapports que les sexes nouent à l’espace » (Coutras, 1993 : 169), il serait bien rapide de conclure que l’usage de la voiture n’est plus sexué. La « deuxième » voiture, la « petite » voiture, est principalement pour la femme, qui, par ailleurs, conduit fréquemment pour tous les trajets liés à la domesticité (courses, accompagnement des enfants).
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[7]
Les catégories sociales qui, se rapprochant des conceptions stoïciennes ou épicuriennes, estiment que le bonheur est plus de l’ordre de l’être et du faire que de l’avoir, se distinguent nettement des premières en ce qu’elles disposent déjà de tout un ensemble de ressources acquises. Avant d’être ou de faire, elles ont : elles ont de l’argent, elles ont de l’instruction, elles ont du travail, elles ont des maisons.
Baudelot et Gollac, 2003 : 64
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