Résumés
Résumé
Cette recherche s’intéresse au processus d’identification des opportunités internationales chez les petites et moyennes entreprises (PME) pendant la crise sanitaire de la Covid-19. L’objectif de cet article est d’étudier l’impact des capacités digitales et de l’agilité organisationnelle sur la détection d’opportunités internationales en prenant en considération le rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement. Une étude quantitative par le biais d’un questionnaire a été conduite auprès de 146 PME tunisiennes. Les résultats obtenus montrent que les capacités digitales et l’agilité organisationnelle affectent positivement la détection d’opportunités internationales. Nous soulignons également qu’un environnement incertain et turbulent peut affaiblir la relation entre les capacités digitales et l’identification des opportunités d’exportation. Ainsi, nous contribuons à la littérature sur l’internationalisation des PME en proposant un modèle qui prend en compte plusieurs facteurs clés dans la détection des opportunités à l’international. Notre étude offre de nouvelles perspectives managériales pour soutenir le développement d’un couplage entre les capacités digitales et les capacités managériales agiles afin de déterminer et favoriser la détection d’opportunités internationales dans les PME.
Mots-clés :
- Internationalisation,
- Opportunités,
- Digitalisation,
- Agilité,
- Incertitude
Abstract
This article aims to shed light on the process of international opportunity recognition among small and medium-sized enterprises (SMEs) during the Covid-19 pandemic. Specifically, the main goal of this research is to study the impact of both digital capabilities and organizational agility on international opportunities identification, as well as the moderating role of environmental uncertainty on these relationships. Data were collected from a sample of 146 Tunisian internationalized SMEs and analyzed using a structural equation model approach. The results highlight that digital capabilities and organizational agility positively affect international opportunity identification. We also demonstrate that an uncertain environment can weaken the relationship between digital capabilities and opportunity recognition. Thus, we contribute to the literature on the SME internationalization by proposing a model that takes into account several key factors in the detection of international opportunities. Our study offers new managerial implications to support the adoption of a coupling between digital capabilities and agile capabilities in order to determine and promote the detection of international opportunities in SMEs.
Keywords:
- Internationalization,
- Opportunities,
- Digitalization,
- Agility,
- Uncertainty
Resumen
Este artículo tiene como objetivo arrojar luz sobre el proceso de reconocimiento de oportunidades internacionales entre las pequeñas y medianas empresas (PyME) durante la pandemia de Covid-19. Específicamente, el objetivo principal de esta investigación es estudiar el impacto de las capacidades digitales y la agilidad organizacional en la identificación de oportunidades internacionales, así como el papel moderador de la incertidumbre ambiental en estas relaciones. Los datos se recopilaron de una muestra de 146 PyME tunecinas internacionalizadas y se analizaron utilizando un enfoque de modelo de ecuaciones estructurales. Los resultados destacan que las capacidades digitales y la agilidad organizacional afectan positivamente la identificación de oportunidades internacionales. También demostramos que un entorno incierto puede debilitar la relación entre las capacidades digitales y el reconocimiento de oportunidades. Así, contribuimos a la literatura sobre la internacionalización de las PyME proponiendo un modelo que tiene en cuenta varios factores clave en la detección de oportunidades internacionales. Nuestro estudio ofrece nuevas perspectivas gerenciales para apoyar la adopción de un acoplamiento entre capacidades digitales y capacidades gerenciales ágiles para determinar y promover la detección de oportunidades internacionales en las PyME.
Palabras clave:
- Internacionalización,
- Oportunidades,
- Digitalización,
- Agilidad,
- Incertidumbre
Corps de l’article
Introduction
La crise sanitaire de la Covid-19 a eu des conséquences économiques importantes à l’échelle nationale et internationale (Zighan, Abualqumboz, Dwaikat et Alkalha, 2022). Les mesures sanitaires de protection et de prévention, visant à contrôler la propagation de la maladie, ont grandement affecté la vie sociale humaine, en limitant les mouvements individuels et les activités communautaires (Lukito-Budi, Manik et Indarti, 2023). Les entreprises se sont retrouvées face à un défi d’adaptation et d’ajustement organisationnel pour poursuivre leurs activités et contourner les difficultés liées au confinement et à la fermeture des frontières, surtout pour les entreprises ayant des activités internationales. Dans ce contexte incertain et turbulent, les petites et moyennes entreprises (PME) sont les organisations les plus touchées par la crise sanitaire en raison de leurs vulnérabilités et de leurs ressources limitées (Deprince, Mayrhofer et Pereira Pündrich, 2021 ; Janssen, Tremblay, St-Pierre, Thurik et Maalaoui, 2021) par rapport aux grandes entreprises. Face aux restrictions sanitaires liées à la pandémie, les entreprises furent obligées de repenser leur mode de fonctionnement pour poursuivre leurs activités, notamment par la mobilisation des compétences et ressources technologiques. En particulier, le besoin urgent d’action face à la crise a donné l’opportunité à ces entreprises d’innover dans des solutions de travail intelligentes à travers l’innovation et l’accélération de leur transformation digitale, notamment, afin de rester en activité et de surmonter les perturbations des chaînes d’approvisionnement (Deng, Zhu, Johanson et Hilmersson, 2022 ; Ding, Guan, Chan et Liu, 2020). Selon une étude menée par la Boston Consulting Group (BCG, 2022[1]) auprès de 5 000 dirigeants, l’adoption de l’agilité est l’un des piliers clés d’une transformation numérique réussie. Face à la pandémie de Covid‑19, les entreprises cherchent à améliorer leur agilité, leur rapidité et leur prise de décision basée sur les données numériques. Notre étude fournit un apport intéressant sur la façon dont la complémentarité entre l’agilité et le numérique peut influencer la détection d’opportunités des PME internationalisées. À notre connaissance, peu de travaux portent sur l’effet conjoint des capacités numériques et de l’agilité organisationnelle sur l’identification des opportunités internationales dans une période de crise caractérisée par une forte incertitude.
En effet, la technologie digitale crée de nouveaux espaces d’opportunités pour les entreprises (Kreuzer, Lindenthal, Oberländer et Röglinger, 2022). Elle permet de digitaliser les opérations et les processus, mais aussi d’ajouter des capacités digitales aux produits physiques (Lokuge, Sedera, Grover et Dongming, 2019), offrant ainsi de nouvelles façons d’interagir entre les clients et les entreprises (Kreuzer et al., 2022 ; Li, Su, Zhang et Mao, 2018). L’influence du digital sur la détection des opportunités est fondamentale non seulement dans le domaine de l’entrepreneuriat digital, mais également dans des domaines connexes tels que l’innovation digitale, où l’identification des opportunités – en tant que première étape du processus d’innovation – est très peu étudiée (Holmström, 2018). L’agilité organisationnelle, quant à elle, permet à l’entreprise d’ajuster rapidement ses opérations et ses processus pour faire face à des conditions de marché volatiles et de s’adapter rapidement à des changements inattendus dans les exigences des clients (Shin, Lee, Kim et Rhim, 2015). L’agilité est considérée comme une stratégie intégrée, un système et/ou une pratique de gestion basée sur des capacités à multiples facettes (Cheng, Zhong et Cao, 2020). Cette pratique managériale pourrait favoriser les capacités de prise de décision entrepreneuriale, la proactivité et la rapidité de l’entreprise dans ses projets d’expansion sur les marchés internationaux.
L’objectif de cette recherche est donc de tester l’effet joint des capacités digitales et de l’agilité organisationnelle sur la détection d’opportunités internationales en prenant en considération le rôle de l’incertitude de l’environnement comme facteur modérateur sur ces deux relations. Pour apporter des éléments de réponse à ces questions, une étude quantitative a été conduite auprès de 146 PME tunisiennes. Le choix du contexte tunisien est justifié par le manque de recherches dans les pays émergents. Or, le comportement des PME dans les pays émergents peut être différent de celui des pays développés en raison de nombreux facteurs tels que le développement économique, la maturité du marché et l’accès à la technologie. En outre, les PME dans les pays émergents peuvent faire face à des défis uniques, tels que la réglementation, la main-d’oeuvre qualifiée, le financement et la concurrence, qui peuvent influencer leur comportement de différentes manières. En conséquence, étudier les PME dans un pays émergent tel que la Tunisie peut aider à mieux comprendre les défis auxquels elles sont confrontées et les opportunités de développement pour elles, surtout pendant la crise sanitaire qui a touché tous les pays.
Dans le cadre de cette recherche, nous mobilisons la théorie des capacités dynamiques (Teece et Pisano, 1994 ; Teece, Pisano et Shuen, 1997). Ces auteurs définissent les capacités dynamiques comme la capacité de l’entreprise à intégrer, construire et reconfigurer des compétences internes et externes pour faire face à des environnements en mutation rapide. Selon les mêmes auteurs, l’accent est mis sur l’exploitation des compétences internes et externes pour faire face à des environnements changeants. Nous avons choisi ce cadre théorique pour deux principales raisons. La première est liée à l’utilisation de nouvelles configurations, notamment les compétences internes et externes. La seconde est en lien avec l’environnement changeant, en particulier l’impact de la pandémie de Covid-19. Ce cadre nous a permis de mieux comprendre comment les PME peuvent utiliser leurs capacités internes et externes pour naviguer dans ce nouvel environnement et détecter de nouvelles opportunités internationales. En réalisant cette étude, nous répondons à l’appel de plusieurs chercheurs, notamment Coviello et Tanev (2017), Paul et Rosado-Serrano (2019) et Vahlne et Johanson (2017), qui évoquent la nécessité de mener d’autres recherches pour affiner notre compréhension de la relation entre la digitalisation et l’internationalisation dans le champ de la recherche sur l’entrepreneuriat international. Trois contributions majeures sont issues de cette recherche. Premièrement, selon Kreuzer et al. (2022), la compréhension du processus d’identification des opportunités entrepreneuriales dans un monde numérique est un vrai défi, étant donné que cet univers est totalement différent des domaines traditionnels. De plus, l’apport de la transformation digitale dans ce processus, particulièrement dans un contexte international, n’a pas été examiné, laissant sans réponse la question quant à la nature de l’influence des capacités digitales sur le processus d’identification des opportunités internationales. Par ailleurs, un succès sur le plan digital dépend essentiellement de l’agilité organisationnelle de l’entreprise, c’est-à-dire la capacité de l’entreprise à détecter les changements environnementaux externes (Yang et Liu, 2012), mais également sa capacité interne à identifier et reconfigurer les ressources et capacités disponibles afin de s’adapter à ces changements (Goldman, Nagel et Preiss, 1995 ; Yusuf, Sarhadi et Gunasekaran, 1999), surtout dans un environnement incertain tel que la crise sanitaire de la Covid-19. L’objet de la présente étude est d’apporter des éléments de réponse aussi bien théoriques qu’empiriques à cette question, en examinant l’effet joint des capacités digitales et de l’agilité organisationnelle sur la détection des opportunités des PME internationalisées. Deuxièmement, si les travaux sur les déterminants de la détection d’opportunités entrepreneuriales internationales sont bien développés, nos résultats les prolongent en montrant que la réussite de ces déterminants dépend de la stabilité du contexte. À notre connaissance, aucune recherche n’a examiné l’effet modérateur de l’incertitude de l’environnement sur les liens entre le digital et l’agilité d’une part et le processus d’identification des opportunités entrepreneuriales, particulièrement dans un contexte international, d’autre part. La Tunisie, en tant que pays non occidental, est un contexte intéressant pour l’étude du processus de détection d’opportunités internationales pour les raisons susmentionnées. Les PME tunisiennes, fragilisées par les crises politiques et sanitaires, représentent un terreau fertile de recherche lié notamment à leurs caractéristiques. Ces spécificités peuvent nous aider à mieux comprendre les déterminants de l’entrepreneuriat international dans un contexte émergent. En nous appuyant sur un échantillon de PME tunisiennes, nous essayons de combler ce gap théorique pour apporter quelques éléments de réponse aux questionnements de plusieurs auteurs, notamment Kreuzer et al. (2022).
Ainsi, cette recherche a été guidée par l’interrogation suivante : dans quelle mesure les capacités digitales et l’agilité organisationnelle influencent-elles le processus de détection d’opportunités internationales ? Comment l’incertitude de l’environnement modère-t-elle ces relations ?
Nous commencerons par définir les capacités digitales et l’agilité organisationnelle, avant de présenter l’étude empirique, les résultats obtenus et d’en discuter la portée et les limites.
1. Revue de la littérature et cadre conceptuel
1.1. Détection des opportunités internationales
L’entrepreneuriat international est défini comme la découverte, la mise en oeuvre, l’évaluation et l’exploitation d’opportunités – au-delà des frontières nationales – pour créer de futurs biens et services (Oviatt et McDougall, 2005). Dans ce champ de recherche, l’opportunité internationale est un concept clé (Mainela, Puhakka et Servais, 2014), qui est défini comme « les processus cognitifs et comportementaux associés à la création et à l’échange de valeur par l’identification et l’exploitation d’opportunités qui dépassent les frontières nationales[2] » (Peiris, Akoorie et Sinha, 2012, p. 296). La détection puis l’exploitation d’opportunités d’affaires internationales font partie du processus d’internationalisation d’une entreprise. En ce qui concerne l’identification des opportunités internationales, il y a deux perspectives théoriques (Johanson et Vahlne, 2009 ; Venkataraman, Sarasvathy, Dew et Forster, 2012) : la découverte d’opportunités d’une part et la création d’opportunités d’autre part (Alvarez et Barney, 2007 ; Chetty, Karami et Martín, 2018 ; Mainela, Puhakka et Servais, 2014 ; Tremblay et Carrier, 2006). La première, qui voit les opportunités comme un phénomène objectif, repose sur l’approche de Kirzner (1997) et explicite que ce sont les informations disponibles et la vigilance de l’entrepreneur qui permettent de détecter une opportunité (Shane et Venkataraman, 2000). La découverte d’opportunités est alors vue comme un processus réactif (Kontinen et Ojala, 2011) et peut se définir comme « l’acte ou le processus consistant à percevoir ou à trouver un ensemble de circonstances favorables pour créer de la valeur[3] » (Chetty, Karami et Martín, 2018, p. 70-71). La seconde, qui voit les opportunités comme un phénomène subjectif, repose sur le constructivisme social (Alvarez, Barney et Anderson, 2013) et l’approche de Schumpeter (1934), et considère la détection d’opportunités comme un processus cognitif (Tremblay et Carrier, 2006). La détection d’opportunités est ainsi le résultat d’un processus d’apprentissage basé sur les relations humaines et les réseaux sociaux (Hills, Lumplein et Singh, 1997). La création d’opportunités est vue ici comme un processus proactif (Kontinen et Ojala, 2011), les opportunités, étant le résultat du rôle actif des entrepreneurs qui sont capables de transformer de nouvelles idées en produits commercialisables. Selon Chetty, Karami et Martín (2018), la création d’opportunités se définit comme étant une action ou un processus capable de façonner ou de créer un ensemble de circonstances favorables pour créer de la valeur. Ainsi, les opportunités peuvent être découvertes ou créées (Alvarez et Barney, 2007). La découverte et la création forment un cycle et sont complémentaires. Parfois, c’est même la combinaison des deux qui permet d’identifier une opportunité internationale (Chetty, Karami et Martín, 2018 ; Galan et Torsein, 2021). Effectivement, pour certains auteurs, les opportunités créées peuvent amener à la découverte d’opportunités et vice versa (Welter et Alvarez, 2015). Pour d’autres, les opportunités résultent à la fois de création et de découverte (Venkataraman et al., 2012 ; Garud, Gehman, Giuliani, 2014). Pour notre part, nous pensons que les deux perspectives susmentionnées sont susceptibles de se retrouver dans la réalité et donc nous optons pour les deux perspectives.
Les études récentes ont mis en exergue les antécédents de l’identification des opportunités internationales, telles que l’expérience internationale de l’organisation et les connaissances (Laperrière et Spence, 2015), l’orientation entrepreneuriale (Ripollés-Meliá, Menguzzato-Boulard et Sánchez-Peinado, 2007), et les réseaux (Chandra, Styles et Wilkinson, 2009 ; Galkina et Chetty, 2015). Pour autant, d’autres recherches doivent être menées sur les antécédents de l’identification des opportunités internationales, en particulier pour la population des entrepreneurs en activité dans des pays dits en voie de développement (Kiss, Danis et Cavusgil, 2012 ; Singh, 2000 ; Styles et Seymour, 2006). Nous examinons le rôle des capacités digitales, de l’agilité organisationnelle et de l’incertitude de l’environnement sur la détection d’opportunités internationales.
1.2. L’influence des capacités digitales
Les capacités digitales sont définies comme une compétence organisationnelle, une expertise et un talent pour exploiter une technologie digitale afin de développer de nouveaux produits ou services (Khin et Ho, 2020). Les capacités digitales ont cinq composantes : les canaux numériques, l’écosystème numérique, l’expérience numérique, les produits numériques et les plateformes numériques (Albanese et Manning, 2015). Selon Teece, Pisano et Shuen (1997), les capacités digitales représentent une catégorie émergente de capacités dynamiques. Ces capacités permettent aux entreprises de transformer et de développer leurs processus opérationnels, leurs modèles commerciaux et leurs expériences client (Westerman, Calméjane, Bonnet, Ferraris et McAfee, 2011). Selon la théorie des capacités dynamiques, les capacités digitales peuvent également être considérées comme un sous-ensemble spécifique de capacités dynamiques permettant aux entreprises de détecter les changements environnementaux et d’y répondre de manière appropriée (Pergelova, Manolova, Simeonova-Ganeva et Yordanova, 2019), de gérer efficacement les risques et les incertitudes et d’adapter leur stratégie en conséquence. Selon Hagsten et Kotnik (2017), cette capacité dynamique permet également de mobiliser et d’orienter efficacement les ressources vers des activités de création de valeur. Les capacités digitales ne sont pas seulement des capacités technologiques, elles relèvent aussi des capacités et ressources humaines qui sont à développer pour la collaboration et l’innovation, en utilisant la technologie digitale (Nasiri, Ukko, Saunila, Rantala et Rantanen, 2020). Les études précédentes ont trouvé que les capacités digitales ont des effets positifs indirects sur la performance financière et non financière (Lu et Ramamurthy, 2011), mais aussi sur l’intention d’entreprendre au niveau international (Arnim et Mrozewski, 2020). Les effets positifs de la digitalisation pour l’entreprise sont aussi visibles au niveau international parce que les organisations accèdent à des connaissances sur les marchés étrangers (Mathews, Healy et Wickramasekera, 2012). De plus, la communication avec les clients, fournisseurs et partenaires d’affaires est plus aisée, en général, avec les outils digitaux (Pergelova et al., 2019), ce qui permet d’identifier des idées d’affaires prometteuses (Chandra, Styles et Wilkinson, 2009). Ainsi, les risques associés à l’activité internationale sont significativement moins importants pour les organisations qui ont des capacités digitales, ce qui peut les amener à s’internationaliser (Kreuzer et al., 2022 ; Loane, 2005 ; Hagsten et Kotnik, 2017). C’est pourquoi la digitalisation est vue comme un catalyseur de l’entrepreneuriat international (Reuber et Fischer, 2011). Plus précisément, Glavas et Mathews (2014) ont trouvé que les entrepreneurs qui internationalisent leur entreprise ont un niveau élevé de capacités digitales. Ils affirment que « ces entrepreneurs internationaux cherchaient à identifier et à exploiter de nouvelles opportunités en adoptant les capacités de l’internet[4] » (p. 242). D’où :
H1 : les capacités digitales impactent positivement la détection des opportunités internationales.
1.3. L’influence de l’agilité organisationnelle
L’agilité organisationnelle (AGO) est définie comme la capacité de l’entreprise à identifier les changements environnementaux inattendus et à y réagir rapidement et efficacement (AlNuaimi, Singh, Ren, Budhwar et Vorobyev, 2022 ; Cheng, Zhong et Cao, 2020 ; Yang et Liu, 2012). Cette agilité organisationnelle peut être considérée comme une réponse pondérée aux changements imprévisibles et continus (Goldman, Nagel et Preiss, 1995) permettant aux entreprises de se développer dans un environnement concurrentiel en exploitant les opportunités offertes par ce changement (Charbonnier-Voirin, 2011). Cette reconfiguration organisationnelle (Charbonnier-Voirin, 2011 ; Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu, 2020) permet de remplacer les processus existant en appliquant de nouvelles procédures et ressources en fonction de nouvelles conditions (Teece, Peteraf et Leih, 2016). Afin d’établir un diagnostic d’agilité organisationnelle, Barrand (2006) propose trois niveaux distincts : stratégique, organisationnel et comportemental. Charbonnier-Voirin (2011) souligne que la littérature sur l’agilité organisationnelle est encore fragmentée et souffre d’une insuffisance théorique. L’auteur évoque d’ailleurs le manque de consensus sur les éléments constituants l’agilité organisationnelle. Il propose, dans sa revue de littérature critique, les différentes caractéristiques de l’agilité organisationnelle (Figure 1).
La littérature antérieure identifie l’AGO comme l’une des capacités dynamiques clés pour les entreprises, ce qui leur permet d’obtenir des avantages concurrentiels durables et de survivre dans des environnements très contingents (Shin et al., 2015 ; Teece, Peteraf et Leih, 2016 ; Zitkiene et Deksnys, 2018). Ces auteurs considèrent également l’agilité comme une capacité dynamique qui donne aux entreprises les moyens pour répondre rapidement à divers contextes en adaptant leurs principales compétences. Les travaux de Sherehiy, Karwowski et Layer (2007) et de Yang et Liu (2012) distinguent deux approches pour appréhender l’agilité organisationnelle. La première approche se concentre sur la capacité interne de l’entreprise à identifier et reconfigurer les ressources et les capacités disponibles en définissant de nouvelles stratégies concurrentielles afin de s’adapter aux changements (Goldman, Nagel et Preiss, 1995 ; Yusuf, Sarhadi et Gunasekaran, 1999). Certains auteurs qualifient cette approche comme une agilité d’ajustement opérationnel (Cheng, Zhong et Cao, 2020 ; Dove, 2001 ; Lu et Ramamurthy, 2011). Les actions opérationnelles choisies par l’entreprise concernent – par exemple – sa capacité d’apprentissage pendant les opérations commerciales internationales et son adaptation en fonction des opportunités sur les marchés internationaux (Mikalef et Pateli, 2017). La capacité à intégrer ses propres connaissances et introduire de nouvelles connaissances expérientielles permet à l’entreprise d’obtenir un avantage comparatif et concurrentiel dans des contextes turbulents (Chakravarty, Grewal et Sambamurthy, 2013 ; Zitkiene et Deksnys, 2018). L’agilité organisationnelle joue également un rôle important dans l’atténuation des conséquences négatives de l’incertitude environnementale sur les employés et l’organisation du travail en général (Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu, 2020). Dans le contexte de la crise sanitaire de la Covid-19, Srivastava et Gupta (2022) montrent que l’agilité organisationnelle, par le biais de l’agilité de la main-d’oeuvre, a un impact positif sur le bien-être des employés. Il est important de souligner que l’agilité dépend également de la congruence des structures et des procédures (Burns et Stalker, 1961 ; Charbonnier-Voirin, 2011 ; Lawrence et Lorsch, 1967). En effet, les entreprises doivent avoir la capacité d’adapter et d’ajuster leurs structures en fonction de changements environnementaux. La théorie de la contingence stipule que la structure idéale est celle qui s’adapte le mieux avec son environnement. La seconde approche est plutôt basée sur la perspective externe et la capacité de l’entreprise à détecter les changements environnementaux (Yang et Liu, 2012), notamment via l’identification des besoins des clients et la saisie des opportunités du marché (McCarthy, Lawrence, Wixted et Gordon, 2010). Certains auteurs qualifient cette approche comme une agilité de capitalisation du marché (Cheng, Zhong et Cao, 2020 ; Dove, 2001 ; Lu et Ramamurthy, 2011), qui consiste à répondre rapidement aux besoins du marché cible grâce à une surveillance et à une exploitation continue de l’environnement commercial. Cette agilité externe permet à l’entreprise d’exploiter les informations et les connaissances existantes pour détecter les opportunités sur les marchés en maîtrisant l’évolution des marchés internationaux (Lu et Ramamurthy, 2011 ; Swafford, Ghosh et Murthy, 2008). Les environnements volatils sont perçus comme une opportunité fertile pour de nouvelles orientations stratégiques (Sambamurthy, Bharadwaj et Grover, 2003).
Dans un contexte international, l’agilité organisationnelle est considérée comme un élément important pour les PME qui ont l’intention de se développer à l’international (Jafari-Sadeghi, Amoozad Mahdiraji, Busso et Yahiaoui, 2022) en faisant face à des contraintes liées à l’incertitude, la nouveauté, les ressources et la complexité des opérations à l’échelle mondiale. Cette agilité organisationnelle favorise les capacités de prise de décision, la réactivité, la flexibilité et la vitesse (rapidité) de l’entreprise dans ses projets d’expansion sur les marchés internationaux. Chen, Chiang et Storey (2012) montrent que les connaissances externes fournies par l’intelligence économique ne sont pas les seuls moyens permettant d’accélérer les activités d’internationalisation de l’entreprise. Cependant, la vitesse d’internationalisation dépend fortement du processus de transformation des connaissances via l’agilité organisationnelle de l’entreprise (Cheng, Zhong et Cao, 2020). Les auteurs soulignent que l’adaptation des connaissances explicites en connaissances expérientielles permet de répondre aux exigences du nouveau marché encore inexploité par l’entreprise. Cegarra-Navarro, Soto-Acosta et Wensley (2016) confirment ces résultats et montrent que l’agilité organisationnelle facilite la recherche et l’exploitation des connaissances pertinentes permettant de développer des services et des produits de haute qualité ou de réagir face à l’émergence de nouveaux concurrents. En résumé, l’agilité organisationnelle est essentielle pour détecter et saisir les opportunités internationales. Par conséquent, nous proposons l’hypothèse suivante :
H2 : l’agilité organisationnelle impacte positivement la détection des opportunités internationales.
1.4. Rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement
L’incertitude de l’environnement est définie par l’incapacité des individus à anticiper l’avenir dû à la difficulté de récupérer des informations précises pendant la prise de décision (Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu, 2020). L’incapacité des entreprises à traiter et comprendre les informations est due à l’instabilité et l’ambigüité de l’environnement externe (Haarhaus et Liening, 2020 ; Vecchiato, 2012). Plusieurs facteurs peuvent accentuer l’incertitude de l’environnement : la mondialisation ou l’émergence de nouveaux concurrents, l’avancée technologique, l’évolution rapide des cycles des produits (qui deviennent d’ailleurs de plus en plus courts), les changements démographiques, les tendances socioculturelles et enfin le comportement des concurrents (Haarhaus et Liening, 2020 ; Milliken, 1987 ; Vecchiato, 2012, 2015 ; Vecchiato et Roveda, 2010).
La recherche en entrepreneuriat met en exergue que le besoin du marché et la dimension technologique sont les principales sources d’incertitude dans les activités entrepreneuriales (McKelvie, Haynie et Gustavsson, 2011 ; Schmitt, Rosing, Zhang et Leatherbee, 2018). L’incertitude du marché représente la méconnaissance des clients (leurs besoins, attitudes, goûts et préférences). Ces informations ne sont pas toujours contrôlées par l’entrepreneur (Peidro, Mula, Jiménez et del Mar Botella, 2010), ce qui rend l’incertitude plus élevée du fait de son incapacité à maîtriser un nouveau marché non familier (McKelvie, Haynie et Gustavsson, 2011 ; McMullen et Shepherd, 2006). L’incertitude du marché concerne également la difficulté à récupérer des informations fiables sur les différents concurrents et leurs stratégies (Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu, 2020). Enfin, cette incertitude détermine la décision d’entrée des entrepreneurs (Wu et Knott, 2006). L’incertitude technologique quant à elle représente l’incapacité à prédire les changements rapides et continus de la technologie (Song et Montoya-Weiss, 2001). Ces changements concernent deux dimensions différentes (Schmitt et al., 2018). La première dimension, dite interne, représente les compétences et les ressources technologiques requises pour développer des produits et services (Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu, 2020). La seconde, qualifiée d’externe, concerne plutôt son incapacité à comprendre ou à anticiper l’évolution de certains aspects de technologie développés par les acteurs de l’environnement (Schmitt et al., 2018). Cette incertitude provient de l’émergence et/ou la combinaison de plusieurs technologies afin de créer de nouvelles idées et solutions (Anderson et Tushman, 1990). Dans un contexte d’incertitude élevée, les entrepreneurs ont tendance à éviter l’exploitation de nouveaux produits basés sur la technologie (Pavitt, 1998).
L’incertitude environnementale empêche l’exploitation de nouvelles opportunités de marché, mais également de nouvelles technologies pas encore testées (Audretsch, 1995), ce qui inhibe l’action entrepreneuriale (Fisher, Stevenson, Neubert, Burnell et Kuratko, 2020 ; McKelvie, Haynie et Gustavsson, 2011). Cette ambigüité environnementale engendre des biais dans le processus décisionnel (Meschi, 2005), limite les choix des options stratégiques (Milliken, 1987) et la capacité à mobiliser les compétences existantes pour répondre à ces incertitudes environnementales en exploitant de nouvelles opportunités.
En résumé, l’incertitude de l’environnement peut entraîner des conséquences sur les capacités digitales de l’entreprise et son agilité organisationnelle. Par conséquent, nous proposons les deux hypothèses suivantes :
H3a : l’incertitude de l’environnement modère la relation entre les capacités digitales et la détection des opportunités internationales.
H3b : l’incertitude de l’environnement modère la relation entre l’agilité organisationnelle et la détection des opportunités internationales.
Nous proposons, au final, un modèle qui teste l’impact des capacités digitales et l’agilité organisationnelle de l’entreprise sur la détection d’opportunités internationales en prenant en considération le rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement.
2. Méthodologie
2.1. Collecte de données
Pour tester ces hypothèses, une étude quantitative a été réalisée entre décembre 2020 et juin 2021 auprès d’un échantillon de 146 PME en Tunisie. Toutes les entreprises impliquées dans cette étude de recherche sont engagées dans une démarche d’internationalisation étant donné qu’elles réalisent des chiffres d’affaires à l’international (Tableau 1). Les données ont été collectées par questionnaires envoyés aux propriétaires dirigeants de ces entreprises et retournés directement aux chercheurs.
Une liste de 1 189 entreprises a été définie par les auteurs depuis le site de l’Agence de promotion de l’industrie et de l’innovation (APII), qui représente le principal réseau de prestations au service de l’entreprise en Tunisie et qui fournit les coordonnées de plusieurs milliers d’entreprises privées. Ensuite, les auteurs ont répertorié 291 entreprises qui n’adhèrent pas au projet de recherche, ce qui a réduit à 898 le nombre d’entreprises ayant effectivement la volonté d’y participer. Les participants ont été contactés par le premier auteur afin de leur expliquer l’objectif de l’enquête, répondre à leurs interrogations et leur assurer l’anonymat et la confidentialité de leurs réponses. Divers moyens étaient mis à la disposition des répondants pour participer à l’étude : une version papier du questionnaire, une version électronique ainsi qu’une version en ligne. Plusieurs relances ont été réalisées par courriel, généralement à deux semaines d’intervalle, portant le temps de recueil des données dans chacune des entreprises à un mois environ.
Sur les 898 PME, 166 nous ont retourné le questionnaire, soit un taux de retour de 18,5 %. Vingt questionnaires ont été exclus en raison d’un nombre important de réponses manquantes, portant à 146 le nombre de questionnaires exploitables. En ce qui concerne la composition des échantillons, ceux-ci étaient examinés selon quatre critères, à savoir l’âge de l’entreprise, sa taille, son secteur d’activité et son chiffre d’affaires à l’international. En termes d’âge, nous avons réparti les entreprises participantes en quatre tranches d’âge : 51 % ont moins de 5 ans, 42 % ont entre 6 et 15 ans, 7 % ont entre 16 et 25 ans et 1 % ont plus de 25 ans. Concernant la taille des entreprises, 81,5 % d’entre elles sont des entreprises de moins de 100 salariés. Ce constat s’explique notamment par une représentation importante des entreprises de petite taille. Notre échantillon est constitué principalement par des PME appartenant au secteur privé et de nationalité tunisienne. De plus, une majorité de ces entreprises appartiennent au secteur des TIC (35,6 %). Le secteur des services occupe également une place importante dans notre échantillon avec 31 %. En termes de chiffre d’affaires à l’international, 80 % des entreprises réalisent un chiffre d’affaires inférieur à un million d’euros contre 20 % des PME qui dépassent ce seuil. Cela est peut-être dû au fait qu’une grande partie des petites entreprises ont subi les lourdes conséquences de la crise sanitaire.
Le tableau 1 fournit les principales caractéristiques des entreprises.
2.2. Mesure des variables
Les échelles de mesure composant le questionnaire ont fait l’objet d’une traduction de l’anglais au français selon une technique de rétrotraduction (Bricout, 2017). Nous avons complété cette série de traductions par un prétest réalisé auprès d’une dizaine de personnes (quatre dirigeants, trois académiciens et trois consultants), qui a permis d’apporter des modifications légères par rapport aux échelles initiales. Une échelle de Likert à sept points a été adoptée pour l’ensemble des items (Annexe 1).
Détection d’opportunités internationales(DOI) : cette variable est mesurée à l’aide d’une échelle issue de la littérature (An, Zhao, Cao, Zhang et Liu, 2018 ; Mostafiz, Sambasivan et Goh, 2019) qui comporte trois items. Un exemple d’item est « voir de nouvelles opportunités internationales potentielles nous vient très naturellement ». L’analyse en composante principale (ACP) indique un construit unidimensionnel restituant 70,22 % de la variance de l’information. La fiabilité interne de DOI est acceptable, car la valeur du coefficient alpha de Cronbach – égale à 0,788 – est supérieure à 0,70 (Nunnally, 1978).
Capacités digitales (CAD) : l’échelle utilisée pour mesurer les capacités numériques de l’entreprise est composée de six items développés par Li, Zhou et Cheng (2022) et confirmée par Khin et Ho (2020). Après avoir mené une analyse factorielle exploratoire via une ACP, nous avons décidé d’éliminer un item (item 5 dans l’annexe 1), qui a une contribution à l’axe très faible. Selon Frone et Tidwell (2015), toute contribution factorielle inférieure à 0,4 pourrait être éliminée pour obtenir de meilleures statistiques. Un exemple d’item est « les capacités de nos solutions digitales sont supérieures à celles de nos concurrents ». La fiabilité interne de notre échelle (alpha de Cronbach) est égale à 0,855.
Agilité organisationnelle (AGO) : composée de huit items, l’échelle de mesure de l’agilité organisationnelle a été développée par Tallon et Pinsonneault (2011) et reprise et confirmée par Darvishmotevali, Altinay et Köseoglu (2020). Un exemple d’item est « être rapide dans l’identification des changements de consommation » ou encore « reconfigurer les ressources technologiques au meilleur moment ». L’alpha de Cronbach calculé pour cette variable est de 0,860.
Incertitude de l’environnement (ICE) : nous avons développé une échelle, qui comporte six items, pour mesurer l’incertitude de l’environnement pendant la crise de la Covid-19 à partir des travaux de Jansen, Vera et Crossan (2009) et de Waldman, Ramírez, House et Puranam (2001). Un exemple d’item est « les changements environnementaux sur notre marché local sont incertains dans ce contexte ». L’alpha de Cronbach de cette échelle est égal à 0,920.
Nous avons également introduit plusieurs variables de contrôle comme l’âge de l’entreprise, sa taille et le chiffre d’affaires réalisé à l’international. Plusieurs recherches antérieures ont montré que ces trois variables pouvaient influencer le processus d’internationalisation des PME (Ahammad, Basu, Munjal, Clegg et Shoham, 2021 ; Catanzaro et Teyssier, 2021). Sur un échantillon de 207 entreprises indiennes, Ahammad et al. (2021) ont montré une influence positive de la taille de l’entreprise sur la performance internationale. Catanzaro et Teyssier (2021), quant à eux, ont démontré un effet négatif de l’âge des PME sur la performance internationale mesuré via l’investissement direct étranger. En outre, dans l’étude de Lecerf et Omrani (2020) menée sur un échantillon de 612 PME allemandes, le chiffre d’affaires détermine positivement et significativement l’orientation internationale de l’entreprise.
3. Résultats des analyses
Après l’examen statistique de la variance de méthode commune, nous ferons une analyse préliminaire des données, puis nous présenterons les résultats de notre modèle structurel ainsi que les tests de robustesse.
3.1. Analyse du biais de la variance de méthode commune
Dans cette étude, les données sont collectées en un seul temps de mesure et auprès des mêmes répondants (c’est-à-dire les propriétaires dirigeants), ce qui peut entraîner une inflation artificielle des résultats due à la variance commune (Podsakoff, MacKenzie, Lee et Podsakoff, 2003). Afin de contrecarrer ce biais potentiel, plusieurs techniques statistiques et non statistiques ont été mises en place. Sur le plan non statistique, nous avons séparé les variables indépendantes, les variables dépendantes et les variables modératrices dans le questionnaire administré. Nous avons également insisté sur l’anonymat des participants ainsi que sur la confidentialité des données récoltées. Sur le plan statistique, nous avons effectué deux fois le test de facteur unique d’Harman (Podsakoff et al., 2003), une première fois en ne faisant intervenir que les items des variables indépendantes (c’est-à-dire les capacités digitales et l’agilité organisationnelle) et la deuxième fois en incluant les items de toutes les variables indépendantes et dépendantes (c’est-à-dire les capacités digitales et l’agilité organisationnelle, ainsi que la variable détection d’opportunités internationales). Une analyse ACP a été effectuée sans rotation et avec le nombre de facteurs fixé à 1. Les résultats font apparaître une variance expliquée à 36,063 % quand la variable dépendante n’était pas incluse et à 36,094 % quand la variable dépendante a été introduite. Aucun facteur n’intervenait pour la majorité de la covariance dans les données étant donné que ces valeurs étaient bien inférieures à la valeur critique (< 50 %) dans les deux cas. Par conséquent, le biais de la variance de méthode commune ne constitue pas un biais sérieux dans notre recherche.
3.2. Analyse préliminaire des données : fiabilité et validité des échelles de mesure
Nous avons utilisé SPSS 26.0 pour effectuer une analyse factorielle exploratoire en vue de vérifier les caractéristiques de nos données ainsi que de nos mesures. Plus particulièrement, nous utilisons deux principaux critères, à savoir la mesure de l’adéquation de l’échantillonnage (KMO) et le test de sphéricité de Bartlett (Pupion, 2012). Pour ce qui est du premier indicateur, une valeur proche de 1 nous indique que les corrélations entre les items sont de bonne qualité. L’annexe 2 montre que toutes les valeurs sont satisfaisantes. En outre, le même tableau montre que toutes les valeurs issues du test de Bartlett sont significatives au seuil de 0,001, indiquant ainsi que la matrice de corrélation n’est pas une matrice identité.
Toujours dans le cadre de nos analyses préliminaires de données, une analyse factorielle confirmatoire (AFC) a été menée afin de vérifier la qualité des mesures, particulièrement, le contrôle de la cohérence interne, la validité convergente ainsi que la validité discriminante des quatre variables du modèle. Nous précisions que la relation entre les variables latentes et les variables manifestes dans notre modèle est de type réflectif. Selon Fernandes (2012) et Roussel, Durrieu, Campoy et El Akremi (2002), l’AFC est une méthode statistique qui a pour rôle de vérifier l’adéquation du modèle théorique, qui est à la base du questionnaire, à la structure des observations statistiques collectées à l’aide de l’instrument. Elle permet, en d’autres termes, de déterminer dans quelle mesure le modèle théorique examiné correspond aux données empiriques grâce à un ensemble d’indices d’ajustement. Selon Hair, Sarstedt, Pieper et Ringle (2012), la cohérence interne est examinée à travers trois indices, à savoir l’alpha de Cronbach (AC), la fiabilité composite (FC) et la variance moyenne extraite (VME). Le tableau 2 montre que les alphas de nos construits varient entre 0,79 et 0,92, dépassant le seuil minimum requis de 0,70 (Nunnally, 1978). Les valeurs de la fiabilité composite sont également supérieures à la valeur recommandée de 0,7 (Tableau 2). De même, le tableau 2 illustre les indices de la VME, qui sont tous supérieurs à 0,5. Par conséquent, la fiabilité des mesures est vérifiée.
La validité convergente permet de vérifier si « les différents indicateurs qui sont censés mesurer le même phénomène sont corrélés » (Evrard, Pras et Roux, 2003, p. 284). Hair et al. (2012) proposent de l’évaluer à l’aide des contributions factorielles (loadings, λ) liant les variables manifestes aux variables latentes. Selon ces chercheurs, les λ doivent être supérieurs à 0,5 et significativement non nuls. Les résultats des tests de validité présentés dans le tableau 2 montrent que tous les loadings remplissent ces deux critères, ce qui indique la validité convergente des items. La validité discriminante dans le modèle de mesure est évaluée à travers deux critères, à savoir le critère de Fornell-Larcker (Fornell et Larcker, 1981) et le critère HTMT (Henseler, Ringle et Sarstedt, 2015). La première partie située en dessous de la diagonale dans le tableau 3 illustre les corrélations de Pearson entre l’ensemble des variables ainsi que les valeurs de la racine carrée des VME qui sont présentées sur la diagonale. La valeur maximale des coefficients de corrélation est égale à 0,595. Ce coefficient reste largement inférieur au seuil recommandé, soit 0,70. Ensuite, nous comparons les valeurs de la racine carrée des VME avec les coefficients de corrélation interconstruits afin de vérifier la validité discriminante. Le tableau 3 montre que la racine carrée des VME est bien supérieure à sa corrélation avec chacun des autres construits du modèle, ce qui confirme bien la validité discriminante de nos échelles de mesure. En outre, selon Henseler, Ringle et Sarstedt (2015), les valeurs HTMT ne doivent pas dépasser 0,9 ou idéalement 0,85. Le tableau 3 (en dessus de la diagonale) montre que les variables latentes du modèle sont suffisamment discriminées entre elles. L’ensemble de ces résultats révèle donc la qualité du modèle de mesure en termes de validité discriminante.
3.3. Test des hypothèses
Afin de tester les hypothèses définies dans la partie théorique, nous avons adopté une méthodologie d’équations structurelles, estimées à l’aide d’une approche de moindres carrés partiels (PLS), en utilisant le logiciel Warppls (Kock, 2022). Selon Richter, Hauff, Ringle et Gudergan (2022), la méthode PLS possède diverses capacités qui peuvent aider les chercheurs à relever plusieurs défis dans la recherche en management international, notamment sur le plan méthodologique. Cette méthode permet d’analyser des modèles structurels complexes, avec une taille d’échantillon relativement petite (Hair, Hult, Ringle et Sarstedt, 2017). Elle est également considérée comme la méthode la plus appropriée en cas de non-normalité résultant de l’hétérogénéité des groupes d’observation, mais également quand une ou plusieurs variables médiatrices et modératrices sont présentes dans le modèle conceptuel (Sarstedt, Hair, Nitzl, Ringle et Howard, 2020). Le tableau 4 et les figures 2 et 3 rapportent les résultats du modèle structurel pour les hypothèses 1, 2 et 3. Pour tester ces hypothèses, nous avons conduit une régression linéaire. Cette méthode est privilégiée, car elle présente des mesures d’ajustement global du modèle plus fiables sur le plan statistique que la méthode non linéaire (Tomarken et Waller, 2005).
Nous avons, tout d’abord, procédé à un test complémentaire pour vérifier la présence d’un problème de multicolinéarité entre les construits indépendants. Pour cela, nous utilisons les scores des VIF qui doivent être inférieurs à 5, le seuil recommandé par Hair et al. (2017). Les statistiques mentionnées dans le tableau 3 montrent une absence du biais de multicolinéarité dans notre étude. De plus, l’ajustement global du modèle aux données s’avère acceptable pour les deux modèles : directe et de modération. Comme le montre le tableau 4, les deux valeurs du SRMR sont inférieures à 0,1 (Henseler, Ringle et Sarstedt, 2015), les chi-2 sont significatives au seuil de 0,1 % et les valeurs du GoF (petit >= 0,1, moyen >= 0,25, grand >= 0,36) représentent un effet de grande taille (Wetzels, Odekerken-Schröder et van Oppen, 2009). Cela signifie que les deux modèles correspondent aux données empiriques de cette étude.
3.3.1. Effets des capacités digitales et de l’agilité organisationnelle
L’hypothèse H1 suppose que les capacités digitales ont un effet positif sur la détection d’opportunités internationales. En effet, les résultats présentés dans le tableau 4 ont montré un effet positif et significatif conduisant à l’acceptation de H1 (β = 0,520, p < 0,001 ; 95 % CI [0,365 ; 0,676]). Cela signifie que les solutions digitales disponibles permettent à l’entreprise de s’adapter aux attentes et contraintes des différentes parties prenantes, étrangères notamment. Grâce aux outils digitaux, les PME pourraient atteindre un degré important de flexibilité et d’interaction avec leurs clients et leurs collaborateurs internationaux, ce qui leur permet de développer, ainsi, une certaine vigilance envers les nouvelles opportunités internationales. Selon la théorie des capacités dynamiques, cela signifie que la capacité de l’entreprise à adopter des technologies digitales ou à améliorer leur fonctionnement lui permet de créer et d’exploiter des opportunités commerciales internationales. En outre, l’hypothèse H2 propose de tester l’impact de l’agilité organisationnelle sur la détection d’opportunités internationales. Les résultats mentionnés dans le même tableau ont révélé un effet positif et significatif (β = 0,344, p < 0,001 ; 95 % CI [0,203 ; 0,486]). Nous interprétons cela par le fait que la capacité d’une entreprise d’être flexible et innovante pour s’adapter aux conditions changeantes des marchés internationaux lui permet de trouver une certaine aisance dans l’identification des nouvelles opportunités. La rapidité au niveau de l’anticipation des changements des demandes des clients internationaux, par exemple, représente également une compétence clé pour l’entreprise afin de répondre efficacement aux besoins spécifiques et urgents de ses clients. D’un point de vue théorique, cela rejoint l’étude de Cheng, Zhong et Cao (2020) qui stipule qu’une forte capacité agile peut aider les entreprises à mieux exploiter les informations et les connaissances existantes pour optimiser sa capacité à détecter les opportunités sur les marchés cibles. Parmi les variables de contrôle, la taille de l’entreprise a un impact positif et significatif sur notre variable dépendante (β = 0,171, p < 0,01 ; 95 % CI [0,040 ; 0,301]). La proportion de variance expliquée par modèle était de R2 = 0,49, ce qui montre un effet observé de taille moyenne dans le sens de Fairchild, MacKinnon, Taborga et Taylor (2009).
3.3.2. Rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement
Le tableau 4 et les figures 2 et 3 synthétisent également les résultats du test des hypothèses de modération. Les hypothèses H1 et H2 sont toujours vérifiées après avoir rajouté la variable modératrice dans le deuxième modèle. Les capacités digitales sont positivement et significativement reliées à la détection d’opportunités (β = 0,495, p < 0,001 ; 95 % CI [0,343 ; 0,647]). De même, l’agilité est également significativement et positivement associée à la détection d’opportunités (β = 0,326, p < 0,001 ; 95 % CI [0,191 ; 0,461]).
Comme prévu par H3a, selon laquelle l’incertitude de l’environnement modère significativement la relation entre les capacités digitales et la détection d’opportunités internationales, un indice significatif, mais négatif, a été observé (β = −0,155, p < 0,05 ; 95 % CI [−0,285 ; −0,025]). Par conséquent, H3a a été corroborée. Cela signifie que l’incertitude perçue peut stimuler la volonté de prise de risque chez les dirigeants des PME en créant des opportunités internationales à travers les capacités digitales possédées par l’entreprise. Pour interpréter la nature de cette interaction, la figure 3 représente graphiquement le rôle modérateur de l’incertitude perçu de l’environnement sur la relation entre les capacités digitales et la détection d’opportunités.
Si l’hypothèse H3b postule que l’environnement incertain modère la relation entre l’agilité organisationnelle et la détection d’opportunités, les résultats de nos analyses statistiques ont indiqué l’inverse (β = 0,087, p > 0,05 ; 95 % CI [−0,042 ; 0,215]). Ainsi, nous rejetons l’hypothèse H3b, bien que des recherches précédentes aient révélé, dans le champ de l’entrepreneuriat international, une modération significative de l’incertitude (Mahnke, Venzin et Zahra, 2007 ; Zayadin, Zucchella, Anand, Jones et Ameen, 2022). En ce qui concerne les variables de contrôle, la variable taille a un effet significatif et positif sur la variable dépendante (β = 0,160, p < 0,01 ; 95 % CI [0,033 ; 0,288]). Cependant, les deux autres mesures, à savoir l’âge et le chiffre d’affaires réalisé à l’international, n’agissent pas significativement sur la détection d’opportunités (β = 0,048, p > 0,05 ; 95 % CI [−0,077 ; 0,174] et β = 0,053, p > 0,05 ; 95 % CI [−0,063 ; 0,168], respectivement). Les résultats indiquent que la proportion de variance expliquée du modèle de modération (R2) est égale à 0,51, ce qui prouve un effet observé de taille moyenne (Fairchild et al., 2009).
3.4. Tests de robustesse
Nous avons utilisé le logiciel WarpPLS pour effectuer une analyse multigroupes (AMG) en vue de vérifier la robustesse de nos tests d’hypothèses. Le tableau 5 présente les résultats de ces analyses qui ont pour but de démontrer s’il y a une différence entre les entreprises TIC (N = 52) et le reste de l’échantillon (N = 94). Bien que les capacités digitales et l’agilité organisationnelle ont plus d’impact sur la détection d’opportunités chez les entreprises TIC que chez le reste de l’échantillon, les résultats montrent que la différence entre ces deux groupes n’est pas significative (β = 0,101, p > 0,05 ; 95 % CI [−0,057 ; 0,260], β = 0,092, p > 0,05 ; 95 % CI [−0,067 ; 0,251], respectivement).
Cependant, les résultats de l’AMG indiquent une différence significative au niveau de la modération. En effet, le tableau 5 montre que l’incertitude de l’environnement ne modère pas la relation entre les capacités digitales et la détection d’opportunités (β = −0,056, p > 0,05). Pareil pour la deuxième relation, nous signalons l’absence d’une relation de modération entre l’agilité organisationnelle et la détection d’opportunités (β = −0,008, p > 0,05) chez les entreprises TIC. Concernant le reste de l’échantillon, les résultats font apparaître une modération négative sur la première relation (β = −0,167, p > 0,01), mais positive sur la deuxième (β = −0,167, p > 0,01). D’un point de vue managérial, cela signifie que l’incertitude liée à l’environnement externe préoccupe moins les PME TIC, qui se prémunissent contre les risques grâce à des processus et outils technologiques adaptés ainsi qu’un modèle d’affaires flexible capable de répondre aux besoins des clients plus rapidement, que les autres entreprises. Contrairement aux PME TIC, les PME des autres secteurs disposent d’une protection minimale contre les risques liés notamment à la hausse des prix des matières premières ou encore les difficultés liées au transport et à l’approvisionnement. Ces entreprises disposent de caractéristiques spécifiques, comme une forte dépendance des parties prenantes ou encore un management rigide et trop informel qui ne leur permettent pas de développer des défenses aptes à les protéger totalement contre les nouvelles menaces.
4. Discussion et conclusion
L’objectif de cette recherche est double. Le premier consiste à tester l’impact des capacités digitales et l’agilité organisationnelle sur la détection d’opportunités internationales. Le second est d’examiner le rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement sur ces relations. Au moyen d’un échantillon de 146 PME tunisiennes, nous montrons que les capacités digitales et l’agilité organisationnelle comme capacités dynamiques internes améliorent le processus de détection d’opportunités dans un contexte international. De plus, nous constatons que dans un environnement stable et certain, les capacités digitales renforcent davantage la capacité des PME à détecter plus d’opportunités internationales.
4.1. Contributions théoriques
Sur le plan théorique, les résultats de cette étude contribuent à l’enrichissement de la littérature sur l’entrepreneuriat digital et le management des PME. Premièrement, depuis quelques années, les chercheurs s’intéressent de plus en plus au rôle de la transformation numérique dans le développement des stratégies entrepreneuriales (Kreuzer et al., 2022). Bien que des recherches récentes ont démontré l’importance de l’adoption de solutions digitales dans le processus d’internationalisation (Denicolai, Zucchella et Magnani, 2021 ; Vadana, Torkkeli, Kuivalainen et Saarenketo, 2020), très peu de recherches ont étudié le rôle des capacités digitales dans le processus de détection d’opportunités dans le contexte des PME. En expliquant comment les capacités digitales des PME contribuent d’une manière importante à l’identification et à la saisie des opportunités entrepreneuriales à l’international, nous répondons à l’appel de plusieurs chercheurs, notamment Coviello et Tanev (2017), Paul et Rosado-Serrano (2019) et Vahlne et Johanson (2017), qui évoquent la nécessité de mener d’autres recherches pour affiner notre compréhension de la relation entre la digitalisation et l’internationalisation dans le champ de la recherche sur l’entrepreneuriat international. Deuxièmement, en s’appuyant sur les théories des capacités dynamiques (Teece et Pisano, 1994 ; Teece, Pisano et Shuen, 1997) et de l’entrepreneuriat international (Oviatt et McDougall, 1994 ; Reuber, Knight, Liesch et Zhou, 2018 ; Tabares, Chandra, Alvarez et Escobar-Sierra, 2021), nos résultats, qui sont conformes à la littérature, montrent que l’agilité organisationnelle détermine l’identification et la saisie des opportunités entrepreneuriales dans un contexte international (Cheng, Zhong et Cao, 2020). Ce résultat n’est d’ailleurs pas surprenant vu l’importance de l’agilité organisationnelle dans la recherche et l’exploitation des connaissances nécessaires dans le processus d’internationalisation (Cegarra-Navarro, Soto-Acosta et Wensley, 2016). Nous soulignons que l’utilisation de la théorie des capacités dynamiques ne se limite pas à appréhender la survie et l’échec des PME dans un environnement changeant, mais permet également de mieux expliquer la vitesse d’apprentissage. Nous considérons que l’agilité organisationnelle est une capacité dynamique qui offre aux PME les moyens de réagir rapidement aux différents contextes en s’adaptant à leurs compétences clés. En avançant cette idée, nous appuyons les travaux antérieurs sur la théorie des capacités dynamiques (Shin et al., 2015 ; Teece, Peteraf et Leih, 2016 ; Zitkiene et Deksnys, 2018). Nous contribuons ainsi à la littérature sur l’agilité organisationnelle dans un contexte d’entrepreneuriat international qui néglige encore les PME et se concentre plutôt sur les grandes entreprises (Jafari-Sadeghi et al., 2022). L’agilité organisationnelle peut aider les PME à surmonter les défis liés à l’insuffisance des ressources financières, matérielles et humaines et au manque d’informations disponibles afin de rechercher d’autres moyens pour développer une croissance internationale. Troisièmement, cette recherche a pour objectif de mieux comprendre la stabilité du lien entre ces capacités digitales et l’aptitude de l’entreprise à détecter des opportunités internationales dans un contexte risqué et turbulent. Notre étude met cette relation causale à l’épreuve du rôle modérateur de l’incertitude de l’environnement. Les résultats montrent qu’un environnement incertain et turbulent, comme celui que l’on vit actuellement avec la crise sanitaire de la Covid-19, peut affaiblir la relation entre la transformation digitale et la détection d’opportunités internationales. Ainsi, nous étendons la théorie de l’entrepreneuriat international en soulignant le rôle de l’incertitude dans le processus d’internationalisation et la nature de l’impact des capacités internes telles que les capacités digitales sur ce processus. Si des recherches dans le champ de l’entrepreneuriat international ont déjà abordé la question de l’incertitude du contexte dans le processus d’identification d’opportunités (Alimadadi, Bengtson et Hadjikhani, 2018 ; Magnani et Zucchella, 2019), aucune à ce jour n’a examiné comment cette incertitude conditionne l’impact du digital sur le processus de détection d’opportunités internationales. Un résultat important qui mérite d’être souligné concerne l’absence d’une relation de modération significative entre l’incertitude de l’environnement et l’agilité organisationnelle sur la détection des opportunités. En effet, une entreprise disposant d’une agilité organisationnelle peut s’adapter rapidement aux changements environnementaux. Donc, l’incertitude de l’environnement ne représente pas forcément une menace ou un danger pour les entreprises engagées dans un processus de détection d’opportunités internationales. Certes, les recherches précédentes ont pu révéler, dans le champ de l’entrepreneuriat international, une modération significative de l’incertitude (Zayadin et al., 2022). Ainsi, Mahnke, Venzin et Zahra (2007) soulignent le rôle de l’incertitude entrepreneuriale sur la détection des opportunités internationales. En effet, les auteurs ont identifié trois incertitudes liées à la communication, aux comportements et aux valeurs rencontrées qui impactent la détection des opportunités internationales. En revanche, ils n’ont pas introduit le concept d’agilité organisationnelle qui, à notre sens, explique la divergence de nos résultats par rapport aux recherches antérieures. Nos travaux enrichissent de fait la discussion puisque nous apportons une vision complémentaire à celle proposée. Enfin, une dernière contribution concerne l’exploration du contexte tunisien, qui demeure peu étudié dans la littérature sur l’entrepreneuriat international. L’analyse des pays émergents, notamment les entreprises nord-africaines, propose une vision complémentaire des recherches conduites dans les pays développés pour mieux comprendre l’entrepreneuriat international dans le monde.
4.2. Contributions managériales
Sur le plan managérial, les résultats de cette recherche suggèrent que la présence des aptitudes et compétences digitales peut contribuer au développement de la capacité des PME à identifier des opportunités internationales. La société d’audit et de consulting Deloitte[5] (2016) considère, dans une étude récente sur la transformation digitale en France, que les PME françaises digitalisées sont trois fois et demie plus susceptibles d’exporter et quatre fois plus susceptibles de vendre à l’international que la moyenne des PME françaises. Les résultats empiriques de cette étude soulignent l’importance d’investir dans l’intégration et l’optimisation des solutions issues de la transformation digitale afin de développer le processus d’internationalisation de l’entreprise. Pour maintenir la compétitivité dans leur environnement, les dirigeants des PME doivent être proactifs en matière de transformation de leur entreprise. Ils devraient considérer la transformation de leur entreprise en une structure connectée pour améliorer l’efficacité de leur activité internationale. Cela passe par exemple par l’optimisation de leur présence sur Internet, notamment les réseaux sociaux, et la mise en place des outils digitaux tels que les logiciels de gestion de la relation client. Deuxièmement, l’agilité organisationnelle est l’un des déterminants clés de la capacité de l’entreprise à identifier des opportunités internationales. Les praticiens ont besoin de réinventer leurs pratiques managériales en mettant en place une structure agile solide. Comme la transformation digitale, la transformation agile nécessite une préparation en amont en assurant, par exemple, des formations pour les collaborateurs ou en mettant en place une veille constante afin d’identifier de nouvelles méthodes. Troisièmement, notre étude fournit aux dirigeants et entrepreneurs une nouvelle combinaison de deux facteurs, encore non explorés conjointement dans la littérature, qui pourraient déterminer et favoriser la détection d’opportunités dans les PME. Instaurer un « double comportement » agile et digital en PME pendant une période de crise permet à ces entreprises de créer de la croissance tout en réduisant le potentiel de risque lié à la turbulence de l’environnement international. Mettre en place cette double stratégie dans un environnement incertain permet aux PME de réduire les coûts de transaction en offrant un meilleur accès à l’information et une communication entre le personnel, les fournisseurs et les réseaux plus performante. L’adoption de cette double stratégie permet également aux PME d’avoir la possibilité de générer des données et d’analyser leurs propres opérations de nouvelles manières plus rapidement que les concurrents, afin d’améliorer leurs performances internationales. Enfin, cette recherche soulève des recommandations importantes en ce qui concerne la gestion d’un environnement incertain et risqué. Nos résultats montrent que l’incertitude perçue sur le marché n’impacte pas la relation entre, d’une part, l’agilité et les capacités digitales et, d’autre part, la détection d’opportunités internationales chez les PME TIC. La technologie associée à de fortes capacités managériales agiles joue un rôle essentiel en faveur de ces entreprises pour subsister en période d’incertitude, en fournissant notamment à leurs clients et à leurs salariés les ressources nécessaires pour travailler de manière productive. Concernant les PME dans les autres secteurs, il convient de repenser leur modèle d’affaires en investissant dans le numérique pour assurer la continuité de leurs activités pendant les périodes de crise. Cela passe, concrètement, par un investissement plus important dans l’architecture informatique, notamment le cloud ou l’edge computing (informatique en périphérie de réseau), dans le but de développer son évolutivité tout en restant à proximité de leurs communautés connectées.
4.3. Limites et voies futures de recherche
Signalons à présent que notre travail de recherche n’est pas exempt de limites. Une première limite est liée à la taille de l’échantillon. En effet, 146 observations de PME tunisiennes permettent certes de vérifier les hypothèses théoriques développées dans notre recherche, mais la généralisation des résultats nécessite une taille beaucoup plus importante. Une future recherche pourrait ainsi mobiliser plus d’entreprises de différentes tailles, qui appartiennent à plusieurs secteurs d’activité, ou mener éventuellement cette étude sur un échantillon de PME de différents pays, ou encore faire une étude comparative avec des PME d’un pays plus développé comme la France par exemple, pour comprendre les différences dues au contexte institutionnel et/ou culturel. Une deuxième limite est liée à la collecte de données en un seul temps (c’est-à-dire des données transversales). En effet, ce type de données ne tient pas compte de l’évolution des mesures dans le temps. De fait, les recherches futures gagneraient à développer des études quantitatives longitudinales. La troisième limite de cette étude réside dans le fait que l’échantillon porte sur les PME internationalisées sans faire la distinction entre les « nées mondiales » et les entreprises exportatrices traditionnelles. Des résultats différents pourraient être observés quant au rôle des capacités internes, telles que les capacités digitales ou les compétences d’agilité, dans le processus d’internationalisation. Cette recherche pourrait donc être répliquée dans le cadre d’une étude comparative pour détecter une éventuelle différence entre les deux types d’entreprises internationalisées : PME « nées mondiales » contre PME exportatrices traditionnelles. Quatrièmement, il serait intéressant d’introduire le profil des entrepreneurs (aversion au risque, capacité à prendre les décisions, etc.) comme une variable de contrôle pour mieux cerner le rôle de la dimension humaine par rapport à l’impact de l’incertitude environnementale. Enfin, parmi les autres voies de recherche futures, nous avons constaté que l’incertitude de l’environnement n’est pas perçue de la même façon entre les dirigeants des PME technologiques et les dirigeants des autres PME. Ce constat mériterait une recherche approfondie, via une analyse multigroupes, sur la réaction des PME de chaque secteur pendant une période de forte incertitude.
Parties annexes
Annexes
Annexe 1. Description des échelles de mesure
Annexe 2. Analyse exploratoire (indice KMO et test de Bartlett)
Notes biographiques
Waleed Omri est enseignant-chercheur en entrepreneuriat à Excelia Business School (La Rochelle). Il est titulaire d’un doctorat en sciences de gestion de l’Université de Limoges (France). Ses recherches portent sur l’entrepreneuriat international, le management de l’innovation et le développement durable en PME.
Hedi Yezza est professeur à l’Université de Sherbrooke (Canada). Il détient un doctorat en sciences de gestion de l’IAE de Paris, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ses travaux s’appuient sur la gestion des entreprises familiales et le capital social.
Audrey Bécuwe est docteure en sciences de gestion, maître de conférences HDR et hors-classe à l’IAE de l’Université de Limoges (France). Elle est membre de l’équipe de recherche CREOP UR 15561. Ses travaux portent sur la GRH et les comportements organisationnels.
Notes
- [1]
-
[2]
Traduction du texte original par les auteurs : « the cognitive and behavioural processes associated with the creation and exchange of value through the identification and exploitation of opportunities that cross national borders ».
-
[3]
Traduction du texte original par les auteurs : « the act or process of perceiving or finding a favourable set of circumstances to create value ».
-
[4]
Traduction du texte original par les auteurs : « these international entrepreneurs were seeking to identify and exploit new opportunities through the adoption of internet capabilities ».
- [5]
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