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Cet ouvrage rassemble des contributions qui ont été présentées en 2009 lors d’un colloque organisé par le Centre d’excellence sur l’Union européenne de l’Université de Dalhousie à Halifax.
Son objectif est de comparer les différents mécanismes de coopération ou d’intégration régionale dans le monde. Le point de référence principal est l’Union européenne. Les différents auteurs s’efforcent de comparer avec elle d’autres formes d’intégration. Sont ainsi pris en considération, notamment, l’Asia-Pacific Economic Cooperation (apec), l’Association of Southeast Asian Nations (asean), l’African Union (au), le Central American Free Trade Agreement (cafta), la Caribbean Community (caricom), le Free Trade Agreement of the Americas (ftaa), le Mercado Comun del Sur (mercosur), le North American Free Trade Agreement (nafta), la South Asian Association for Regional Cooperation (saarc).
Cette liste impressionnante, qui n’est encore que partielle, montre l’ampleur de la tâche et la difficulté d’une approche cohérente. De plus, les auteurs viennent de différentes disciplines, cultures et approches théoriques. Cela produit inévitablement un résultat, certes enrichissant et diversifié, mais malheureusement très éclaté.
D’autant que, comme le souligne à de nombreuses reprises son maître d’oeuvre, Finn Laursen, on compare des institutions qui n’ont pas grand-chose en commun. L’Union européenne inclut en effet non seulement une zone de libre-échange, mais également une union douanière, un marché intérieur, une monnaie unique (pour dix-sept de ses membres), une agriculture intégrée, un espace de circulation sans frontières pour les personnes et des éléments importants de politique intérieure et extérieure. De plus, comme le souligne Laursen, seule l’Union européenne a créé des organes supranationaux comme la Commission européenne ou la Banque centrale européenne.
Par contraste, les autres mécanismes d’intégration contiennent au mieux une zone de libre-échange, et, encore, celle-ci ne fonctionne pas toujours (mercosur) ou ne touche que partiellement les barrières non tarifaires (nafta). Se pose donc la question, pour reprendre l’expression populaire, de savoir si l’on n’est pas en train d’additionner des pommes à des poires. En d’autres termes, y a-t-il un sens à comparer des formes d’intégration régionale qui ont si peu en commun ?
Pour donner davantage de cohérence à son ouvrage, Finn Laursen a rédigé une introduction et une conclusion substantielles. On y trouve non seulement un résumé de chacun des chapitres des différents auteurs, mais également des considérations théoriques et structurantes qui permettent d’accroître l’unité de l’ensemble.
Son introduction pose cependant un problème car, comme l’auteur l’indique lui-même, elle reprend largement celle d’un autre livre qu’il avait publié en 2003 chez le même éditeur et qui portait un titre presque semblable. Par conséquent, on peut légitimement se demander si l’on peut utiliser une même introduction pour présenter des textes totalement différents.
Dans sa conclusion, Finn Laursen tente de construire une tentative d’explication du succès de l’ue, des échecs de l’asean et du mercosur ainsi que du bilan mitigé du nafta. Pour ce faire, l’auteur avance trois facteurs explicatifs (variables indépendantes) : l’asymétrie de puissance modérée, le haut degré d’interdépendance et les idées directrices de Monnet.
« L’ asymétrie de puissance modérée » signifie que l’Europe a eu la chance de ne pas avoir de puissance écrasante comme les États-Unis en Amérique du Nord, le Brésil en Amérique du Sud ou la Chine en Asie. Cette théorie explicative, que Finn Laursen reconnaît avoir empruntée à Walter Mattli, contient certes une part de pertinence, mais elle néglige toutes les spécificités et toute la complexité du développement chaotique de l’Union de 1950 à nos jours.
« Le haut degré d’interdépendance » veut dire que les pays européens avaient davantage d’échanges économi- ques et humains que les pays d’Asie et d’Amérique du Sud et donc davantage d’incitations à s’intégrer. Cet argument n’est cependant que partiellement convaincant. D’une part, parce que des pays interdépendants comme la Suisse et la Norvège peuvent très bien rester rebelles à une intégration poussée du type de celle de l’ue. D’autre part, parce que l’on aurait au contraire pu retourner l’argument en avançant la proposition que c’est parce qu’ils n’étaient pas assez interdépendants que les pays d’Asie et d’Amérique du Sud ont encore plus besoin d’intégration que les pays européens.
Enfin, le dernier argument sur « les idées directrices de Jean Monnet » ne convainc guère. D’une part, parce que l’ascendant de Jean Monnet sur les traités de Rome a été relativement faible. D’autre part, parce que l’idéalisme intégrationniste dépassait de loin l’influence de Jean Monnet. Aussi, parce que le rôle des idées en histoire mériterait d’être mieux analysé et sérié.
Par conséquent, l’explication du succès relatif de l’intégration en Europe par rapport aux autres régions du monde ne peut pas être réduite à trois facteurs contestables et trop généralisateurs, mais doit tenir compte d’une myriade d’éléments qui ne peuvent pas être présentés de manière atemporelle.
En conclusion, ce recueil contient des chapitres intéressants qui, pris séparément, contiennent tous des réflexions et des analyses stimulantes. Mais je ne recommanderais pas cet ouvrage pour une introduction didactique de politique comparée aux différents mécanismes d’intégration régionale dans le monde, car les textes sont trop techniques et ciblent trop quelques problématiques bien précises.