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La réponse à apporter à la question du terrorisme est sans contexte une thématique brûlante qui agite la communauté internationale. Ramenée sur le devant de la scène par les attentats du 11-Septembre, cette question se pose néanmoins avec acuité depuis longtemps aux gouvernants. Avec cet ouvrage, les auteurs souhaitent offrir un éclairage nouveau et plus large visant à mettre en lumière toute la complexité du sujet, qui transcende les champs d’études universitaires traditionnels.
La principale innovation de ce livre est certainement la forme qui a été choisie par les auteurs. En effet, il ne s’agit ni d’une monographique envisageant la question à partir d’une discipline, ni d’un recueil regroupant les points de vue émanant de chercheurs d’horizons divers qui, chacun dans un article, présenteraient leur réflexion sur la question. Avec cet ouvrage, nous sommes davantage en présence d’une démarche qui vise à faire dialoguer les opinions de trois auteurs, un philosophe, un juriste et un politologue. De plus, pour éviter que le livre ne se résume à trois parties indépendantes les unes des autres, la problématique a été divisée en quatre grandes sections, à savoir « Terrorism. Causes and Cures » ; « Is Torture an Effective Response to Terrorisme ? » ; « Is International Terrorism an Inevitable Consequence of Globalization ? » ; « Counter-Terrorisme. Public/Social Policy, Social Engineering and Just War ». Ainsi, pour chacune de ces sous-questions (à l’exception de la première et l’on ne peut que le regretter), les trois auteurs présentent leur analyse suivant leur discipline. À titre d’exemple, prenons la deuxième partie de l’ouvrage, qui porte sur l’usage de la torture et son effet sur la lutte contre le terrorisme. Tout d’abord, le politologue Rob Imre explique comment l’utilisation de la torture sur un individu n’a qu’un intérêt limité, estimant que, finalement, son but premier n’est pas tant de soutirer des informations, souvent peu fiables, que d’exercer un efficace contrôle sur la société. Par la suite, le juriste Ben Clarke présente la façon dont la prohibition de la torture a peu à peu acquis un caractère de norme de jus cogens, tout en reconnaissant, à travers des exemples, qu’en pratique la torture est une méthode largement répondue, et cela, en dépit de son interdiction. Il met ainsi en lumière le double discours de beaucoup d’États, qui utilisent la torture tout en défendant sa prohibition absolue. Enfin, le philosophe T. Brian Mooney se penche, en s’inspirant des réflexions de saint Thomas d’Aquin concernant le droit naturel, sur la question de savoir si la torture peut être dans certaines circonstances moralement acceptable. Il prend comme exemple un scénario de bombe à retardement (ticking bomb), où des vies innocentes seraient en jeu. Indéniablement c’est ce troisième éclairage qui est le plus intéressant et qui apporte une plus-value à cet ouvrage. En effet, il est peu courant, dans la doctrine généralement consacrée à cette question du terrorisme, de trouver une réflexion philosophique sur ce phénomène. Réfléchir tout à la fois sur le terrorisme, sur le message qu’il souhaite transmettre et sur la façon dont il l’exprime à l’aune des valeurs humanistes est sans contexte un exercice fascinant qui permet de dépasser la réponse immédiate et forcément incomplète du juriste et du politologue.
Cet ouvrage ne s’adresse probablement pas à des spécialistes de la question du terrorisme, car bien entendu il ne peut prétendre offrir une vision politique, juridique ou philosophique aussi précise que pourrait le faire un ouvrage uniquement consacré à l’une de ces trois disciplines. Cependant, il a le mérite d’inciter le chercheur à dépasser son champ d’études et à s’intéresser à la façon dont le sujet peut être analysé sous un nouvel angle. En cela, il est un premier pas vers une étude interdisciplinaire sur la question. Il n’est cependant pas, et c’est le principal bémol, un ouvrage en lui-même interdisciplinaire, contrairement à ce qui nous est affirmé dans l’introduction. Pour cela il aurait fallu un véritable dialogue entre les trois disciplines. Tout au plus, et c’est déjà bien, il s’agit là d’un livre pluridisciplinaire, qui présente tour à tour la position de chacune des disciplines. Néanmoins, on ne peut s’empêcher de penser que les débats que doivent avoir ensemble Mooney, Imre et Clarke sont certainement plus passionnants que l’exposition de leurs réflexions prises individuellement. Il aurait sans doute été pertinent de réserver une place dans cet exercice pour établir un véritable dialogue entre les trois chercheurs. Ainsi, l’ouvrage laisse quelque peu le lecteur sur sa faim, puisqu’il se termine abruptement, sans une conclusion qui aurait pourtant été l’espace idéal pour mettre en perspective ces trois réflexions.