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Nous passons une partie importante de notre vie au travail, pour le meilleur et pour le pire. Or, le bien-être y est un facteur majeur de satisfaction et de productivité. Nous utilisons ici les avancées de la psychologie positive pour viser à l’amélioration des pratiques de gestion du personnel dans le but de favoriser le bien-être et la productivité en bibliothèques.

Pour ce faire, nous nous intéresserons d’abord brièvement à la psychologie positive afin d’établir une compréhension commune du cadre théorique. Nous regarderons ensuite en quoi la satisfaction en milieu de travail est pertinente. Puis, nous aborderons quelques éléments clefs de la psychologie positive aux fins de notre recherche. Enfin, nous établirons les façons de favoriser le bien-être au travail, notamment grâce à divers types d’intervention en amont de situations managériales courantes.

Qu’est-ce que la psychologie positive ?

La psychologie positive étudie l’impact du bonheur, de la satisfaction à l’égard de la vie et du bien-être (concepts utilisés ici de façon synonymique) tant chez les individus que dans les milieux de travail ou les collectivités civiles. Ce courant de la psychologie existe depuis plus d’une vingtaine d’années. La psychologie positive nous outille pour atteindre davantage de satisfaction au quotidien et dans nos milieux de travail en identifiant des dispositions et des habitudes jugées propices au bonheur.

Pertinence de la satisfaction à l’égard de la vie en milieu de travail

Quel est l’apport de la satisfaction en milieu de travail ? Nous pouvons dire qu’il est important à plus d’un titre.

D’une part, nous notons un effet de la satisfaction sur la qualité de vie des employés et sur l’amélioration soutenue de la productivité. Il en résulte une meilleure atteinte des objectifs de la bibliothèque. La documentation scientifique démontre que la productivité au travail est améliorée et qu’elle est influencée par la réduction de l’absentéisme (volontaire ou involontaire). Ce dernier point est notamment appuyé par le fait qu’une meilleure qualité de vie corrèle avec une meilleure santé physique et mentale. De plus, un environnement agréable favorise la créativité, clef pour l’innovation et la réalisation de soi au travail.

D’autre part, un tel environnement de travail améliore aussi la résilience face aux changements, en plus de favoriser la collégialité et la collaboration. Ces conditions entravent la propagation d’animosité. Lorsqu’il y a conflits, la psychologie positive encourage leur résolution par des procédés qui permettent de rétablir un lien de confiance. Ainsi, un milieu de travail positif alimente en lui-même des relations plus satisfaisantes.

En fin de compte, lorsque les gestionnaires adoptent le bien-être comme compas décisionnel, les choix tendent vers le bien-être de la communauté.

Achor (2013) résume clairement les avantages d’opter pour le bonheur : les personnes heureuses, déjà satisfaites de leur vie, sont aussi plus énergiques, productives et en santé. Ces constatations nous encouragent à développer la question de la satisfaction, car tous les partenaires en bibliothèques y gagnent : les employés sont plus heureux et se réalisent au travail, les objectifs de la bibliothèque sont atteints et sa mission, mieux réalisée.

Cet engagement à l’égard du bien-être est encore plus rentable au sein du milieu dans lequel les bibliothèques s’inscrivent : nous observons son impact non seulement sur les équipes de travail, mais aussi sur les usagers et la communauté. Les bibliothèques jouent un rôle majeur dans leur milieu et les répercussions de l’adoption du bien-être comme valeur cardinale pourraient s’avérer importantes. Les bibliothèques peuvent elles-mêmes devenir des agents de changement.

Le bonheur à portée de main

Un facteur déterminant dans la psychologie positive veut que nous ayons tous une capacité individuelle de contrôle et d’action sur notre satisfaction à l’égard de la vie.

Les chercheuses états-uniennes Warner et Vroman (2011) ont identifié trois facteurs essentiels influençant notre satisfaction à l’égard de la vie :

  • les circonstances de la vie (p. ex. mariage heureux, emploi stable) ;

  • une prédisposition génétique et ;

  • l’implication dans des activités qui augmentent le bonheur (p. ex. relations saines, exercices physiques, activités spirituelles).

Nous pouvons donc avoir une maîtrise sur notre satisfaction à l’égard de la vie. Ce constat est crucial pour motiver nos équipes et nous motiver nous-mêmes afin de poursuivre dans cette voie.

Le bonheur est à portée de main, il est possible d’accroître la satisfaction à l’égard de la vie. Pour y arriver, il faut d’abord changer nos perspectives. Achor (2013) propose différents exercices qui remettent en cause nos raisonnements habituels. Nous connaissons le questionnement classique : sommes-nous optimistes ou pessimistes ? Le verre est-il à moitié plein ou à moitié vide ? Si nous voyons un verre à moitié plein, nous sommes considérés comme des optimistes. Si nous le percevons à moitié vide, peut-être sommes-nous plutôt pessimistes. Mais Achor (2013)nous demande de nous ouvrir à d’autres perspectives, à d’autres solutions et à plus de créativité : pourquoi ne pas nous intéresser au pichet d’eau qui est à côté du verre ? Voilà une perspective créative qui ouvre à plus de possibilités. Ainsi, notre attention ne se porte plus sur un manque, mais plutôt sur une ressource. La perspective est différente. Nous pouvons estimer que ce changement peut enrichir d’autres situations.

Trouver des perspectives différentes pour comprendre notre réalité permet d’ajuster notre compréhension du monde et d’acquérir plus de flexibilité face à nos émotions et aux réponses que nous leur apportons. Si un collègue nous ignore un matin, nous pouvons nous imaginer qu’il est désagréable, qu’il ne nous respecte pas, qu’il n’a pas bu son café, qu’il passe un matin difficile, qu’il est préoccupé par autre chose, qu’il a un souci personnel ou qu’il ne nous a pas entendu. Selon ce que nous percevons, notre réaction variera. Le cours des événements aussi. Si une situation nous préoccupe, il faut en discuter avec les personnes concernées afin de gérer les faits réels, et non des perceptions multiples et volatiles. Nous obtiendrons au moins une compréhension partagée des événements. Peut-être travaillons-nous avec un collègue désagréable, cela arrive, mais peut-être notre collègue est-il simplement distrait.

Achor (2013) propose différents moyens d’améliorer notre appréciation de la vie au-delà de la multiplication des perspectives à utiliser.

Nous gagnons tous à établir des objectifs réalisables et clairs, qui offrent une direction et des moyens pratiques pour y parvenir. Avoir des buts est à la base du bonheur. Leur réalisation offre un sentiment d’accomplissement et d’efficacité, lequel nourrit aussi la satisfaction. Dans la même veine, il est pertinent de fixer des sous-objectifs raisonnables conduisant à de nouveaux projets dont la réussite procurera un sentiment de succès.

Il est important de gérer les voix négatives intérieures et extérieures si nous voulons être heureux. Notre discours intérieur et celui de notre entourage ont un impact important sur nos perspectives ainsi que sur notre vision de nous-mêmes et du monde. Le bien-être ne peut croître que dans un milieu qui lui est favorable.

En travaillant sur notre propre bonheur, nous améliorons notre influence sur notre entourage : les équipes de travail, les personnes supervisées, les collègues et l’administration. Comme mentionné plus haut, notre bien-être peut aussi avoir un effet ricochet sur les abonnés. Le milieu est perçu comme un endroit où il est possible de se réaliser, où il fait bon être. Cela influence les usagers, qui eux-mêmes, en retour, influencent leur environnement. Le bonheur est non seulement atteignable, il est aussi contagieux. Par nos actions et nos paroles, nous sommes tous des agents de changement (Gielan 2015).

Bâtir du bien-être au travail

Nous avons établi que favoriser le bien-être au travail est une mission valable. Pour y arriver, plusieurs moyens sont à notre portée.

Le coaching (guidance) est un type d’intervention bien connu basé sur les principes de la psychologie positive. Nous intervenons selon les principes propres au domaine lorsque nous misons sur des forces (les nôtres et celles de la personne conseillée) en utilisant une narration positive (par exemple, en mettant de l’avant les avantages d’un changement) et en encourageant la résilience et le bien-être (Bakker 2013 ; Gielan 2015).

Un autre type d’intervention est l’enrichissement du capital psychologique positif de chacun. Solidifier ce capital implique une amélioration ou un renforcement de l’efficacité (savoir que l’on est en mesure de réaliser une tâche avec compétence, dans un délai raisonnable), de l’optimisme, de l’espoir et de la résilience.

Un solide capital psychologique aura des effets positifs sur le comportement, la productivité et l’engagement au travail d’un employé.

Nous pouvons aussi intervenir en utilisant les concepts de la psychologie positive dans des pratiques courantes. Pensons notamment à l’utilisation des forces, à l’acquisition de nouvelles connaissances, à un travail porteur de sens pour l’employé, à l’utilisation d’un langage dynamique (p. ex. reconnaissance et mise en valeur des succès), à la mise en place de conditions de travail qui favorisent l’équilibre entre défis et habiletés, à la résilience et au bien-être (Bakker 2013 ; Gielan 2015).

De même, utiliser une narration positive offre un terreau fertile aux relations et aux émotions de qualité. Un moyen de transmettre cette perspective favorable est d’utiliser un power lead, en personne, au téléphone ou en réunion. Cela veut dire mener ses interactions avec optimisme et même avec enthousiasme. Par exemple, répondre au téléphone en disant « Bon après-midi, Valérie à l’appareil » ou commencer une réunion en félicitant quelqu’un pour une réussite ou un bon coup donne le ton et une lancée dynamique à la rencontre.

D’autres types d’action sont aussi à notre portée en tant qu’agents de changement. Nous pouvons favoriser des activités individuelles enrichissantes chez les employés, ce qui aura des répercussions dans chaque aspect de leur vie, particulièrement au travail.

Ces actions peuvent favoriser le bien-être sur le plan individuel. Des activités reconnues et acceptées par les chercheurs en psychologie positive sont l’expression de la gratitude ou encore l’exercice de la compassion et de l’altruisme. Les gestes de bonté spontanés (ou actes aléatoires de générosité) sont un chemin prometteur pour gagner du capital social, pour renforcer une communauté (en agissant contre l’anomie sociale), en plus de préparer le terrain à des expériences alimentant notre propre bonheur. Il peut également être bon de faire de l’exercice et de profiter d’un sommeil réparateur.

Nous pouvons encourager de telles activités par des incitatifs concrets sur les lieux de travail. La création d’un groupe de marche sur l’heure du dîner en est un exemple simple.

La culture d’entreprise en elle-même joue bien sûr un rôle essentiel. Quels messages sont envoyés par la direction ? Les administrateurs sont-ils eux-mêmes heureux, à l’aise au travail ou stressés, satisfaits du partage vie-travail (en attendant un équilibre vie-vie) ? Une administration qui soutient ses employés et voit le milieu de travail comme un milieu de vie productif promouvra une qualité de vie propre à l’épanouissement des employés.

Un autre moyen de favoriser le bonheur dans son lieu de travail est de faire connaître ses propres expériences notables. Nous sommes tous influencés par notre entourage et les nouvelles qui nous parviennent. Il n’est pas possible d’éviter difficultés et maux, qui sont une partie intégrante de la vie, mais nous pouvons chercher à faire de la place au bonheur, aux multiples perspectives qui encouragent la persévérance.

Nous aurons compris que le bonheur ne signifie pas exclusivement être en vacances, les pieds dans le sable, mais bien de pouvoir se réaliser dans un environnement sain. Il n’est donc pas question d’installer un mini-golf dans le bureau, mais bien de créer un milieu favorable où chacun peut exploiter ses talents et participer à un grand projet, tel que la mission de la bibliothèque.

Actions possibles des gestionnaires

Les gestionnaires gagnent à être conscients de leur environnement et de leur capacité à influencer le bien-être de leur équipe. Tout d’abord, ils gagnent à reconnaître les forces de leurs employés, de leur équipe et de leur milieu, notamment pour tirer profit de leur utilisation maximale. (Non seulement le milieu de travail se retrouve-t-il alors pourvu de plus de forces, celles-ci étant identifiées, reconnues et publicisées, mais les employés eux-mêmes sont plus heureux puisqu’ils ont l’occasion d’utiliser leurs forces, ils deviennent donc plus productifs. Le milieu gagne alors à plusieurs titres.)

Les gestionnaires ont également avantage à célébrer le travail bien fait et à offrir de la rétroaction, ou du feedback (Linley 2010). Ce faisant, les employés sont valorisés et les attentes sont calibrées – ce qui est attendu du milieu est exemplifié. L’étape de la rétroaction est importante. D’une part, elle offre une reconnaissance méritée. D’autre part, elle indique au groupe quelle est la norme d’un travail exemplaire. Autrement dit, les attentes sont renforcées et les succès, célébrés. « The right employer can create conditions that are conducive to happiness. » (Ben-Shahar 2007, 99)

Plusieurs circonstances managériales présentent l’occasion de renforcer la satisfaction des employés. Les évaluations ou les rencontres annuelles sont des moments particulièrement propices à un recadrage positif et à la réappropriation d’événements grâce à une interprétation positive.

Ce sont aussi des moments propices pour s’assurer que les employés se réalisent à travers leur travail, sachant que celui-ci est porteur de sens et qu’il facilite un équilibre entre défis et habiletés (Harter & Blacksmith 2010).

La désignation d’objectifs mesurables est un facteur important pour la satisfaction – cela permet d’avoir un sens du succès et de l’efficacité. Les objectifs prennent la forme de tâches découlant de la mission de la bibliothèque. Ils mènent à un sentiment de réalisation.

Autant que possible, les tâches gagnent à favoriser l’expérience optimale (le flow), ce sentiment d’engagement et de passion dont l’étude a fait la renommée du chercheur Csikszentmihalyi (1989 ; 2003). Dans le même sens, le choix et la complétude des tâches permettent à chaque employé d’exercer son influence et d’avoir un sentiment de satisfaction. Pouvoir accomplir des tâches importantes permet d’ancrer le travail dans ses propres valeurs et objectifs de vie. Finalement, l’utilisation d’une force au quotidien donne un sentiment d’accomplissement et de valorisation à la personne qui l’exerce. Autrement dit, la réalisation de soi au travail à travers des tâches qui sont cohérentes avec ses propres valeurs permet d’obtenir de la satisfaction, car le travail est perçu comme un lieu d’accomplissement personnel. Lorsque les valeurs et les besoins des travailleurs et des établissements se rejoignent, tout le monde est gagnant, tant sur le plan de la productivité que sur celui de la satisfaction (Ben-Shahar 2007).

Créer un milieu de travail positif pour un individu implique plusieurs éléments. L’individu est encouragé à devenir le meilleur qui soit, à se connaître et à se conduire de manière exemplaire (notamment par l’autorégulation des émotions et des comportements). Il apprécie ses forces et les met à contribution au travail. Il apprécie aussi les efforts de ses collègues. Cet individu trouve un sens dans l’engagement, dans le contentement du travail (flow) et du défi qu’il représente. Un milieu agréable permet à l’employé de trouver un sens et un but à sa carrière et de poursuivre son évolution professionnelle. Finalement, un milieu positif est un environnement qui soutient le perfectionnement des employés (Davis 2010).

Les gestionnaires jouent un rôle crucial dans le développement d’un milieu de travail positif, là où les employés s’accomplissent et où la bibliothèque atteint ses objectifs. Les dirigeants donnent le ton quant à l’atmosphère de travail (Russo-Netzer & Ben-Shahar 2011), notamment en favorisant des émotions positives et une culture d’apprentissage (Marianetti & Passmore 2010). Le travail collaboratif augmente grâce à des relations sociales enrichissantes, à la générosité et à la compassion (Witvliet 2011). Dans cette même perspective, mettre de l’avant la présence consciente (ou mindfulness) comme valeur d’entreprise favorise la satisfaction au quotidien (Marianetti & Passmore 2010). Finalement, un autre élément clef est la communication au sein de l’organisation et la consultation des équipes (Higgs 2010). Par exemple, en période de changement, il est recommandé de communiquer régulièrement avec son équipe afin de lui transmettre de l’information, mais aussi afin de prendre connaissance des propositions, des questions et des perspectives imaginées par les corps de travail. De tels échanges permettent de mieux cerner les enjeux.

Situations managériales

Gestion des personnes difficiles

Les bibliothèques ne sont pas exemptées de la gestion des personnes difficiles. Il ne faut en aucun temps accepter les comportements non professionnels. En dépit des réticences à signaler certains comportements, du harcèlement par exemple, il faut agir pour le bien-être de l’ensemble de l’équipe dans le cadre légal prévu. Nous gagnons à démontrer de la compassion dans nos communications. Un outil fondamental est le développement de la résilience, soit la capacité de rebondir après des événements plus ou moins pénibles. Face aux personnes difficiles, Gielan (2015) propose d’utiliser des retraites stratégiques – s’éloigner, physiquement et mentalement, des situations conflictuelles.

Lorsque nous décidons de faire face à une situation dont nous prévoyons les aspérités, nous pouvons choisir le moment, la durée et le lieu des échanges. Autrement dit, nous établissons un plan de match pour atteindre notre objectif (par exemple, obtenir un document), en limitant les trappes, les tracas et les imprévus. Avoir un plan est une condition de base pour exécuter une tâche difficile efficacement et avec le moins de problèmes possible. Nous gagnerons aussi à être accompagnés d’une personne sympathique qui pourra dissoudre les tensions et faciliter la réussite du plan d’intervention.

En temps normal, il sera utile de faire preuve d’une attitude d’ouverture qui favorisera notre propre bien-être de manière à contrer la négativité des personnes difficiles et à attirer l’attention sur ce qui va bien et ce sur quoi nous avons de l’emprise. Il faut aussi considérer le transfert d’employés vers d’autres services ou même le licenciement de ceux qui ont des agissements antisociaux ou inacceptables (Gielan 2015).

Résolution de conflits

En cas de conflits, il est important de les régler, qu’il y ait réconciliation ou non. Cela s’effectue en s’excusant, en pardonnant et en cherchant à rétablir une relation de confiance. Ces étapes sont importantes, car elles permettent de maintenir les échanges, de réduire le stress et de favoriser le bien-être (Witvliet 2008).

Les émotions positives ouvrent de nouvelles perspectives : elles nous permettent de voir plus de possibilités, d’avoir plus de créativité et de confiance, ce qui mène à négocier de manière plus harmonieuse (Fredrickson 2008).

Cela s’inscrit dans la logique voulant que l’amélioration du vivre-ensemble augmente le capital social (Achor 2010 ; Achor 2013).

Accompagnement dans le changement

L’adaptation au changement est une réalité managériale commune à toutes les carrières. Afin de favoriser l’acceptation des changements, il est important de mettre l’accent sur les avantages attendus et de s’assurer que les équipes sont outillées pour leur faire face (connaissances, habiletés). Il est aussi souhaitable de créer des habitudes et des rituels pour que les changements s’installent et prennent racine (Russo-Netzer & Ben-Shahar 2011). En outre, il est recommandé de communiquer de façon convaincante et claire, de même que de consulter les équipes en place, de les informer des changements à venir et d’identifier les retombées espérées (Higgs 2010).

D’autres facteurs contribuent encore à l’acceptation du changement : résilience et adaptabilité (Gielan 2015), leadership positif (Ben-Shahar 2007), optimisme (Gielan 2015) et capacité à gérer les défis et les succès (Achor 2010).

Gestion du stress

Un autre important défi est la gestion du stress. Pour le relever, nous reviendrons à un élément clef déjà souligné : les perceptions. Nous gagnons à changer notre perception du stress et à le voir comme catalyseur plutôt que comme inhibiteur (Achor 2010). Le stress se nourrit beaucoup de lui-même. En prendre conscience et chercher à l’appréhender correctement permettra de mieux gérer le stress. Si le travail est source de stress, c’est qu’il doit être important. Un travail qui a beaucoup de valeur est une chance énorme. Nous pouvons aussi chercher à calmer notre stress en analysant la situation, en examinant ses conséquences, en identifiant le soutien possible. La connaissance de nos propres priorités facilitera les choix appropriés et la gestion du stress.

Pressions économiques

Finalement, un dernier grand défi auquel il faut faire face aujourd’hui dans le monde de la gestion est la réduction des crédits alloués aux bibliothèques et les pressions économiques diverses. On ne trouvera pas ici de solutions pour regarnir les budgets. Ce que nous proposons, c’est de chercher à maximiser la satisfaction d’une communauté avec les mêmes montants, d’adopter une juste perspective, de prendre des décisions en tenant compte des limites financières et de viser le bien-être de la communauté desservie.

Le Bhutan fournit un exemple modèle d’une telle vision. Ce pays utilise l’indice de bonheur national brut comme mesure de succès plutôt que le produit intérieur brut (PIB). Le bonheur devient alors un indice lors de la prise de décision. Ainsi, la question déterminante pour une initiative à fort impact n’est plus simplement « Est-ce rentable ? », mais plutôt « Est-ce que cela apporte, à long terme, plus de bien-être à la communauté ? ». Ce modèle décisionnel est tout à fait pertinent dans un monde où le « progrès » à tout prix, le développement économique sauvage ne sont plus soutenables, ni pour la planète ni pour les individus. Nous devons tendre vers un modèle où le bien-être holistique et l’atteinte de la satisfaction sans opprimer autrui ni détruire l’environnement est la priorité. Ce questionnement apparaît lorsqu’il est question de projets de développement. Revenons à l’exemple du Bhutan. Devrait-on prioriser un projet hydraulique ou la préservation d’écosystèmes (Musikanski & de Graaf 2013) ? Si le développement économique est le facteur principal, le projet hydraulique sera choisi. Si nous tenons plutôt compte de la qualité de vie (à court, à moyen ou à long terme), nous choisirons alors la protection des écosystèmes.

Conclusion

Toutes les pratiques énumérées ici favorisent la croissance de notre capital social (relations positives avec autrui) et de notre sentiment d’appartenance à un groupe. En tout et pour tout, ces attitudes préparent le terrain à des expériences alimentant notre propre bonheur.

Le présent article se veut une invitation au bonheur, une invitation à réfléchir et à agir afin que les gestionnaires et les employés de bibliothèque favorisent leur propre bien-être et deviennent des agents de changement dans leur communauté. Les effets attendus se manifesteront tant sur le plan de la productivité que sur celui de la qualité du vivre-ensemble. Dès maintenant, il faut encourager l’expression de la gratitude, l’utilisation de power lead et de la narration positive. Dans quelles conditions voulons-nous travailler à l’avenir ? Avec bonheur, avec satisfaction et avec bien-être.