Résumés
Résumé
Dans cette étude, nous examinons le lien entre le sexe du chef de ménage et la relation à la pauvreté du ménage à Ouagadougou. L’analyse en composantes principales et la two step cluster analysis ont été appliquées aux données du Recensement général de la population et de l’habitat du Burkina Faso de 2006. Elles ont permis de comparer les caractéristiques socioéconomiques du groupe des hommes et du groupe des femmes chefs d’un ménage et de distinguer différents sous-groupes les composant. Les résultats indiquent que les femmes jeunes, actives et célibataires ou mariées affichent la plus grande proximité avec le niveau de vie « élevé ». Le groupe des femmes âgées, inactives et principalement veuves présente les conditions de vie les plus médiocres. Les ménages dirigés par un homme tendent eux à se situer plus au milieu, dans la classe moyenne. La situation des femmes chefs de ménage à Ouagadougou se révèle être à l’intersection de la classe sociale et du cycle de vie.
Abstract
Using principal component analysis and cluster analysis on census data, the paper examines the relationship between the gender of the household head and poverty in Ouagadougou. First, we investigated whether the distinction of households based on the sex of the household head sufficiently explains the differences between female and male headed households. Second, we investigated whether households headed by women were systematically more impoverished than those headed by men. The results indicated that of the different sub-categories of household heads identified in the analyses, the sub-group of young, active women, married or single, is the most closely associated with “high standard of living” households. The group composed of elderly, inactive widows has the most unsatisfactory living conditions. These results underline the importance of social class and life cycle in the relationship between poverty and female headed households.
Corps de l’article
Introduction
Les études sur les femmes chefs de ménage servent souvent à faire la preuve de rapports sociaux de sexe inégaux, à travers l’examen des différences dans l’accès et la gestion des ressources matérielles du ménage entre les hommes et les femmes (Chant, 2008). Les femmes chefs de ménage constituent ainsi une catégorie d’analyse majeure des inégalités entre hommes et femmes dans les études quantitatives sur les pays en développement. Par exemple, que ce soit pour la santé ou la scolarisation, la variable « sexe du chef de ménage » est privilégiée dans les études qui mesurent les différences de prise en charge du bien-être des enfants par les hommes et par les femmes (Arends-Kuenning et Duryea, 2006 ; Han, Huang et Garfinkel, 2003 ; Moguerou, 2010 ; Shapiro et Tambashe, 2001 ; Sibanda 2004 ; Townsend, Madhavan, Tollman, Garenne et Kahn, 2002 ; Wakam, 2002 ; Wayack-Pambè et Pilon, 2011).
L’augmentation des ménages dirigés par une femme est parfois présentée comme relevant d’un processus de diversification des structures familiales, celles-ci traduisant une autonomisation des femmes par rapport au patriarcat. Plus souvent, ce phénomène est expliqué comme étant le reflet d’une paupérisation des femmes dans des contextes de crise économique généralisée. L’intérêt pour les femmes chefs de ménage découle ainsi surtout d’un souci de faire ressortir le lien entre les structures familiales qu’elles dirigent et la pauvreté. Le dénuement économique des femmes chefs de ménage est en effet considéré comme l’un des défis du développement (Peters cité par Dungumaro, 2008), du fait de plusieurs facteurs discriminatoires à l’égard des femmes, dont notamment l’accès au revenu (accès au marché du travail formel), la charge de travail dû à leur rôle reproductif (garde des enfants, soins aux membres de la famille) qui les empêche d’exercer une activité économique et enfin parce que, lorsqu’elles sont à la tête d’un ménage, les femmes en sont la plupart du temps les seules pourvoyeuses de ressources, alors que les hommes chefs de ménage ont souvent des contributeurs additionnels, le plus souvent leurs conjointes. Par ailleurs, les inégalités salariales entre les hommes et les femmes sur le marché du travail accentuent le désavantage économique des femmes chefs de ménage.
Cet article, qui a comme cadre d’étude Ouagadougou (capitale du Burkina Faso), compare les femmes et les hommes « chefs d’un ménage » quant à leurs caractéristiques sociodémographiques ainsi que leur situation respective par rapport à la pauvreté. Les données mobilisées sont celles du Recensement général de la population et l’habitat (RGPH) du Burkina Faso de 2006, dont l’exhaustivité permet de s’affranchir du problème des faibles effectifs. À partir des informations sur les caractéristiques individuelles du chef de ménage, celles du logement et celle des biens possédés par le ménage, nous avons cherché à voir dans un premier temps dans quelle mesure le profil social, économique et démographique des femmes chefs de ménage diffère significativement de celui des hommes chefs de ménage. Nous avons examiné par le même moyen les éléments qui fondent l’hétérogénéité de chacun des deux groupes de ménage définis a priori. Dans un deuxième temps, parce que le sujet de la « féminisation de la pauvreté » est une thématique récurrente des études sur les femmes chefs de ménage, nous avons regardé si à Ouagadougou, de façon systématique, les ménages dirigés par une femme étaient plus (ou moins) pauvres que ceux dirigés par un homme.
Nous avons structuré l’article de la façon suivante : nous confrontons tout d’abord les différentes définitions de la notion de femme chef de ménage présentes dans la littérature scientifique aux représentations sociales de la fonction de chef de ménage dans la société burkinabè et ouagalaise. Nous nous intéressons ensuite aux travaux démographiques réalisés en Afrique subsaharienne sur la relation entre la pauvreté et le fait d’avoir une femme à la tête d’un ménage. Après avoir présenté la méthodologie de cette étude, nous en présentons les résultats, puis nous terminons par une synthèse de ses apports à l’analyse de la situation des femmes chefs de ménage à Ouagadougou.
Représentations du statut de femme chef de ménage dans le contexte de Ouagadougou
Les données de l’Enquête démographique et de santé (EDS) de 2010 du Burkina Faso (EDSBF-MICS IV) indiquent que la proportion de femmes de 15 à 49 ans instruites était de 77 % à Ouagadougou, contre 27 % pour l’ensemble du pays. Le pourcentage de celles ayant atteint un niveau de scolarité secondaire était de 35 % dans la capitale, contre 11 % pour l’ensemble du pays, et celles ayant fait des études supérieures représentaient respectivement 6 % et 1 %. Pour la même année, l’indice synthétique de fécondité était de 3,4 enfants par femme à Ouagadougou, contre 6 enfants par femme au niveau national. Enfin, la proportion de femmes occupant un emploi de cadre ou d’employée était de 12 % dans la capitale, comparativement à 6 % dans les autres villes (INSD et ICF International, 2012). Tous ces facteurs sont généralement présentés dans la littérature comme étant favorables à l’autonomie financière des femmes et à leur autorité sur les questions familiales (Kabeer, 2005 ; Kishor, 2000). Pourtant, les données du RGPH de 2006 donnent une proportion de femmes chefs de ménage de seulement 14 % à Ouagadougou, la moyenne nationale étant de 11 %. Le Burkina Faso est ainsi le pays d’Afrique subsaharienne qui affiche la plus faible proportion de femmes chefs d’un ménage. L’explication de la faible représentativité des femmes parmi les chefs de ménage reflète probablement le fait que, encore plus que dans les autres sociétés africaines, ce rôle familial est rarement reconnu aux femmes dans les sociétés burkinabè. Le statut de chef de ménage demeure en effet associé « à l’autorité familiale, définie comme l’exercice d’un pouvoir de gestion des individus et des biens appartenant à la cellule familiale (large ou restreinte) » (Ouedraogo, 1996, p. 101). Même dans le cadre d’un noyau familial limité à un homme, une femme et leurs enfants, cette autorité sur les personnes et les biens n’est pas reconnue aux femmes dans la plupart des ethnies du Burkina Faso, majoritairement régies par le patriarcat, car les femmes sont elles-mêmes des biens dont on peut hériter (Kobiané, 2007).
La définition de ce qu’est une femme chef de ménage ne fait pas consensus parmi les chercheurs. Elle varie selon l’objectif de l’étude, selon si les auteurs mettent l’accent sur l’autonomie résidentielle et la prise de décision ou plutôt sur l’autonomie matérielle. Cependant, outre par l’autonomie résidentielle, les femmes chefs d’un ménage sont la plupart du temps définies à partir de leur état matrimonial. Cette définition répartit les femmes en chef de jure ou de facto (Fuwa, 1999 ; Pilon, Seidou Mama et Tichit, 1997), car elle se fonde sur l’absence dans le ménage d’un partenaire masculin corésident. Le sous-groupe de jure comprend les femmes chefs d’un ménage sans partenaire régulier ou reconnu, à savoir les célibataires, les divorcées/séparées et les veuves, et plus rarement les femmes en union polygynique avec résidence séparée des époux. Le sous-groupe de facto est composé de femmes qui ont un partenaire masculin stable mais qui sont identifiées comme les chefs de leur ménage parce que ce partenaire est durablement absent[1]. À Ouagadougou, les femmes chefs de ménage de facto sont le plus souvent épouses de migrants ou de fonctionnaires en affectation ailleurs. Du fait d’une configuration résidentielle plus individualisée, et parce qu’elles sont plus à même d’être autonomes financièrement et qu’elles sont plus instruites, les femmes à Ouagadougou ont plus de possibilités de s’affirmer comme chef de leur ménage, car elles sont moins susceptibles d’être soumises à certaines coutumes. Par exemple, la pratique du lévirat, qui veut que les jeunes veuves soient rétrocédées à la parentèle masculine de leur défunt mari, est peu pratiquée à Ouagadougou, parce que les femmes peuvent se prendre en charge financièrement, elles et leur progéniture. Les veuves peuvent ainsi contracter des mariages symboliques qui leur garantissent de bons rapports avec la belle-famille ainsi qu’une protection pour elles et leurs enfants (Ouedraogo, 1996). De même, les femmes mariées ont plus de latitude pour éviter la cohabitation avec la belle-famille en cas d’absence prolongée du mari. Dans un contexte général dans lequel l’occupation du statut de chef de ménage par une femme célibataire ou divorcée est négativement perçu, le relâchement du contrôle familial dans la capitale permet à certaines jeunes femmes célibataires, étudiantes ou salariées, d’être dans un ménage autonome qu’elles dirigent. On a ainsi recensé au RGPH de 2006 une proportion de 20 % de femmes célibataires chefs d’un ménage à Ouagadougou, contre 14 % dans les autres villes du Burkina Faso et 3 % en milieu rural.
La référence à l’état matrimonial — et partant à la présence d’un conjoint masculin — pour définir les femmes chefs de ménage ou les ménages dirigés par les femmes est cependant contestée par certains auteurs, qui lui préfèrent la notion de « ménage potentiellement dirigé par une femme », définie à partir du concept de « working head »(Lloyd et Gage-Brandon, 1993). Ce dernier concept tiendrait mieux compte, dans l’attribution de la position de chef de ménage, de la contribution économique de la femme aux ressources du ménage. Pour ces auteurs, les femmes qui soutiennent économiquement leur famille devraient ainsi être considérées comme les véritables chefs de leur ménage, indépendamment de la corésidence avec un conjoint. Cette vision du statut de femme chef de ménage fondé sur un rôle de pourvoyeuse de ressources dans le ménage ne peut se concevoir pour Ouagadougou que si elle n’intègre pas dans cette fonction les aspects liés au pouvoir de décision. En effet, être chef d’un ménage implique non seulement de se reconnaître soi-même comme tel, mais aussi d’être reconnu dans ce rôle par les autres membres du ménage ainsi que par le reste de la société. Le manuel de l’agent recenseur du RGPH de 2006 établit ainsi que les membres d’un ménage « reconnaissent en général, un des leurs comme chef de ménage, indépendamment du sexe de celui-ci » (INSD et ICF International, 2006, p. 12). En Afrique subsaharienne de manière générale, et au Burkina Faso en particulier, comme nous l’avons mentionné plus haut, la position de chef de ménage est considérée comme une prérogative masculine, le rôle prestigieux envisagé pour la femme dans la famille étant celui d’épouse et de mère (Bop, 1996 ; Lecarme, 1992 ; Ouedraogo, 1996 ; Pilon, Seidou Mama et Tichit, 1997). Les femmes identifiées comme chefs d’un ménage parce qu’elles sont les plus grandes contributrices à l’entretien du ménage ne se voient pas nécessairement accorder d’autorité sur les questions familiales. Lorsque le rôle de chef de ménage se confond avec celui de chef de famille, ce dernier a aussi un rôle social, qui va au-delà de sa seule cellule domestique. Or les normes culturelles veulent que certains rituels, même dans la cellule domestique, soient accomplis par les hommes seulement. Des études réalisées en Afrique subsaharienne indiquent que, même lorsqu’elles se considèrent comme pourvoyeuses des ressources du ménage et qu’elles assument les responsabilités qui reviennent traditionnellement aux hommes, les femmes mariées avec un conjoint cohabitant ne se désignent pas comme chef de leur ménage (Mookodi, 2000 ; Wayack Pambè, 2012). En maintenant les égards dus à l’époux, parmi lesquels la non-contestation de son rôle de chef de famille, les femmes à Ouagadougou préservent le statut social acquis par le biais du mariage, statut bien supérieur à celui que peut leur fournir l’instruction, l’activité professionnelle ou le revenu. Aussi, seulement 1,3 % des femmes burkinabè ayant un conjoint présent ont été recensées comme chef de leur ménage au RGPH de 2006. L’opérationnalisation de la notion de femme chef d’un ménage demeure ainsi fortement tributaire du positionnement culturel et social du contexte dans lequel les femmes évoluent. Bien que relevant à l’origine d’une catégorie statistique, les femmes chefs de ménage sont souvent envisagées comme constituant un groupe social. Ce groupe doit alors être défini historiquement et géographiquement, car il ne saurait y avoir de conception universelle et définitive des ménages dirigés par une femme (Goebel, Dodson et Hill, 2010 ; Stewart-Withers, 2011).
Ménage dirigé par une femme et féminisation de la pauvreté en Afrique subsaharienne
Parce qu’elle repose en partie sur des réalités observées dans les pays occidentaux, la notion de femme chef de ménage tend à être assimilée à la monoparentalité féminine, ce qui bien souvent enferme ce groupe dans une vision misérabiliste. Par exemple, la désagrégation du groupe des femmes chefs de ménage selon l’état matrimonial a eu souvent comme objectif de faire ressortir la fragilité économique, sociale et psychologique des ménages monoparentaux féminins sans soutien masculin. Ces ménages sont généralement perçus comme ayant les structures familiales les plus précaires, car ils seraient isolés et économiquement vulnérables. Cette représentation des ménages monoparentaux — si l’on s’accorde sur le fait qu’ils constituent une partie importante des ménages dirigés par les femmes — occulte souvent le fait que leur vulnérabilité relève d’un ensemble de facteurs, comme la vision et la perception des ménages dirigés par une femme dans la société, l’organisation des familles (élargie ou nucléaire) ou encore les systèmes de genre en vigueur dans ladite société. Les ménages dirigés par une femme peuvent effectivement être isolés et économiquement vulnérables, surtout dans les contextes où il est admis que les femmes ne peuvent pas « faire de bons chefs de famille », et cela a été très longtemps le cas dans les sociétés occidentales (Momsen, 2002). Dans nombre de pays en développement et surtout en Afrique subsaharienne, la situation des ménages monoparentaux est plus variée. Elle dépend des mécanismes de prise en charge des systèmes de solidarité de la parenté élargie, mais aussi des croyances religieuses ou encore de la perception négative ou non des mères célibataires dans la société (Stewart-Withers, 2011). Selon les contextes, les ménages de veuves et de mères célibataires peuvent ne pas être dans des situations économiques ou sociales plus vulnérables que d’autres types de ménage(Debdulal et Rafi, 2010 ; Goebel, Dodson et Hill, 2010). Kebe et Charbit (2007) rapportent par exemple qu’au Sénégal, les chefs de ménage monoparentaux, majoritairement composés de femmes, sont les moins affectés par la pauvreté monétaire. Wayack Pambè (2012) constate qu’à Ouagadougou, c’est le caractère isolé du ménage plus que la monoparentalité (à savoir l’absence d’un conjoint masculin) qui expliquerait la plus grande vulnérabilité économique de certains de ces ménages monoparentaux. Elle constate en effet que les ménages monoparentaux isolés composés d’une femme seule avec uniquement ses enfants mineurs ont deux fois plus de risque d’être classés dans la catégorie « pauvre » que les ménages monoparentaux féminins avec une structure familiale de forme élargie.
Malgré la diversité de situation des femmes chefs de ménage constatée dans les études, l’idée s’est répandue, sous la houlette des organismes internationaux, que les femmes sont les plus pauvres parmi les pauvres, et qu’il existe un risque élevé de transmission intergénérationnelle à leurs enfants des désavantages structurels dont elles souffrent dans les ménages qu’elles dirigent (Chant, 2008 ; Medeiros et Costa, 2008 ; Momsen, 2002). La notion de « féminisation de la pauvreté » s’est ainsi imposée, au point de constituer une orthodoxie résistant à toutes les contradictions empiriques qui lui ont pourtant été apportées par diverses études sur le sujet (Chant, 2008 ; Medeiros et Costa, 2008). Les études qui se sont penchées sur la problématique de la pauvreté des ménages dirigés par une femme indiquent en effet que leur surreprésentation dans les ménages les plus pauvres n’est pas un fait constant, mais qu’elle varie d’un pays à l’autre, et qu’elle n’est pas suffisamment systématique pour parler d’une « féminisation de la pauvreté ». De même, les résultats issus de la comparaison du bien-être des enfants entre les ménages dirigés par un homme et ceux dirigés par une femme tendent majoritairement à montrer un avantage pour les enfants à vivre dans la seconde catégorie[2] (Shapiro et Tambashe, 2001 ; Sibanda, 2004 ; Townsend et collab., 2002 ; Wakam, 2002 ; Wayack Pambè et Pilon, 2011).
Nonobstant ce fait, une bonne partie de la recherche sur les femmes chefs de ménage demeure centrée sur les politiques de réduction de la pauvreté susceptibles de venir en soutien à ces ménages (Aghajanian et Thompson, 2013).
De nombreuses études se sont intéressées à la relation des femmes chefs de ménage avec la pauvreté en Afrique subsaharienne, à l’instar d’autres régions en développement (Appleton, 1996 ; Bentley, 2004 ; Dungumaro, 2008 ; Kebe et Charbit, 2007 ; Kimenyi et Mbaku, 1995 ; Locoh et Ametepe, 2004 ; Mberu, 2007 ; Oginni, Ahonsi et Ukwuije, 2013 ; Rogan 2013). Les résultats de ces études ne montrent pas de régularité dans l’association entre le fait d’avoir une femme à la tête d’un ménage et le risque que ce ménage soit pauvre. Dans une revue de la littérature sur le lien entre pauvreté et ménage dirigé par une femme en milieu rural en Afrique australe, O’laughlin (1998) note que, d’un point de vue diachronique, il n’est pas possible de conclure à une augmentation systématique des ménages dirigés par une femme dans la sous-région, ni que tous les ménages dirigés par une femme soient pauvres, ni non plus que tous les ménages pauvres aient une femme à leur tête. Aborder la question dans une perspective transversale ne permet pas non plus d’aboutir à un constat définitif. Par exemple, Dungumaro (2008) observe, en Afrique du Sud, que les ménages pauvres ont trois fois plus de chances d’avoir une femme à leur tête plutôt qu’un homme, et que les ménages dirigés par une femme se retrouvent davantage dans les catégories les plus pauvres. Le même constat est fait, toujours pour l’Afrique du Sud, par Rogan (2013). Il observe aussi que les ménages dirigés par une femme rencontrent un risque plus grand d’être pauvres, parce qu’ils dépendent uniquement de revenus gagnés par des personnes de sexe féminin et, de façon générale, ces dernières sont moins bien rémunérées que les personnes de sexe masculin. Locoh et Ametepe (2004) ont examiné la question de la paupérisation des femmes à Lomé à partir du confort du logement lors d’un changement de résidence quand elles deviennent chef de ménage. Leurs analyses montrent que, de façon générale, quel que soit leur statut familial (chef de ménage ou autre membre), les femmes ont une moindre probabilité que les hommes d’accéder à des logements confortables avec des équipements en eau, électricité et sanitaires. Toutefois, les femmes ne sont pas davantage que les hommes dans des logements dépourvus de tout équipement. Les femmes comme les hommes qui ont accédé au statut de chef de ménage à Lomé lors de leur dernier déménagement ont eu une probabilité significativement plus faible d’accéder à un logement mieux équipé que les hommes et femmes d’autres statuts familiaux ayant connu la même mobilité. Shaffer (1998)montre quant à lui, pour la Guinée, que les indices de pauvreté basés sur la consommation sont plus élevés dans les ménages dirigés par un homme que dans les ménages dirigés par une femme et que les femmes, en particulier celles qui dirigent un ménage, sont sous-représentées dans les ménages pauvres et très pauvres. Les conclusions de l’étude de Kebe et Charbit (2007) sur la vulnérabilité des ménages dirigés par les femmes au Sénégal mesurée à partir de leur relation à la pauvreté monétaire vont dans le même sens. Elles révèlent certes que les femmes sont à la tête de structures familiales plus précaires, du fait à la fois d’une faible dotation en capital humain et d’une faible intégration au marché du travail rémunéré, et que les femmes chefs de ménage apparaissent également plus fragiles, parce qu’elles n’ont pas de conjoint actif présent dans le ménage et parce que leur ménage compte plus de dépendants et d’inactifs. Toutefois, malgré cette somme de handicaps, les femmes chefs de ménage se révèlent moins exposées que les hommes chefs de ménage à la pauvreté monétaire. Kebe et Charbit (2007) expliquent que la faiblesse des revenus générés par leur ménage est compensée par la capacité qu’ont les femmes à mobiliser leurs réseaux sociaux, drainant ainsi vers elles une rente migratoire plus importante. Des études effectuées au Nigéria à partir des données des EDS et utilisant toutes deux une estimation (proxy) par le niveau de vie pour estimer le bien-être du ménage aboutissent, elles, à des résultats contradictoires sur la question de la plus grande pauvreté des femmes chefs de ménage dans ce pays. Mberu (2007), à partir de l’EDS de 1999 du Nigéria, constate que les ménages qui ont à leur tête une femme étant par ailleurs seule adulte de son ménage ont des conditions de vie plus difficiles et sont significativement plus pauvres que les ménages avec deux parents à leur tête. C’est aussi le cas pour les ménages qui ont un homme seul adulte à la tête du ménage, mais l’intensité de la relation est plus faible. Par contre, Oginni, Ahonsi et Ukwuije (2013), qui ont utilisé des données de l’EDS de 2008 du Nigéria, concluent quant à eux que les politiques de lutte contre la pauvreté doivent se focaliser sur les ménages dirigés par les hommes, car ceux qui ont une femme à leur tête ont 25 % moins de risque d’être pauvres.
Il apparaît donc que la variation des résultats en Afrique subsaharienne n’autorise pas de généralisation quant à la situation de plus grande pauvreté des ménages dirigés par une femme comparativement aux ménages dirigés par un homme. Des analyses qui tiennent compte du contexte dans lequel évoluent les ménages se révèlent nécessaires pour comprendre ce qui est spécifique aux femmes chefs de ménage dans chaque pays.
Méthodologie et données
Notre étude est basée sur une analyse des caractéristiques individuelles des chefs de ménage hommes et femmes, ainsi que sur une analyse des caractéristiques du logement et des biens possédés dans les ménages qu’ils dirigent. Les données concernent l’ensemble des 278 141 ménages et chefs de ménage de Ouagadougou enregistrés lors du dernier recensement de la population du Burkina Faso (2006). Les variables individuelles sont notamment le sexe du chef de ménage, son âge, son statut d’activité (exercice ou non d’une activité économique), son état matrimonial et son niveau de scolarité. Les caractéristiques du ménage sont saisies à travers d’une part le type de logement, le statut d’occupation de ce logement, la nature des murs, le moyen utilisé pour l’éclairage et pour la cuisson, la source d’approvisionnement en eau potable et le mode de collecte des ordures et, d’autre part, le nombre de téléviseurs, de téléphones fixes, de téléphones mobiles, de réfrigérateurs, de vélos, de mobylettes et d’automobiles[3]. Le tableau 1 présente la distribution des variables primaires retenues à cette étape.
Comme nous l’avions prévu, la grande majorité des chefs de ménage sont des hommes (85,8 %). Alors que près de la moitié sont de jeunes adultes de 30 à 44 ans (46,3 %), le taux de personnes non scolarisées dans ce groupe est très important (43,8 %). Néanmoins, on observe un nombre relativement élevé de personnes ayant fréquenté au moins l’enseignement secondaire (21,3 %). Plus des deux tiers (76,9 %) des chefs de ménage déclarent être « en emploi ». Le nombre de retraités parmi les chefs de ménage est très faible (4,2 %), ce qui résulte du double fait de la structure par âge des chefs de ménage vue précédemment et de la faible couverture du système de retraite, qui ne s’adresse qu’au secteur formel. Si la plupart des chefs de ménage sont en union monogame (65,6 %), on remarque aussi que près d’un chef de ménage sur cinq (19,1 %) est célibataire. Ceci correspond au positionnement dans le cycle de vie. Certains jeunes hommes ou jeunes femmes chefs de ménage poursuivent encore un cursus scolaire, tandis que d’autres, surtout parmi les hommes, rencontrent des difficultés économiques et attendent des jours meilleurs pour se marier.
Pour ce qui est des caractéristiques du logement, la plupart des chefs de ménage sont propriétaires. En dehors du moyen de cuisson (où le bois simple est majoritaire) et du moyen de gestion des eaux usées (où le recours à la rue est très pratiqué), les logements ont en général des caractéristiques convenables, si l’on se réfère à la nature des murs du bâtiment, à la source d’approvisionnement en eau potable, à la source d’énergie et à la gestion des ordures.
En ce qui concerne les biens d’équipement, les biens les plus possédés par les ménages sont un poste de radio (84,8 %), une bicyclette (71,5 %), un téléphone mobile (61,8 %) et une mobylette (59,5 %). Un peu plus de la moitié des ménages (51,8 %) disposent d’un téléviseur, la possession d’un téléphone fixe ou d’un réfrigérateur (18,3 %) demeurant relativement rare.
Afin de cerner les facteurs qui définissent le mieux les ménages dirigés par un homme et ceux dirigés par une femme, nous avons construit dans un premier temps les profils de l’ensemble des ménages, en prenant en compte les deux catégories de variables décrites plus haut, à savoir les caractéristiques individuelles du chef de ménage et celles du ménage. Plus précisément, l’objectif à cette étape a été de déterminer s’il existe ou non un profil type de ménage suivant le sexe du chef de ménage et, par là, de déterminer les « points de rupture » éventuels entre les deux catégories de ménage. Il s’agit ainsi, en fonction des modalités de chaque variable, de voir ce qui distingue le groupe des hommes chefs de ménage du groupe des femmes chefs de ménage et, en utilisant plusieurs variables, de voir lesquelles sont les plus proches de l’une ou l’autre des catégories de ménage. Nous avons effectué à cet effet une analyse en composantes principales (ACP) sur l’ensemble des variables prises en compte dans l’étude sous leur forme muette (chaque variable primaire a été scindée en autant de variables que ses modalités, et ces dernières ont été codées 1 ou 0). À partir du plan factoriel défini par les deux premières composantes, nous avons isolé les éléments relativement spécifiques définissant chacune des deux catégories de ménage reposant sur le sexe du chef de ménage.
L’étape suivante de notre travail a consisté à évaluer l’homogénéité (ou l’hétérogénéité) au sein de chacun des groupes de chefs de ménage définis en fonction du sexe. À partir des quatre variables individuelles les plus pertinentes caractérisant les chefs de ménage (âge, niveau de scolarité, statut d’activité et état matrimonial), nous avons utilisé la méthode two step cluster afin de dégager les différents sous-groupes qui se ressemblent (partagent le plus d’attributs communs) à l’intérieur de chaque groupe de ménages. La comparaison du nombre de sous-groupes homogènes au sein de chaque groupe d’une part et l’analyse des caractéristiques de chaque sous-groupe d’autre part permettent de saisir encore plus finement les particularités de chacun des groupes de chefs de ménage femmes et hommes.
La troisième étape de notre travail a porté sur la comparaison des conditions de vie des ménages dirigés par un homme et de celles des ménages dirigés par une femme. En faisant l’hypothèse que les ménages dirigés par une femme présentent même dans leur hétérogénéité de moins bonnes conditions de vie que ceux dirigés par un homme, nous avons défini le niveau de vie du ménage en fonction du sexe de la personne qui le dirige[4]. La comparaison des conditions de vie des ménages s’est faite grâce à un indicateur synthétique (proxy) de niveau de vie des ménages suivant une approche non utilitariste. Ainsi, pour construire cet indicateur, nous avons utilisé uniquement les variables relatives aux ménages présentées plus haut, à savoir les caractéristiques du logement et les biens possédés. L’indicateur synthétique de niveau de vie correspond à la première composante issue de l’ACP réalisée sur l’ensemble de ces variables (Kobiané, 1998 ; Moussa, 2010). Nous avons ensuite construit trois classes de niveau de vie des ménages grâce à la méthode des nuées dynamiques. Cette technique présente, par rapport aux n-tiles qui sont très souvent utilisés dans la littérature, l’avantage de constituer des groupes uniquement sur le critère d’homogénéité, c’est-à-dire sans aucune contrainte d’effectifs. Enfin, nous avons défini les différents groupes ou classes à l’aide d’une analyse factorielle des correspondances. Les conditions de vie de chaque sous-catégorie de ménage précédemment déterminée à l’étape 2 sont déduites de sa proximité ou de son éloignement relatif sur le pan factoriel à l’une des trois classes de niveau de vie issues de cette analyse factorielle des correspondances.
Résultats
Être femme et chef d’un ménage à Ouagadougou : conditions et intensité du phénomène
Les résultats de l’analyse descriptive, présentés dans le tableau 2, donnent la distribution des femmes chefs de ménage selon leur état matrimonial et la proportion de femmes chefs d’un ménage dans un état matrimonial donné. Ils fournissent un premier indicateur du mode d’accès des femmes au statut de chef de ménage à Ouagadougou. Nous avons conservé les chefs de ménage tels qu’ils avaient été identifiés lors du recensement, à savoir la personne désignée comme telle par le répondant au questionnaire. Outre une forte participation des femmes au marché du travail (rémunéré), les deux phénomènes qui contribuent le plus à la formation de ménages dirigés par une femme dans les pays développés sont le divorce et la diminution de l’intensité du mariage, avec une augmentation des mères célibataires (Arias et Palloni, 1999). En Afrique subsaharienne, au Cameroun, Tichit (2002) observe que la participation des femmes au marché du travail rémunéré contribue aussi fortement à la formation des ménages dirigés par les femmes dans la capitale administrative. À Yaoundé, les femmes chefs de ménage sont ainsi pour la plupart de jeunes fonctionnaires majoritairement célibataires. La répartition des femmes chefs de ménage selon l’état matrimonial à Ouagadougou montre une situation qui relève à la fois de la tradition, avec une contribution forte des veuves et des femmes mariées dans la population des femmes chefs de ménage, et d’un certain modernisme, par la proportion relativement forte de célibataires et la part non négligeable de divorcées. On peut ainsi y lire que les conditions pour qu’une femme accède au statut de chef de ménage sont d’abord qu’elle soit veuve (40 %), ensuite qu’elle soit mariée à un migrant (26 %) ou qu’elle soit célibataire (22 %). Alors que le mariage demeure une donnée centrale dans la vie des femmes burkinabè, la forte proportion de femmes chefs de ménage célibataires se révèle surprenante, de même que le pourcentage, faible mais substantiel, de femmes divorcées (6 %). En effet, le divorce demeure très stigmatisé dans les sociétés burkinabè et, en cas de séparation, la pratique est plutôt de recueillir les femmes, surtout les jeunes, au sein du lignage paternel (Bertho, 2012).
Un autre élément majeur visible dans le tableau 2 est la faible proportion de femmes chefs de ménage à Ouagadougou (14 femmes pour 100 hommes). Bien que ce pourcentage soit plus élevé que la moyenne nationale, comme nous l’avons déjà relevé, il traduit néanmoins une organisation des systèmes de genre qui, comme dans beaucoup de sociétés traditionnelles, fait toujours de la femme une cadette sociale (Aghajanian et Thompson, 2013). Le nombre de femmes pour 100 hommes dans chaque état matrimonial indique en effet ici que c’est en cas de rupture d’union que les femmes sont le plus susceptibles d’être désignées comme chef d’un ménage. Il transparaît ainsi, dans une société ouagalaise pourtant urbaine, un « conservatisme » dans le fonctionnement de la cellule conjugale, au sein de laquelle l’autorité familiale reste dévolue à l’homme.
Profils socioéconomiques et démographiques des hommes et des femmes chefs de ménage à Ouagadougou
La figure 1 présente les résultats de l’ACP et met en évidence les différences entre les ménages selon le sexe du chef de ménage, à partir des caractéristiques individuelles du chef de ménage et celles du ménage qu’il dirige. Elle montre des profils relativement différents selon si la personne à la tête du ménage est une femme ou un homme.
Dans l’ensemble, les femmes chefs de ménage sont définies davantage par leurs caractéristiques individuelles que ne le sont les hommes de même statut, excepté le fait d’avoir un niveau élevé de scolarité, qui caractérise plutôt les hommes chefs de ménage. Les variables qui décrivent les caractéristiques individuelles (plutôt que celles du ménage) apparaissent plus déterminantes du statut de chef de ménage pour une femme que pour un homme. En outre, en termes de « force » des aspects individuels, les femmes chefs de ménage sont, comme prévu, plus concernées par le divorce ou le veuvage[5] que par tout autre statut sociodémographique. Par ailleurs, elles sont davantage représentées dans la catégorie des chefs de ménage ayant un niveau de scolarité primaire que les chefs de ménage hommes, tandis que la modalité « jamais scolarisé » n’est associée qu’à elles. Enfin, on note que l’exercice d’une activité économique caractérise plus les femmes chefs de ménage que les hommes chefs de ménage.
Si l’on s’intéresse aux caractéristiques du ménage et des biens possédés, on constate que les ménages dirigés par une femme sont ceux qui sont le plus associés aux ménages ayant de mauvaises conditions de vie. Par exemple, tous les ménages n’ayant aucun bien (vélo, mobylette, téléphone mobile, etc.) ou qui présentent de mauvaises caractéristiques en termes de logement (murs en banco, cuisson avec du bois ou autres, etc.) sont de loin plus proches des ménages dirigés par une femme que de ceux à la tête desquels on trouve un homme. Ces premiers résultats apportent plusieurs renseignements. Tout d’abord, ils montrent que la notion de « femme chef de ménage », qui a d’abord une utilité statistique, correspond également à une réalité sociale à Ouagadougou. La prépondérance des caractéristiques individuelles dans la détermination des femmes chefs de ménage (comparativement aux hommes chefs de ménage) suggère que ce statut n’est accordé aux femmes que dans certaines conditions particulières. Ainsi, non seulement les femmes ne peuvent être chefs de ménage qu’en l’absence d’un conjoint masculin, mais en plus elles n’accèdent à cette position qu’à des âges élevés, comme l’indique la prédominance de l’état de veuve ou divorcée au sein du groupe des femmes chefs de ménage. En revanche, le simple fait d’être un homme semble être une condition a priori très forte pour jouer le rôle de chef de ménage. Ces premiers résultats montrent aussi que les femmes chefs de ménage sont plus pauvres et moins instruites que les hommes chefs de ménage.
Le groupe des femmes chefs de ménage moins hétérogène que le groupe des hommes chefs de ménage
Sur la base d’une analyse utilisant la méthode two step cluster, deux groupes homogènes de femmes chefs de ménage et trois groupes d’hommes chefs de ménage ont été obtenus à partir des variables d’âge, de niveau de scolarité, de statut d’activité et d’état matrimonial des chefs de ménage. Il ressort ainsi que, dans l’ensemble, le groupe des femmes à la tête d’un ménage est moins hétérogène que le groupe des hommes chefs d’un ménage (tableau 3).
Le premier sous-groupe de femmes chefs de ménage (Gf1) est caractérisé par l’âge relativement élevé (45 ans ou plus) des femmes qui le composent, par le fait que ces femmes dans leur quasi-totalité (83 %) ne possèdent aucun niveau de scolarité et que dans leur grande majorité (57 %) elles n’ont pas d’activité économique — notons que toutes les retraitées figurent dans ce sous-groupe — et par le fait que, pour la plupart (72 %), ce sont des veuves ou des divorcées.
Le second sous-groupe (Gf2) présente des caractéristiques sensiblement opposées à celles du premier groupe. Il est ainsi majoritairement composé de femmes jeunes, 9 sur 10 ayant moins de 45 ans. Les femmes de ce sous-groupe sont pour la plupart instruites (86 %) et le plus souvent au moins de niveau de scolarité secondaire (61 %). Ce sous-groupe de femmes est dans sa grande majorité actif économiquement (60 %) et il se partage, sur le plan matrimonial, principalement entre les célibataires (45 %) et les femmes mariées en union monogame.
Chez les hommes chefs de ménage, il ressort tout d’abord globalement qu’il est beaucoup plus difficile (comparativement aux femmes chefs de ménage) d’isoler des caractéristiques pour chacun des sous-groupes. On peut néanmoins subdiviser cette catégorie en trois sous-groupes. Le premier (Gh1) est composé à 100 % d’hommes chefs de ménage âgés de 30 à 44 ans, qui exercent tous une activité économique et qui sont en union monogame. La grande majorité des hommes de ce sous-groupe est instruite (61 %), une part importante ayant été au moins au collège.
Le deuxième sous-groupe d’hommes chefs de ménage (Gh2) est essentiellement composé d’hommes de 45 ans ou plus (9 sur 10), majoritairement non instruits (56 %). Ces hommes sont pour la plupart actifs (à 67 %) et en majorité en union monogame (71 %). Il est toutefois à noter en ce qui concerne l’état matrimonial que c’est le seul sous-groupe d’hommes qui comprenne des hommes en union polygame et des veufs ou divorcés.
Le dernier sous-groupe d’hommes chefs de ménage (Gh3) est structuré autour des hommes les plus jeunes, 76 % ayant moins de 30 ans. Il comprend 77 % d’hommes actifs et 62 % de célibataires. Comme l’on peut s’y attendre compte tenu de sa jeunesse, c’est le sous-groupe qui a la proportion la plus faible d’hommes chefs de ménage non instruits (30 %).
En définitive, à Ouagadougou, les chefs de ménage se distinguent à l’intérieur de chaque catégorie à partir de critères communs qui sont l’âge, le revenu et le niveau d’instruction, et les sous-groupes des femmes chefs de ménage se distinguent de plus spécifiquement en fonction de l’état matrimonial. Alors que la question de l’hétérogénéité du groupe des femmes chefs d’un ménage est régulièrement mentionnée dans la littérature, les résultats obtenus ici montrent que la catégorie des hommes chefs de ménage peut se révéler plus disparate que celle des femmes de même statut familial. Cette diversité au sein des deux groupes mérite d’être intégrée dans des analyses qui comparent la relation à la pauvreté des ménages selon le sexe de la personne qui les dirige.
Niveau de vie des ménages et sexe du chef de ménage
Nous comparons dans un premier temps les conditions de vie des cinq sous-groupes de ménage (les deux sous-groupes de ménages dirigés par une femme et les trois sous-groupes de ménages dirigés par un homme) en examinant leur proximité ou leur éloignement relatif sur le plan factoriel avec l’une des trois classes de niveau de vie issues de l’analyse factorielle des correspondances.
Les résultats obtenus ici nuancent ceux obtenus dans la première analyse, qui ont révélé une relation plus forte à des conditions de vie médiocre pour le groupe des femmes chefs de ménage pris dans son ensemble. Comme on le voit sur la figure 2, le sous-groupe Gf2 des femmes chefs de ménage se distingue nettement des quatre autres sous-groupes et apparaît comme celui qui a la plus grande probabilité d’avoir des ménages de la classe de niveau de vie « élevé », avec laquelle il présente la plus forte proximité. Les femmes de ce groupe, jeunes et instruites, sont non seulement dans leur grande majorité actives comme nous l’avons vu, mais elles exercent aussi probablement, du fait de leur fort niveau d’instruction, des emplois bien rémunérés dans le secteur formel. Le sous-groupe de femmes chefs de ménage Gf2 comprend également une forte proportion de femmes mariées, dont les maris sont susceptibles d’être migrants de travail ou fonctionnaires, et donc d’effectuer des transferts monétaires dans leur ménage. Le sous-groupe des hommes chefs de ménage Gh2 se montre aussi plus proche de la classe de niveau de vie « élevé », comparativement aux deux autres sous-groupes d’hommes chefs de ménage et au sous-groupe de femmes chefs de ménage Gf1, mais on peut noter dans le même temps qu’il affiche aussi une proximité relative avec la classe de niveau « bas ». Les ménages de ce groupe, composé des hommes les plus âgés, regroupent à la fois des retraités, qui jouissent certainement de biens matériels qu’ils ont pu cumuler tout au long de leur vie, et d’hommes toujours en activité qui, malgré leur faible niveau d’instruction, sont dans des secteurs de l’économie rémunérateurs comme le commerce.
Un autre résultat important qui apparaît ici est qu’un des deux sous-groupes de femmes, le Gf1, comprend sans conteste les ménages qui présentent les conditions de vie les plus médiocres dans la capitale. Ce sous-groupe est en effet celui qui est le plus proche de la classe de niveau de vie « bas ». Deux des sous-groupes d’hommes chefs d’un ménage (Gh1 et Gh3) semblent appartenir quant à eux à la classe moyenne de la capitale burkinabè. Ce sont, pour certains, des ménages qui sont dans un processus de constitution de leur patrimoine.
Une dernière analyse a consisté à conserver la catégorie des hommes chefs de ménage comme un groupe homogène, tandis que les ménages dirigés par une femme sont restés répartis en deux sous-groupes. L’analyse du résultat de l’analyse factorielle des correspondances portant sur les sous-groupes de femmes chefs de ménages comparés à l’ensemble des hommes chefs de ménage en termes de niveau de vie fait ressortir divers constats. Le premier confirme le fait que le groupe des femmes chefs de ménage Gf2 présente de loin de meilleures conditions de vie que les groupes de ménages dirigés par des hommes, tandis que le sous-groupe de femmes chefs de ménage Gf1 ne se rapproche quant à lui que des ménages ayant le plus faible niveau de vie. Quant à l’ensemble du groupe des hommes chefs de ménage, il présente une configuration ambiguë, car il s’apparente à la fois au niveau de vie moyen et au niveau de vie « bas ».
Ainsi, dans l’ensemble, on remarque qu’en termes de conditions de vie, les ménages dirigés par une femme se situent aux deux extrêmes des classes de niveau de vie, tandis que les ménages dirigés par un homme tendent plutôt à se situer au centre, dans la classe moyenne.
En définitive, il ressort de la comparaison de la relation à la pauvreté des ménages selon le sexe du chef de ménage que les inégalités qui parcourent les différents sous-groupes composant la catégorie des femmes chefs de ménage peuvent se révéler plus importantes que celles qui existent entre l’ensemble de ce groupe et celui des hommes chefs de ménage. Le phénomène des femmes chefs de ménage traversant les différentes couches sociales, certaines sont plutôt favorisées matériellement, tandis que d’autres se montrent plus vulnérables économiquement, en l’occurrence les veuves. La plus grande précarité des femmes chefs de ménage veuves est également constatée dans d’autres études réalisées en Afrique subsaharienne. Ainsi, Van de Walle (2013) rapporte qu’au Mali, les femmes chefs d’un ménage se révèlent en moyenne plus pauvres que les hommes chefs d’un ménage, mais seulement si on ne prend pas en compte l’état matrimonial. En milieu urbain comme rural, les ménages de veuves et de divorcées sont considérablement plus vulnérables que les ménages de femmes mariées, que ces dernières soient en union monogame ou polygame. L’introduction de la variable sur l’état matrimonial montre que les ménages dirigés par les veuves sont significativement plus pauvres que les autres types de ménage. Appleton (1996) montre aussi qu’en Ouganda les ménages de veuves sont, parmi tous les sous-groupes de ménages, ceux qui ont le niveau de vie le plus bas, et qu’ils sont surreprésentés dans la catégorie des ménages pauvres. Horrell et Krishnan (2007) observent également une situation contrastée en termes de niveau de vie entre les femmes chefs de ménage de jure et les femmes chefs de ménage de facto. Les premières se révèlent plus démunies financièrement et moins instruites que les secondes, qui perçoivent de plus des transferts monétaires.
Comme nous l’avons vu, les transferts monétaires (internationaux ou de l’intérieur du pays) de la part des membres de la parenté élargie ou du mari sont soulignés de façon régulière dans la littérature comme constituant l’une des raisons majeures qui fait que les femmes chefs d’un ménage ne sont pas plus économiquement vulnérables que les hommes chefs de ménage, malgré leur désavantage structurel en termes d’accès aux ressources (Kebe et Charbit, 2007 ; Villarreal et Shin, 2008). Il nous semble toutefois que, à Ouagadougou, l’incidence de la pauvreté, plus faible chez les femmes chefs de ménage, reflète également un processus de sélection de ces femmes, qui constituent de fait une catégorie particulière. Elles peuvent s’autoriser à s’affranchir des normes sociales qui veulent qu’elles soient sous la protection d’un ménage dirigé par un homme en l’absence définitive du conjoint parce qu’elles sont matériellement émancipées et peuvent prendre en charge leur ménage de manière autonome (Shaffer, 1998 ; Villarreal et Shin, 2008).
Conclusion
Cette étude s’est saisie des possibilités qu’offre l’exhaustivité des données d’un recensement général de la population pour apporter des éclairages supplémentaires à la connaissance du phénomène des femmes chefs de ménage en milieu urbain en Afrique subsaharienne. Nous avons eu comme double objectif de révéler les spécificités des femmes chefs de ménage (comparativement aux hommes chefs de ménage) à Ouagadougou et de réexaminer la situation de ces deux groupes par rapport à la pauvreté. Les résultats indiquent que la notion de femme chef de ménage est statistiquement opérationnelle dans le cadre de Ouagadougou, et qu’elle correspond également à une réalité sociale. La distinction entre les chefs de ménage se fonde sur leur revenu, leur âge et leur sexe. Le groupe des femmes chefs de ménage se révèle être très différent du groupe des hommes chefs de ménage, essentiellement par l’état matrimonial, et il se subdivise en deux sous-groupes très distincts. Ces résultats contribuent à nuancer les affirmations souvent énoncées sur la relation entre pauvreté et femmes chefs de ménage. Les femmes chefs d’un ménage font en effet l’objet d’études particulières parce qu’elles sont perçues — elles et les structures familiales qu’elles dirigent — comme étant plus vulnérables que les hommes chefs de ménage. Dans cette étude, à l’instar de plusieurs autres, il apparaît que cela n’est pas toujours le cas, et que les différences relèvent plus de l’appartenance à une classe sociale qu’à un sexe. Les différences internes dans la catégorie des femmes chefs de ménage montrent ainsi que les situations de ces dernières dépendent de leur classe sociale, de leur cycle de vie et de leur situation matrimoniale.
Nos analyses montrent également que, dans la perspective d’une appréhension de leur vulnérabilité, l’éclatement de la catégorie des femmes chefs de ménage en chef de jure et de facto n’est pas suffisante pour mettre en exergue l’hétérogénéité de ces femmes chefs de ménage. Si les veuves et leurs ménages apparaissent comme les plus fragiles à Ouagadougou, ce n’est pas le cas des célibataires, ce qui semble suggérer que c’est plutôt le fait de ne pas être instruites et d’être inactives plutôt que d’être veuves qui explique la précarité des premières citées.
Enfin, la présence non négligeable de jeunes femmes célibataires dans le groupe des femmes chefs de ménage dans la capitale burkinabè laisse entrevoir les prémices d’un changement dans la manière dont les femmes envisagent leur position sociale à Ouagadougou. Il se pourrait que certaines jeunes femmes fassent désormais le choix d’être chef de leur ménage, en tirant profit de l’opportunité que leur donne leur autonomie financière pour acquérir une autonomie résidentielle et conquérir ainsi un rôle familial perçu jusque là comme étant réservé à la seule gente masculine. Il serait intéressant de voir comment ces jeunes femmes, une fois en union, renégocient ce statut au sein de leur couple.
Parties annexes
Notes
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[1]
Une absence prolongée du mari (6 mois dans les recensements) fait basculer le ménage d’une femme chef de ménage mariée de la catégorie de facto à la catégorie de jure.
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[2]
Ces conclusions sur la supériorité des ménages dirigés par une femme dans la prise en charge des enfants ont contribué à justifier l’utilisation des ménages dirigés par les femmes comme mesure de la pauvreté et des inégalités selon le genre au sein de la famille ou des ménages, en même temps qu’elles généraient à leur tour une autre orthodoxie. Celle-ci est que les femmes seraient de meilleures gestionnaires que les hommes et que les ressources gérées par elles seraient plus investies dans le bien-être de leur ménage et allouées plus équitablement.
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[3]
Une variable couramment utilisée pour différencier le groupe des femmes chefs de ménage de celui des hommes est la taille du ménage. Nous n’avons pas pris en compte la taille du ménage dans les analyses effectuées ici pour deux raisons. La première est que, du point de vue conceptuel, nous avons considéré les caractéristiques individuelles du chef de ménage dans le but de comprendre les facteurs qui favorisent l’accès à ce statut selon le sexe. Les variables relatives au ménage en termes de biens possédés et de caractéristiques du logement ont servi quant à elles pour la détermination de la relation des chefs de ménage à la pauvreté. Inclure la taille du ménage dans les analyses exigeait que soit également inclus la composition démographique du ménage, afin de mieux cerner la capacité et la situation économique de ce ménage, car la taille du ménage « brute » ne renseigne pas suffisamment sur ces aspects. La seconde raison, purement stochastique, est liée au fait qu’une prise en compte éventuelle de la taille des ménages dans nos analyses entraîne une chute non négligeable de la variance totale expliquée par les deux premiers facteurs, en raison de la très faible qualité de représentation des ménages ayant moins de 4 membres. Ainsi, en définitive, la prise en compte de la taille du ménage dans cette étude aurait réduit le degré de fiabilité de notre analyse sans pour autant fournir un apport supplémentaire à notre propos.
-
[4]
En effet, pour parler complètement de la « féminisation de la pauvreté », il convient de prendre en compte le sexe de tous les membres du ménage (et non pas seulement du chef de ménage).
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[5]
Pour des raisons de faibles effectifs, notamment chez les hommes, il n’a pas été possible de dissocier les chefs de ménage divorcé(e)s et d’en faire un groupe à part. Il nous a semblé plus pertinent de les regrouper avec les veufs et veuves, avec lesquels ils partagent le fait d’être en rupture d’union, même s’il est bien évident que les deux groupes se distinguent par l’âge, le niveau de scolarité et l’activité économique, et que ce regroupement ne permet pas de rendre compte de la particularité de la situation des divorcé(e)s.
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