Dans l’esprit de plusieurs, Camille Laurin est d’abord et avant tout le père de la Charte de la langue française, un des piliers du premier gouvernement souverainiste au Québec. Or, bien avant de devenir un célèbre politicien, il s’était démarqué à titre de médecin engagé dans la défense et la modernisation de la psychiatrie québécoise francophone. Et, bien avant cela, alors qu’il était étudiant à la Faculté de médecine de l’Université de Montréal (1943-1950), il participe à de nombreuses associations étudiantes locales, nationales et internationales et dirige le Quartier latin, le journal des étudiants, pendant un an (1947-1948). Ses initiatives et ses prises de position d’alors révèlent non seulement ce qu’il considère être les problèmes les plus urgents de son époque et les solutions qu’il préconise, mais sont aussi en partie annonciatrices de ses engagements futurs et surtout de ses modes de pensée qui orienteront son action sociale à l’avenir. Il est clair qu’à l’Université de Montréal durant les années d’après-guerre, Camille Laurin est plongé dans un milieu qui aura su favoriser son sens de l’engagement. En effet, il a eu la chance de se retrouver dans un endroit particulièrement stimulant qui lui aura permis de développer et déployer ses aptitudes à l’activisme, et qui l’aura aussi sûrement conforté dans l’importance qu’il accorde à l’engagement social. En brossant un tableau de la communauté des leaders étudiants à l’Université de Montréal et des préoccupations qui l’animent, il est possible de montrer combien Camille Laurin a été en phase avec la composante plus activiste des jeunes universitaires de son époque et combien ce contexte lui aura permis de s’épanouir. Or, cet exercice nous amène également à revoir certaines interprétations avancées dans notre ouvrage sur les leaders étudiants des années cinquante et, plus particulièrement, sur une conclusion que nous avions tirée à l’endroit des attitudes et des valeurs de Camille Laurin. Autrement dit, en portant un second regard sur ses écrits dans les pages du Quartier latin au cours des années quarante et sur la nature de ses engagements à cette étape de sa vie, nous en sommes venus à la conclusion qu’il fallait nuancer l’interprétation de sa pensée. Dans notre analyse des priorités et des activités des leaders étudiants de l’après-guerre, nous avions noté qu’ils étaient engagés dans trois principales voies d’action sociale réformiste qui en amènent certains à critiquer ouvertement les courants de pensée dominants. Ils s’investissent ainsi dans le domaine des relations internationales, principalement dans le but d’oeuvrer pour la paix mondiale. Ils se prononcent aussi sur les débats brûlants qui animent la société québécoise, y compris ceux entourant le rôle du clergé catholique et les conditions de la classe ouvrière. Finalement, ils participent aux délibérations émergentes entourant la réforme universitaire. Cette étude approfondie de leurs initiatives et de leurs écrits révélait de plus qu’ils adhèrent de façon générale à deux tendances distinctes qui se caractérisent par des valeurs et des priorités qui leur sont propres, l’une traditionnelle et l’autre moderniste. Du côté des traditionalistes, nous avions identifié des jeunes « plutôt portés à juger leur entourage et à formuler des solutions suivant des critères qui s’alignent sur une conception traditionnelle de la société. C’est-à-dire qu’ils prônent des idéaux qui concordent en général avec les valeurs et les priorités des autorités religieuses ou politiques de la société québécoise de cette époque. » Les modernistes, pour leur part, « sont plutôt disposés à remettre en question certaines des croyances ou des conventions sociales traditionnelles bien établies » et « à réclamer des changements plus importants ». Et, bien que nous reconnaissions que ces catégories ne devaient pas être considérées comme …
Difficile à classer : second regard sur la nature de l’engagement de Camille Laurin en milieu universitaire
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Nicole Neatby
Département d’histoire, Université Saint Mary
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