Résumés
Résumé
Cet article propose un bilan de l’analyse de Keynes au regard de la macroéconomie keynésienne contemporaine. Dans la première section, nous montrons dans quelle mesure le principe de la demande effective est fondé sur une conception du problème de coordination interindividuelle. La deuxième section avance que si le recours à la concurrence imparfaite peut servir de base à une interprétation contemporaine du principe de demande effective, elle n’est pas une condition suffisante à l’existence du chômage involontaire tel que Keynes l’entendait. De même, les modèles de défauts de coordination proposent une interprétation intéressante du problème de coordination de Keynes, mais ne démontrent pas l’existence du chômage involontaire.
Abstract
This article makes an evaluation of what remains of Keynes in New Keynesian economics (NKE). In section 2, we show to what extent Keynes’s principle of effective demand is based on an inter-individual coordination problem. Then, section 3 examines if NKE – in particular imperfect competition and coordination failures models – provides a modern interpretation of Keynes’s coordination problem. The result of our analysis is twofold. On the one hand, NKE modelizes certain part of Keynes’s theory. In particular, NKE provides microeconomic foundations for the principle of effective demand and sheds light on the role of expectations in Keynes’s coordination problem. But, on the other hand, it does not succeed to model involuntary unemployment à la Keynes.
Corps de l’article
Introduction
Que reste-t-il de Keynes dans la macroéconomie contemporaine? Afin de répondre à cette question, il est nécessaire de voir si cette dernière diffère ou non de la macroéconomie des années trente. Il est difficile de comparer l’ensemble de la macroéconomie avec Keynes. Dans cet article, nous confrontons la nouvelle économie keynésienne (NEK) et Keynes.
La difficulté de notre projet s’explique, d’une part, par les ambiguïtés des travaux de Keynes et, d’autre part, par l’hétérogénéité de la NEK.
En ce qui concerne l’hétérogénéité de la nouvelle économie keynésienne, un choix s’avérait indispensable. Cet article délimite le champ de recherche de la NEK à partir de l’ouvrage de Mankiw et Romer (1991). De plus, nous nous concentrons sur les modèles d’équilibre général[1].
Le choix de la NEK semble, à première vue, peu pertinent dans la mesure où les nouveaux économistes keynésiens ne se préoccupent pas de la fidélité de leur cadre théorique à la pensée de Keynes. Cependant, même si la relation n’est pas directe, il nous semble difficile de nier que la nouvelle économie keynésienne est une des écoles de pensée qui s’est formée à partir des idées de Keynes. Le label « nouveaux keynésiens » regroupe les économistes qui, dans les années quatre-vingt, ont répondu à la critique de la nouvelle économie classique vis-à-vis de la synthèse néoclassique[2]. La NEK s’efforce de trouver une explication théorique à l’ajustement visqueux des salaires et des prix. On retrouve chez les nouveaux keynésiens l’idée selon laquelle les économies de marché sont intrinsèquement sujettes à des défauts de coordination à grande échelle.
Afin d’éviter les discussions concernant les incohérences et autres insuffisances théoriques, nous supposons qu’il est possible d’interpréter la pensée de Keynes en établissant un lien de causalité entre la théorie de la demande effective considérée comme une étude du problème de la coordination et la démonstration de l’existence d’un chômage involontaire. Le problème de coordination selon Keynes implique que les revenus distribués aux producteurs ne conduisent pas à un niveau de demande effective de plein emploi. Le chômage involontaire est le corollaire logique d’un niveau de demande effective inférieur au niveau de plein emploi. En outre, le chômage involontaire ne doit pas être expliqué par une rigidité à la baisse des salaires nominaux.
La NEK offre-t-elle une analyse des défauts de coordination permettant la démonstration du chômage involontaire?
La première section suggère une interprétation du problème de coordination au sens de Keynes. La deuxième section compare l’analyse de Keynes avec la NEK. Il s’agit de se demander si les fondements microéconomiques proposés par la NEK, à savoir principalement la théorie de la concurrence imparfaite et la théorie des jeux, offrent une interprétation moderne de la théorie des échecs de coordination de Keynes.
1. Une interprétation du problème de coordination chez Keynes
Cette section défend la thèse selon laquelle les défauts de coordination macroéconomique exposés dans la Théorie générale sont la conséquence d’un problème de coordination entre les individus. En effet, même si les effets des échecs de coordination se ressentent au niveau macroéconomique – le revenu distribué par les producteurs n’implique pas un niveau de demande effective correspondant au plein emploi des ressources – le principe de demande effective exprime les difficultés à coordonner les anticipations des agents. Nous présentons cette interprétation dans une première section. La seconde section examine les implications du problème de coordination de Keynes sur son analyse du chômage.
1.1 Principe de demande effective et problème de coordination
Les différentes interprétations du principe de demande effective s’accordent sur le fait que la demande effective est représentée par le point d’intersection de l’offre et de la demande agrégées, point auquel il est possible d’observer du sous-emploi et une sous-utilisation. Le niveau de la production n’est donc pas déterminé par la disponibilité des ressources mais par la demande effective.
Le principe de demande effective signifie que le niveau de la production découle des anticipations de demande des entrepreneurs:
Tout producteur doit essayer d’estimer la demande qui a des chances d’être effective avant de débuter toute production et, ce, indépendamment de la capacité productive existante. Ne pas tenir compte de cet aspect provoque une surproduction. En ce sens, à tout point du temps, c’est la demande anticipée (la demande effective de Keynes) qui génère la production.
Pasinetti, 1997 : 100-101
Par conséquent, à court terme (lorsque la technologie et les équipements sont donnés et que le taux de salaire monétaire est fixé), les anticipations du niveau de demande sont cruciales dans le processus de décision des entrepreneurs car elles déterminent le niveau de l’emploi et de la production :
Il s’ensuit que, dans un état donné de la technique, des ressources et du coût de facteur par unité d’emploi, le volume de l’emploi, aussi bien dans les entreprises et industries individuelles que dans l’ensemble de l’industrie, est gouverné par le montant du « produit » que les entrepreneurs espèrent tirer du volume de production qui lui correspond. Car les entrepreneurs s’efforcent de fixer le volume de l’emploi au chiffre qu’ils estiment propre à rendre maximum l’excès du « produit » sur le coût de facteur.
Keynes, 1936 : 52nous soulignons
La définition du principe de demande effective insiste effectivement sur le rôle des anticipations :
Ainsi le volume de l’emploi est déterminé par le point d’intersection de la courbe de la demande globale et de la courbe de l’offre globale; car c’est à ce point que la prévision de profit des entrepreneurs est maximum. Nous appellerons demande effective le montant du « produit » attendu D au point de la courbe de la demande globale où elle est coupée par celle de l’offre globale.
Keynes, 1936 : 53
Les anticipations des entrepreneurs ne correspondent pas aux anticipations de l’équilibre de plein emploi du fait de l’information incomplète, ce qui explique la difficulté des entrepreneurs à prédire correctement la demande des consommateurs. Il est généralement admis que Keynes a beaucoup plus insisté sur l’incertitude dans son article de 1937 que dans la Théorie générale. Pourtant, cet aspect est déjà présent dans son principal ouvrage, ainsi que le montre la citation suivante :
Un entrepreneur ayant à prendre une décision pratique relative à son échelle de production ne fait évidemment pas, au sujet du « produit » éventuel de la vente de chaque volume de production, une prévision unique exempte d’incertitude, mais plusieurs prévisions incertaines plus ou moins probables et précises.
Keynes, 1936 : 52[3]
L’article de 1937 insiste alors sur le rôle de l’incertitude lors de la formation des anticipations des agents et sur les implications en termes de théorie des cycles des affaires :
L’objet de l’accumulation de la richesse est de produire des résultats, ou des résultats potentiels à une date relativement lointaine, et quelquefois à une date indéfiniment lointaine. Ainsi, le fait que notre connaissance du futur est fluctuante, vague et incertaine fait que la richesse est un sujet particulièrement impossible à étudier avec les méthodes de la théorie économique classique.
Keynes, 1937 in JMK, 14 : 113
En particulier, l’investissement est le facteur le plus volatil car les décisions d’investissement sont fonction des anticipations exogènes des entrepreneurs. Les profits futurs ne peuvent pas être calculés à partir des informations de marché, ni déterminés de façon endogène à partir de la fonction d’épargne. S’il est possible de supposer que le comportement des entrepreneurs est déduit d’une « rationalité conventionnelle » (Keynes, 1937), l’attitude des investisseurs peut également devenir irrationnelle, ce qui explique la volatilité de l’investissement. Keynes parle à ce propos des esprits animaux. La variabilité de l’investissement s’enracine dans la perte de confiance des entrepreneurs dans les rendements futurs des actifs, qui provoque une perte de confiance concernant la formation des biens capitaux, conduisant finalement à du chômage massif.
Ces difficultés de prévision empêchent les entrepreneurs de comprendre que les salaires versés correspondent à la consommation de leurs propres produits et des biens des autres entrepreneurs. Si chaque producteur prenait en compte ces effets, il serait encouragé à produire plus, à verser des salaires plus élevés et donc à employer plus de travailleurs. Mais il est difficile pour un entrepreneur qui prend une décision concernant son propre marché de planifier parfaitement à la fois le montant produit par ses concurrents et le revenu des consommateurs.
Il est ensuite important de rappeler qu’il n’existe pas chez Keynes de système de prix coordonnant les anticipations des agents. Les prix ne constituent pas un signal parfait parce qu’ils ne synthétisent pas l’ensemble de l’information dont les entrepreneurs ont besoin lors de leurs prises de décision. Les prix ne sont pas fixés comme dans le système walrassien, dans lequel on indique aux entrepreneurs combien et quand produire. En particulier, le taux d’intérêt ne coordonne pas parfaitement les décisions d’épargne et d’investissement. L’explication avancée par Keynes met au jour l’importance du problème de coordination des anticipations des agents. En effet, le taux d’intérêt mesure la prime qui doit être offerte afin d’inciter les individus à détenir leur richesse sous une forme autre que la monnaie. Et le degré de confiance, qui dépend des anticipations des agents, affecte la formation de cette prime :
Mais la quantité d’encaisses thésaurisées peut être modifiée seulement si la quantité totale de monnaie est changée ou si le montant du revenu monétaire courant (au sens large) est changé; alors que les fluctuations du degré de confiance sont susceptibles d’exercer un effet très différent, à savoir modifier non pas le montant effectivement thésaurisé mais le montant de la prime qui doit être offerte afin d’inciter les individus à ne pas thésauriser.
Keynes, 1937 in JMK, 14 : 116
Les déficiences de demande effective impliquent que le niveau de production anticipée par les entrepreneurs est inférieur au niveau de plein emploi. Le problème de coordination repose sur le fait que le comportement des individus doit être compatible avec le comportement des autres individus afin d’atteindre l’équilibre de plein emploi. Les échecs de coordination sont la conséquence de l’incapacité des individus à prédire correctement et parfaitement les opportunités issues des décisions et actions des autres agents. Par conséquent, les individus forment des anticipations qui ne correspondent pas au niveau de production de plein emploi.
1.2 Problème de coordination et chômage involontaire
Notre interprétation du problème de coordination chez Keynes présente deux implications principales.
La première conséquence est la possibilité d’une sous-utilisation des ressources et particulièrement le travail. En effet, les échecs de demande effective conduisent à un équilibre de chômage involontaire :
Le seul fait qu’il existe une insuffisance de la demande effective peut arrêter et arrête souvent l’augmentation de l’emploi avant qu’il n’ait atteint son maximum. L’insuffisance de la demande effective met un frein au progrès de la production alors que la productivité marginale du travail est encore supérieure à sa désutilité.
Keynes, 1936 : 57
Ainsi, nous adoptons la conception selon laquelle la démonstration de l’existence du chômage involontaire est un corollaire du principe de demande effective. Et, d’après notre interprétation, les échecs de demande effective s’expliquent par une absence de coordination des anticipations des agents. Si les interactions entre les agents conduisent à des échecs de demande effective, le chômage involontaire apparaît comme un résultat non anticipé des interactions entre les individus. Ceux-ci ne peuvent se rendre compte de l’imperfection de leur coordination dans la mesure où ils ne forment pas d’anticipations rationnelles et qu’ils évoluent dans un environnement d’information imparfaite.
La seconde conséquence est que l’origine du chômage involontaire n’est pas l’existence de rigidités nominales ou réelles qui empêcheraient les ajustements du salaire réel :
Ce n’est donc pas la désutilité marginale du travail, exprimée en salaires réels, qui détermine le volume de l’emploi, sauf dans la mesure où l’offre de main-d’oeuvre disposée à travailler en échange d’un certain salaire réel fixe un maximum que l’emploi ne saurait dépasser.
Keynes, 1936 : 57
L’analyse de Keynes du chômage involontaire n’est pas dérivée d’hypothèses exogènes relatives au fonctionnement du seul marché du travail puisque, dans une perspective d’équilibre général, les dysfonctionnements du marché du travail – notamment le chômage involontaire – s’expliquent par des problèmes de coordination des décisions prises sur d’autres marchés – le marché des biens et le marché financier.
2. Le problème de coordination de keynes et la nouvelle économie keynésienne
Cette section compare l’analyse faite par Keynes du problème de coordination et la formalisation des échecs de coordination par les nouveaux keynésiens. Il n’est pas possible de prendre en considération l’ensemble des travaux de la NEK. Aussi, nous synthétisons les principaux apports analytiques des nouveaux keynésiens au sein de cadre canonique de modélisation[4]. En particulier, nous examinons les implications analytiques de deux fondements théoriques qui semblent être les principales contributions de la NEK à la théorie contemporaine des fluctuations : la concurrence imparfaite et la théorie des jeux. Notre démarche nous aide à comprendre pourquoi la NEK n’offre pas une démonstration du chômage involontaire à la Keynes.
2.1 Concurrence imparfaite et échecs de coordination
Les modèles de concurrence imparfaite ont constitué une contribution importante aux fondements microéconomiques de la macroéconomie keynésienne. Parmi ces travaux, le modèle de concurrence monopolistique a été longuement analysé, non seulement dans le contexte de rigidités de prix mais aussi lors d’études du marché du travail. Notre réflexion cherche à montrer les implications de ce type de modèles pour le problème de coordination et le chômage involontaire.
Le cadre canonique dans lequel nous étudierons cette question est le modèle de concurrence monopolistique, en particulier dans la version de Blanchard et Kiyotaki (1987)[5]. Nous étudions la concurrence monopolistique sur le marché des biens. On suppose un marché du travail parfaitement concurrentiel. Notre réflexion ne prend donc pas en considération les imperfections concurrentielles sur le marché du travail, notamment un pouvoir de négociations des salariés (Blanchard et Kiyotaki, 1987) ou un salaire d’efficience (Akerlof et Yellen, 1985). Il s’agit de déterminer si la concurrence monopolistique sur le marché des biens permet, à elle seule, de démontrer l’existence du chômage involontaire. La comparaison avec l’analyse de Keynes apparaît dès lors plus cohérente dans la mesure où celui-ci insiste sur le fait que les dysfonctionnements du marché des biens, et non du marché du travail, sont à l’origine du chômage involontaire.
La caractéristique centrale de cette formalisation de la concurrence est que les firmes basent leurs décisions de production et d’emploi sur des anticipations concernant l’importance de la demande dans leur industrie. Étant donnée cette contrainte de demande, le niveau produit par les firmes est inférieur au niveau walrassien. La demande de travail étant dérivée de la quantité produite, le niveau d’emploi total est inférieur au niveau de concurrence parfaite alors que le salaire réel est plus faible. Lorsque les producteurs disposent d’un pouvoir de monopole sur leur marché, la quantité qu’ils produisent est inférieure à l’optimum social. L’écart entre le niveau de production d’équilibre et le niveau optimal est d’autant plus élevé que le pouvoir de monopole des producteurs est important.
L’économie est composée de n biens qui sont des substituts imparfaits et de la monnaie. Chaque bien est produit par un monopoliste, qui choisit le prix nominal et le niveau de production du bien étant donnée la fonction de demande à laquelle il fait face. Le producteur représentatif est également un consommateur dérivant son utilité de la consommation de tous les biens et des encaisses réelles. Le programme de maximisation de l’individu représentatif i s’opère en deux étapes. Dans un premier temps, le consommateur représentatif répartit sa richesse Ii (somme des revenus et des encaisses monétaires) entre la consommation Ci et la monnaie Mi. La consommation Ci est une fonction du niveau de consommation de chaque bien j, Cji, soit si on note θ l’élasticité de substitution (constante) entre les biens :
Soit
l’indice de prix, les encaisses monétaires initiales détenues par l’agent i, Yi la production de l’agent i.
L’agent représentatif i maximise la fonction d’utilité suivante :
s.c.
avec 0 < g < 1 et d deux paramètres. La fonction d’utilité à élasticité de substitution constante est homogène de degré un par rapport à la consommation Ci et aux encaisses réelles Mi/P. L’utilité de l’agent représentatif dépend positivement de la consommation et des encaisses réelles et négativement du montant produit.
L’allocation optimale de la richesse entre les dépenses de consommation et les encaisses monétaires permet d’obtenir le niveau de consommation ainsi que la valeur des encaisses réelles :
et
La demande de biens ainsi que la demande d’encaisses réelles sont des fonctions linéaires de la richesse réelle.
Dans un deuxième temps, l’agent représentatif i répartit ses dépenses de consommation entre les différents biens j. Soit Cji la consommation de bien j par l’agent i, Pj le prix du bien j. Le programme de maximisation s’écrit :
s.c.
avec 0 < (θ – 1)/θ < 1. Les conditions du premier ordre permettent de dériver la fonction de demande individuelle de chaque bien j du consommateur i :
La demande totale du producteur j est la somme de toutes les demandes individuelles de son bien :
La demande de chaque bien est une fonction linéaire de la richesse et est une fonction du prix relatif du bien, avec une élasticité – θ.
La dernière fonction importante à définir est la demande agrégée réelle qui est la somme de toutes les demandes individuelles pour chaque marchandise produite divisée par l’indice de prix :
En résumé, le marché des biens est caractérisé par la fonction de demande Yj qui est déterminée d’une part, par la relation entre le prix Pj fixé par la firme j et le niveau général des prix P et, d’autre part, par la demande agrégée d’encaisses réelles
Lorsqu’on considère comme données la technologie et les conditions de marché des facteurs de production, la fonction de production des firmes dépend seulement du facteur travail. On suppose une fonction de production linéaire du facteur travail à rendements constants : Yi = Li. Le producteur représentatif maximise sa fonction de profit sous contrainte de la demande du bien qu’il produit, en prenant comme donné les prix des autres biens de l’économie. La condition du premier ordre permet d’obtenir la règle de prix d’équilibre :
où P* est le prix d’équilibre symétrique et le salaire réel. Le prix est proportionnel au salaire réel, dépendant ainsi seulement des coûts et non de la demande.
La principale contribution de la théorie de la concurrence imparfaite est de permettre de modéliser dans une certaine mesure le principe de demande effective. Ce principe est ancré dans l’idée selon laquelle les entrepreneurs forment des anticipations sur la demande de leur bien, anticipations qui dépendent du niveau de la demande agrégée. Or, la différence importante entre la théorie de la concurrence imparfaite et la théorie walrassienne est que les firmes fondent leurs décisions de production et d’emploi à partir de conjectures concernant la pente et la localisation de leur courbe de demande. Même lorsque le nombre de firmes est assez important de sorte que les interdépendances oligopolistiques sont négligeables, chaque firme doit former des anticipations sur la demande de son industrie et, par conséquent, sur la demande agrégée. De plus, l’apport de la théorie de la concurrence imparfaite est lié à la variable richesse agrégée qui est à l’origine d’un effet multiplicateur présent dans la fonction de demande agrégée. En effet, la demande globale dépend des encaisses réelles elles-mêmes fonction de la richesse agrégée. Aussi, à l’équilibre général de concurrence imparfaite, la contrainte de demande d’une firme représentative peut être assouplie par un accroissement de la demande agrégée combiné avec un accroissement général de la production.
La théorie de la concurrence imparfaite attribue une signification claire aux déficiences de demande effective. Il y a échec de demande effective lorsque la courbe de demande individuelle est trop faible. Les déficiences de demande effective sont la cause des équilibres à faible niveau d’activité. Reste à vérifier si ces équilibres à faible niveau d’activité se caractérisent par un chômage involontaire.
Si la théorie de la concurrence imparfaite sur le marché des biens modélise dans une certaine mesure le principe de demande effective, elle ne démontre pas l’existence du chômage involontaire. En effet, les principaux résultats de l’introduction de la concurrence imparfaite en macroéconomie sont les suivants.
Premièrement, la concurrence imparfaite conduit à de l’inefficience (Benassy, 1987). L’équilibre macroéconomique est inefficient puisque la firme représentative voudrait produire plus dans le cas d’un accroissement de demande aux prix et salaires courants. Dans ce cas, le ménage représentatif voudrait accroître son offre de travail suite à une augmentation de la demande de travail. Ainsi, lorsque les prix et les salaires sont donnés, un accroissement de la production et de l’emploi améliorent à la fois les profits et l’utilité des ménages. Deuxièmement, la concurrence imparfaite sur le marché des biens ne conduit pas à du chômage involontaire. En effet, l’emploi échangé sur le marché du travail correspond à un nombre donné d’heures travaillées. Dès lors, un accroissement de la demande de travail, suite à une augmentation de la production, ne correspond pas à la création de nouveaux emplois. Les travailleurs déjà employés travailleront plus et, par conséquent, augmenteront leur bien-être. Le sous-emploi signifie dans ce cas que le niveau d’emploi est inférieur au niveau walrassien. Mais, il n’y a pas de chômage.
Cette situation s’explique par le fait que les modèles de concurrence imparfaite ne capturent pas l’essence du problème de coordination de Keynes et, ce, pour plusieurs raisons.
La plupart des modèles nouveaux keynésiens sont élaborés à partir de la structure Dixit-Stiglitz. Dans ce type de modèle, les producteurs choisissent le prix optimal en prenant le revenu agrégé comme donné. Cette hypothèse, particulière à ce modèle, est liée au postulat selon lequel les agents sont insignifiants par rapport aux variables agrégées. La demande de la firme est donnée par un ratio : le numérateur dépend seulement du prix de la firme et le dénominateur s’interprète comme l’indice de prix de l’industrie correspondante (voir l’équation 3). Un faible changement de prix affecte le numérateur de la demande de la firme. Mais, puisque chaque firme a un impact négligeable sur le marché, ce changement de prix n’affecte pas l’indice de prix du dénominateur. Du fait de la procédure d’agrégation, les interactions entre les producteurs et donc l’hétérogénéité des agents sont exclues de l’analyse. La courbe de demande agrégée à laquelle fait face le producteur représentatif représente la somme des demandes individuelles. Dès lors, un producteur individuel ne perçoit pas les augmentations potentielles de la demande provenant des autres producteurs.
Les modèles de concurrence oligopolistique pourraient offrir une solution à ce problème dans la mesure où le nombre de firmes est donné et que les interactions stratégiques sont incluses dans ce type de modèle. Néanmoins, les travaux des nouveaux keynésiens en concurrence oligopolistique conduisent également à l’absence de chômage involontaire du fait des hypothèses généralement adoptées.
En effet, dans les modèles oligopolistiques à la Hart (1982), le principe de demande effective est exclu de la modélisation. Chaque producteur tient compte de la richesse des individus mais l’effet revenu si important dans le principe de demande effective n’est pas endogénéisé. Par hypothèse, le producteur fait face à des profits potentiels infinis de sorte qu’il ne perçoit pas les effets des contraintes de demande.
Cette situation explique pourquoi les nouveaux keynésiens font appel aux rigidités réelles pour expliquer le chômage involontaire, une stratégie qui s’inscrit dans la tradition de la synthèse néoclassique, mais qui ne correspond pas au raisonnement de Keynes dans la Théorie générale. Le chômage n’est alors pas dérivé d’une étude du marché des biens, et, par conséquent, il n’est pas le résultat d’une analyse en termes d’équilibre général. L’origine du chômage provient de la présence de dysfonctionnements sur le marché du travail empêchant un ajustement du salaire réel[6]. Deux attitudes sont possibles face à ce constat.
D’une part – il s’agit de la position défendue dans cet article – il est important de noter que, par rapport à la conception de Keynes, le chômage involontaire des nouveaux keynésiens correspond à du chômage volontaire :
Outre le chômage « de frottement » le postulat admet encore le chômage « volontaire », dû au refus d’une unité de main-d’oeuvre d’accepter une rémunération équivalente au produit attribuable à sa productivité marginale, refus qui peut être libre ou forcé et qui peut résulter soit de la législation, soit des usages sociaux, soit d’une coalition au cours d’une négociation collective de salaires, soit de la lenteur des adaptations aux changements, soit enfin de la simple obstination de la nature humaine.
Keynes, 1936 : 36
En d’autres termes, le projet théorique de Keynes dans la Théorie générale – la démonstration d’un chômage involontaire – n’a pas été réalisé par les nouveaux économistes keynésiens.
D’autre part, il est possible de considérer que les nouveaux keynésiens ne modélisent pas le chômage involontaire tel que Keynes l’entendait car la définition du chômage involontaire proposée par ce dernier souffre d’incohérences théoriques majeures. Dans cette perspective, un des apports de la NEK serait de montrer qu’il est impossible d’expliquer le chômage involontaire sans recours à des rigidités de marché du travail. L’existence de problèmes de coordination sur les autres marchés, en particulier le marché de biens et le marché financier, ne constituerait pas une condition suffisante à l’existence du chômage involontaire.
2.2 Théorie des jeux et problème de coordination de Keynes
D’après Patinkin (1984 : 101) :
Keynes n’était pas prédisposé à croire aux forces naturelles qui pousseraient toujours les agents vers une situation mutuellement bénéfique. Du fait de l’incertitude concernant les réactions des autres à nos actions, le monde réel de Keynes était un monde qui – dans un contexte macro – conduirait volontiers aux résultats « globalement irrationnels » du dilemme du prisonnier et non pas aux résultats rationnels du commissaire-priseur walrassien.
Des économistes néokeynésiens ont essayé de donner suite à cette intuition à partir de la théorie des jeux de coordination[7]. Mais, à la différence du dilemme du prisonnier, les jeux de coordination ne reposent pas seulement sur le conflit entre les joueurs. Les anticipations sont un élément critique dans ce type de jeux. En particulier, la possibilité d’échecs de coordination, surgissant des croyances pessimistes auto-entretenues, s’observent à l’équilibre. Les inefficiences qui en résultent sont, à leur tour, intéressantes par rapport au problème de coordination de Keynes. De plus, les échecs de coordination sont analysés à partir de fondements microéconomiques clairs. Dans quelle mesure ces travaux sont-ils proches de l’analyse que fait Keynes du problème de coordination et du chômage involontaire?
Afin d’illustrer la comparaison entre le problème de coordination de Keynes et la théorie des jeux de coordination, considérons le jeu suivant. Soit G1 un jeu de coordination à deux joueurs :
Il y a deux équilibres de Nash en stratégies pures, les profils de stratégies (1,1) et (2,2) et un équilibre en stratégie mixte au sein duquel le joueur 1 choisit l’action 1 avec une probabilité de 0,25 et le joueur 2 sélectionne l’action 2 avec une probabilité de 0,75. Ces équilibres sont ordonnés selon le critère de Pareto. L’équilibre (2,2) est dominant au sens de Pareto. De plus, les équilibres sont stricts dans la mesure où le choix de l’action 1 (respectivement 2) est l’unique réponse optimale face au choix de l’action 1 (respectivement 2) de l’opposant.
La principale caractéristique des jeux de coordination est qu’ils présentent de multiples équilibres ordonnés selon le critère Pareto. La multiplicité d’équilibres et donc la possibilité d’une sélection d’un équilibre dominé au sens de Pareto dérive de l’incapacité des joueurs à coordonner leurs choix dans un environnement stratégique. Les échecs de coordination correspondent alors à des équilibres sous-optimaux. La nature des interactions stratégiques sous-jacentes aux équilibres multiples a des implications sur le comportement de l’économie que le jeu est supposé représenter. En particulier, les actions des joueurs dans les jeux de coordination sont des compléments stratégiques impliquant que des accroissements du niveau d’activité des autres agents créent une incitation à accroître l’activité de l’agent restant. Supposons que le passage de l’action 1 à l’action 2 équivaut à une augmentation du niveau d’effort. Si le joueur 2 augmente son niveau d’effort (de 1 à 2) le joueur 1 à intérêt à substituer l’action 2 à l’action 1. Aussi s’il y a de multiples équilibres de Nash et des complémentarités stratégiques, les équilibres sont ordonnés selon le niveau d’effort.
Il y a échec de coordination dans la mesure où l’équilibre sélectionné n’est pas l’équilibre de Pareto. L’interprétation du problème de coordination de Keynes est dès lors fortement reliée à la possibilité de ranger les équilibres en fonction d’un critère d’efficience. Plusieurs critères de sélection sont possibles. Parmi ceux-ci, le critère de « dominance en risque » de Harsanyi-Selten nous permet d’offrir une interprétation intéressante du problème de coordination de Keynes[8]. Notons néanmoins que la notion de « dominance en risque » n’est pas universellement acceptée en théorie des jeux. De ce fait, le raisonnement qui suit ne propose pas une logique irréfutable. Il s’agit simplement d’illustrer une manière particulière de formaliser le problème de coordination de Keynes à partir de la théorie des jeux de coordination.
Étant donné que le jeu G1 est symétrique, le raisonnement suivant est valide pour chaque joueur. Chaque joueur ne sait pas quelle est la stratégie de l’autre joueur. L’uniformité des croyances implique qu’un joueur anticipe que l’opposant joue chaque stratégie avec équiprobabilité. Par symétrie, l’autre joueur a les mêmes croyances. Si un joueur affecte une probabilité de 0,5 à la stratégie de l’opposant, le gain anticipé d’un joueur donné quand il joue la stratégie 1 est 3 × 0,5 + 3 × 0,5 = 3. De même, le gain anticipé d’un joueur quand il joue la stratégie 2 est 0 × 0,5 + 4 × 0,5 = 2. Si un joueur est rationnel, il choisit la stratégie 1 parce qu’il obtient un gain anticipé plus élevé. Par conséquent, l’équilibre joué par les deux agents est l’équilibre de Nash « dominance en risque » (1,1) alors que l’équilibre de Pareto, c’est-à-dire le plus efficient, n’est pas sélectionné. L’équilibre sous-optimal (1,1) est dit dominé en risque car une faible croyance (0,25) sur le choix 1 du joueur 2 suffit à ce que l’intérêt du joueur 1 soit de sélectionner l’action 1.
Dans ce cadre, l’équilibre « dominance en risque » est la source de l’échec de coordination. Le lien avec le problème de coordination de Keynes réside dans le fait que les joueurs ont besoin d’une confiance suffisante afin de considérer que l’autre joueur sélectionnera également la stratégie optimale. Mais, dans les jeux non coopératifs, l’annonce d’un joueur n’est pas suffisante pour compenser le degré de risque dû à l’incertitude. Le problème de coordination de Keynes est alors représenté par le biais de modèles caractérisés par au moins deux équilibres ordonnés en fonction des niveaux d’activités et d’emplois, un équilibre haut et un équilibre bas. L’équilibre inefficient peut être sélectionné. Ce résultat n’est pas sans rappeler la vision de Keynes selon laquelle il y a deux principaux équilibres : un équilibre de plein emploi qui correspond à la tradition classique et un équilibre de chômage se caractérisant par un sous-emploi involontaire du travail (Leijonhufvud, 1981 : 55).
L’argumentation précédente nous conduit à deux principaux commentaires relatifs à l’analyse du chômage dans les travaux des nouveaux keynésiens fondés sur la théorie des jeux de coordination.
Premièrement, ces travaux constituent une avancée conceptuelle dans la mesure où ils formalisent l’élément clé du problème de coordination de Keynes. En effet, celui-ci est fermement enraciné dans le manque de cohérence des anticipations des agents. Les producteurs n’investissent pas le montant correspondant au niveau de demande effective de plein emploi parce qu’ils ne croient pas que le niveau de consommation futur sera suffisant. Face au risque de ne pas vendre l’ensemble de leur production, ils révisent leurs plans d’investissement à la baisse. Ce raisonnement est également présent dans la problématique de sélection d’équilibres des jeux de coordination. Si chaque joueur anticipe que le risque de dévier de l’équilibre Pareto de la part de l’autre joueur est trop important, il choisira l’équilibre « dominant en risque » lui rapportant néanmoins un paiement plus faible. À l’équilibre sous-optimal, les agents ne trouvent pas avantageux d’un point de vue collectif de modifier leur comportement.
Deuxièmement, en dépit de cette avancée conceptuelle, le recours à la théorie des jeux n’offre pas la possibilité de modéliser le phénomène du chômage, qu’il soit volontaire ou involontaire. L’équilibre de coordination sous-optimal correspond à un équilibre de sous-emploi dans la mesure où les paiements sont inférieurs aux paiements de l’équilibre optimal. Cet équilibre est caractérisé par des efforts plus faibles de la part des agents, et donc par un bien-être inférieur à celui qui est optimal au sens de Pareto. Mais, des efforts plus faibles ne correspondent pas à un emploi plus faible. Des niveaux d’activité (correspondant à des niveaux d’efforts) sont comparés, néanmoins le critère de référence n’est pas le produit ou l’emploi mais le bien-être.
Conclusion
Finalement, que reste-t-il de Keynes dans la macroéconomie keynésienne contemporaine?
D’un certain côté, Keynes reste vivant du point de vue de la richesse de l’appareil théorique et conceptuel qui continue d’inspirer les développements macroéconomiques contemporains. L’article montre en effet que la thèse d’une filiation entre Keynes et la nouvelle économie keynésienne n’est pas si infondée dans la mesure où cette dernière a formalisé des éléments analytiques clés de la théorie de Keynes. En particulier, les modèles de concurrence imparfaite offrent des fondements microéconomiques au principe de demande effective. Les modèles qui s’inspirent de la théorie des jeux proposent une interprétation intéressante du problème de coordination de Keynes.
D’un autre côté, le projet théorique de Keynes, à savoir la démonstration d’un chômage involontaire, n’est pas d’actualité dans la nouvelle macroéconomie keynésienne. La méthodologie de l’agent représentatif adoptée dans ce type de modèles ne laisse aucune place à une analyse des échecs de coordination à la Keynes puisqu’elle suppose des individus avec des caractéristiques identiques qui auront un comportement identique dans les mêmes circonstances. Aussi bien les modèles de concurrence imparfaite que les modèles dits de défauts de coordination ne formalisent en aucune façon le phénomène du chômage involontaire tel que Keynes l’entendait. La nouvelle économie keynésienne reste le plus souvent emprisonnée dans son approche en termes d’équilibre partiel, même dans le cas de modélisation en équilibre général, se référant alors à des dysfonctionnements du marché du travail pour expliquer le chômage.
Parties annexes
Collaborateur
Abdallah Zouache
Maître de conférences au département de sciences économiques de l’université Jean Monnet à Saint-Étienne et chercheur au CREUSET (Centre de recherches économiques de la même université). Il s’intéresse tout particulièrement à l’histoire de la macroéconomie. Il a dirigé, en collaboration avec Michel Bellet, la publication de The Evolution of the Market Process: Austrian and Swedish Economics (Londres, Routledge, à paraître en 2004).
Notes
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[*]
L’article s’inspire en partie des chapitres 4 et 5 de la thèse de l’auteur (Zouache, 2000). La thèse a bénéficié de discussions fructueuses avec M. Bellet, M. De Vroey, J. Nyssen et L. A. Gérard-Varet. L’article a bénéficié des commentaires de Gilles Dostaler, Philippe Solal ainsi que des rapports des deux évaluateurs. L’auteur reste néanmoins seul responsable des erreurs présentes dans l’article.
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[1]
Il s’agit de modèles simplifiés proposant une représentation de l’économie organisée en plusieurs marchés interreliés, en particulier les marchés des biens, de la monnaie et du travail.
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[2]
La synthèse néoclassique considère que les principaux résultats keynésiens peuvent s’interpréter dans le cadre de la théorie néoclassique. Le modèle de référence est IS-LM et les principaux apports sont associés aux noms de Hicks (1937), Modigliani (1944), Patinkin (1965) et Tobin (1958).
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[3]
Notons néanmoins que Keynes ne suppose pas un état d’incertitude complète dans la phrase qui suit : « Lorsque nous parlons de sa prévision de “ produit ”, nous entendons la prévision de “ produit ” qui, si elle était faite avec certitude, lui inspirerait la même attitude que le groupe de possibilités vagues et différentes qui composent en fait l’état de sa prévision lorsqu’il prend la décision » (Keynes, 1936 : 52).
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[4]
Il est possible de distinguer deux principaux courants de recherche chez les nouveaux keynésiens. Le premier, qui inspire cette section, s’intéresse aux frictions nominales sur le marché des biens. Le second, que nous ne considérons pas explicitement, insiste sur les imperfections sur le marché du crédit. Un résumé des principales caractéristiques de cette dernière approche se trouve dans Greenwald et Stiglitz (1993). Notons que les deux types de travaux tirent leurs principales conclusions à partir de modèles de concurrence monopolistique.
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[5]
Nous nous inspirons de la version simplifiée de Blanchard et Fisher (1989). Étant donné le manque de place, le modèle ne pouvait être présenté complètement. Le lecteur pourra se référer à la thèse de l’auteur (Zouache, 2000) pour une présentation plus détaillée.
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[6]
Les travaux dont il est question ici présentent la caractéristique commune de supposer une rigidité réelle sur le marché du travail qui donne lieu à un salaire réel trop élevé par rapport au salaire réel walrassien, provoquant l’existence d’un chômage qualifié d’involontaire. On pense aux travaux postulant un pouvoir de négociation des syndicats, un salaire d’efficience ou aux modèles insiders-outsiders. Notons que le modèle de salaire d’efficience présente l’avantage d’expliquer la rigidité réelle à partir du comportement rationnel des entrepreneurs. Néanmoins, la démarche proposée ne se place pas dans un cadre d’équilibre général mais relève d’une méthodologie d’équilibre partiel étrangère à Keynes. En outre, le chômage involontaire est moins un problème que le résultat d’un problème : le hasard moral et le tire-au-flanc (De Vroey, 1998).
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[7]
Voir la synthèse de Cooper (1999).
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[8]
On distingue alors l’équilibre dominant selon le critère de Pareto de l’équilibre « dominance en risque ». Le premier se réfère à un critère d’efficience en termes de paiement. Le critère de sélection du second est le risque. L’origine du risque repose sur la perte éventuelle provoquée par un changement potentiel de stratégie de l’autre joueur. L’équilibre « dominance en risque » est l’équilibre dont la divergence par rapport à la situation de coordination est la « plus supportable ».
Bibliographie
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- Zouache, A. (2000), Macroéconomie de l’emploi et du chômage involontaire : Un essai sur l’actualité de la controverse Hayek-Keynes, thèse de troisième cycle, Université Jean Monnet, Saint-Étienne.