Abstracts
Résumé
Objectif À la suite d’une réorganisation dans le secteur de l’hébergement en santé mentale dans une région québécoise, cette étude descriptive a évalué l’intégration des principes de rétablissement selon des utilisateurs de services (n = 25), des responsables de milieux d’hébergement (n=19) et des professionnels de la santé et de services sociaux (n = 30).
Méthode La version française du Recovery Self-Assessment a été remplie par tous. Les utilisateurs de services ont également rempli l’Échelle de satisfaction envers les domaines de la vie. Des questions qualitatives supplémentaires écrites ont été posées.
Résultats La plupart des utilisateurs de services étaient globalement satisfaits de leur résidence actuelle, mais ont noté que les options d’intervention et aborder les besoins sexuels pourraient être améliorés. Les intervenants considèrent qu’il y a une intégration significativement plus faible des différentes dimensions du rétablissement que les deux autres groupes (p < 0,001). Les trois groupes ont indiqué que les utilisateurs de services devraient être davantage impliqués dans la planification des services en résidence.
Conclusion L’intégration des points de vue a mis en lumière le besoin de travailler de façon collaborative pour soutenir le processus de rétablissement dans les milieux d’hébergement et impliquer davantage les personnes utilisatrices de services.
Mots-clés :
- milieux résidentiels,
- services en santé mentale,
- rétablissement
Abstract
Objective Following a reorganization in the housing sector of mental health services in a region of Quebec, this descriptive study assessed the perceived integration of recovery principles according to service users (n=25), managers of residential facilities (n=19) and social and health care professionals (n=30).
Method All participants completed the Recovery Self-Assessment. Service users also filled the Satisfaction with Life Domains Scale. Additional qualitative questions were asked in a written format.
Results Most service users were satisfied overall with their current residence but noted that intervention options and addressing sexual needs could be improved. Clinicians perceived significantly less integration of the various dimensions of recovery than the two other groups (p < 0.001). All groups identified that persons with mental illness should be more involved in service planning in residences.
Conclusion Integrating the perspectives of different key stakeholders highlighted the need to continue to work collaboratively to support a recovery process in housing facilities and involve more service users.
Keywords:
- residential facilities,
- mental health services,
- recovery
Article body
Problématique et contexte
Depuis plus de 40 ans, de par le monde, des millions de personnes aux prises avec des troubles mentaux graves ne résident plus en institution psychiatrique, mais vivent au sein de la communauté ou ne sont hospitalisées généralement que pour de courtes périodes. Au lieu du rôle passif de « patient », le fait d’être locataire et de travailler suscite des opportunités pour une personne de développer son capital humain (capacités personnelles) et des rampes de lancement pour bénéficier de l’ensemble des richesses collectives. Sur le plan empirique, le sens donné au logement varierait selon l’expérience du logement pour les personnes. Il symbolise la relation entre un lieu de vie sociale et une identité (Bernard, 1988) ou la sécurité (Kearns et Gessler, 1998). Cet ancrage territorial du logement (et du travail) représente un enjeu crucial pour le maintien et la promotion de la santé chez les personnes ayant des troubles de santé mentale. Plusieurs courants théoriques insistent sur l’importance de cette inscription spatiale, notamment celui du capital humain de Becker (1964), celui du capital social (réseau de contacts) de Bourdieu (1986), de Coleman (1990) et ceux de la solidarité du tissu social et du support social (Forum national, 1997).
Selon ces auteurs, particulièrement Bourdieu (1986), le capital social est ce capital relationnel permettant à certaines personnes d’atteindre des objectifs qui autrement n’auraient pu l’être. C’est le capital social dit positif. À l’inverse, le capital négatif empêcherait la réalisation des objectifs. Putnam (1995) distingue 4 éléments du capital social qu’il est intéressant de considérer : une image de soi positive, le sentiment d’exercer un certain contrôle (empowerment) sur son environnement et sur les événements qui nous touchent, la résilience, c’est-à-dire la capacité d’un sujet aux prises avec des stress importants de mettre en jeu des mécanismes adaptatifs pour non seulement « encaisser le coup », mais rebondir en tirant un certain profit d’une telle épreuve, ainsi que la qualité et la densité du réseau de relations sociales. Fait intéressant, cette manière de voir est très proche de la façon dont le rétablissement est discuté dans la littérature spécialisée.
Ainsi, pour plusieurs auteurs (Davidson, Harding et Spaniol, 2005 ; Noiseux et Ricard, 2008 ; Provencher, 2002), le rétablissement est l’expérience vécue de la transcendance des limites fonctionnelles et des handicaps sociaux rattachés au trouble de santé mentale, laquelle se manifeste par le développement de nouveaux potentiels, la réappropriation du pouvoir personnel sur l’environnement, le renouveau d’un sens existentiel, l’espoir d’un avenir meilleur et l’émergence d’une paix et d’une sérénité intérieure. Par rapport au logement, la perspective du rétablissement implique donc assurément la participation des utilisateurs de services dans le choix de leur chez-soi (Browne et Hemsley, 2010).
Rétablissement et chez-soi
En effet, les personnes ayant des troubles mentaux graves expriment leurs aspirations à un chez-soi autonome avec du soutien lorsque nécessaire (Fakhoury, Murray, Shepherd et Priebe, 2002 ; Piat, Ricard, Sabetti et Beauvais, 2008). Le fait de demeurer dans le logement de son choix est reconnu comme un prédicteur de résultats positifs et est associé avec un contrôle perçu et effectif sur son environnement (Boydell, 2006 ; Nelson, Sylvestre, Aubry, George et Trainor, 2007). A contrario, les dispensateurs de services ont tendance à mettre de l’avant des lieux résidentiels regroupés pour les usagers (Piat et coll., 2010). D’autres recherches se sont intéressées aux liens entre la perspective du rétablissement et le chez-soi. Selon le point de vue des utilisateurs de service, un « chez-soi » est de bonne qualité et abordable (Padgett, Gulcur et Tsemberis, 2006), favorise le choix et le contrôle (Ashcraft, Anthony et Martin, 2008 ; Grant et Westhues, 2010 ; Hill, Mayes et McConnell, 2010) et a un volet d’entraide (Tsai et Salyers, 2012).
Des liens ont aussi été établis entre le rétablissement et les réseaux sociaux des utilisateurs de services qui sont facilités quand il y a une stabilité résidentielle (Chesters, Fletcher et Jones, 2005). Les relations de proximité dans le quartier, le climat social et la sécurité perçue sont aussi significativement corrélés avec le bien-être psychologique et sont reconnus comme d’importants médiateurs en regard du rétablissement (Kloos et Shah, 2009 ; Kloos et Townley, 2011). La personnalisation des services de santé mentale est également une autre façon de promouvoir le rétablissement qui a des impacts sur le chez-soi (Morin, Bossé, Carrier, Garon et Lambert, 2015).
Cette vision quant à l’importance du choix du logement sur le rétablissement de la personne a amené le ministère de la Santé et des Services sociaux québécois (MSSS), dans son dernier plan d’action en santé mentale, à affirmer clairement qu’être logé dans un milieu adapté aux besoins de la personne est un aspect déterminant pour influencer son rétablissement, sa participation sociale et son intégration dans la communauté. « Les soins et les services axés sur le rétablissement diffèrent des services traditionnels : au-delà de l’intervention sur la maladie et sur les incapacités qui en découlent, les intervenants suscitent de l’espoir, soutiennent la personne et sont animés par la conviction que celle-ci peut agir dans la reprise de pouvoir sur sa vie ; la détermination de ses besoins et de ses forces ; le développement de ses habiletés ; sa responsabilisation ; l’utilisation des ressources disponibles qu’elle juge pertinentes pour répondre à ses besoins. » (MSSS, 2015).
Afin de se conformer aux plans d’action du MSSS, dans la région ciblée pour cette étude, région comprenant des milieux urbains, semi-urbains et ruraux, une réorganisation importante devait s’effectuer. Le document Organisation des services résidentiels en santé mentale et de soutien à la personne dans son milieu de vie 2008 – 2013 constitue à cet égard le document clé de référence. La programmation en santé mentale de l’Agence de la santé et des services sociaux de l’Estrie (ASSSE) 2008-2013 prévoyait une diminution de 240 à 123 places en Résidences Intermédiaires (RI) et Résidences de Type Familial (RTF) (ASSSE, 2008). Les RI sont « toute ressource exploitée par une personne physique comme travailleur autonome ou par une personne morale ou une société de personnes et qui est reconnue par une agence pour participer au maintien ou à l’intégration dans la communauté d’usagers par ailleurs inscrits aux services d’un établissement public en leur procurant un milieu de vie adapté à leurs besoins et en leur dispensant des services de soutien ou d’assistance requis par leur condition » (Loi sur les services de santé et services sociaux, Section V, 302). Il existe quatre types de RI, soit l’appartement supervisé, les maisons de chambre, les maisons d’accueil et les résidences de groupe (Régime d’assurance maladie du Québec). Les RTF « peuvent être reconnues à titre de famille d’accueil, une ou deux personnes qui accueillent à leur lieu principal de résidence au maximum 9 personnes en difficulté qui leur sont confiées par un établissement public afin de répondre à leurs besoins et leur offrir des conditions de vie favorisant une relation de type parental dans un contexte familial » (Loi sur les services de santé et services sociaux, Section V, 312). Selon le rapport d’évaluation suivant la réorganisation des services résidentiels de la région à l’étude (Carbonneau et Foley, 2014), les cibles ont été atteintes et même dépassées. Toutefois, ce rapport mettait de l’avant plusieurs pistes de recherches dont celle de documenter selon la perspective du rétablissement la situation des personnes utilisatrices de services qui ont été l’objet de cette transformation des ressources résidentielles.
En conclusion, la mise en oeuvre de la perspective du rétablissement représente un changement paradigmatique dans le domaine de la santé mentale. Cette mise en oeuvre fait notamment appel à une convergence de valeurs et d’intérêts entre les diverses parties prenantes. Le secteur d’activités que sont les ressources résidentielles ne fait pas exception à cet égard d’où l’intérêt de réaliser une recherche dans une région qui a connu un changement majeur dans ce secteur d’activités en très peu d’années. Les objectifs de cette étude visaient à mieux comprendre le degré d’actualisation de la vision du rétablissement dans les services résidentiels de santé mentale dans cette région du Québec pour la clientèle qui a été touchée par la transformation de services et de circonscrire des pistes d’amélioration pour favoriser le rétablissement.
Méthodes
Cette recherche était une étude de nature évaluative s’appuyant sur un sondage descriptif quantitatif transversal. Le devis descriptif fut retenu pour répondre aux objectifs, car ce type de dispositif de recherche permet de fournir un portrait de phénomènes existants, de déterminer la fréquence d’apparition d’un phénomène et de comparer des groupes ou des pratiques (Fortin, 2010).
Cette étude fut approuvée par le comité d’éthique à la recherche du Centre intégré universitaire en santé et services sociaux de l’Estrie-Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (numéro 2016-553).
Participants
Quatre groupes d’acteurs clés étaient ciblés pour participer à l’étude : 1) les personnes utilisatrices de services ayant vécu la transformation des services résidentiels ; 2) leurs proches ; 3) les propriétaires ou responsables des milieux d’hébergement ; 4) les professionnels de la santé et des services sociaux intervenant auprès des personnes utilisatrices des services résidentiels.
En ce qui concerne les critères d’admissibilité, les critères d’inclusion pour les personnes utilisatrices de services étaient les suivants : 1) être âgé de 18 ans et plus ; 2) bien comprendre le français pour être en mesure de compléter les questionnaires ; 3) avoir vécu un changement d’un milieu résidentiel à un autre résultant de la réorganisation dans les services résidentiels entre 2008 et 2013. Les critères d’exclusion étaient de présenter un trouble neurocognitif grave (démence) ou d’être sous un régime de protection (inaptes au consentement). Pour les proches, les intervenants et les responsables de résidences, ils devaient être âgés de 18 ans et plus et bien comprendre le français pour être en mesure de compléter les questionnaires.
Les stratégies de recrutement ont varié selon les types d’acteurs clés et ont été approuvées par le comité d’éthique. Afin de recruter les responsables des milieux d’hébergement, les gestionnaires des services de première ligne en santé mentale ont contacté ces derniers. Les gestionnaires informaient ensuite l’équipe de recherche quant aux responsables intéressés à obtenir davantage d’information sur ce projet. Afin de recruter les intervenants, l’équipe de recherche a rencontré les équipes cliniques de première ligne dans les centres intégrés de santé et services sociaux de la région pour leur présenter l’étude. Les intervenants intéressés étaient ensuite invités à contacter l’équipe de recherche pour plus d’informations sur cette étude. Afin de recruter les personnes utilisatrices de services, les intervenants contactaient des usagers admissibles. Les intervenants informaient ensuite l’équipe de recherche quant aux personnes utilisatrices admissibles intéressées à être contactées pour obtenir de plus amples informations sur l’étude. Les proches étaient recrutés par référence des personnes utilisatrices de service. Les responsables des milieux d’hébergement, les intervenants ainsi que les personnes utilisatrices des services de toutes les villes composant la région administrative à l’étude étaient invités à participer.
Cueillette des données : outils et procédure
Les 2 variables mesurées étaient la perception du rétablissement et la satisfaction des personnes utilisatrices envers leur milieu d’hébergement actuel. Pour évaluer les perceptions du rétablissement, le Recovery Self-Assessment (RSA) a été sélectionné. Selon la revue systématique de Williams et coll. (2012), le RSA est présentement l’outil le plus fréquemment utilisé afin d’évaluer l’orientation des services de santé mentale. Le RSA est un questionnaire qui permet aux répondants de donner leur point de vue sur l’orientation du rétablissement dans les services de santé mentale. Diverses versions de l’outil ont été élaborées pour les dispensateurs de services, les usagers, les familles et les propriétaires de ressources (O’Connell, Tondora, Croog, Evans et Davidson, 2005). Le RSA est composé de 32 items regroupés selon les dimensions suivantes : projet de vie, participation des usagers, diversité des options de traitement, choix des usagers, services personnalisés et environnement facilitant. L’échelle de réponse est de type Likert, avec 5 niveaux allant de fortement en désaccord (1) à fortement en accord (5). Le RSA a des propriétés psychométriques de modérées à fortes en termes de validité et de fidélité (McLoughlin, Du Wick, Collazzi et Puntill, 2013 ; Ye, Pan, Keung Wong et Bola, 2013). Une recension systématique des mesures de rétablissement a estimé que seul le RSA a une cohérence interne adéquate (alpha entre 0,76 et 0,90) et qu’il est aussi parmi les meilleures mesures en regard de sa base conceptuelle (Williams et coll., 2012). Le RSA aurait également une validité concurrente satisfaisante ainsi qu’une fidélité test-retest adéquate (r = 0,88) (Burgess et coll., 2011). Au Québec, Piat et coll. (2015) ont traduit en français et administré le RSA à 188 personnes utilisatrices de services et à 96 propriétaires dans plusieurs ressources résidentielles localisées à Montréal. La cohérence interne de cette version française du RSA était de 0,92 pour les personnes utilisatrices de services et de 0,84 pour les propriétaires.
Dans la présente étude, une question écrite supplémentaire a été ajoutée au RSA des intervenants pour approfondir les forces et les aspects à améliorer par type de résidence, car le RSA évalue le tout de façon globale : « Indiquez les forces principales et pistes d’amélioration que vous percevez en lien avec l’actualisation du rétablissement pour chaque type d’établissement où vous intervenez. » Un prétest de cette question fut effectué auprès de deux intervenants en santé mentale en première ligne pour s’assurer de sa clarté et de sa pertinence. Les personnes responsables de ressources étaient également invitées à commenter verbalement leurs cotes au RSA lors de la rencontre avec l’intervieweur.
Pour mesurer la satisfaction envers le milieu d’hébergement actuel, l’Échelle de satisfaction envers les domaines de la vie (ESDV), version française du Satisfaction with Life Domains Scale (Baker et Intagliata, 1982 ; Caron, Mercier et Tempier, 1997 ; Larivière, Gélinas, Mazer, Tallant et Paquette, 2006) fut retenu. Pour chacun des énoncés, le répondant doit indiquer sur une échelle de 7 visages, allant du plus souriant (score de 7) au plus triste (score de 1), sa réponse à la question suivante : « Quel visage exprime le mieux comment vous vous sentez en ce qui concerne… ? » pour 20 aspects de la vie, dont le lieu de résidence, la vie avec les corésidents ou le quartier, regroupés en 5 dimensions : 1) vie quotidienne et relations sociales ; 2) loisirs ; 3) milieu de vie ; 4) relations intimes ; 5) autonomie. L’ESDV a été validé auprès d’un échantillon de 266 personnes de la population générale et de 245 personnes avec des troubles mentaux graves. La cohérence interne de l’échelle globale (alpha = 0,92) et des sous-échelles (alpha entre 0,71 et 0,84) est excellente et sa stabilité temporelle test-retest est bonne (r = 0,73) (Caron et coll., 1997). Il a été utilisé dans une étude antérieure examinant l’adaptation à la vie en milieux résidentiels pour des aînés avec des troubles mentaux graves suite à une longue hospitalisation dans un hôpital psychiatrique (Larivière et coll., 2006). Dans la présente étude, une 21e question fut ajoutée « Quel visage exprime le mieux comment vous vous sentez par rapport à votre lieu de résidence actuel comparativement à votre milieu de vie précédent ? », comme dans la version originale de Baker et Intagliata (1982), où la personne compare son lieu de résidence actuel à un lieu antérieur (p. ex. hôpital ou autre résidence).
Pour recueillir des données sociodémographiques, la version française du Canadian Toolkit for Measuring Psychosocial Rehabilitation Outcomes (Ontario Federation of Community Mental Health and Addictions Programs, 1999) fut remplie par les participants. Cet instrument fournit des renseignements démographiques généraux (p. ex. âge, sexe, langue maternelle, état civil) sur les utilisateurs de services, de même que des informations concernant leur diagnostic, l’historique psychiatrique et professionnel.
Après avoir donné leur accord, tous les participants furent rencontrés individuellement pour la signature du formulaire de consentement et l’administration des questionnaires. Les questionnaires étaient remplis par les participants, avec le soutien de l’intervieweur pour la bonne compréhension des questions au besoin.
Analyse des données
Des statistiques descriptives (p. ex. moyennes, fréquences) ont servi à présenter le profil des participants et la satisfaction envers le milieu résidentiel. Puisque toute la population de référence était à l’étude, les analyses statistiques ne servirent pas à faire des inférences, mais à décrire les perceptions des diverses parties prenantes. Afin de déterminer l’existence d’une différence significative entre les 3 groupes aux différents scores du questionnaire RSA, le test de Kruskal Wallis fut utilisé en raison de la petite taille d’échantillon des groupes. Une analyse posthoc fût ensuite réalisée afin d’identifier le groupe présentant une telle différence. De manière à identifier les conditions de rétablissement à améliorer selon le point de vue des diverses parties prenantes, les écarts moyens pour chaque item des sous-échelles du RSA par rapport aux résultats moyens globaux de ce même questionnaire, observés respectivement chez chaque type de participants, furent calculés et rapportés avec un intervalle de confiance à 95 %. Un test de Student a été réalisé pour chaque item afin de déterminer si cet écart était statistiquement significatif. Une différence moyenne négative est une indication que l’évaluation pour cet item est inférieure à la moyenne globale.
Les réponses aux questions écrites qualitatives ont été retranscrites intégralement dans un tableau. Deux membres de l’équipe de recherche ont analysé indépendamment chaque question complétée par les intervenants pour identifier les thèmes communs et particuliers pour chaque type de milieux résidentiels (p. ex. RI, RTF, CHSLD) et sur la vision du rétablissement en général dans les ressources d’hébergement (Miles, Huberman et Saldana, 2013). Les thèmes furent discutés et révisés par ces deux auteurs pour obtenir un consensus, puis présentés à l’équipe de recherche. Les données qualitatives venaient enrichir les résultats quantitatifs.
Résultats
La cueillette de données s’est déroulée entre août 2015 et septembre 2016 dans tout le territoire de la région. Soixante-quatorze répondants comprenant 19 responsables de ressources, 25 utilisateurs de services et 30 intervenants provenant de villes de diverses tailles ont participé à l’étude. Aucun proche n’a pu être recruté puisque les personnes utilisatrices refusaient ou oubliaient d’en parler à leur proche ou le proche refusait. Sur les 74 participants, 81,8 % étaient des femmes, d’âge moyen de 44,7 ans.
Les personnes utilisatrices des services présentaient divers troubles de santé mentale, le plus fréquent étant la schizophrénie (tableau 1). Quatre participants ont rapporté avoir plus d’un diagnostic. Les personnes utilisatrices des services étaient majoritairement célibataires et n’avaient pas d’emploi. Elles vivaient dans différents types de résidences, mais surtout en logement autonome ou supervisé depuis moins de 5 ans. Aucun usager ne vivait dans une ressource intermédiaire. Les usagers étaient partagés sur le désir de vivre à cet endroit pour toujours, mais 64 % avaient une préférence pour vivre seul.
Les responsables de ressources géraient une grande variété de milieux, tels que des résidences de type familiales, des milieux de transition avec encadrement intensif, des ressources intermédiaires, des foyers de groupe, un centre hospitalier de soins de longue durée. Les milieux étaient publics, semi-privés et privés (tableau 2). La moitié utilisaient le concept de rétablissement dans leur travail avec leurs résidents et environ la moitié avaient suivi une formation sur ce concept.
Les intervenants oeuvraient majoritairement en première ligne dans un centre intégré de santé et de services sociaux, et 47 % depuis moins de cinq ans dans le domaine de la santé mentale (tableau 3). Concernant le concept du rétablissement, 80 % avaient reçu une formation et 67 % l’utilisaient dans leur pratique, ce qui est légèrement supérieur aux responsables des ressources résidentielles.
Au RSA (tableau 4), les personnes utilisatrices de services avaient une moyenne globale de 4,11 et ainsi jugeaient favorablement l’intégration du rétablissement. La moyenne la plus élevée concernait le choix des usagers (x̅ = 4,40) (p. ex. accès aux dossiers médicaux ; choix des professionnels et des services à consulter) et la plus basse (x̅ = 3,46) était la diversité des options de traitement. Les responsables de ressources avaient une moyenne globale se situant à 4,18 et eux aussi étaient plutôt en accord avec l’intégration du rétablissement. La moyenne la plus élevée était également le choix des usagers (x̅ = 4,49) et la plus basse (x̅ = 3,71) était la participation des usagers dans la planification et l’évaluation des services. Enfin, pour leur part, les intervenants avaient une moyenne globale de 2,80 (moyennes significativement plus basses que les responsables et les personnes utilisatrices) et exprimaient donc un certain désaccord avec l’intégration du rétablissement. La moyenne la plus élevée était également le choix des usagers (x̅ = 3,23) et la plus basse (x̅ = 2,20) était la participation des usagers dans la planification et l’évaluation des services. Globalement et sur l’ensemble des dimensions, les intervenants étaient significativement moins en accord sur l’intégration de la vision du rétablissement selon le RSA que les personnes utilisatrices et les responsables de ressources (tableau 4). Le test statistique Mann Whitney (la distribution des données n’étant pas normale au test Kolmogorov-Smirnov) a permis de documenter la différence entre les résultats des responsables et des personnes utilisatrices. Le seul score démontrant une différence statistiquement significative entre les deux groupes se réfère à la diversité des options de traitement (p = 0,035), les responsables ayant un point de vue plus positif que les personnes utilisatrices dans cette dimension. Aucune différence statistiquement significative n’est présente entre les deux groupes pour le score global au RSA et les autres dimensions.
Une analyse item par item a été effectuée pour chacun des groupes afin de comparer l’item à la moyenne du score globale, en prenant en compte également l’intervalle de confiance, et ainsi dégager les items se situant significativement au-dessus de la moyenne et ceux sous la moyenne, pouvant indiquer alors les éléments satisfaisants et les aspects à améliorer (tableau 5).
L’analyse comparative de chaque item du RSA pour chaque groupe a montré les convergences suivantes. Les items significativement au-dessus de leur moyenne globale dans les trois groupes étaient : 1 = La responsable et les employés de cette résidence font un effort concerté pour accueillir les usagers et les aider à se sentir à l’aise ; 2 = L’environnement physique de cette résidence est invitant et respectueux ; 6 = La responsable et les employés de cette résidence n’utilisent pas de menaces, de pots-de-vin ou d’autres formes de pression pour influencer le comportement des résidents. Dans deux groupes sur 3, les items suivants étaient significativement satisfaisants : 3 = Les responsables et les employés des résidences encouragent les résidents à avoir de l’espoir et des attentes élevées en lien avec leur rétablissement ; 5 = Les résidents peuvent facilement accéder à leur dossier de suivi ou leur plan de traitement s’ils le veulent ; 28 = Les responsables et les employés des résidences travaillent fort pour aider les résidents à accomplir leurs objectifs personnels.
Les items significativement sous la moyenne dans les trois groupes étaient : 20 = Les responsables et les employés des résidences présentent aux résidents des personnes en rétablissement qui peuvent leur servir de modèles ou de mentors ; 25 = Les résidents sont encouragés à participer aux réunions d’équipe/comité consultatif et aux rencontres de gestion de leur résidence s’ils le veulent ; 29 = Les résidents sont (ou peuvent être) impliqués dans la formation des employés et dans les programmes d’éducation de leur résidence. Dans deux groupes sur 3, l’item 15 est ressorti, soit « Les responsables et les employés des résidences offrent aux résidents des opportunités de discuter de leurs besoins et intérêts sexuels lorsqu’ils le souhaitent. » Soulignons que pour l’item 30 (les responsables et employés du milieu sont à l’écoute des expériences, intérêts et préoccupations et y répondent), les personnes utilisatrices voyaient significativement positivement cet élément, alors que pour les 2 autres groupes, il était significativement négatif.
Enfin, l’analyse descriptive au Questionnaire de satisfaction envers les domaines de la vie rempli par les utilisateurs de services a montré en ordre croissant ce qui était le plus satisfaisant : relations intimes (moy. 4,65/7 ; é.t. 1,01) ; loisirs (moy. 5,24/7 ; é.t. 1,26) ; autonomie (moy. 5,33/7 ; é.t. 0,92) ; vie quotidienne et relations sociales (moy. 5,47/7 ; é.t. 0,80) ; milieu de vie (moy. 5,61/7 ; é.t. 1,26). À la question : Quel visage exprime le mieux comment vous vous sentez par rapport à votre lieu de résidence actuel comparativement à votre milieu de vie précédent ? 84 % des répondants ont coté entre 5 et 7.
Qualitativement, 11 intervenants ont indiqué que l’intégration du rétablissement est favorisée si des personnes bien formées sont sur place (professionnels, bénévoles, pairs aidants). Cette intégration est également facilitée lorsqu’il y a une stabilité dans les intervenants gravitant autour des résidents (n = 3), que le responsable de la ressource est disponible pour répondre aux besoins des résidents et faire des activités avec eux (n = 5) et que le milieu est perçu comme un milieu de vie plutôt qu’un milieu d’hébergement (n = 5). Un thème souvent mentionné est que le quotidien dans plusieurs types de milieux offre peu ou insuffisamment d’opportunités occupationnelles qu’elles soient des tâches, des activités productives ou des activités récréatives. Plus de la moitié des intervenants ont d’ailleurs souligné l’importance de donner des opportunités aux résidents de développer leur autonomie dans un environnement sécurisant. Aussi, comme le montre cette citation, un commentaire fréquent était que les usagers étaient peu impliqués dans la planification des services à offrir : « Il manque de création d’opportunités pour aller chercher le feed-back des résidents sur ce qui pourrait être amené comme service dans les résidences. » Par ailleurs, lors des échanges issus de la complétion des questionnaires, la majorité des intervenants notaient une certaine méfiance de plusieurs responsables de ressources à embrasser la vision du rétablissement en raison de la crainte de donner plus de responsabilités aux résidents, car cela pourrait augmenter le risque de la désorganisation chez ces derniers. La tolérance au risque et l’inconfort dans la gestion du risque est un thème qui revient, peu importe le type de milieu. Ce qui semble être sous-jacent au malaise envers une orientation de rétablissement dans les milieux de vie se résume dans une contradiction entre être payé pour faire de la réadaptation et ne plus avoir d’argent si la réadaptation est complétée et que la personne quitte ce milieu. Cette idée est résumée ici par cette personne intervenante :
« Il serait souhaité que les ressources privées puissent recevoir davantage de formation et de sensibilisation sur la notion de rétablissement pour souhaiter un impact sur leur culture organisationnelle, leur vision de leur rôle comme ressource résidentielle auprès d’usagers. Mais ma perception est qu’il y a un écart très grand entre la vision des responsables des ressources qui semble être une vision business, location de chambre, argent. »
Pour leur part, les responsables de ressources ont souvent mentionné que le rétablissement était facilité quand les personnes présentaient des troubles de santé mentale moins graves, avec un plus faible risque de fugue ou de désorganisation. Les responsables étaient en général en accord avec le fait que leurs résidents étaient peu impliqués dans la prise de décision, mais leur opinion était prise en compte. Ils tentaient de répondre aux souhaits des usagers à condition que ces besoins n’entravent pas leur santé. Un thème central souvent exprimé était la confusion ressentie par les responsables entre leur rôle versus celui de l’intervenant du Centre de santé et services sociaux quand l’objectif concerne l’intégration dans la communauté. En résumé, ils se demandaient : qui fait quoi et jusqu’où ?
Discussion
L’objectif principal de la présente étude était de décrire les visions dans les services résidentiels en santé mentale dans une région du Québec incluant divers types d’hébergement en milieu urbain, semi-urbain et rural. Elle a recueilli les points de vue sur les forces et les éléments à améliorer selon des usagers, des responsables de ressources et des professionnels.
Les résultats montrent que les utilisateurs de services consultés demeurent surtout dans des petits milieux de vie : ils sont satisfaits de ce dernier en lien avec leur vie quotidienne, leurs relations sociales et leurs loisirs. Ils sont néanmoins partagés à y demeurer de façon permanente. Ils sont moins satisfaits en ce qui concerne les relations intimes (famille, couple, autres résidents), les opportunités pour parler de leurs besoins sexuels et la diversité des options de traitement. Les intervenants sont ceux qui sont le plus en désaccord sur l’intégration de la vision du rétablissement dans les milieux résidentiels. L’ensemble des 3 groupes de participants convergent toutefois pour faire ressortir que les forces sont l’environnement physique qui est respectueux et invitant, ainsi que l’environnement social : attitudes accueillantes, encourageantes, stimulant l’espoir envers le rétablissement et une aide à atteindre les objectifs offerts par les responsables de ressources et les intervenants des centres de santé et de services sociaux.
Parmi les pistes de réflexion d’améliorations à apporter pour mieux intégrer la vision du rétablissement, notons la formation sur le rétablissement et ses implications avec des thèmes comme : la tolérance du risque, la personnalisation des interventions, l’importance de l’engagement occupationnel dans des activités variées et signifiantes sur la santé et surtout impliquer davantage les utilisateurs de services dans la planification et l’offre de services, et le manque d’opportunités occupationnelles, peu importe le milieu de vie. Il serait aussi souhaitable de mieux comprendre les inconforts entre la vision des responsables de ressources résidentielles et des intervenants, et clarifier les rôles dans l’accompagnement dans l’intégration dans la communauté. Sur le plan de l’offre de services, avoir accès à une plus grande variété de types de milieux de vie et d’organismes communautaires, peu importe la grandeur de la municipalité, fut également suggéré dans les divers endroits sur le territoire. Cet enjeu est une orientation que le MSSS (2015) et la Commission de la santé mentale du Canada (2017) prônent afin de répondre aux besoins, aux préférences, aux capacités et aux ressources différentes des personnes vivant avec des troubles de santé mentale.
Ayant utilisé le même outil que l’équipe de Piat et coll. (2015) et effectué les analyses de la même façon, il a été possible de comparer les résultats de cette présente étude avec les leurs. Il semble que les responsables de ressources dans la région à l’étude sont moins formés au rétablissement que les responsables montréalais (53 % vs 72 %). Pour ce qui est des utilisateurs de services, ils se ressemblent sur plusieurs aspects : durée moyenne de résidence dans le milieu de vie est surtout entre deux et cinq ans ; ils sont dans la quarantaine en moyenne et surtout célibataires. L’échantillon de la présente étude avait toutefois plus de femmes (64 % vs 34 % ; à Montréal). Au RSA, les moyennes globales indiquent que les utilisateurs de services de la région ciblée sont légèrement plus satisfaits de l’intégration du rétablissement (4,11 vs 3,71), mais que c’est similaire chez les responsables de ressources (4,18 vs 4,31). L’équipe de Piat et coll. (2015) n’avait pas inclus les intervenants dans leur étude. Les points communs entre les deux études sur les aspects à améliorer selon l’ensemble des parties prenantes sont l’implication des utilisateurs de services dans la prise de décision, les comités liés à la gestion de la résidence, les services à offrir, la formation dans leur résidence, ainsi que l’intégration de pairs-aidants : 1) mentors ; et 2) ajout de personnes expertes formées. Dans les deux études, les usagers ont nommé un souhait de pouvoir parler de leurs besoins sexuels (dans notre étude, les intervenants ont aussi identifié cet aspect comme étant à améliorer). Ce qui divergeait est que dans la région de la présente étude, l’item concernant la possibilité de changer d’intervenant n’est pas ressorti comme un aspect à améliorer.
Les résultats montrent que la vision du rétablissement dans les hébergements communautaires doit continuer à être mieux comprise par les diverses parties prenantes. Dans notre étude, les résultats indiquent qu’un pourcentage notable de responsables de ressources et d’intervenants n’ont pas eu de formation ou n’utilisent pas ce concept (ce qui laisse supposer qu’ils le connaissent plus ou moins bien) et qu’il y a une certaine divergence, particulièrement entre les intervenants et les deux autres groupes. Des études antérieures ont comparé les perceptions des utilisateurs de services et des responsables de ressources (p. ex. Piat et coll., 2015), de diverses parties prenantes en lien avec le soutien à l’emploi de personnes vivant avec un trouble psychotique (p. ex. Hampson, Watt et Hicks, 2018) ou sur le concept de rétablissement en général (p. ex. Noiseux et Ricard, 2008). Comme dans notre étude, les diverses parties prenantes expriment plusieurs aspects convergents, mais également des éléments qui diffèrent selon le groupe. Donc, il est intéressant de poursuivre cette réflexion et cette discussion de façon collaborative pour expliciter tous ensemble la signification de ce concept quand il est appliqué à l’organisation des services et dans les environnements où les personnes vivent et participent. La tendance dans les études antérieures a été d’examiner le concept de rétablissement avec un groupe seulement de façon séparée, comme les dispensateurs de services et les décideurs (p. ex. Le Boutillier et coll., 2011), les personnes vivant avec un trouble de santé mentale (p. ex. Piat, Sabetti et Couture, 2009 ; Larivière et coll., 2015) ou plus récemment les familles (p. ex. Piat et Seida, 2018).
Le besoin de clarifier le rôle du responsable de ressource résidentielle et le professionnel de la santé qui suit l’utilisateur de services résident dans un hébergement communautaire, en lien avec sa réadaptation, demeure. Des écrits montrent que les responsables désirent être impliqués dans le processus décisionnel des professionnels de la santé en ce qui concerne les responsabilités attribuées à la ressource, le soutien à apporter et le plan d’intervention de leurs résidents (Fitzgerald, 2009 ; Piat et coll., 2005). Même s’ils sont consultés, ils ne sont pas impliqués pour autant dans le « processus de planification et de prise de décision » entourant leurs résidents. Ils ont le désir de se rendre utiles dans le processus de rétablissement de leurs résidents de façon à contribuer à l’amélioration de leur autonomie. Ils voudraient aussi être considérés comme un membre à part entière de l’équipe de professionnels encadrant les résidents (Fitzgerald, 2009).
En 2006, Rodriguez, Bourgeois, Landry, Guay et Pinard mentionnaient que les usagers étaient insuffisamment impliqués dans le processus décisionnel des ressources ou dans l’évaluation de pratiques et de programmes. Nos résultats, plus d’une dizaine d’années plus tard, vont dans le même sens. Il ne s’agit pas seulement de recueillir leurs opinions, mais de les impliquer concrètement dans les décisions qui les concernent (Fitzgerald, 2009). Une des valeurs phares du Plan d’action en santé mentale 2015-2020 du MSSS est la primauté de la personne comme actrice principale des soins et des services la concernant.
La question de vivre des relations interpersonnelles plus intimes dans des hébergements communautaires est ressortie dans l’étude actuelle. La présence et la qualité des relations avec les autres résidents, des amis et les responsables de ressources résidentielles sont ressorties dans une étude de Piat et coll. (2012) comme un facteur ayant une influence importante sur le rétablissement. Les relations de couple et la sexualité sont des sujets encore peu explorés dans les écrits concernant les personnes vivant avec des troubles de santé mentale graves. Il ressort, sous plusieurs angles, que ce soit l’hésitation à s’engager, l’expression des désirs ou les comportements à risque, que c’est un besoin qui est souvent insatisfait et peu abordé dans les interventions auprès des utilisateurs de services (De Jager et McCann, 2017).
Enfin, la difficulté à offrir des opportunités occupationnelles à l’intérieur comme à l’extérieur de milieu de vie demeure une question à explorer pour mieux comprendre les obstacles personnels, sociaux ou organisationnels à le faire. Il est pourtant documenté qu’avoir des activités signifiantes est un déterminant du rétablissement (Brown, Hemsley et St-John, 2008 ; Hendryx, Green et Perrin, 2008) que l’on vive ou non en hébergement communautaire et qu’une variété d’occupations ayant diverses fonctions (p. ex. détente, déploiement de ses habiletés, connexion sociale, relever un défi) est liée à la santé, au bien-être et à la qualité de vie de personnes vivant avec des troubles de santé mentale (Bejerholm, 2010 ; Larivière et coll., 2016).
Forces et limites de l’étude
Les forces de l’étude sont d’avoir inclus tous les secteurs d’une région, 3 types de parties prenantes et diverses sources de données pour offrir un bon portrait de l’intégration du rétablissement dans les différents milieux résidentiels de la région. Le fait que nous n’avons pas pu recruter des proches en passant directement par les utilisateurs de services et que nous n’avons pas recruté les personnes utilisatrices des services sous régime de protection constituent toutefois une limite. Dans une future étude, il faudrait possiblement privilégier le recrutement par le biais d’associations et d’organismes communautaires dès le départ. Intégrer des proches dans le choix du milieu de vie, dans la prestation des services, dans l’accompagnement au rétablissement est un défi documenté (Bonin et coll., 2012), mais une priorité du MSSS soulignée dans son dernier plan d’action. Aussi, avec un plus grand nombre de responsables de ressources, il serait davantage possible de distinguer les enjeux des divers types de milieux de vie. Enfin, les commentaires qualitatifs recueillis étaient écrits et ainsi, dépendant du degré de profondeur de la réponse du participant.
Conclusion
Cette étude contribue à une meilleure compréhension des éléments liés à la vision du rétablissement qui sont bien intégrés dans divers types de milieux résidentiels pour des personnes ayant des troubles de santé mentale dans une région incluant des secteurs urbains, semi-urbains et ruraux. Plusieurs éléments à améliorer sont similaires à des études antérieures réalisées dans des grands centres. Ainsi, les pistes futures pouvant être dégagées et à poursuivre en recherche est l’implantation d’interventions innovantes collaboratives et partenariales, que ce soit par rapport à la formation sur le rétablissement dans les milieux résidentiels toutes les parties prenantes ensemble ou à l’offre de services dans les milieux, et ce, à partir des défis soulevés dans cette étude, par exemple, le soutien aux besoins sexuels et relations intimes des personnes. Ultimement, la visée est de prendre soin de cette clé majeure du rétablissement : son milieu de vie, qu’il soit un logement autonome ou un hébergement communautaire.
Appendices
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