Abstracts
Résumé
L’oued de la Moulouya et ses affluents demeurent les principales ressources en eau pour irriguer les champs agricoles avoisinants de la région de Berkane qui représentent l’activité principale de cette région. L’évaluation de la qualité des eaux de ces ressources s’avère une nécessité pour maintenir leur bon fonctionnement et par la suite assurer un bon rendement des produits agricoles. Pour ce faire, un suivi mensuel de prélèvements des eaux a été réalisé dans l’oued de la Moulouya et son affluent Zegzel-Cherâa durant une année de décembre 2015 à novembre 2016. Ces prélèvements ont fait l’objet d’analyses bactériologiques selon les protocoles décrits par les normes marocaines ISO et les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Les analyses bactériologiques ont montré que l’oued de Cherâa est soumis à une forte pollution d’origine humaine et animale, avec une prédominance de la source humaine. En effet, la charge bactérienne (coliformes totaux [CT], coliformes fécaux [CF], Escherichia coli [EC], streptocoques fécaux [SF], etc.) est supérieure aux normes marocaines du Secrétariat d’État auprès du ministère de l’Énergie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement (SEEE, 2007) indiquant ainsi que les eaux sont de mauvaise qualité. L’analyse explicative (ACPn) réalisée sur les variables étudiées a permis de mettre en évidence un gradient de pollution pour l’oued Cherâa et a également fait ressortir l’automne comme la saison la plus chargée en bactéries indicatrices de pollution. L’abondance de ces microorganismes dans les cours d’eau traduit la présence possible de bactéries pathogènes qui pourraient causer des maladies au sein de la population qui utilise ces eaux pour boire et pour l’irrigation. Les eaux de l’oued Cherâa sont impropres à la consommation.
Mots-clés:
- Berkane,
- oued Moulouya,
- Zegzel-Cherâa,
- bactériologie,
- qualité
Abstract
The Moulouya wadi and its tributaries are the main water resources for irrigating the neighbouring agricultural fields of the Berkane region, which constitute the main activity of this region. Assessing the water quality of these resources is necessary to maintain their functioning and ensure a good yield for agricultural products. To do this, a monthly water sampling was carried out in the wadi of Moulouya and its tributary Zegzel-Cherâa for one year from December 2015 to November 2016. The samples were subjected to bacteriological analyses according to the protocols described by the Moroccan ISO standards and the recommendations of the World Health Organization (WHO). The bacteriological analyses showed that the wadi of Cherâa is subjected to a strong pollution of human and animal origins, with a predominance of the human source. Indeed, the bacterial load (total coliforms, faecal coliforms, Escherichia coli, faecal streptococci, etc.) is higher than the Moroccan standards of the State Secretariat at the Ministry of Energy, Mines, Water, and Environment (SEEE, 2007) indicating that the waters are of poor quality. The explanatory analysis (PCA) carried out on the studied variables highlighted a pollution gradient for the wadi Cherâa and also showed that the autumn was the season most polluted with higher loads of indicator bacteria. The abundance of these microorganisms in streams reflects the possible presence of pathogenic bacteria that could cause disease in populations that use these waters for drinking and irrigation. The waters of the wadi Cherâa are unfit for consumption.
Key words:
- Berkane,
- Wadi Moulouya,
- Zegzel-Cherâa,
- bacteriology,
- quality
Article body
1. Introduction
L’eau est un élément primordial à la survie humaine et au développement socioéconomique durable. Le problème de la dégradation des ressources en eau est devenu l’un des aspects les plus inquiétants et pourrait constituer à long terme un réel danger pour l’avenir de l’humanité (BELAID, 2010; BELGHITI et al., 2013). Par ailleurs, les microorganismes jouent un rôle crucial dans l’équilibre écologique des écosystèmes aquatiques notamment par la régulation des cycles biogéochimiques et énergétiques (BIANCHI et al., 1989). Au niveau bactériologique, l’introduction des espèces bactériennes polluantes dans les systèmes aquatiques via les eaux usées demeure le majeur problème causant un dysfonctionnement du milieu naturel et des risques sanitaires importants (ABOULKACEM et al., 2007). Parmi les situations critiques que peut causer l’existence des bactéries pathogènes dans le milieu hydrique se trouve la propagation de nombreuses maladies infectieuses : la typhoïde, le choléra, etc. (OMS, 1990; EL OUALI et al., 2008).
Le Maroc comme d’autres pays en voie de développement fait face aux différentes formes de pollution de ses ressources en eau. Plusieurs études, menées dans ces pays, révèlent un degré de dégradation inquiétant, notamment la pollution des eaux de surface par les activités anthropiques (FEKHAOUI, 1990; MATHUTHU et al., 1993; CHAHLAOUI, 1996). La région de l’Oriental dont les ressources en eau de surface constituent l’objet de cette étude est une zone à vocation agricole. À la suite de l’accroissement des besoins en eau pour l’irrigation, les industries et l’approvisionnement en eau potable, ces ressources en eau jouent un rôle socio-économique très important au Maroc oriental. Elles sont à la fois utilisées pour l’approvisionnement en eau potable des populations de la région et pour les activités agricoles, notamment l’abreuvement des animaux et l’irrigation des terres. Ces eaux sont vulnérables à plusieurs facteurs tels que le déversement des eaux usées qui détériorent leur qualité, ce qui rend les mesures pour les développer, les gérer et les protéger plus complexes. L’homme et les animaux représentent les principaux agents responsables de la contamination de l’eau (HARTEMANN, 2004; LARIF et al., 2013).
En effet, l’objectif de cette étude consiste à évaluer la qualité bactériologique des eaux de la basse Moulouya et ses principaux affluents qui sont imputables à l’irrigation et à évaluer la variabilité spatiale et temporelle de leur qualité bactériologique.
2. Matériel et méthodes
2.1 Présentation de la zone d’étude
Les stations Branche Sud-Ouest (S1) et Bas Zegzel (S2) sont situées au niveau de l’oued Zegzel, quant à la station S4, elle est située sur l’oued Cherâa, alors que les stations Saf Saf (S3) et l’ancien pont de Cap de l’Eau (S5) sont situées sur l’oued de la Moulouya (Figure 1) selon les coordonnées géographiques regroupées dans le tableau 1.
Les cinq stations choisies n’ont jamais servi pour une évaluation de leur qualité bactériologique. L’importance hydrologique de ces cours d’eau réside dans leur utilisation, par pompage, pour l’irrigation des surfaces de différentes cultures caractérisant la zone d’étude.
Les échantillons d’eau ont été aseptiquement prélevés d’une façon instantanée et mensuelle étalée sur une année (2015-2016) parmi les différents sites préalablement définis (Figure 1), dans des flacons de verre de 500 mL préalablement stérilisés à l’autoclave et portés dans une glacière à ±4 °C au laboratoire pour les analyses bactériologiques selon les normes marocaines ISO (ISO/IEC, 2005).
2.2 Analyses bactériologiques
L’analyse bactériologique a été déterminée par la méthode de filtration sur membranes Millipore (0,45 µm) et a porté sur les germes indicateurs de pollution montrés dans le tableau 2. Ces analyses ont été réalisées selon les protocoles décrits pas les normes marocaines ISO (ISO/IEC, 2005).
2.3 Analyses physicochimiques
La température et le pH ont été mesurés in situ à l’aide d’un même appareil (pH-mètre WTW). La conductivité a été mesurée à l’aide d’un conductimètre normalisé (WTW). La turbidité a été mesurée à l’aide d’un turbidimètre portable (Turbiquant 1100 T, MCK118325.0001). La demande biologique en oxygène pendant cinq jours a été déterminée par la méthode d’OxiTop selon la loi NFEN 1899-1998.
2.4 Analyses statistiques
Une analyse en composantes principales (ACP) a été réalisée à l’aide du logiciel R sous la programmathèque ADE4 (analyse de données écologiques et environnementales avec des procédures exploratoires d’essence euclidienne). Un prélèvement d’eau a été effectué dans les cinq stations (S1, S2, S3, S4 et S5) étalé sur les quatre saisons (hiver, printemps, été et automne). Chaque valeur représente la moyenne de trois mois de prélèvement correspondant à chaque saison (Figure 2).
L’ACP permet de déterminer la structure spatiale ou temporelle. De ce fait, les analyses inter- et intra-classes, décrites par THIOULOUSE et CHESSEL (1987), DOLEDEC (1988) et BLANC et al. (1998), peuvent être utilisées. L'analyse inter-classes met l'accent sur l’effet spatial ou temporel alors que l’analyse intra-classes recherche à supprimer l’un de ces effets.
Afin d´étudier les structures de liaisons linéaires (structure spatiotemporelle) (DOLEDEC et CHESSEL, 1991) sur les variables physicochimiques et bactériologiques en question et de connaître les corrélations entre elles, nous procédons à la réalisation d'une analyse en composantes principales normée (ACPn). Nous avons 12 variables mesurées dans cinq stations pendant quatre saisons (Figure 3).
Par ailleurs, réaliser une ACP intra-saisons est presque la même chose que réaliser simultanément les ACP des quatre tableaux (sites et variables) définis par les quatre saisons (Figure 4). Il serait donc possible de rechercher une représentation graphique liant quatre cartes factorielles différentes à l'ACP intra-saisons.
3. Résultats et discussion
3.1 Variations spatiotemporelles des variables physicochimiques et bactériologiques
La figure 2 représente les variations spatiotemporelles des variables physicochimiques et bactériologiques du milieu d’étude après normalisation.
3.1.1 Variations spatiotemporelles des variables physicochimiques
La température est bien supérieure à la moyenne durant l’été pour les cinq stations. Le maximum est observé au niveau de Cherâa (S4). Le potentiel hydrogène (pH) est supérieur à la moyenne au niveau de l’oued de la Moulouya (8,28 ± 0,1) et Cherâa (8,15 ± 0,2) pendant l’été (Tableau 3). Les caractéristiques des pH pourraient être liées à la nature géologique des formations aquifères et aux terrains traversés (ABOULKACEM et al., 2007). Ceci est également remarqué dans les eaux de l’oued Elhimer où un maximum de 9,3 de pH a été enregistré par EL OUALI et al. (2011).
Une forte minéralisation est observée au niveau de l’oued de la Moulouya pendant l’hiver. Des valeurs de conductivité supérieure à la moyenne sont enregistrées au niveau des stations S3 (3,68 mS∙cm-1) et S5 (3,46 mS∙cm-1) surtout en hiver et durant toutes les saisons dans le cas de S5. En effet, cette minéralisation pourrait être due à la concordance géomorphologique, à la nature géologique des formations du sol et à la profondeur des niveaux captés qui sont autant de caractéristiques influençant les variations de la conductivité. Pendant l’été l’amont de Zegzel enregistre la plus faible valeur de conductivité (0,800 mS∙cm-1) et qui reste supérieure à celle trouvée dans les eaux de la Loire où le maximum est de 0,320 mS∙cm-1 (FLORENTINA et al., 2009).
Les mesures de turbidité qui dépassent la moyenne sont enregistrées surtout au niveau de l’oued de la Moulouya durant le printemps et l’automne. Oued Zegzel (S1 et S2) enregistre des valeurs inférieures à la moyenne durant les quatre saisons. La turbidité des eaux de surfaces est généralement attribuable à des matières organiques et inorganiques (GESTION DES RESSOURCES HYDRIQUES MANITOBA ET SANTÉ MANITOBA, 2011). Elle peut être causée par des pluies abondantes, des inondations et l’écoulement printanier, ainsi que par l’activité humaine perturbant la terre, par exemple, la construction (l’aménagement du pont Hassan II au niveau de la station S3).
Une pollution organique qui dépasse la moyenne caractérise la station S4 durant les quatre saisons. Ces fortes concentrations de la demande biologique en oxygène pendant 5 jours (DBO5) proviennent des rejets urbains de la ville de Berkane déversés dans l’oued de Cherâa.
3.1.2 Variations spatiotemporelles des variables bactériologiques
La flore mésophile aérobie totale (FMAT) est utilisée comme un indicateur de la charge globale. Elle représente l’ensemble des microorganismes autochtones et allochtones capables de se multiplier à une température qui varie entre 22 et 40 °C (RODIER et al., 2009). FMAT a le même aspect que la DBO5 au niveau de l’oued Cherâa (S4) où de fortes concentrations supérieures à la moyenne (2,3 x 103 UFC∙mL-1) sont enregistrées pendant les quatre saisons. Une concentration maximale de la FMAT de 3,6 x 103 UFC∙mL-1 est observée en été dans l’oued de Cherâa.
Le groupe des coliformes joue le rôle d’indicateur de pollution et de contamination fécale (FUJIOKA et al., 1999). Les coliformes fécaux (8,8 x 105 UFC par 100 mL), les coliformes totaux (2,2 x 106 UFC par 100 mL) et Escherichia coli (1,02 x 105 UFC par 100 mL) sont très abondants au niveau de l’oued Cherâa pendant toutes les saisons. Les CF sont vulnérables aux facteurs abiotiques édaphiques et climatiques du milieu naturel, ces interactions des espèces d’une biocénose entre elles et avec leur biotope ont été introduites par l’écologiste Arthur Tansley en 1935 (TANSLEY, 1935).
Les streptocoques sont des témoins de contamination fécale assez résistants notamment dans les milieux de forte salinité (GAUJOUS, 1995) et se trouvent très abondants au sein de l’oued Cherâa (9,5 x 104 UFC par 100 mL) durant toutes les saisons sauf en hiver. Leur diminution en cette saison pourrait être expliquée par une réduction des rejets des eaux usées non traitées. Une température moyenne de 17,8 °C a été enregistrée en hiver dans l’oued de Cherâa et cela pourrait également expliquer leur diminution parce qu’ils sont des espèces fragiles qui disparaissent totalement à une température de 10 à 20 °C au bout de 24 h (HASLAY et LECLERC, 1993).
Les concentrations des streptocoques les plus inférieures à la moyenne sont enregistrées à de l’aval de l’oued Zegzel (19 UFC par 100 mL) pendant la saison hivernale et sont dues aux fortes précipitations qui ont eu lieu en cette période. Ils peuvent également se développer à des pH basiques (jusqu’à 9,6) et par conséquent sont considérés comme indicateurs de germes pathogènes d’une résistance similaire au pH élevé (PNUE et OMS, 1977).
Les staphylocoques (Staph) suivent la même allure que les streptocoques durant toutes les saisons; la station S4 enregistre de fortes concentrations en termes de germes, le maximum est enregistré pendant l’été (105 UFC par 100 mL). Un maximum supérieur à la moyenne des Clostridiums sulfito-réducteurs est enregistré au niveau de l’oued Cherâa (S4) pendant l’automne (1,7 x 103 UFC par 100 mL). Ils sont très fréquents dans les eaux usées qui sont principalement d'origine anthropique (PNUE et OMS, 1977), ce qui explique leur existence dans les eaux de l’oued Cherâa qui reçoit les eaux usées de la ville de Berkane. Les anaérobies sulfito-réducteurs (ASR) sont très abondants dans toutes les stations pendant l’automne à l’exception dans S1. Ceci serait probablement dû à l’apport de la matière organique via la chute des feuilles qui seraient responsables de la diminution de la concentration d’oxygène en cette saison (DERFOUFI et al., 2019).
3.2 Variation spatiotemporelle des variables physicochimiques et bactériologiques
Le cercle de corrélation (Figure 3D) montre une superposition des coliformes totaux et des coliformes fécaux, E. coli (EC) et les anaérobies sulfito-réducteurs (ASR). Le facteur 1 (50,22 %) prend en compte les paramètres microbiologiques et la DBO5, il exprime donc le phénomène de la pollution des eaux (pollution microbienne et organique). Le facteur 2 (18,66 %) est défini par les paramètres physicochimiques (température et pH). Il semble rendre compte des conditions du milieu (eaux) et leur influence dans la pollution des cours d’eau.
La station S4 au niveau de l’oued Cherâa montre un taux élevé de pollution (Figure 3C). Cette pollution s’accentue surtout en automne. L’oued Zegzel (S1 et S2) montre une bonne qualité d’eau. Le facteur 2 (18,7 %) caractérise un gradient de minéralisation au niveau de l’oued de la Moulouya (S3 et S5). La figure 3 nous révèle que les fortes charges des indicateurs de contamination, telles que celles des CT, CF, EC, SF, Staph, ASR et les FMAT sont enregistrées en saison automnale dans l’oued Cherâa (S4).
3.2.1 Analyse intra-saisons
La carte factorielle (Figure 4C) de l’ACP normée montre un gradient amont-aval que ce soit pour l’oued de Zegzel (S1, S2) ou pour l’oued de la Moulouya (S3, S5). En termes d’inertie, l’ACP globale des données du milieu est égale à 12 (nombre total de variables dans une ACP normée). L’inertie totale attribue 81,8 % à l'inertie intra-saisons. De plus, le facteur 1 de l’inertie intra-saisons représente 57,3 % de l’inertie de l’ACP normée (soit 46,9 % de l’inertie de l’ACP intra-saisons) (Figure 4C).
Dans la figure 5, l’ACP intra-saisons nous révèle que la typologie spatiale n'est pas similaire d'une saison à l'autre. Les axes de l'inertie intra-saisons représentent les axes produits par la superposition des quatre saisons, des cinq stations centrées par saison.
Pendant les quatre saisons, la station S4, qui est la plus polluée, se trouve toujours éloignée des autres stations. Les stations S1 et S2, les moins polluées, sont opposées à la station S4 sur les deux axes et également opposées aux stations S3 et S5 sur l’axe 1. Les concentrations en termes de charge bactérienne au niveau de Zegzel sont inférieures à la moyenne. Ceci pourrait être expliqué par une grande proportion des bactéries indigènes qui, dans les environnements naturels, ne se développent pas sur les milieux de culture et à des températures habituellement utilisables pour l’isolement des souches au laboratoire (GONÏ-URRIZA et al., 1999).
En période hivernale, les stations se rapprochent des axes et c’est bien la saison où les stations apparaissent similaires et on remarque que la station S4 est moins polluée par rapport aux autres saisons. Cette réduction serait liée aux pluies qui ont eu lieu pendant cette saison. L’aval de Zegzel enregistre de faibles valeurs de conductivité par rapport à son amont (S1) ce qui explique son rapprochement de l’axe 2.
La station S3 pendant le printemps se rapproche de l’axe 2, ceci est dû à une augmentation de la concentration de différents groupes bactériens tels que les staphylocoques, les streptocoques les ASR et E. coli. En printemps et en été, un gradient de pollution amont-aval est observé au niveau de Zegzel et Moulouya. En amont de Zegzel pendant l’été on note une augmentation de la température qui favorise l’activité bactérienne dans les écosystèmes aquatiques, ceci explique l’augmentation de la DBO5 en cette saison. La station S5 s’éloigne des autres stations sur l’axe vertical et enregistre un taux élevé de pollution en printemps. La station S4 pendant la saison estivale se sépare des autres stations et dévoile de fortes concentrations des FMAT, des streptocoques et des staphylocoques, cette pollution pourrait s’expliquer par les rejets domestiques qui sont véhiculés à partir d’un réseau d’assainissement provenant de la ville de Berkane. Des résultats similaires sont trouvés par Larif sur l’oued de Boufekrane (LARIF et al., 2013) où une évolution spatiotemporelle a été observée de la flore totale ainsi que des bactéries indicatrices de contamination fécale en temps sec et de pluies.
En période automnale les stations se dispersent sur le plan 1-2 de l’ACP intra-saisons (Figure 5). Oued Cherâa (S4) dévoile une forte concentration de DBO5 et enregistre les fortes charges bactériennes indicatrices de la pollution en cette saison (CT, CF, EC, SF, etc.). Par ailleurs, l’amont de Zegzel (S1) apparait de bonne qualité en automne. Des travaux d’aménagement du pont Hassan II au niveau de Saf Saf, Moulouya (S3) déséquilibre l’état physique de cette station ce qui explique la forte concentration de turbidité.
3.2.2 Analyse intra-stations
Pour supprimer l’effet spatial et se focaliser sur l’effet temporel, autrement dit pour mettre en exergue la stabilité spatiale de la structure temporelle, nous réalisons une analyse intra-stations qui permet de rechercher les éléments communs aux tables (dates et variables) (THIOULOUSE et CHESSEL, 1987; THIOULOUSE et al., 1997). L’inertie intra-stations est égale à 0,18 c’est-à-dire que 18,2 % de l’inertie totale est attribuée à l’ACP intra-stations.
Le cercle de corrélation des variables mésologiques met en évidence sur l’axe factoriel 1 (61,6 % de l’information totale) un gradient de température où les valeurs sont élevées en période de l’été au niveau de toutes les stations, qui s’oppose au gradient de pollution organique et aux indicateurs de pollution fécale qui caractérise la saison d’automne (Figure 6) sur l’axe factoriel 2.
La saison automnale s’éloigne des autres saisons, c’est la saison où les stations S1 et S2 apparaissent moins polluées sur l’ACP normée (Figure 3). La variation temporelle des moyennes des variables FMAT, Staph et SF montre une bonne corrélation avec la saison printanière sur l’axe factoriel 1 de l’ACP intra-stations qui caractérise la saison où la station la plus polluée est S4 au niveau de l’oued Cherâa et s’oppose à la DBO5, aux ASR, aux CT, CF et EC sur l’axe factoriel 2 du cycle de corrélation. Nous pourrions expliquer cette augmentation de charge bactérienne par l’augmentation de la température et la durée d’ensoleillement pendant le printemps. Les variations saisonnières des bactéries entériques peuvent être en partie influencées par des changements des conditions hydrométéorologiques (HUNTER et al., 1999), ainsi qu’elles peuvent induire une ampleur de la contamination bactérienne fécale des cours d'eau, particulièrement en période d'automne et par conséquent constituer un vrai risque sanitaire.
La conductivité est corrélée positivement avec la saison hivernale où de fortes concentrations sont enregistrées au niveau de la Moulouya (S3 et S5). Cette dernière connaît des fluctuations saisonnières sous l’influence de l’évaporation ou de précipitations démontrées par RAMDANI (1986).
La température est bien corrélée avec la saison estivale où toutes les stations enregistrent des valeurs élevées en termes de température (donc c’est un effet temporel). Des études ont préalablement souligné des variations spatiotemporelles dans les eaux de surface (FERNANDEZ-ALVAREZ et al., 1991; CHAHLAOUI, 1996). Ces auteurs ont révélé que les charges en bactéries aérobies hétérotrophiques et en entérobactéries croient avec la température de l'eau. Par ailleurs, CHAHLAOUI (1996) a démontré l'existence d'un gradient croissant des charges bactériennes de l'amont vers l'aval du cours d'eau, ce qui est le cas pour l’oued Zegzel et Moulouya.
4. Conclusion
Le présent travail fournit des informations importantes sur la base de descripteurs bactériologiques (FMAT, CT, CF, SF, etc.) des eaux de la Moulouya, Zegzel et Cherâa évalués ci-dessus (Tableau 3). L’analyse explicative (ACPn) des variables étudiées a permis d’obtenir une structure amont-aval, ainsi qu’une typologie spatiotemporelle. Les résultats obtenus montrent que la variation spatiotemporelle de la charge bactérienne des eaux de l’oued Cherâa est supérieure aux normes marocaines pour les eaux destinées à des fins agricoles. Les eaux de l’oued Cherâa sont qualifiées de mauvaise qualité selon les normes marocaines des eaux de surface principalement au cours des saisons sèches où les rejets des eaux usées non traitées provenant des habitations riveraines auraient lieu.
Par ailleurs, ces eaux sont utilisées pour différents usages ménagers, abreuvement et agricole ce qui leur constitue un risque sanitaire (OMS, 1990), d’où la nécessité d’épurer les eaux usées avant leur évacuation dans les écosystèmes aquatiques. La qualité des eaux de Zegzel et Moulouya reste bonne en moyenne et elles peuvent être utilisées pour différents usages, dont l’irrigation.
Appendices
Remerciements
Ce travail a été réalisé au sein de l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires Agropole-Berkane (ONSSA). Nous exprimons notre gratitude au directeur régional de l’ONSSA, M. Noureddine Attar, pour son soutien constant lors de l’élaboration et la réalisation de ce travail. Nous remercions également M. Mohammed Khoumli directeur du laboratoire de microbiologie alimentaire à l’ONSSA pour son aide technique.
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