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« Comment un enseignant soutient-il les élèves immigrants intégrés dans une classe ordinaire au primaire dans la langue d’enseignement et dans les matières scolaires tout en tenant compte de l’ensemble de la classe ? » (p. 39) L’ouvrage est guidé par cette question. Découlant d’une thèse, ce livre est organisé selon l’articulation classique attendue d’une telle démarche scientifique. Ainsi, il nous offre une problématique détaillée relevant les principaux enjeux et défis inhérents à l’enseignement et particulièrement du travail auprès des élèves immigrant⋅e⋅s. Une mise en dialogue des besoins des élèves et de la réponse des enseignant⋅e⋅s est alors présentée. Ensuite, l’auteure propose d’étudier le soutien offert de la part des enseignant⋅e⋅s aux élèves immigrant⋅e⋅s intégré⋅e⋅s dans les classes ordinaires à l’aune de l’approche sociohistoricoculturelle. En s’appuyant sur des concepts vygotskiens, notamment la zone proximale de développement, l’étayage et la perception du langage comme outil culturel, l’auteure décrit habilement les liens qu’elle tisse entre ce cadre et le soutien prodigué par les enseignant⋅e⋅s aux élèves immigrant⋅e⋅s. Après avoir détaillé le contexte de la recherche et les outils employés afin de collecter les données, l’auteure analyse le type de soutien donné par deux enseignantes pour aider trois élèves.
De façon avisée, la chercheuse aborde des enjeux concernant l’enseignement aux élèves immigrant⋅e⋅s comme le travail « autoprescrit » ou l’ajout de tâches pour répondre aux besoins des élèves. En effet, ces tâches peuvent être nombreuses et, puisqu’elles répondent aux objectifs généraux de l’école, ne sont pas toujours considérées.
Les retombées de cette recherche sont multiples et dépassent les éléments de réponse à la question générale. Ainsi, des dynamiques scolaires relatives à l’enseignement en milieu multiethnique sont relevées, notamment l’enseignement en classe ordinaire d’élèves récemment sorti⋅e⋅s des classes d’accueil. La recherche est décrite minutieusement et s’appuie sur des fondements conceptuels et théoriques solides. Par ailleurs, l’approfondissement des interactions entre les trois dyades à l’étude est particulièrement appréciable par le cadre structuré de l’analyse.
Bien que la description des comportements de soutien soit abordée, peu d’espace est accordé à la dimension subjective de l’aide donnée et reçue de la part des élèves et des enseignant⋅e⋅s. Les données collectées par la chercheuse sont utiles pour comprendre les besoins perçus par les enseignant⋅e⋅s et leur réponse. Cela dit, une considération de la perception de l’élève moins centrée sur la tâche serait pertinente pour la détermination d’autres facteurs pouvant avoir une influence sur les comportements à l’étude. Cette décentration du cadre, en s’appuyant sur les perceptions des participant⋅e⋅s, pourrait aussi permettre de présenter d’autres formes de soutien, moins directes, de la part des enseignant⋅e⋅s.
En somme, l’auteure propose un ouvrage rigoureux qui s’adresse aux chercheurses qui désirent approfondir les thèmes de l’enseignement aux élèves immigrant⋅e⋅s et de leur soutien dans les classes ordinaires. Par ailleurs, les praticien⋅ne⋅s pourraient également y trouver matière pour analyser leurs méthodes de soutien en vue d’aider ces élèves.