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Cette deuxième édition revue et augmentée de l’ouvrage de Jean-Paul Payet et Diane Rufin représente une importante contribution à la sociologie des inégalités en général, et en particulier, les inégalités liées à l’éducation et aux pratiques institutionnelles. Tout le long du livre, les auteurs déconstruisent certaines réalités sociales considérées comme évidentes et entretenues par différentes institutions. Le livre se divise en deux grandes parties : la première partie présente quatre Évidences concernant les inégalités scolaires. Plus précisément, il s’agit des évidences liées aux différences entre écoles, enseignants, et les différences liées aux familles ou aux élèves. La deuxième partie du livre expose également quatre Évidences liées aux pratiques institutionnelles. Il s’agit notamment des évidences concernant les notes et le niveau des élèves, des droits des élèves et des parents, et enfin les évidences concernant la violence à l’école. Le principal point fort de cet ouvrage tient au fait que les auteurs s’appuient sur leur expérience et sur des études empiriques très riches et très éloquentes, menées dans différents contextes sociaux, pour montrer comment des opinions toutes faites, des croyances et des préjugés généralement admis dans le domaine de l’éducation sont fondés sur des logiques qui servent plus les intérêts personnels des enseignants ainsi que les intérêts politiques et économiques, davantage que pour les intérêts des élèves ou des étudiants. Les différentes évidences analysées dans ce livre mettent en perspective plusieurs exemples de ce type : en ce qui concerne les logiques qui servent les intérêts personnels des enseignants, dans l’évidence 1, les enseignants les plus expérimentés exercent dans les écoles les plus défavorisées, les auteurs déclarent que les enseignants qui se placent dans ces types d’écoles recherchent plus de confort dans leur travail (p.20). En ce qui a trait aux logiques qui servent les fins économiques et politiques, les auteurs évoquent, un aspect qui semble particulièrement frappant lorsqu’ils analysent l’évidence 4, liée à l’enseignement spécialisé. En effet, au sujet de ce type d’enseignement, Payet et Rufin révèlent une logique de l’offre et de la demande (p.54). Par ailleurs, le fait d’associer les fondements théoriques aux fondements empiriques constitue également une richesse indéniable de ce livre. De plus, le texte est rédigé dans un langage simple, et accessible. Conçu sous un format de poche, cet ouvrage constitue un précieux outil pédagogique très pratique.
Toutefois, une grande tendance à la généralisation, très peu de nuances et les partis pris des auteurs sont des aspects qui pourraient être propres à susciter de vives critiques.
Malgré ces limites, la pertinence de cet ouvrage dans le contexte actuel ne souffre d’aucune contestation. En effet, très riche en informations et en enseignements, il constitue une référence et une grande source d’inspiration pour les professionnels de l’éducation, l’administration scolaire, les chercheur(e)s, les étudiant(e)s, les élèves, ainsi que pour les parents, malgré le fait que la déconstruction des évidences exposées soit susceptible de déstabiliser certains savoirs et réalités sociales déjà bien établis.