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L’évaluation des politiques éducatives est un ouvrage concis dans lequel son auteur constate la récurrence du débat public qui ponctue le fonctionnement de l’école française et s’interroge sur le succès de l’évaluation des politiques éducatives. Xavier Pons amorce son analyse en traçant un historique de l’évolution des pratiques évaluatives des dernières décennies en tant que domaine d’action publique, et conclut sur le caractère secondaire accordé à l’institutionnalisation de l’évaluation en France. Il s’intéresse ensuite aux acteurs impliqués dans l’évaluation du système éducatif ainsi qu’aux outils et méthodes qu’ils privilégient, et mentionne l’influence du contrôle étatique dans la division du travail évaluatif. L’auteur soulève les impacts peu étudiés des évaluations conduites en explorant notamment la contribution réelle des conclusions évaluatives à la prise de décision et au développement des pratiques des acteurs concernés, l’espace communicationnel créé, l’opportunité de formation et de professionnalisation et finalement, la finalité de régulation. Associée dans les écrits de recherche à l’outil d’une marchandisation de l’école, à l’instrument d’une nouvelle gestion publique ou à la conséquence d’un néolibéralisme, l’évaluation des politiques éducatives demeure, selon l’auteur, un idiome réformateur, c’est-à-dire un outil de communication utilisé par les acteurs, soutenant l’idée d’une réforme du système et de l’évolution des pratiques, mais dont les assises se révèlent imprécises.
Les propos tenus dans cet ouvrage témoignent d’une connaissance très élargie du sujet par l’auteur. L’historique présenté s’appuie sur un travail de documentation de qualité, truffé de nombreuses références temporelles, factuelles et nominales. Toutefois, il peut être plus ardu pour un lecteur peu familier avec le système éducatif français d’arriver à une compréhension adéquate en raison des multiples acronymes et références qui viennent parfois alourdir le texte, particulièrement dans le premier chapitre de l’ouvrage.
L’auteur expose sa thèse de l’évaluation des politiques éducatives en tant qu’idiome réformateur en guise de conclusion. Le raisonnement inhérent à cette position est introduit dans les chapitres qui précèdent cette conclusion et ne peut que conduire le lecteur à adhérer à la thèse que propose Pons. En effet, l’auteur démontre un argumentaire antérieur qui dépeint adroitement le portrait contextuel et historique du système éducatif français, forçant ainsi le lecteur à réaliser un constat similaire et à approuver ce qui est mis en évidence. L’arrivée tardive de cette idée centrale est toutefois questionnable, car ce qui précède dans l’ouvrage laisse parfois entrevoir une vision disparate et égarée à l’égard de l’activité évaluative du système éducatif. Seule la conclusion permet de corriger cette impression avec le constat de cette conception institutionnelle de l’évaluation qui perdure dans le temps, n’identifiant elle-même aucun objectif ou contenu précis dans son discours.
Somme toute, cet ouvrage parvient à réaliser l’objectif annoncé a priori et offre un regard fort intéressant sur l’évaluation des politiques éducatives françaises, sous un angle qui combine à la fois perspectives sociologique, politique et administrative.