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Ce livre, issu d’une recherche européenne, a comme objectif de comprendre les modes de régulation des systèmes éducatifs de cinq pays (Angleterre, Belgique, Hongrie, Portugal et France). Il se divise en deux parties : la première discute les orientations théoriques et méthodologiques de l’étude et présente une analyse comparée des régulations des systèmes scolaires. Des questions cruciales telles le rôle de l’État, la décentralisation, la concurrence entre les établissements et les rapports entre enseignement public et enseignement privé sont abordées. La deuxième partie permet de découvrir les perspectives nationales des politiques qui orientent six espaces scolaires (Londres, Charleroi, Budapest, Lisbonne, et deux espaces français : Lille et Créteil).
L’étude de ces six cas montre qu’il existe des relations compétitives entre les établissements scolaires pris dans une logique de marché ; logique qui semble avoir des incidences pernicieuses sur les inégalités sociales et scolaires et sur les rapports qu’ils établissent avec les communautés locales et les familles. Quatre types de régulations ont été repérés : les régulations institutionnelles, les relations entre l’État et les établissements, les relations des établissements entre eux et les relations internes à chaque établissement. Ces relations affectent le fonctionnement administratif et pédagogique des établissements scolaires.
Un des points forts de cette étude est de montrer, grâce à des données de terrain, la complexité des évolutions dont les systèmes scolaires souffrent actuellement. Les logiques des établissements n’y sont pas seulement orientées par les politiques, les autorités locales ou leurs projets pédagogiques, elles sont aussi influencées par la position qu’ils occupent dans l’espace local et en fonction de leur attractivité pour les parents.
Par ailleurs, les auteurs montrent que le rôle de l’État diffère d’une société à l’autre et qu’autant les modèles de gouvernance que les formes de régulation sont très variables d’un système à l’autre, ce qui compromet la convergence des systèmes éducatifs européens.
L’étude met finalement en évidence que tous les pays étudiés, au-delà des différences locales, semblent chercher un compromis entre deux pôles relativement contradictoires : d’une part, la politique de libération de l’offre de formation qu’ils appellent le quasi-marché, et d’autre part, la politique de l’État évaluateur, qui essaie de conserver son contrôle. Ainsi, tous ces pays semblent plutôt chercher un compromis entre ces deux modes de gouvernance en donnant aux instances locales un pouvoir accru, qu’il s’agisse des hiérarchies intermédiaires de l’État ou des collectivités locales.
Même si la lecture de cet ouvrage est ardue, il s’agit d’une étude qui réclame une ample discussion ; les chercheurs universitaires, les décideurs des politiques scolaires et la société civile québécoise devraient être interpellés par ses résultats. En effet, comme l’a montré Lessard (2003), la réforme éducative que vit le Québec présentement impose une nouvelle gouvernance ou un nouveau mode de régulation.
Lessard, C. (2003). L’école, communauté de sens ou produit de consommation. Télescope, l’Observatoire de l’Administration Publique,ENAP, 10(2), 12-17.