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Laissons l’émotion guider nos réflexions. Laissons l’empathie animer notre lecture. Laissons les ressentis éprouver nos âmes afin que nous puissions percevoir ce lien qui nous lie tous : l’humanité. Ce poème a pour vocation d’humaniser une situation qui peut sembler lointaine. Évoquant différents aspects du conflit, il se veut porteur de vérité, mais aussi d’espoir. Par le prisme des divers points de vue qui le traversent, il est possible de se mettre à la place de tous ceux qui souffrent – peu importe leur camp. Si le droit et la justice ont pour vocation de prévenir et réparer les atrocités, l’émotion et l’art ont pour mission de lier les humains entre eux. Par le biais des ressentis, nous pouvons tous percevoir que nous appartenons à une même humanité, que nous sommes habités par un même coeur. Russes ou Ukrainiens, les populations meurtries méritent d’avoir une voix, que leur parole soit diffusée, répandue et écoutée. Le tableau qui figure dans le texte est une peinture de l’artiste ukrainienne Maria Primachenko, figure emblématique de l’identité nationale ukrainienne. Durant le conflit, un musée contenant plusieurs de ses oeuvres a été réduit en cendres. Certaines de ses peintures ont pu être sauvées grâce au courage de locaux ayant pénétré dans le bâtiment en feu pour y extraire les oeuvres colorées et vives. La culture ne doit pas être anéantie, car elle porte la vie d’un peuple, une identité entière qui lui permet de se retrouver, mais aussi de se découvrir aux autres. Dans la même veine, la référence aux chemises brodées évoque les traditions populaires ukrainiennes. Il s’agit d’hommages à cette culture que je commence à connaitre, malheureusement dans des circonstances tragiques, mais qui me semble fascinante et si pleine de résilience. Résilience, renaissance : deux principes directeurs qui permettront de reconstruire un avenir positif.
Je vois la fertilité opprimée
Des corps et des champs de blé
Sous les bruits étrangers
Les cités ne reconnaissent plus leur horizon
Esprits lacérés – chairs oubliées
Je joins mes paumes et implore ma propre résilience
Sous les bruits étrangers, je prie ma résistance
Les liens sont sectionnés : mon fils, ma terre, mon Aimé
Il y a le quotidien bafoué
Les enfants qui naissent malgré l’innocence dérobée
Les enfants qui rient sous les bruits étrangers
J’entends les fissures qui ne craqueront pas
Qui courent sur les murs attaqués et sous mes doigts
J’entends les pierres qui ne tomberont pas
J’attends les mères qui ne cesseront pas
J’entends les consciences qui ne s’effondreront pas
L’humanité n’est pas morte au combat
Les oiseaux reviendront pour chanter liberté
Des ailes coupées renaitront les avenirs rêvés
Et ne mourra jamais le chant des évadés
Des songeurs d’avenir, des résistants masqués
Nos chants infinis seront toujours enflammés
Peu importe le silence imposé par les bruits étrangers
Et l’oiseau de communion, et l’oiseau d’unisson
Leur envol dans le ciel restera immaculé –
Renaissance à chaque battement de plumes
Fières, elles délivrent nos inspirations
Icare n’est qu’un mirage – il nous faut voler vers le Soleil
Nos ailes ne failliront pas, elles se déploient et réveillent
Tout ce qu’il y a au fond d’un regard qui s’émerveille
Je vois Anastasia, Yulia et Oleksandra
Fermer les paupières et joindre les mains
Je les vois près de moi
Protégeant l’humanité en leur sein
Hymne de liberté – nous te chantons tous
Martyrs relevés, âmes célébrées
Nous ne voulons plus de renaissances fusillées
Et dans la confiance de ton cri
Se révèle la pureté des vies –
Et sera donné en partage le pain ukrainien
Pour chaque fin prématurée, cicatrisera de son dernier grain
Le tournesol volé des champs est martyr au bûcher
Au feu volent les humanités
Mais les regards fiers et les bras certains
D’un nouvel unisson, feront déferler les pavillons
Et vers fraternité ne cesseront de marcher
Les espoirs de peuples soudés
Aimons nos frères, aimons nos horizons
Car c’est ensemble qu’ils aspirent à une nouvelle vision
Les fondations réunies d’une nouvelle construction
Va à la fenêtre, vois l’obélisque blanc
De partout bientôt fusionneront les chants –
Et tu sais mon enfant, jamais ne tomberont les mémoires
De tous ceux perdus dans le noir des ruines, dans le noir du devoir
Ils sont comme cet oiseau des libertés
Enfermé dans une cage, qui ne peut plus s’y déployer
Mais tu sais mon fils, ses plumes réchaufferont leurs coeurs
D’avoir dû vers un ailleurs
Loin de toi s’envoler –
Il y a un pays qui se relève, au-delà de nos consciences, par-delà nos réalités
Un nouveau printemps, pour chacune des peurs qui a secoué tes os
Pour tous ces frémissements près de ta peau
Les oiseaux renaitront tous, et tu les verras
Quand vers le ciel tu lèveras tes bras
Accueille la mère, accueille le père
Accueille le pardon, accueille l’Autre
Accueille celui qui t’a combattu
Accueille celui que tu as vaincu
Oppose ta pureté aux coeurs déviés
Détourne leur obscurité par ton émotion
Il y aura une résurrection pour chacune de tes résignations –
À l’encre de ta vie, écris un nouveau destin
Des fractures en ton sein, coule un nouveau vin
Enfile ta vychyvanka couleur azur
Fais-en ton armure et murmure
Que notre mère est celle de tous
Que chaque enfant est celui de tous –
Liberté, c’est toi qui attires
Au rassemblement des martyrs
Si tu souffres aujourd’hui
C’est pour mieux repartir
Affectée, éprouvée, prouvée – ton identité
Jamais abattue – relevée et fière
Humanité, tu es forte de multitudes
L’aboutissement de tes certitudes
Tu lies nos solitudes
Citoyens et frères
Prêts à incarner cette prière, ensemble sur cette terre –
J’entends à présent
Les rêves rassemblés des esprits alliés
S’élever de la forêt sombre vers les villes sans désespoir
J’entends maintenant
La clameur des raisons s’incliner pour partager l’instant des passions
De la mer aux monts des regards exaltés
C’est l’horizon qui lie les mots
Construire une nouvelle force
Des confins lointains aux baies bondées
Nous devons reprendre la route
Vers le renouvellement des saisons
Et un enfant rit pour détourner
Tout renoncement à l’action libérée.