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Introduction

Les troubles mentaux graves ont été associés à un risque plus élevé de comportements antisociaux et de violence (CAV). Par exemple, une méta-analyse récente montre que la psychose est associée à un accroissement du risque de violence de 49 à 68 % par rapport à la population générale [1]. Les gestes de violence commis par les personnes atteintes de schizophrénie peuvent générer une attention médiatique importante, les gestes étant parfois d’une terrible violence. Ceci contribue à la stigmatisation de ce groupe, et ce, malgré qu’une majorité de ces individus ne manifeste pas de CAV [2]. De plus, lorsque des CAV surviennent, l’entourage et les équipes de soins deviennent craintifs et se sentent impuissants. On peut alors observer une augmentation des mesures coercitives - comme l’isolement et la contention - et dans certains cas, une dérive vers le système carcéral. L’amélioration de la prévention et des traitements des CAV chez les personnes atteintes de TMG est donc primordiale. Cependant, ce sont des tâches complexes où de multiples interventions à différents niveaux doivent être instaurées.

Les CAV émergent d’une multitude de facteurs qui interagissent. Dans cet article, nous analyserons les différents aspects sous l’angle de la perspective systémique [3]. L’interaction personne-environnement sera évaluée à partir de l’environnement social dans lequel l’individu est immergé et avec lequel il interagit. Particulièrement, l’accent sera mis sur l’approche thérapeutique qui vise la réhabilitation, c’est-à-dire de développer des éléments du contexte social pour redonner à la personne sa dignité et une place dans la société [4]. Dans cette perspective, les dimensions sur lesquelles des actions s’avèreront nécessaires et qui seront à prioriser pour améliorer le succès des interventions et appuyer le processus de rétablissement des personnes souffrant de TMG associés à des troubles concomitants de CAV sont :

  1. diminuer la discrimination ou la stigmatisation

  2. favoriser l’intégration des services de santé mentale, d’alcoolisme et de toxicomanie et de justice offerts aux personnes souffrant de TMG afin d’assurer une cohérence et une continuité des soins.

Ces composantes prioritaires seront discutées en évaluant les modèles en place et leur pertinence quant à la mise en œuvre d’actions ciblées et efficaces.

Discrimination/stigmatisation

La stigmatisation est un problème important qui représente un obstacle au rétablissement des personnes atteintes de TMG. L’effet le plus préjudiciable de la stigmatisation et de la discrimination réside dans les attitudes de condescendance et de dénigrement manifestées partout dans la société à l’égard de la maladie mentale et de ceux qui en souffrent [5].

Figure 1

Modèle systémique de la stigmatisation et interventions possibles (encadré), inspiré de Henderson et Thornicroft (2009) et Corrigan et al. (2008)

Modèle systémique de la stigmatisation et interventions possibles (encadré), inspiré de Henderson et Thornicroft (2009) et Corrigan et al. (2008)

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Un processus d’intériorisation a été décrit où ces attitudes négatives peuvent s’intégrer à l’identité de la personne souffrant de TMG [6]. Deux formes de  stigmatisation sont exposées: la stigmatisation sociale (public stigma) et l’autostigmatisation (self-stigma) [7]. Les stéréotypes sociaux seraient à la base de ce phénomène où les personnes atteintes de TMG sont perçues comme dangereuses, incompétentes et faibles [7]. Henderson et Thornicroft [3] proposent un modèle systémique (figure 1) qui lie les différentes composantes et mène à la discrimination de l’individu. La culture et l’ignorance à l’égard de la santé mentale provoqueraient des attitudes négatives qui culmineraient en des comportements de stigmatisation comme le refus d’embaucher une personne atteinte de TMG, mais également, au plan individuel, en la construction d’une estime de soi fragile et d’un concept de soi négatif. Cette dernière composante mènerait à des attitudes d’anticipation d’être discriminé et freinerait la progression vers le rétablissement de l’individu qui ne s’investirait plus pleinement dans le processus de réadaptation de peur d’échouer ou d’être rejeté [8].

L’interaction avec l’environnement social est également complexe puisque les patients rapportent qu’être atteint de schizophrénie a créé des problèmes dans les relations avec la famille, les amis et des difficultés sont mentionnées pour se trouver et maintenir un emploi [8]. Une dégradation des soins de santé physique est observée, les symptômes physiques étant souvent attribués à la maladie psychiatrique [6]. Un cercle vicieux s’installe où l’individu ressent beaucoup de stress, se dévalorise et freine son processus de rétablissement (par le processus d’autostigmatisation) et cela augmente les risques d’une rechute qui confirmera l’image de soi négative. Cette perspective stress-vulnérabilité a amené van Zelst [9] à proposer un modèle développemental (gène-environnement) qui inclut la stigmatisation comme facteur causal dans le déclenchement et le maintien de la pathologie. Cette conception est soutenue par l’association positive qui a été observée entre l’intensité des symptômes et la perception d’une perte de dignité [10]. La conception négative du soi et de l’environnement s’amplifie lors d’un passage à l’acte. Les éléments de dangerosité suspectés se confirment [11]. Trouver un hébergement devient ardu [12]. La discrimination s’intensifie et se manifeste tant chez les intervenants de la santé que dans la population générale. Pour décrire ce phénomène, le concept de double et même de triple stigmatisation a été proposé [13] où un effet additif se manifesterait par le fait d’être atteint d’un TMG, de perpétrer des actes criminels et d’être aux prises avec des problèmes d’alcool ou de drogues. Des conséquences négatives importantes pourraient émerger de cette conception sociale négative liée à la dangerosité puisque la prévalence des personnes atteintes de TMG dans les prisons est importante [14] et qu’une augmentation des lits en psychiatrie légale est observée [15]. Est-ce une nouvelle manière de contenir les CAV? La crainte de CAV augmente également le recours à des mesures coercitives dans le réseau de soins régulier comme l’hospitalisation forcée ou pseudovolontaire (sous la menace d’un recours aux tribunaux si la personne décide de quitter contre l’avis de l’équipe médicale) [6]. L’aidant, malgré sa volonté de soutenir l’individu dans ses démarches, peut devenir nuisible (harmful helper) [6]. La reprise du contrôle (empowerment) par l’individu est réduite au profit de mesures de contrôle externe. Une perte de l’adéquation entre les besoins de la personne et les soins offerts se produit.

La stigmatisation a souvent été perçue comme un problème insoluble, un état de fait avec lequel les gens atteints de psychose devaient composer [16]. Cette vision pessimiste pourrait changer puisqu’un nouveau programme d’intervention et de recherche sur la discrimination des gens atteints de TMG vient d’être lancé en Angleterre. Le programme Time to Change [3] a reçu un appui financier important pour effectuer une action nationale et locale qui vise à engager les individus, les communautés et les organisations professionnelles dans un mouvement visant la réduction de la stigmatisation. Guidé par un modèle systémique des facteurs impliqués dans l’émergence de la discrimination, différentes interventions sont prévues.

Au niveau populationnel, Time to Change fera une large campagne d’éducation visant la diminution de la discrimination [3]. Ce type d’intervention a démontré son efficacité pour diminuer les attitudes négatives, mais l’effet est de faible amplitude et de courte durée. Les stéréotypes négatifs s’avèrent difficiles à déloger et filtreraient les messages positifs au profit des messages négatifs [7]. Ce type d’intervention est donc une composante efficace si elle se loge dans une stratégie plus large d’action.

Au niveau organisationnel, une manière de réduire la stigmatisation serait d’assurer une fluidité entre les milieux spécialisés et les soins de première ligne afin que les patients puissent retourner rapidement vers les soins primaires qui favorisent une prise en charge globale ou holiste et diminuent les effets négatifs de se retrouver dans un milieu de la santé mentale; plus particulièrement dans le milieu de psychiatrie légale [17, 18]. L’intégration au travail pourrait également être favorisée par des lois antidiscriminations. Une initiative américaine a été prise en ce sens, mais les résultats demeurent mitigés. Davantage de recherches seront nécessaires pour déterminer l’efficacité de ce type de mesure [7].

Au niveau individuel, Time to Change offrira des programmes d’éducation pour modifier les attitudes négatives de groupes ciblés comme les intervenants de la santé et les employeurs [3]. Ces programmes ont démontré une efficacité à amoindrir les attitudes négatives, comme dans les forces policières [19] où cela semblait prometteur pour diminuer l’utilisation de la force, mais n’apparaissait pas avoir d’impact sur les attitudes d’intégration sociale; les gens n’étant pas davantage ouverts à l’instauration d’un foyer de groupe de personnes souffrant de TMG près de leurs résidences [7]. Le contact interpersonnel direct avec les individus atteints d’un TMG associé à des CAV pourrait représenter une stratégie puissante pour changer les attitudes négatives [7]. Pour être efficace, ce type de rencontre devrait contenir 4 éléments essentiels :

  1. une égalité entre les groupes

  2. des buts communs

  3. l’absence de compétition

  4. être approuvé et même demandé par les gestionnaires.

L’intervention serait également davantage agissante si elle se déroule dans le milieu de travail ou dans les organisations et implique une interaction en vis-à-vis [7].

Au niveau des individus atteints de TMG, Time to change offrira des programmes de promotion de la santé et de reprise de contrôle (empowerment). L’approche de reprise de contrôle est parmi les meilleures voies pour contrer l’autostigmatisation [7]. Les approches de thérapie cognitive se sont également avérées efficaces pour réduire les schémas négatifs [7]. La divulgation des problèmes de santé mentale et la protestation par l’individu ou par les groupes de patients victimes des préjudices sont également recommandées. Des avantages et des inconvénients sont associés à ce type de démarche, il importe de bien cerner les enjeux à chaque occasion afin de ne pas augmenter la stigmatisation lorsque des actions d’affirmation personnelle ou de groupe sont effectuées [7].

Services intégrés

L’intégration des services est un principe important sur lequel s’appuie la réadaptation psychiatrique [7]. Les équipes multidisciplinaires et les soins intégrés ont un impact positif sur la sévérité des symptômes, le fonctionnement social, les perspectives d’emploi et sur l’hébergement des personnes souffrant de TMG si on les compare aux services conventionnels organisés souvent en silo ou en parallèle [20]. Lorsque des troubles concomitants d’alcool ou de drogues (TCAD) sont présents, l’intervention devient davantage ardue tant au niveau individuel qu’organisationnel. Il s’agit d’un problème de grande ampleur (jusqu’à 50% des patients souffrant de TMG auraient un TCAD) qui augmente les risques de rechute, d’hospitalisation, de CAV, d’incarcération, d’itinérance et d’infection au VIH et aux hépatites [21]. L’offre de soins pour ces 2 problématiques est souvent fragmentée puisque les services pour l’alcoolisme et la toxicomanie et ceux de la santé mentale fonctionnent généralement en parallèle [22]. Les patients naviguent donc entre des systèmes séparés où ils ont de la difficulté à saisir les objectifs de leur réadaptation, les messages étant disparates et même contradictoires entre les services [21]. Un modèle de traitement intégré a émergé pour les personnes atteintes de TMG et de TCAD (double problématique ou dual diagnosis) [7, 21, 22]. Il s’agit d’un modèle où l’on propose qu’un ou des cliniciens de la même équipe puissent offrir les soins pour les deux problématiques afin que la personne puisse bien gérer les deux maladies qui sont souvent imbriquées. Il s’agit d’une approche qui vise l’élargissement de la multidisciplinarité ou la création d’un programme intégré [23]. Cette intervention apparaît holistique et unitaire pour l’individu. Les soins sont cohérents tant dans leur philosophie que dans leurs recommandations. Les résultats, au niveau de la réduction de l’abus de substances de ce type de programme, sont cependant mitigés, mais une diminution du recours à l’hospitalisation ainsi que du glissement vers l’itinérance est observée pour ceux qui bénéficient des traitements assurés dans la communauté (Assertive Community Treatment ou ACT) [7]. Une analyse en classe latente [24] a révélé que 4 trajectoires apparaissaient suite à un suivi de 10 ans de cette population. Les 4 groupes étaient :

  1. rétablissement rapide (early recovery)

  2. rétablissement instable (unstable recovery)

  3. rétablissement tardif (late recovery)

  4. aucun rétablissement.

Le premier groupe était caractérisé au départ par des TCAD moins sévères et une plus grande utilisation de la clozapine. Le 4e groupe présentait le niveau le plus faible de participation aux traitements. Il s’agit donc de groupes ayant des problématiques particulières et une interaction spécifique au niveau des soins.

Les principes énoncés par les concepteurs des traitements intégrés se révèlent séduisants. Toutefois, plusieurs limites à ces interventions ont surgi. L’interface avec le système de justice semble problématique et a été peu explorée. Les données actuelles semblent montrer que ces personnes ne sont pas de bons candidats aux interventions de type ACT intégré [7]. Cet insuccès s’expliquerait par les problèmes de CAV des patients. Par ailleurs, il s’agit d’un modèle qui vise la création d’une équipe multidisciplinaire apte à offrir tous les services, mais dans certains contextes, où des contraintes organisationnelles, humaines et financières sont plus importantes [25], cela apparaît plus complexe. Il semble donc que les programmes de traitements intégrés ne conviennent ni à tous les patients, ni à tous les contextes de soins.

Des modèles alternatifs ont été proposés. Les programmes ACT spécialisés en psychiatrie légale (Forensic ACT ou FACT) ont ainsi émergé afin de diminuer l’incarcération et répondre aux besoins légaux des patients [12]. Un problème de définition de l’intervention est apparu ainsi qu’une difficulté à bien cerner les différences avec les programmes ACT réguliers traitant des patients qui ont des profils similaires. Le nom porte également un fort potentiel de stigmatisation [17]. Par ailleurs, à l’image des autres recherches sur les programmes intégrés, peu d’intérêt est accordé aux processus de changement, pour les équipes de soins qui doivent composer avec de nouvelles manières de travailler [20].

L’intégration des systèmes pourrait représenter une voie prometteuse. Un modèle théorique (figure 2)[25] émerge qui reprend les composantes essentielles à considérer lors d’un processus d’intégration systémique. L’objectif est l’établissement de liens durables entre les dispensateurs de services ou les unités de traitement dans un système ou encore dans l’ensemble des systèmes; ceci visant à faciliter la prestation de services aux personnes à l’échelle locale [23]. Ainsi, il apparaît important de bien cerner la configuration des soins et de l’appareil judiciaire et le type de patients qui bénéficieront des traitements dans un contexte particulier avant d’entreprendre un processus d’intégration. Le contexte global doit également être considéré puisque les valeurs sociales et l’appui des structures gouvernementales, tant au niveau financier que politique, sont primordiaux pour la réussite de l’implantation de services intégrés [21]. Le type d’intégration doit demeurer souple: il peut prendre la forme d’équipes multidisciplinaires où existe une collaboration entre les professionnels de disciplines différentes, ou bien s’agencer dans des services de soins où l’on retrouve un système organisé pour des patients précis recevant leurs soins en fonction d’un protocole qui couvre l’ensemble des étapes de la maladie et du rétablissement selon une trajectoire de soins intégrés (Integrated care pathway) [20].

Figure 2

Modèle de l’intégration des services de santé mentale, de la toxicomanie et de la justice, inspiré de Brousselle et al. (2007)

Modèle de l’intégration des services de santé mentale, de la toxicomanie et de la justice, inspiré de Brousselle et al. (2007)

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Le processus de changement demande de considérer 4 dimensions de l’intégration (figure 2) qui mèneront à l’intégration systémique du nouvel ensemble de services [25]. Les dimensions sont :

  1. l’intégration des soins par la coordination des pratiques des cliniciens

  2. l’intégration de l’équipe clinique qui implique de s’assurer de l’établissement des différentes équipes multidisciplinaires et de leur mode de fonctionnement dans la structure du réseau

  3. l’intégration fonctionnelle qui implique une coordination entre les activités de soutien (le financement, la gestion et les modalités de diffusion de l’information) et les activités cliniques

  4. l’intégration normative qui consiste à s’assurer de la cohérence entre le système collectif de valeurs et de représentations, la gouvernance et le système clinique.

Les mécanismes d’intégration sont multiples; nous pouvons les observer à la figure 2. Ces mécanismes sont nécessaires pour que l’intégration ait lieu à chacune des dimensions. Plus spécifiquement, la formation est cruciale [23]. Différentes modalités éducatives ont été proposées afin d’assurer la cohérence des réseaux intégrés de soins. Une initiative intéressante a été faite à Québec afin de favoriser l’intégration des soins offerts aux personnes souffrant de troubles de la personnalité [26]. L’approche était psychoéducative en ce qu’elle offrait une formation aux différents intervenants du réseau sur la manière d’interagir avec les patients qui présentent des problèmes reliés à leur personnalité. Les auteurs précisent que l’ingrédient essentiel du succès de leur programme a été le transfert des connaissances aux partenaires par les professionnels du Faubourg St-Jean (clinique spécialisée de 3e ligne des troubles de la personnalité). Toutefois, cette action ne visait pas l’intégration du système avec l’appareil judiciaire. À cet effet, un programme de formation nationale fait de module interactif a été réalisé en Angleterre [27] pour les intervenants qui travaillent avec des personnes atteintes d’un trouble de personnalité. De manière constructive, ce projet vise les intervenants directement en lien avec les patients (ce qu’ils qualifient de : front line staff), et ce, dans les services de santé, mais également pour les autres intervenants tels les policiers et les gardiens de prison. Le projet est en phase d’implantation et des résultats plus précis sont à venir en ce qui a trait à la capacité de cette intervention à mieux intégrer les soins. Un autre modèle de formation a également été proposé pour les personnes qui présentent des problématiques multiples [23, 28] : celui des programmes de formation croisée. Cette approche introduit le partage des informations à travers les différents rôles possibles dans les tâches, les situations et les positions occupées par les coéquipiers. Il s’agit d’une stratégie d’apprentissage composée d’une suite de techniques interreliées (clarification positionnelle, observation positionnelle, rotation positionnelle) visant à favoriser le partage d’une vision commune ou d’un modèle mental, d’une compréhension des rôles de chacun; ceci afin d’améliorer les capacités d’interagir entre les diverses équipes multidisciplinaires [28]. Plus particulièrement, ce type de formation pourrait être intéressante pour contrer la tendance des services de santé mentale, d’alcoolisme, de toxicomanies et de justice à travailler en silo, pour plutôt favoriser un rapprochement par une meilleure compréhension des rôles de chacun dans la trajectoire de soins. Une expérience québécoise a d’ailleurs montré une augmentation des interactions entre les intervenants de différents milieux par ce type de formation [28].

Le modèle théorique (figure 2) est appuyé par l’expérience d’intégration qui a eu lieu pour les programmes de diversion du système judiciaire. Il s’agit d’initiatives intéressantes qui ont été créées pour éviter ou diminuer le temps de détention des patients atteints de TMG en leur offrant des traitements dans la communauté. Une collaboration entre le système de santé et le système de justice qui pourrait servir de modèle pour d’autres interventions visant cette population a émergé. De manière générale, il semble que le taux d’arrestation et d’utilisation de la force ait diminué avec ce type d’initiative [7]. Différents facteurs organisationnels ont été identifiés [29] afin que la réussite de ces programmes se réalise :

  1. l’intégration des services par la coopération et la communication entre les différents acteurs et le soutien formel des agences gouvernementales

  2. la présence d’équipes multidisciplinaires, d’un leadership fort au niveau clinique et de la gestion et d’un agent de liaison afin de gérer les interactions entre la justice, la santé mentale et les services sociaux

  3. des rencontres régulières à l’intérieur des équipes afin de bien planifier les plans de traitement.

L’appui collectif à ce projet vient du principe que la sécurité doit être maintenue ou améliorée [30]. La mise en place de ces programmes s’est fortement répandue aux États-Unis. Leur nombre est passé de 52 à 560 programmes dans 47 États. L’expansion a été soutenue par le gouvernement fédéral américain et par plusieurs États. Ces programmes ont des configurations et des manières d’opérer différentes en fonction des structures locales ce qui pourrait expliquer leur succès, mais également la difficulté à bien les évaluer et à les comparer [31].

Conclusion

En somme, deux dimensions sont à prioriser pour améliorer le processus de réhabilitation des personnes souffrant de TMG associé à des CAV : contrer la stigmatisation et favoriser l’émergence d’un réseau de services intégrés. La perspective systémique permet de mieux cerner les différents niveaux d’intervention qui favoriseront le processus thérapeutique visant le rétablissement de ces individus. Des initiatives distinctes visant une action multidimensionnelle ont été entreprises. Les programmes de diversion judiciaire se sont répandus aux États-Unis par une approche flexible qui tient compte des dimensions de l’intégration [31] et en Angleterre [3] une action à différents paliers a été entamée pour contrecarrer la discrimination. Au plan individuel, différents aspects peuvent être directement intégrés par les intervenants du réseau. L’amélioration des services s’opérera par une poursuite de la formation, un leadership fort au niveau des équipes cliniques et la création de protocoles pour assurer une trajectoire de soins adéquate pour les individus atteints de TMG associé à des CAV. Chacune de ces modifications pourrait amener des progrès dans la relation soignants/soignés et favoriser le processus de rétablissement. La recherche nous renseignera sur l’efficacité de ces approches et sur les aspects organisationnels à favoriser pour mettre en place des programmes effectifs tant pour les patients que pour le personnel soignant.