Abstracts
Résumé
Cet article propose d’aborder la campagne des élections législatives de juin 2012 menée par le Parti Pirate français. Nous examinons comment cette organisation partisane, qui a la particularité de s’appuyer sur la cyberculture pour définir sa démarche politique, tente de transgresser les règles du jeu politique. En effet, le Parti Pirate et ses militants souhaitent hacker la politique en concevant et en pratiquant différemment celle-ci. Dès lors, la campagne électorale Pirate apparaît être un cas pratique pertinent pour saisir comment les candidats et l’organisation Pirate tentent de pratiquer la politique. Nous analysons tout d’abord la sociographie des candidats et des suppléants Pirates, puis la stratégie et l’organisation de la campagne, tant à l’échelle des candidats/suppléants que de l’organisation Pirate. Enfin, nous montrons les conséquences politiques et organisationnelles de cette campagne électorale.
Mots-clés :
- Parti Pirate,
- partis politiques,
- campagne,
- cyberculture,
- engagement
Abstract
This article is about the parliamentary election campaign in June 2012 conducted by the French Pirate Party. We examine how this partisan organization–whose particularity is that it relies on cyberculture to define its political approach–is trying to break the rules of the political game. Indeed, the Pirate Party and its activists want to hack politics by designing and practicing it differently. Accordingly, the Pirate campaign is a relevant practical case to understand how the candidates and the Pirate organization are trying to practice politics. We first analyze the sociography of the Pirate candidates and alternates, and then the campaign strategy and organization, as regards both candidates/alternates and the Pirate organization. Finally, we show the political and organizational consequences of this election campaign.
Keywords:
- Pirate Party,
- political parties,
- campaign,
- cyberculture,
- commitment
Article body
Le 10 juin 2012, le Parti Pirate présentait 101 candidats et autant de suppléants aux élections législatives. L’objectif affiché par le parti et ses représentants était de hacker les élections afin d’incarner dans l’espace politique une « force de proposition pour promouvoir une citoyenneté universelle dans la société de l’information et en dehors »[1] en proposant « au corps social des réformes globales plutôt que de chercher à amender le système existant sans en bousculer les cadres » (entretien réalisé en face à face à Rennes, février 2013). Cette contribution vise donc à analyser et à mettre en perspective la première expérience électorale d’envergure du Parti Pirate en France.
Le mouvement Pirate est apparu en 2006 en Suède à l’initiative d’un programmateur informatique, Rick Falkvinge. Le fondateur du Parti Pirate suédois avait pour ambitions de légaliser le partage sur Internet, de défendre le logiciel libre[2] et l’indépendance de la justice, de lutter pour la transparence de la vie politique par l’ouverture des données publiques, ainsi que de protester contre le fichage en ligne et hors ligne (Falkvinge, 2011). Le mouvement s’est ensuite implanté dans de nombreux pays et plus particulièrement en Europe[3].
En France, l’émergence du mouvement Pirate fut complexe. En effet, entre 2006 et 2009, jusqu’à neuf organisations se sont réclamées du mouvement Pirate, puis trois se sont disputé le leadership du mouvement. C’est en réaction à la loi relative au DADVSI[4] adoptée en juin 2006 que la première organisation Pirate a pris forme : le Parti Pirate. Au cours de la même année, une scission à propos d’un différend programmatique lié à la promotion du logiciel libre est à l’origine de la deuxième organisation : le Parti Pirate français canal historique. En juin 2009, en plein débat sur la loi HADOPI[5], un étudiant de Sciences Po Paris a créé une troisième organisation : le Parti Pirate français. Le Parti Pirate français canal historique a rejoint le Parti Pirate en septembre de la même année, puis, le Parti Pirate français s’est autodissous et a invité ses membres à adhérer au Parti Pirate[6].
Les militants Pirates caractérisent leur parti comme une « formation spontanée née de la volonté des citoyens de se réapproprier une vie politique dans laquelle ils ne se reconnaissent plus[7] ». Le Parti Pirate, par l’intermédiaire de ses membres, a donc construit son discours politique sur un constat de crise de la politique (Dalton et Wattenberg, 2000 ; Berstein, 2013), de crise de la représentation (Cohendet, 2004) et de crise de la démocratie (Webb, 2006), à l’instar de nombreux mouvements qui s’inscrivent dans la pratique alternative de la politique. Ce raisonnement est renforcé par les vertus prêtées, par les acteurs, à l’usage du numérique, à savoir une prise de parole facilitée permettant le débat par l’intermédiaire d’échanges, de confrontations d’idées régies par le principe de publicité et la participation dynamique de tous, dont la finalité est la pratique d’une citoyenneté « active » et dynamique. La démarche politique du Parti Pirate apparaît dès lors comme étant le fruit d’une hybridation entre les répertoires d’actions partisans traditionnels et les répertoires d’actions issus de la cyberculture[8] (Chadwick, 2007).
La volonté des fondateurs du Parti Pirate français de pratiquer et de concevoir la politique différemment n’est pas une posture nouvelle dans l’histoire politique française. Par le passé, le Parti communiste (Pudal, 1989), le Mouvement Poujadiste (Collovald, 1989), les Verts (Wable, 1998), Chasse, Pêche, Nature et Traditions (CPNT) (Traïni, 2000), les Motivé·e·s (Guionnet, 2005a) et, plus récemment, Nouvelle Donne ont revendiqué de pratiquer et de penser « autrement » la politique. Par ailleurs, le Parti Pirate affiche sémantiquement, mais également par sa participation aux élections législative de 2012, une démarche ouvertement partisane : en intégrant comme enjeu majeur – ce qui constitue sa spécificité – la place des technologies numériques dans la vie politique comme dans son organisation interne et son agir politique. Le Parti Pirate a, en effet, pour particularité de s’être constitué par et sur Internet, par l’intermédiaire de forums[9] et l’ouverture d’un site Internet. Il s’appuie aussi, pour définir son projet politique et structurer son organisation, sur quatre fondements : l’horizontalité décisionnelle, la transparence, le partage du savoir et de la culture et la participation citoyenne.
Entrés dans l’action politique par l’intermédiaire de la défense des libertés sur Internet, les militants Pirates ont élaboré une trame programmatique marquée par une influence manifeste des valeurs véhiculées par les technologies de l’information et de la communication (TIC) et plus particulièrement de la cyberculture, à savoir la liberté, la transparence et le partage de la culture et du savoir (Samuel, 2004). Ces trois axes forment ainsi les piliers de la production programmatique du Parti Pirate, faisant de celui-ci un parti politique ad hoc (Ostrogorski, 1993). Ces éléments mettent par conséquent en tension les principes de la démocratie représentative, fondée sur la délégation du pouvoir à des élus et sur une participation citoyenne limitée au moment du vote.
La campagne électorale menée par le Parti Pirate et ses candidats est donc un véritable vivier empirique puisque celle-ci permet d’interroger les pratiques politiques et militantes d’une organisation partisane qui tente de renouveler la forme parti politique à partir des potentialités et des enjeux des technologies numériques. Nos interrogations sont donc les suivantes : Comment la campagne des élections législatives de juin 2012 confronte-t-elle les pratiques alternatives de la politique défendues par le Parti Pirate aux les réalités du jeu et du champ politique ? Qui sont les candidats Pirates ? Comment le parti, les candidats et les militants Pirates ont-ils fait campagne ? Et enfin, quelles ont été les répercussions de la campagne pour le parti et ses militants ? En d’autres termes, comment le Parti Pirate et ses militants ont-ils tenté de hacker les élections ?
L’objet de cet article est ainsi d’étudier les caractéristiques de cette campagne et les tensions qu’elles ont suscitées dans les discours et les pratiques des candidats et des militants ainsi qu’au sein de l’organisation Pirate, à partir d’un terrain réalisé en 2012-2013.
Nous proposons de démontrer que la campagne menée par le Parti Pirate et ses représentants permet de mettre en exergue le fait que ce parti est devant un choix stratégique (Offerlé, 1999 ; 2012), une tension entre une normalisation progressive ayant pour conséquences l’intériorisation de la contrainte du champ politique[10] ou une position en marge de celui-ci, voire une disparition complète (Guionnet, 2005a ; 2005b ; Giraud, 2007).
Pour mener cette analyse, nous avons combiné trois méthodes d’enquête. En premier lieu, nous avons réalisé 24 entretiens semi-directifs auprès de membres du Parti Pirate de France[11]. Pour ce faire, nous avons tout d’abord procédé à un ciblage des acteurs selon leur statut actuel ou ancien au sein de l’organisation Pirate. Cela nous a permis d’interroger des fondateurs, des porte-paroles, des responsables de section, des trésoriers, des anciens candidats, des anciens suppléants, des militants et des sympathisants. La deuxième méthode d’enquête que nous avons privilégiée est l’analyse de contenu du site Internet du Parti Pirate[12], ainsi qu’une analyse de contenu des blogues de campagne des candidats et des suppléants Pirates aux élections législatives de juin 2012. Notre analyse de contenu s’est concentrée sur trois périodes : la première correspond aux articles publiés par les candidats avant le premier tour des élections des législatives (soit avant le 10 juin), la seconde correspond aux articles publiés entre les deux tours des élections législatives (soit entre le 10 juin et le 17 juin), puis la troisième correspond aux articles publiés après le second tour (soit à partir du 18 juin). Enfin, nous avons réalisé un questionnaire[13] destiné aux 202 candidats et suppléants aux élections législatives de juin 2012.
Nous articulerons notre réflexion en trois temps et en suivant une double perspective analytique, microsociologique et macrosociologique. Nous commencerons par identifier le profil sociopolitique des candidats et des suppléants Pirates aux élections législatives de 2012, puis nous analyserons la tentative de conciliation entre les valeurs Pirates et les réalités du jeu politique par le biais de la campagne des élections législatives de juin 2012. Enfin, nous aborderons les effets de la campagne électorale sur l’organisation, les orientations politiques et les membres du Parti Pirate[14].
Caractéristiques sociales et militantes des candidats et suppléants Pirates
Le choix d’établir une sociographie des candidats et des suppléants Pirates aux élections législatives de juin 2012 répond à un questionnement important : qui sont les candidats et suppléants Pirates ? Nous avons distingué trois variables pour déterminer le profil sociopolitique des candidats et des suppléants : l’âge et le genre, les caractéristiques sociales, culturelles, scolaires et professionnelles, et enfin l’engagement militant, associatif et civique[15].
Il apparaît qu’au sein de l’effectif des candidats et des suppléants, les hommes sont nettement majoritaires. Les femmes, quant à elles, se sont plus engagées en tant que suppléantes qu’en tant que candidates[16].
Le Parti Pirate a recherché activement des candidates ou des suppléantes lors de la préparation de la campagne pour pallier le faible nombre de femmes au sein de l’effectif des candidats en lançant des appels réguliers sur les réseaux sociaux pour les inciter à se présenter. Une candidate a souligné : « Le Parti Pirate avait aussi besoin de candidates, car trop peu nombreuses. Je me suis donc lancée principalement pour rendre service au mouvement » (entretien réalisé en ligne, avril 2013). La faible proportion de femmes peut s’expliquer, selon Eszter Hargittai, par le fait que les celles-ci se considèrent moins compétentes que les hommes en matière de politique et plus particulièrement en ce qui concerne la politique en ligne (dans Hargittai et Shafer, 2006). De plus, « en dépit du durcissement de la contrainte paritaire dans les modes de scrutin après 2007, les postes les plus hauts placés dans la hiérarchie politique (têtes de liste éligibles […]) restent majoritairement occupés par des hommes » (Paoletti, 2013 : 70). Enfin, il ressort que les candidats/suppléants Pirates sont en majorité des citadins.
La moyenne d’âge des candidats/suppléants est de 33 ans, le plus jeune étant âgé de 18 ans et le plus âgé de 66 ans. On constate aussi qu’une majorité de candidats/suppléants Pirates sont issus par leur origine familiale de la « classe moyenne et supérieure ». En revanche, les enfants d’agriculteurs/exploitants ou d’ouvriers ne sont que très peu représentés. Parallèlement, le niveau d’études des candidats/suppléants est relativement élevé, ce qui confirme les mécanismes bien connus du « cens caché » (Gaxie, 1993).
Moins conforme à la sociologie de l’engagement politique, une nette majorité de candidats/suppléants ont ou sont en cours d’obtention d’un diplôme dans les domaines « sciences/technologies/santé ». La moitié des candidats/suppléants font ou ont fait des études dans un domaine lié aux sciences et plus particulièrement à l’informatique. Par ailleurs, 55 % exercent une profession dans le domaine de l’informatique et/ou de l’Internet ; autrement dit, les candidats sont issus des milieux professionnels les plus en prise avec les transformations technologiques. Cette situation avait déjà été observée dans le cas des Verts, puisqu’une nette majorité des militants écologistes disposaient d’une formation scientifique et exerçaient une profession liée à l’environnement (Sainteny, 1997).
Cette tendance se confirme à l’examen des loisirs culturels des candidats/suppléants Pirates : même si ces loisirs sont diversifiés, l’informatique reste la principale activité pratiquée.
Du point de vue de la socialisation politique, il apparaît que les candidats/suppléants vivent dans un contexte familial propice à l’émergence d’une conscience politique. Cependant, ces données nécessitent d’être mises en perspective avec d’autres variables, notamment l’engagement civique des candidats/suppléants.
La variable familiale permet d’appréhender le comportement politique des candidats/suppléants Pirates en tant que citoyens, à savoir si ceux-ci sont hors du jeu ou dans le jeu politique. Or, ils s’inscrivent très majoritairement dans la participation politique. La régularité dans le vote témoigne d’un certain intérêt des candidats pour la politique, intérêt qui est d’ailleurs renforcé par un engagement préalable et/ou parallèle au Parti Pirate. En effet, la majorité des candidats/suppléants ont eu une ou plusieurs expériences politiques, syndicales ou associatives autres que le Parti Pirate. Les candidats/suppléants ayant répondu positivement ont précisé qu’ils étaient membres d’une association loi 1901 à objet général (culturel, éducatif, citoyen) ou spécialisé dans le web (protection des droits des internautes, fournisseur d’accès à Internet, hackerspace) à hauteur de 61 %, d’un syndicat (syndicat étudiant, syndicat professionnel) à hauteur de 26 %, d’un collectif (les Indignés) ou d’un autre parti politique (Europe écologie – les Verts [EELV], parti de gauche, Newropeans) à hauteur de 13 %.
Si l’on tente de dresser un profil sociologique type du candidat/suppléant, celui-ci est un homme, citadin, jeune, issu de la classe moyenne et supérieure, diplômé et plus précisément titulaire d’un baccalauréat +5 et plus ; ses loisirs sont très fortement liés à l’usage des TIC ; il a un emploi en relation plus ou moins directe avec l’informatique connectée ; il a commencé sa carrière militante par un engagement au sein d’organisations autres que le Parti Pirate ; l’expérience Pirate est son premier engagement partisan[17]. Ce profil sociologique correspond au profil des internautes politiques, qui « tendent à être plus urbains, de classe moyenne et plus souvent des hommes » (Gibson et Ward, 2011 : 111). Il y a donc une certaine homogénéité sociale dans l’effectif des candidats et des suppléants Pirates. Cette catégorie se caractérise par un fort capital culturel et un rapport capital culturel / capital économique favorable au premier[18].
Organisation et stratégie électorale du Parti Pirate : faire campagne autrement
L’objectif du Parti Pirate était d’atteindre 75 candidatures pour avoir le droit de diffuser un spot électoral sur les chaînes du service public. Le Parti Pirate a d’abord tenté d’obtenir le plus de candidatures possibles auprès de ses militants. Il a ensuite élargi son appel à candidatures à l’ensemble des citoyens sensibles à ses valeurs. S’il s’en était tenu à ses seuls membres, soit environ 600[19] à la veille du premier tour, le Parti Pirate aurait dû mobiliser au moins la moitié de ses effectifs[20]. La mobilisation des sympathisants a été amplifiée par le bouche-à-oreille (en ligne et hors ligne). Dans sa volonté d’obtenir un maximum de candidatures, le Parti Pirate a simplifié la procédure de candidature, quitte à ce que celle-ci soit constituée de manière incomplète :
même si vous ne connaissez pas encore votre circonscription, même si vous n’avez pas choisi votre suppléant(e) […] Faites déjà savoir le plus tôt possible au parti que vous êtes candidat. Vous pourrez compléter votre dossier plus tard : circonscription, suppléant(e). Vous pourrez aussi changer de suppléant, de circonscription (vers une circonscription libre), ou même vous désister plus tard[21].
Cette démarche leur a permis de présenter 101 candidats, dépassant ainsi leur objectif.
Pour structurer son organisation de campagne, le Parti Pirate a mis en place une « équipe élection » composée de deux personnes, dont le rôle était de gérer le processus électoral et de faire du démarchage de potentiels candidats jusqu’au terme des élections. Cette équipe élection était supervisée par les instances nationales du parti. Elle a rédigé un guide à destination des futurs candidats, explicitant les démarches à suivre pour se porter candidat : tout d’abord, il était nécessaire d’adhérer au parti. Cet acte, qui peut, à première vue, paraître anodin, impliquait une acceptation totale du programme « officiel »[22]. Il s’agissait ensuite pour le candidat potentiel de constituer son équipe, composée d’un suppléant et d’un mandataire financier. Ensuite, le candidat adoubé devait signer la charte d’engagement qui le lie au parti. Cette charte l’obligeait à respecter un certain nombre de conditions vis-à-vis du Parti Pirate :
J’accepte de mon propre chef les décisions du Parti Pirate concernant cette élection, telles que les accords éventuels, les recommandations, les prises de position pour le second tour. Je représenterai le Parti Pirate, ses idées, ses propositions. Je défendrai le programme du Parti Pirate dans son intégralité, et m’opposerai aux idées qui vont à l’encontre des positions du Parti Pirate. Je n’engagerai pas le Parti Pirate sans en avoir été autorisé par les instances nationales légitimes du parti. Le cas échéant, je défendrai de la même manière le programme du Parti Pirate pendant ma mandature. Je respecterai la loi aussi bien pendant la campagne, que pendant mon mandat le cas échéant. Je respecterai la charte éthique de l’association Anticor et j’adhérerai à ladite association si je suis élu. Je tiendrai mes électeurs, mon co-candidat, les adhérents et les instances de l’association informés de mes activités et de mes prises de positions et décisions publiques dans le cadre de mon mandat. Le cas échéant, je ferai don à l’association de mes indemnités d’élu à concurrence des limites légales[23].
Le Parti Pirate a, en parallèle, développé une stratégie politique de distinction vis-à-vis des partis politiques « traditionnels » : la campagne à zéro euro. Le principe de celle-ci était à la fois voulu et subi : il était voulu car cela relevait de la volonté du parti de s’inscrire dans une pratique alternative de la politique, en tentant de faire campagne « autrement ». Cela impliquait pour les candidats/suppléants des dépenses raisonnées, en invitant notamment les citoyens à consulter leur blogue de campagne, poussant ainsi l’électeur à une démarche active. Pour le Parti Pirate, l’électeur devait devenir un acteur « éclairé » de son choix en s’informant par lui-même et pas uniquement par le truchement des médias classiques, comme le souligne notamment une affiche de leur campagne (figure 1).
Une autre raison consistait à « éviter de faire appel aux coûteux services d’un expert-comptable pour valider les comptes de campagne »[24]. Le mandataire et le compte de campagne ne tenaient qu’un rôle purement formel, puisque dans le cadre de la campagne à zéro euro, le compte ouvert par le mandataire devait rester inerte. De fait, aucun flux financier n’était autorisé à transiter par ce compte, selon les dispositions prises par le Parti Pirate.
Le principe de la campagne à zéro euro était également subi, car le Parti Pirate disposait de moyens financiers extrêmement restreints. Il lui aurait été impossible de financièrement prendre en charge une campagne de cette envergure. C’est pourquoi le Parti Pirate exigeait que ses candidats financent leur campagne avec leurs propres ressources, dans la limite de leurs moyens. Dans les faits, les candidats ont donc dû imprimer leurs affiches de campagne, leurs bulletins de vote[25] et leur profession de foi, ou les mettre à disposition des électeurs sur leur blogue de campagne.
Ainsi, des outils dialogiques ont été utilisés par les candidats/suppléants dans l’optique de toucher un très large auditoire à moindre coût. De plus, le guide de campagne indiquait qu’il : « ne sera pas nécessaire de faire les marchés et d’arpenter les cages d’escalier de la circonscription. C’est mieux, mais pas obligatoire. Une campagne sera organisée sur Internet pour sensibiliser les sympathisants du Parti Pirate[26] ».
Nous avons fait le choix de nous concentrer sur l’analyse des blogues de campagne des candidats. Ceux-ci ne sont, certes, qu’une composante restreinte des dispositifs communicationnels digitalisés, mais le blogue[27] a majoritairement été utilisé par les candidats Pirates. En effet, 89 blogues ont été ouverts pour la campagne[28]. De fait, le blogue est un indicateur pertinent pour analyser la communication individuelle des candidats. Le blogue doit donc être appréhendé ici comme un média individuel d’expression de masse (Proulx, 2009 : 69), c’est-à-dire un outil médiatisé permettant aux candidats de publier des contenus textuels, audio, photo et vidéo, faisant de cet outil un espace personnalisable et propice à l’expressivité. La majorité des candidats Pirates disposant d’un capital technique issu d’une importante socialisation à l’informatique connecté, nous avions pour hypothèse que les candidats Pirates optimiseraient l’utilisation de l’outil blogue, notamment par la réappropriation et le développement individualisé du programme.
Ainsi, un total de 707 articles ont été publiés sur l’ensemble des blogues étudiés, toutes périodes confondues[29] : 84 % des articles ont été publiés pendant la première période, 10 % pendant la seconde période et 6 % durant la troisième. Le facteur commun à tous les blogues était la publication du programme de campagne que le Parti Pirate a développé pour les élections législatives. Celui-ci synthétise le programme « officiel » du Parti Pirate en cinq grands axes (voir encadré).
Dans la majorité des blogues étudiés, 74 % des candidats se sont limités à présenter le programme synthétisé du Parti Pirate sans l’accompagner d’une réflexion personnelle, en insérant des liens renvoyant au site Internet du parti. Cela peut être interprété à la fois comme une volonté des candidats d’encourager les citoyens à s’informer par eux-mêmes en les aiguillant, mais aussi par un manque de temps à consacrer pour la tenue du blogue. Parmi ces 47 blogues, seulement 21 % ont uniquement un premier article formulant l’objet du blogue, suivi de la version synthétique du programme, formalisée dans un article ou insérée dans un onglet consacré. Par ailleurs, dans 44 % des blogues étudiés, les candidats ont publié un ou plusieurs articles sur une ou plusieurs mesures « compatibles » inscrites dans le programme optionnel du Parti Pirate. Parmi ceux-ci, 39 % ont simplement évoqué l’une de ces thématiques. Les 61 % restant ont, quant à eux, développé une argumentation sur leur choix et leur volonté de soutenir cette ou ces mesures en plus du programme de campagne officiel. Cet indicateur permet en effet de mettre en évidence les convictions personnelles des candidats. Les candidats ont privilégié le revenu de base, le non-cumul des mandats, le droit à mourir dans la dignité, la lutte contre le nucléaire civil, la lutte contre la brevetabilité du vivant ou encore le mariage homosexuel. Certaines personnes ont poussé la réflexion en publiant des articles de type encyclopédique sur un ou plusieurs sujets, contenant des références multiples renvoyant à des revues scientifiques, des sites Internet consacrés au sujet, des documentaires. En outre, parmi les 47 blogues retenus au préalable, de nombreux candidats ont utilisé le blogue seulement comme un agrégateur d’informations relatives à la campagne du Parti Pirate ainsi qu’à leur propre campagne. Le blogue avait alors pour objet de relayer les initiatives de leurs camarades en partageant des vidéos qu’ils ont produites (par exemple la vidéo « Bref, je suis candidat aux législatives[30] ») et/ou des articles de presse les concernant, ainsi qu’une revue de presse sur la campagne des élections législatives.
Pour le Parti Pirate, le blogue de campagne avait également pour fonction la mise à disposition du matériel de campagne. En effet, la campagne à zéro euro et l’action du vote en faveur du Parti Pirate par une démarche volontariste du citoyen nécessitaient une diffusion du matériel de campagne par d’autres moyens que les canaux officiels. Le blogue apparaissait donc comme un moyen approprié permettant une large diffusion et une facilité d’accès aux affiches, bulletins, circulaires et tracts du parti. La possibilité de télécharger le bulletin de vote du candidat apparaissait fondamentale pour être en mesure de voter pour le candidat en question[31]. Ainsi, 73 % des blogues disposaient de bulletins de vote téléchargeables. Sur la totalité des blogues étudiés, 27 % mettaient des affiches, des circulaires et/ou des tracts à la disposition des électeurs, mais pas de bulletins de vote.
Pour 26 % des blogues étudiés (soit 16 blogues), ceux-ci étaient utilisés comme une tribune, un porte-voix permettant aux candidats d’exposer leur vision pour pratiquer la politique autrement et transmettre leurs idées pour penser la politique de façon alternative. Ces candidats se sont approprié le programme en rédigeant plusieurs articles détaillant et motivant la nécessité des mesures retenues par le Parti Pirate. Il s’agissait avant tout, pour eux, de démontrer la viabilité de leur programme, du projet de société qui en découle et plus largement d’incarner une alternative crédible. Une candidate remarquait à ce propos : « [le blogue] nous a permis de nous faire connaître, de mieux présenter nos idées […] et de montrer qu’en France il est possible de faire de la politique différemment » (entretien réalisé en face à face à Nantes, septembre 2013). Ces 16 candidats ont donc optimisé l’utilisation de leur blogue de campagne. En outre, 16 % des articles ont été publiés pendant les deuxième et troisième périodes. Ces articles avaient pour sujets une analyse des résultats du candidat et plus généralement du Parti Pirate, des remerciements envers les électeurs et les consignes de vote pour le second tour[32].
Enfin, à la différence d’un média « classique », le blogue a un atout majeur : le commentaire. En effet, la fonction commentaire permet théoriquement et techniquement d’instaurer un échange entre les candidats et les citoyens, tout cela étant facilité par le fait qu’il ne soit pas nécessaire de s’inscrire préalablement pour commenter. Sur l’ensemble des blogues étudiés, il y a en moyenne huit commentaires publiés, toutes périodes confondues[33], ce qui représente, proportionnellement par rapport au nombre de blogues et au nombre d’articles, bien peu de commentaires. Néanmoins, « ce n’est pas parce que les blogues ne recueillent dans leur grande majorité qu’une minorité de commentaires que certains d’entre eux ne peuvent pas être assimilés à des micro-espaces de discussion » (Neihouser, 2017 : 151). Il est nécessaire de préciser que ces commentaires ont été publiés en très forte majorité sur les blogues les plus actifs. Les sujets abordés étaient par exemple des encouragements, des critiques acerbes contre la démarche politique du Parti Pirate ; d’autres commentaires permettaient d’ouvrir le débat, d’échanger avec le candidat sur certains points du programme. Cependant, cette interactivité théorique ne doit pas uniquement être appréhendée par l’intermédiaire de la fonction commentaire. Les réseaux sociaux, Facebook et Twitter, et la possibilité de contacter directement le candidat par formulaire et/ou par courriel peuvent créer les conditions d’une plus grande interactivité entre le candidat et ses électeurs. Ainsi, 59 % des candidats ont inséré dans leur blogue un lien renvoyant vers leurs comptes Facebook et Twitter. Pour 41 % des blogues restant, il était possible de contacter le candidat directement par courriel ou par formulaire. Le blogue de campagne a finalement été utilisé comme une simple profession de foi numérisée, la majorité des candidats n’ayant pas exploré toutes les potentialités qu’offrait l’outil blogue, à savoir un espace d’expression personnalisable. Notre hypothèse d’une large appropriation du blogue comme un outil d’expressivité s’est donc révélée inexacte, puisque seulement 26 % des blogues étudiés ont été utilisés comme tel. Néanmoins, pour 58 % des candidats/suppléants ayant répondu à notre questionnaire, le premier contact avec le Parti Pirate s’est effectué par Internet et 79 % d’entre eux ont déclaré utiliser les outils dialogiques et collaboratifs (forum, Mumble, Internet Relay Chat [IRC], wikis, listes d’adresses et réseaux sociaux[34]) pour militer.
Le Parti Pirate et ses candidats ont effectivement fait campagne « autrement », mais ce qui était pensé comme un choix s’est révélé être une obligation face au manque de moyens dont disposait le parti. Soulignons également le fait que les candidats ont misé davantage sur la marque Pirate plutôt que sur la diffusion des idées Pirates auprès des électeurs. Cela met en exergue la difficile conciliation entre la réalité de la campagne électorale et la ligne du parti qui insiste sur le fait que les idées doivent primer sur l’appareil partisan.
Faire campagne : la nécessité d’intégrer un savoir-faire politique traditionnel
Le 10 juin 2012, les 101 candidats Pirates ont obtenu des résultats très faibles, puisqu’ils ne dépassent pas 3 % des suffrages exprimés[35] : 24 candidats ont obtenu 1 % et plus des suffrages exprimés et, parmi eux, deux candidats ont obtenu un score supérieur à 2 %. La candidate de la circonscription Allemagne – Europe centrale – Europe de l’Est a obtenu le meilleur score des candidats présentés par le Parti Pirate en recueillant 2,85 % des voix exprimées. À la différence de toutes les autres circonscriptions, les circonscriptions des Français établis hors de France correspondent à des territoires vastes regroupant plusieurs États[36]. Les résultats obtenus dans ces circonscriptions peuvent notamment être expliqués par le fait qu’en Allemagne, en Autriche et en Belgique, les Partis Pirates nationaux ont tous participé à des scrutins d’envergure nationale. L’Allemagne est d’ailleurs un des bastions du mouvement Pirate à l’échelle européenne : depuis 2009, le Piraten Partei a obtenu 194 postes de conseillers municipaux et 45 sièges de députés au sein de ses parlements régionaux. Ces partis Pirates ont disposé d’une large exposition médiatique lors de ces scrutins, ce qui a entraîné, de facto, une forme de socialisation aux idées Pirates. C’est cette proximité géographique qui peut également expliquer les résultats obtenus dans le Haut-Rhin et dans le Bas-Rhin, puisque le candidat Pirate de la première circonscription du Haut-Rhin a obtenu l’un des meilleurs résultats avec 2,45 % des voies, et le candidat Pirate de la troisième circonscription du Bas-Rhin, quant à lui, en a obtenu 1,30 %. Ainsi, aucun des candidats n’a pu se maintenir au second tour.
Néanmoins, la participation aux élections législatives présentait deux avantages pour le parti, à savoir disposer d’une visibilité nationale (avec le spot de campagne notamment[37]) tout en menant une campagne locale. Les élections législatives ont donc été conçues par les instances du parti comme un instrument stratégique pour accroître son implantation territoriale. En effet, la campagne des législatives a permis aux candidats Pirates de rencontrer des acteurs associatifs, politiques et médiatiques locaux. Ils ont également été des relais locaux pour le Parti Pirate, favorisant la formation de nouvelles sections locales et le développement des sections préalablement établies[38]. Ces échanges ont permis la constitution de réseaux territorialisés. Cependant, le développement de ces réseaux repose sur la personne du candidat, ce qui n’est pas en adéquation avec les fondements affichés par le Parti Pirate.
Comme nous l’avons mentionné précédemment, la campagne Pirate avait pour ambition d’être « alternative », en accord avec les valeurs politiques Pirates. Or, cela engendre des conséquences : lorsqu’on « est dans un parti jeune, on commet forcément des oublis, des erreurs et des approximations » (entretien réalisé en ligne, octobre 2012). Certains dysfonctionnements ont effectivement été relevés par les candidats. Le Conseil constitutionnel a prononcé des sanctions d’inéligibilité à l’encontre de trois d’entre eux[39], en raison de négligences dans les comptes de campagne. Par ailleurs, une candidate a observé, à propos de l’organisation de la campagne, qu’« il y a même eu des candidats dont on a dû faire les bulletins la veille » (entretien réalisé en face à face à Rennes, février 2013). Ainsi, le manque d’expérience, de temps et de financement a fortement influé sur l’organisation individuelle et collective de la campagne. Il a été difficile pour certains candidats de concilier à la fois l’organisation de leur campagne, leur vie professionnelle et personnelle : « Pour des raisons professionnelles je n’ai pas pu mener une campagne aussi poussée que je l’aurais souhaité » (entretien réalisé par téléphone, décembre 2012). Les contraintes financières ont également été un obstacle pour les candidats dans le déroulement de la campagne : « par exemple, c’est sur fonds propres qu’on a payé 20 000 bulletins dans ma circonscription (pour 100 000 votants environ) et quelques affiches. Je n’avais pas les moyens d’avoir une circulaire à envoyer dans les boîtes aux lettres comme les autres partis… ça a joué en notre défaveur, mais ça faisait 3000 euros, donc pas à la portée de tous » (entretien réalisé en ligne, avril 2013).
Cette campagne des élections législatives fut, pour la quasi-totalité des candidats, un exercice nouveau. Deux perceptions différentes de la campagne peuvent être mises en exergue à l’issue de ces élections. La campagne a représenté une expérience positive, comme le remarquait une candidate : « Je me suis fixé ce challenge pour des raisons personnelles […] Ce fut une expérience extrêmement enrichissante sur le plan humain que je ne regrette pas » (entretien réalisé en face à face à Paris, mars 2013). Cette expérience a également été perçue comme un atout majeur transposable dans la vie professionnelle, comme l’expliquait une autre candidate : « La campagne m’a permis d’acquérir pas mal d’expérience super vendable pour le boulot » (entretien réalisé en ligne, mars 2013). Cet exercice a pareillement permis un apprentissage de la politique. C’est le cas d’une candidate qui a indiqué que la campagne lui « permettrait de mieux connaître la politique française, d’apprendre le fonctionnement des institutions, du financement électoral » (entretien réalisé en ligne, avril 2013) ; c’est aussi le cas d’un suppléant qui a mentionné que les candidats ont « quand même énormément appris de ce premier test grandeur nature, c’était la première fois qu’on présentait autant de candidats […], on a vu le coût d’une campagne, les affiches, les bulletins… » (entretien réalisé en face à face à Rennes, février 2013). Pour d’autres candidats, la campagne a conforté leur vision péjorative du système politique établi. La confidence à ce propos d’un candidat nous semble révélatrice : « J’ai juste vu l’autre côté du miroir. C’est encore plus dégueulasse que je ne le pensais » (entretien réalisé en ligne, octobre 2012). Pour ces candidats, l’exercice de la campagne s’est révélé être un fardeau sur le plan éthique, les conduisant à s’inscrire de façon plus radicale dans une opposition tranchée vis-à-vis du système politique actuel, et à vouloir appliquer cette même ligne de conduite au parti.
In fine, pour une majorité de candidats et de militants, la campagne des législatives a fait apparaître la nécessité de dépasser le cadre programmatique techno-centré et d’élargir le champ programmatique du parti. Une candidate a insisté sur le fait que « La cyberculture est effectivement très importante, même si je pense que dans l’intérêt du Parti Pirate il serait bien de nous en éloigner un peu pour toucher un public plus large » (entretien réalisé en ligne, mars 2013). Par ailleurs, cette nécessité apparaissait d’autant plus saillante pour certains militants :
Monsieur Tout-le-Monde veut que l’on réponde à la question « comment allez-vous nous sortir de la crise ? », question que je trouve bidon et débile à la fois car on ne peut attendre de réponse simple, claire et concise de la part de la personne à qui on pose la question, ou sinon c’est un mensonge. Donc nous devons élargir nos compétences pour être pris au sérieux. Je suis contre cette vision des choses, mais je comprends évidemment que les gens ne s’intéressent pas à un parti qui n’a qu’un seul axe de réflexion.
Entretien réalisé en face à face à Rennes, février 2013
Un autre candidat confirme cette volonté de développer le programme du Parti Pirate : « Je suis pour qu’on développe tous les sujets, qu’on réfléchisse à tous les problèmes de société et qu’on donne nos avis de plus en plus sur tous les thèmes. La forme du parti politique oblige aussi à parler d’un peu tout, à s’engager pour faire changer les choses en profondeur et pas uniquement pour défendre les Pirates du net » (entretien réalisé en ligne, mars 2013).
Nous observons ici de manière prégnante les effets concrets de cet apprentissage que fut la campagne. Le Parti Pirate tend donc à devenir un parti omnibus (Ostrogorski, 1993) afin de répondre aux aspirations de la majorité de ses membres selon lesquelles « Le Parti Pirate n’a pas que vocation à être “le Parti de l’Internet” » (entretien réalisé en ligne, octobre 2012). Cette inflexion remet en question les fondements idéels et organisationnels du Parti Pirate, initialement conçu comme un parti politique ad hoc, principalement attaché à défendre les valeurs issues de la cyberculture. Ce glissement idéel du parti n’est d’ailleurs pas approuvé par tous les membres, certains considérant que
la mentalité hacker et Pirate est applicable à la politique, et qu’au contraire d’une logique contestataire gauchiste, c’est la liberté qui doit primer. À chaque ajout dans le programme, chaque chapitre abordé doit répondre à cette supposition : un Pirate fait ce qu’il veut parce qu’il est libre. J’ai depuis un certain temps la désagréable impression que le Parti Pirate tourne façon parti de gauche contestataire ; or, on sait que ce genre de partis est voué à l’échec (le NPA en est un exemple cuisant)[40].
De plus, il apparaît nécessaire pour les candidats de disposer d’un minimum de professionnalisme et plus particulièrement d’une capacité oratoire pour pouvoir participer activement aux débats politiques, qualité que certains candidats considèrent ne pas avoir : « Je ne pense pas avoir la facilité de langage qu’ont les personnes actuellement en politique, et je pense réellement qu’il faut quelqu’un qui puisse parler très clairement et qui ne se trompe pas, un professionnel quoi » (entretien réalisé en face à face, à Paris, septembre 2012). Le Parti Pirate entendait initialement lutter contre la professionnalisation du personnel politique. Toutefois, ce témoignage ainsi que les éléments que nous avons soulignés précédemment démontrent la nécessité de se professionnaliser.
En participant aux élections législatives, le Parti Pirate avait pour objectif de proposer aux citoyens une autre façon de faire et de penser la politique. Cependant, la campagne des législatives a mis en perspective l’inscription du Parti Pirate dans un processus de normalisation tendant vers l’appropriation d’une démarche partisane traditionnelle. Il est donc évident que face à un champ politique relativement clos et professionnalisé, les membres du parti sont pris dans une aporie entre promotion d’une culture politique alternative et une intériorisation de la contrainte des règles qui régissent le jeu politique.
Conclusion
On observe depuis quelques années l’apparition de nombreux mouvements qui ambitionnent de « transformer le fonctionnement de la démocratie, d’améliorer son efficacité et son organisation grâce à un renouvellement des formes d’engagement des citoyens » (Mabi, 2017 : 3) en développant et en utilisant des dispositifs numériques afin de « hacker la démocratie au sens propre du terme, c’est-à-dire de participer à son fonctionnement pour le modifier de l’intérieur, en profitant de ses ressources » (ibid. : 9). Nous constatons que le Parti Pirate s’inscrit pleinement dans cette dynamique, faisant de celui-ci un des mouvements précurseurs des « civic tech » en France. Le numérique n’est donc pas un simple recours technique pour le Parti Pirate, mais un élément constitutif et structurant[41]. En effet, le parti tente de promouvoir l’horizontalité, à tous les niveaux de son organisation, en permettant aux militants Pirates de participer à l’édification du mouvement ainsi qu’à ses orientations politiques.
L’analyse de la morphologie sociale Pirate a fait apparaître certaines tendances : le candidat Pirate est un homme, jeune (entre 18 et 35 ans), diplômé, qui occupe une profession en lien avec l’informatique ; il s’engage, préalablement et parallèlement à son engagement au Parti Pirate, auprès d’autres organisations, le plus souvent non politisées. La majorité des candidats aux élections législatives sont des nouveaux entrants en politique, puisqu’ils sont issus de la vague d’adhésion importante[42] qui a eu lieu en 2012. Le mouvement Pirate, comme de nombreux partis politiques « alternatifs », a choisi de mettre en scène son discours autour de la problématique de la « crise de la représentation » ; néanmoins, la sociographie des candidats/suppléants aux élections révèle surtout une socialisation précoce à la politique et des formes d’engagement et de participation fortement institutionnalisées. La campagne des législatives a, par ailleurs, permis aux candidats/suppléants Pirates ainsi qu’au parti de se confronter aux réalités du champ politique aux échelles nationale et locale. À l’issue de la campagne de juin 2012, nous avons observé un basculement programmatique et organisationnel d’un parti ad hoc techno-centré à un parti omnibus traitant davantage des problématiques économiques, sociales et sociétales.
Il apparaît dès lors que la structuration et le développement de l’organisation partisane Pirate s’inscrivent dans un « processus complexe et incertain » (Aït-Aoudia et Dézé, 2011 : 641). À l’issue de notre enquête, nous avons constaté les prémices d’une institutionnalisation et un processus de professionnalisation résultant de la difficile conciliation entre les conceptions alternatives de la politique et les réalités du champ politique auxquelles les membres de cette organisation politique sont contraints de se soumettre. Cela se traduit notamment par une normalisation organisationnelle et des stratégies politiques, comme ce fut déjà observé chez les Verts (Faucher-King, 1999) et les Motivé·e·s (Guionnet, 2005a ; Giraud, 2007). Après les élections législatives, l’organisation interne du Parti Pirate a été remaniée. Cela a notamment eu pour conséquence le départ de cadres qui refusaient ce changement de stratégie. De plus, les sections locales sont devenues la pierre angulaire de la nomenclature décisionnelle, actant ainsi le processus d’autonomisation observé durant la campagne. Chaque coordinateur de section siège désormais dans l’instance principale du Parti Pirate, à savoir la coordination nationale[43]. Notons également que deux conseillers municipaux Pirates ont été élus lors des élections municipales de 2014[44] ; l’un a depuis fait défection pour rejoindre les rangs de Debout la France. Depuis 2009, les partis Pirates ont rencontré des fortunes diverses en Europe avec l’élection de deux eurodéputés suédois[45], de six députés au Parlement national islandais, de trois conseillers municipaux en Autriche et en République tchèque, de deux conseillers municipaux en Espagne, d’un maire en Suisse, de 407 conseillers municipaux, de 41 députés au sein des parlements régionaux[46] et d’une eurodéputée en Allemagne[47].
En 2017, le Parti Pirate a présenté 58 candidats aux élections législatives[48], soit 43 candidats de moins que lors de la précédente campagne. Cela semble indiquer une régression majeure. Néanmoins, cet indicateur n’est pas suffisamment prégnant pour entériner le déclin du parti. Nous faisons ainsi l’hypothèse que ce recul des effectifs serait le résultat d’une stratégie consistant à concentrer les candidatures dans des circonscriptions proches géographiquement, pour des raisons logistiques mais aussi pour miser davantage sur l’implantation locale en vue des prochaines échéances électorales.
Appendices
Note biographique
Arthur Renault est doctorant en science politique au sein du laboratoire ARENES (Unité mixte de recherche 6051). Ses recherches portent sur les usages partisans des technologies numériques ainsi que sur le cybermilitantisme. Il est également chargé d’enseignement en science politique à la Faculté de droit et de science politique et à la Faculté de sciences économiques de l’Université de Rennes 1. Il a notamment publié, en 2013, « Démocratie liquide », dans Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, sous la direction d’Ilaria Casillo, Rémi Barbier, Loïc Blondiaux, Francis Chateauraynaud, Jean-Michel Fourniau, Rémi Lefebvre, Catherine Neveu et Denis (accessible sur Internet : http://www.dicopart.fr/fr/dico/democratie-liquide).
Notes
-
[1]
Parti Pirate, 2011, Déclaration de politique générale, consulté sur Internet (https://partipirate.org/blog/com.php?id=214) le 17 octobre 2012.
-
[2]
Ce type de logiciel est distribué sous licence libre, c’est-à-dire qu’il n’est pas la propriété de son ou ses auteurs. Plus précisément, le logiciel libre peut être modifié, corrigé et diffusé librement et gratuitement. Mozilla Firefox, OpenOffice.org et VLC sont les logiciels libres les plus connus.
-
[3]
Deux organisations internationales ont été créées (en 2010 et en 2014) afin de regrouper et de fédérer les Partis Pirates aux échelles internationale et européenne. Il s’agit du Parti Pirate international (PPI) et du Parti Pirate européen (PPE). Le PPI compte 43 membres (dont le PPE) et le PPE 16 membres.
-
[4]
Loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information (DADVSI) qui prévoit notamment la généralisation des systèmes de protection et de contrôle des oeuvres numériques (DRM) ainsi que des sanctions pour le téléchargement d’oeuvres protégées (Loi n° 2006-961 du 1er août 2006).
-
[5]
La loi HADOPI, ou loi création et internet, qui a créé la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Loi no 2009-669 du 12 juin 2009).
-
[6]
Cette situation n’est d’ailleurs pas sans rappeler la difficile unification des courants écologistes français au sein d’une même entité partisane.
-
[7]
Consulté sur Internet (http://partipirate.org/blog/com.php?id=213) le 2 décembre 2013.
-
[8]
Nous définissons la « cyberculture » comme une culture participative et relationnelle basée sur l’horizontalité sociale, la transparence, le partage et la participation. Un des principes « qui régit la cyberculture est le remix, ensemble de pratiques sociales et communicationnelles de combinaisons, de collages et d’appropriation des morceaux d’informations à partir des technologies numériques » (Lemos, 2006 : 38).
-
[9]
Espace de communication asynchrone (toutes les discussions sont archivées et consultables) et public.
-
[10]
Le « champ » fonctionne « à la fois comme un champ de forces, dont la nécessité s’impose aux agents qui s’y trouvent engagés, et comme un champ de luttes à l’intérieur duquel les agents s’affrontent, avec des moyens et des fins différenciés selon leur position dans la structure du champ de forces, contribuant ainsi à en conserver ou à en transformer la structure » (Bourdieu, 1994 : 55). Les « champs » doivent être également pensés comme des « sous-univers sociaux qui se constituent avec leurs propres références, leur histoire spécifique, leur mode de recrutement, leurs enjeux particuliers et leur capital spécifique » (Champagne et Christin, 2004 : 221).
-
[11]
Ces entretiens ont été effectués entre octobre 2012 et novembre 2013.
-
[12]
Voir le site Internet (www.partipirate.org), consulté le 21 janvier 2012.
-
[13]
Ce questionnaire composé de 36 questions a été réalisé avec le logiciel d’enquête LimeSurvey et diffusé par courriel entre le 28 février 2013 et le 28 mai 2013 ; 61 personnes ont répondu partiellement au questionnaire et 41 personnes y ont répondu entièrement.
-
[14]
Nous tenons à remercier Christine Guionnet, Fabienne Greffet, Thierry Giasson, Anaïs Theviot, Flavie Ferchaud, Romain Carnac, Audrina Loumvoumina, ainsi que les évaluateurs de la revue Politique et Sociétés pour leur relecture d’une première version de ce texte et leurs précieux commentaires.
-
[15]
L’ensemble des données mises en perspective dans cette partie sont issues de questionnaires auxquels 61 personnes ont répondu. Les données de genres ont été obtenues par recoupement à partir des blogues de campagnes, des profils Twitter et Facebook et de la propagande électorale.
-
[16]
Notons que 75,60 % d’hommes et 24,40 % de femmes ont répondu à notre questionnaire. Il ne s’agit pas nécessairement d’un élément prégnant d’analyse en soi, mais d’une indication supplémentaire qui tend à corroborer la tendance analysée. En effet, la proportion d’hommes et de femmes qui ont répondu est sensiblement identique à celle de l’effectif total des candidats/suppléants (soit 79 % d’hommes pour 21 % de femmes).
-
[17]
À noter que 63 % des candidats/suppléants qui ont répondu au questionnaire ont adhéré au parti en 2012 à l’occasion de la campagne des législatives.
-
[18]
Notons, en complément, qu’Anaïs Theviot (2013) a réalisé une étude sociographique comparative auprès des cybermilitants de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) et du Parti socialiste (PS). Ses résultats sont similaires aux nôtres, hormis ce qui concerne les professions.
-
[19]
Consulté sur Internet (https://www.partipirate.org/spip.php?article129)) le 10 novembre 2012.
-
[20]
Chaque candidature nécessite de mobiliser un minimum de trois personnes : le candidat, le suppléant et le mandataire financier.
-
[21]
Parti Pirate, 2012, Charte d’engagement, consulté sur Internet (http://legislatives.partipirate.org/2012/comment-participer/) le 12 mai 2012.
-
[22]
Le programme Pirate dispose d’une particularité, tant en ce qui regarde sa forme que ses applications, puisque celui-ci est en réalité un bi-programme. En effet, lors de l’élaboration programmatique, les mesures qui ont récolté une majorité large (soit 75 % des votants) sont adoptées dans le programme « officiel ». Les mesures qui n’ont pas obtenu un quota suffisant peuvent être adoptées dans le programme « optionnel » lors d’un second vote. Pour cela, ces mesures doivent obtenir la majorité simple (soit 50 % des votants).
-
[23]
Parti Pirate, 2012, Charte d’engagement, doc. cité.
-
[24]
Parti Pirate, Guide de campagne, consulté sur Internet (http://legislatives.partipirate.org/2012/comment-participer/) le 12 mai 2012.
-
[25]
La loi électorale autorise les citoyens à imprimer eux-mêmes leur bulletin de vote.
-
[26]
Parti Pirate, Guide de campagne, doc. cité.
-
[27]
Le blogue a l’avantage d’être un média asynchrone, c’est-à-dire que chaque message publié reste accessible au public, sauf si le producteur ferme le blogue.
-
[28]
Rappelons que le Parti Pirate a présenté 101 candidats ; neuf ont fait le choix de ne pas ouvrir de blogue ou ont déclaré ne pas disposer du temps nécessaire pour le faire. À la date du début de notre analyse, sur 89 pages accessibles, 26 étaient des blogues fermés ou ceux-ci n’avaient pas ou plus d’articles accessibles (il était donc impossible d’accéder aux divers contenus) ; nous avons donc étudié 63 blogues.
-
[29]
Pour rappel, la première période correspond aux articles publiés par les candidats avant le premier tour des élections des législatives de juin 2012 (soit avant le 10 juin). La seconde correspond aux articles publiés entre les deux tours des élections législatives (soit entre le 10 juin et le 17 juin). La troisième période correspond aux articles publiés après le second tour (soit à parti du 18 juin).
-
[30]
Consulté sur Internet (http://www.youtube.com/watch?v=BIdK2Y_i9t8) le 12 juin 2012.
-
[31]
En effet, de nombreux candidats n’avaient pas de bulletins disponibles dans tous les bureaux de vote, ou ils n’en avaient qu’une petite quantité.
-
[32]
Dans un communiqué de presse, le Parti Pirate précisait ses consignes de vote pour le second tour : « Nous sommes et demeurerons indépendants. Les citoyens Pirates ne se reconnaissent pas dans les autres partis, leur offre politique traditionnelle ou leur jeu habituel des alliances. Promouvoir et diffuser nos idées compte davantage à nos yeux qu’obtenir des élus ». Parti Pirate, 2012, Transparence sur la stratégie entre les deux tours, consulté sur Internet (http://legislatives.partipirate.org/2012/2012/06/08/transparence) le 18 décembre 2012.
-
[33]
88 % des commentaires ont été publiés durant la première période étudiée, 5 % durant la deuxième et 7 % durant la troisième.
-
[34]
Le forum est conçu comme un espace permettant la discussion et le débat au sein du Parti Pirate. Le Mumble est un outil de communication vocal libre (GNU) ; il permet de communiquer avec une ou plusieurs personnes en même temps. Il a été utilisé par le parti pour faire des réunions entre responsables nationaux et coordinateurs de section ou plus simplement entre militants. L’Internet Relay Chat (IRC) est un outil de communication textuelle par Internet et permet la discussion instantanée à deux ou plus. Les Wikis sont des sites Internet collaboratifs de rédaction qui permettent à tout internaute de modifier la page qu’il est en train de consulter ; ces modifications sont archivées dans un historique consultable par tous. Ils ont été utilisés le plus souvent par le Parti Pirate pour expliquer et illustrer le fonctionnement de leur organisation. La liste d’adresses sert à diffuser des informations par courriel.
-
[35]
Le Parti Pirate n’a donc pas dépassé le seuil des 50 candidats ayant obtenu 1 % des suffrages exprimés, nécessaire à l’obtention d’un financement d’État pendant cinq ans.
-
[36]
Notons que les quatre candidats qui se sont présentés dans les circonscriptions des Français établis hors de France ont tous obtenu un score de plus de 1 %. Ainsi, le candidat Pirate de la circonscription Amérique du Nord a obtenu 1,29 % des suffrages exprimés et le candidat Pirate de la circonscription Liechtenstein-Suisse en a obtenu 1,06 %.
-
[37]
Rappelons que le seuil minimal pour avoir le droit de diffuser un clip de campagne sur toutes les chaînes du service public est de 75 candidats.
-
[38]
Sept sections locales ont été formées au Parti Pirate à la suite de la campagne des législatives de juin 2012 : Aquitaine, Franche-Comté, Lorraine, Nord-Pas-de-Calais, Poitou-Charentes, Réunion et Champagne-Ardenne.
-
[39]
Décision no 2012-4698 AN du 22 février 2013, Décision no 2013-4786 AN du 22 février 2013, et Décision no 2013-4751 AN du 22 février 2013.
-
[40]
Source : Manudwarf (2012), Pourquoi le Parti Pirate peut (doit ?) être un parti libéral, consulté sur Internet (http://manchot-enrage.fr/2012/06/11/pourquoi-parti-Pirate-un-parti-liberal/) le 11 septembre 2012.
-
[41]
À noter que depuis l’émergence de l’Internet en tant qu’espace d’expression et de communication, il est possible d’observer des évolutions au sein des partis politiques « traditionnels » (notamment dans leur pratique communicationnelle). Cependant, cette influence des TIC demeure extrêmement restreinte sur le plan idéologique (Greffet, 2011).
-
[42]
À l’échelle du Parti Pirate.
-
[43]
Le Parti Pirate compte désormais trois instances : le bureau national (organe administratif), la coordination nationale (organe politique) et la commission de contrôle (organe de contrôle).
-
[44]
Freddy Vasseur à Portes-lès-Valence (liste Union des démocrates et indépendants – Union pour un mouvement populaire) et Alexis Boudaud à Auch (liste Europe écologie les Verts - Parti Pirate).
-
[45]
Depuis les dernières élections européennes de 2014, la Suède ne compte plus aucun eurodéputé Pirate.
-
[46]
Depuis les dernières élections régionales de 2017, le Parti Pirate allemand ne compte plus aucun député régional.
-
[47]
Julia Reda, élue en 2014.
-
[48]
Les scores obtenus en juin 2017 sont extrêmement faibles, le meilleur étant de 1,42 % des voix exprimées (Gabrielle Nereuil dans la septième circonscription de Paris).
Bibliographie
- Aït-Aoudia, Myriam et Alexandre Dézé, 2011, « Contribution à une approche sociologique de l’approche partisane : une analyse du Front national, du Movimento sociale italiano et du Front islamique de salut », Revue française de science politique, vol. 61, no 4, p. 631-658.
- Berstein, Serge, 2013, « Les partis politiques : la fin d’un cycle historique », Esprit, no 397, p. 28-39.
- Bourdieu, Pierre, 1994, Raisons pratiques. Sur la théorie de l’action, Paris, Seuil.
- Chadwick, Andrew, 2007, « Digital Network Repertoires and Organizational Hybridity », Political Communication, vol. 24, no 3, p. 283-301.
- Champagne, Patrick et Olivier Christin, 2004, Mouvements d’une pensée, Pierre Bourdieu, Paris, Bordas.
- Cohendet, Marie-Anne, 2004, « Une crise de la représentation politique ? », Cités, vol. 2, no 18, p. 41-61.
- Collovald, Annie, 1989, « Les Poujadistes ou l’échec en politique », Revue d’histoire contemporaine, vol. 36, no 1, p. 113-165.
- Dalton, Russell J. et Martin P. Wattenberg (sous la dir. de), 2000, Parties Whitout Partisans. Political Change in Advanced Industrialized Democracies, Oxford, Oxford University Press.
- Falkvinge, Rick, 2011, The Pirate Wheel, consulté sur Internet (www.falkvinge.net/2011/11/26/the-Pirate-wheel-revisited-as-broad-ideology) le 20 avril 2012.
- Faucher-King, Florence, 1999, Les habits verts de la politique, Paris, Presses de Science Po.
- Gaxie, Daniel, 1993, Le Cens caché : inégalités culturelles et ségrégation, Paris, Seuil, coll. « Sociologie politique ».
- Gibson, Rachel et Steven Ward, 2011, « Renouveler le parti ? Les stratégies de campagnes et d’organisation en ligne des partis britanniques », dans Fabienne Greffet (sous la dir. de.), Continuerlalutte.com. Les partis politiques sur le Web, Paris, Presses de Sciences Po, p. 109-123.
- Giraud, Baptiste, 2007, « Les Motivé-e-s, ou l’innovation prisonnière des règles du jeu politique », Sociologies pratiques, vol. 15, no 2, p. 55-67.
- Greffet, Fabienne (sous la dir. de), 2011, Continuerlalutte.com, les partis politiques sur le web, Paris, Presses de Sciences Po.
- Guionnet, Christine, 2005a, « Marginalité en politique et processus d’institutionnalisation, les mouvements Motivées et citoyens (2001-2003) », dans Lionel Arnaud et Christine Guionnet (sous la dir. de), Les frontières du politique, enquête sur les processus de politisation et de dépolitisation, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Res Publica », p. 263-291.
- Guionnet, Christine, 2005b, « “La politique autrement” à Rennes entre récurrences et réinvention », dans Jacques Lagroye, Patrick Lehingue et Frédéric Sawicki (sous la dir. de), Mobilisations électorales, le cas des élections municipales de 2001, Paris, CERAPS/CURAPP (Centre d’études et de recherches administratives / Centre universitaire de recherches sur l’action publique et le politique), Presses universitaires de France, p. 117-143.
- Hargittai, Eszter et Steven Shafer, 2006, « Difference in Actual and Perceived Online Skills : The Role of Gender », Social Science Quarterly, vol. 87, no 2, p. 432-448.
- Lemos, André, 2006, « Les trois lois de la cyberculture. Libération de l’émission, connexion au réseau et reconfiguration culturelle », Sociétés, vol. 91, no 1, p. 37-48.
- Mabi, Clément, 2017, Citoyen hackeur. Enjeux politiques des civic tech, consulté sur Internet (http://www.laviedesidees.fr/Citoyen-hackeur.html) le 2 mai 2017.
- Neihouser, Marie, 2017, « Les blogs politiques en France. Fréquentation et participation des lecteurs », Réseaux, vol. 204, no 4, p. 133-158.
- Offerlé, Michel (sous la dir. de), 1999, La profession politique. XIXe-XXe siècles, Paris, Belin.
- Offerlé, Michel, 2012 [8e éd.], Les partis politique, Paris, Collection Que sais-je ?, Presses universitaires de France.
- Ostrogorski, Moisey, 1993 [1re éd. 1903], La démocratie et les partis politiques, Paris, Fayard.
- Paoletti Marion, 2013, « Campagne électorale », dans Catherine Achin et Laure Bereni (sous la dir. de), Dictionnaire Genre et science politique, Paris, Presses de Sciences Po (PFNSP), « Références », p. 68-79.
- Proulx, Serge, 2009, « L’émergence des médias individuels de communication de masse, Vers une coopération conflictuelle avec les médias mainstream ? », dans Antoine Char et Roch Côté (sous la dir. de), La révolution Internet, Québec, Presses de l’Université du Québec, p. 63-71.
- Pudal, Bernard, 1989, Prendre parti : pour une sociologie historique du PCF, Paris, Presses de Sciences Po (PFNSP).
- Sainteny, Guillaume, 1997, Les Verts, Paris, Presses universitaires de France.
- Samuel, Alexandra, 2004, Hacktivism and the Future of Political Participation, thèse de doctorat en philosophie, Université Harvard, Cambridge (MA).
- Theviot, Anaïs, 2013, « “Qui milite sur Internet ?” Esquisse du profil sociologique du “cyber-militant” au PS et à l’UMP », Revue française de science politique, vol. 63, no 3, p. 663-678.
- Traïni, Christophe, 2000, Les braconniers de la politique. Les ressorts de la conversion à Chasse, Pêche, Nature et Traditions, Cahiers du CEVIPOF (Centre de recherches politique de Sciences Po), Paris, Presses de Sciences Po, no 28.
- Wable, Stéphane, 1998, « Les Verts et la politique autrement », dans CURAPP (Centre universitaire de recherches sur l’action publique et le politique), La politique ailleurs, Paris, Presses universitaires de France, p. 99-115.
- Webb, Paul, 2006, « Political Parties and Democratic Disconnect : A Call for Research », dans Paul Webb (sous la dir. de), Democracy and Political Parties, Londres, Hansard Society, p. 5-24.