Abstracts
Résumé
Cette recherche exploratoire se rapporte aux mesures d’accommodement et d’accompagnement ainsi qu’aux répercussions, difficultés et besoins des étudiants en situation de handicap (SH) en contexte de stage en enseignement. En répondant à un questionnaire en ligne, 158 stagiaires SH en enseignement en Belgique francophone et au Québec affirment, en majorité, que leur situation de handicap a des répercussions sur leurs stages. Leurs principales difficultés et besoins se rapportent à l’organisation et la communication écrite. Toutefois, peu de mesures d’accommodement et d’accompagnement sont mises en place en stage.
Mots-clés :
- Stagiaires en situation de handicap,
- mesures d’accommodement et d’accompagnement,
- enseignement
Abstract
This exploratory research aims to identify the accommodation and support measures, the challenges and the needs, for students with disabilities in teaching internship context. By answering an online questionnaire, 158 SH trainees in teaching in Belgium and Quebec, affirm, for the most part, that their situation of disability has repercussions on their internships. Their main challenges and needs are related to organization and written communication. However, few accommodation and support measures have been established during the internship.
Keywords:
- Interns with disabilities,
- accommodation and support measures,
- education
Article body
Introduction
De l’origine d’un modèle de postures pour accompagner les pratiques
Contexte
Sur la lancée du mouvement mondial de l’inclusion (UNESCO, 1994), les étudiants[1] en situation de handicap (SH) accèdent aux études supérieures selon une croissance importante (Fortier, 2018). Pour le Québec, une hausse de 200 % a été constatée entre 1995 et 2007 (Vagneux et Girard, 2014). En 2017-2018, 16 304 étudiants SH étaient inscrits dans les universités québécoises, dont 11 435 dans les universités francophones. La majorité d’entre eux ont un handicap dit « invisible » dont les principaux troubles recensés sont : trouble déficitaire de l’attention, trouble de santé mentale et trouble d’apprentissage (AQICESH, 2018). En Belgique francophone, une augmentation significative des étudiants SH aux études supérieures est également constatée à la suite de l’apparition du décret relatif à l’enseignement supérieur[2] inclusif en 2014 . Entre 2014 et 2018, la population d’étudiants demandeurs d’adaptations (accommodements) a augmenté de 174 %, passant de 904 demandeurs en 2014 à 2479 en 2018. En 2017, 19 % des demandes introduites ont abouti à un plan d’accompagnement individuel (PAI). En 2017-2018, 57 % des demandeurs présentaient un trouble d’apprentissage, 20 % une maladie invalidante, 9 % une déficience psychique, 6 % une déficience motrice et 7 % une déficience visuelle ou auditive (Rapport de l’ARES[3] , mars 2019). La création de services spécifiques dans les établissements et la mise en place d’accommodements dans l’enseignement secondaire expliquent cette forte évolution (Rapport de l’ARES, mars 2019).
Au Québec, les universités, à l’instar des collèges, ont l’obligation légale d’intégrer et de soutenir la réussite des étudiants SH (Charte des droits et libertés de la personne du Québec, article 10). Des services d’accueil et d’intégration ont été instaurés en continuité avec les services reçus antérieurement dans le parcours scolaire. Ces services gèrent, entre autres, les accommodements raisonnables, une obligation légale, pour assurer le droit à l’égalité et offrir les moyens susceptibles de favoriser la réussite sans compromettre l’atteinte des exigences académiques (Philion, Bourassa, Lanaris et Pautel, 2016a). Récemment, en Belgique, dans chaque Haute École, Université ou École Supérieure des Arts (ESA), un service d’accueil et d’accompagnement qui gère les demandes et la mise en place des mesures d’accommodement (aménagements, adaptations) ont été créés à la suite du décret (Parlement de la communauté française, 2014).
Problématique
À l’heure actuelle, on observe que des accommodements sont accordés dans les cours et principalement pour les examens. À titre d’exemples, il y a de l’aide pour la prise de notes, la passation d’un examen peut se dérouler dans un local isolé, du temps supplémentaire est accordé pour remettre un travail où l’utilisation d’outils technologiques est permise pour assurer la qualité de la langue écrite pour les étudiants ayant une dyslexie (Philion et al., 2016a ; Vagneux et Girard, 2014). Toutefois, dans les programmes « professionnalisants » comportant des stages, comme la formation à l’enseignement, la situation se révèle beaucoup plus complexe. Les accommodements pour les cours ne sont pas toujours transposables en stage. De plus, on constate un manque de documentation et de règles pour gérer les accommodements dans ce contexte (Atkins, Chance et Page, 2001 ; Vagneux et Girard, 2014 ; Philion et Vivegnis, 2018). Dans les rares guides qui existent, les balises restent floues. De plus, la question d’accorder des mesures d’accommodement en contexte de stage soulève des enjeux éthiques : comment soutenir tout en gardant les mêmes exigences pour former des enseignants compétents ? (Baldwin, 2007). Il s’agit de mettre en place des accommodements « raisonnables » qui ne compromettent ni le développement ni l’évaluation des compétences attendues (Bribosia et Rorive, 2019). L’inquiétude des formateurs est que les stagiaires SH n’atteignent pas le niveau attendu de développement des compétences professionnelles (Leyser, Greenberger, Sharoni et Vogel, 2011). Les enseignants associés/maîtres de stage ont aussi tendance à douter que les stagiaires SH puissent devenir des enseignants capables d’assumer pleinement le rôle (Lebel et al., 2016).
Les stages sont les moments de la formation les plus appréciés des étudiants, mais ils sont aussi considérés comme exigeants. Au Québec, les étudiants doivent réaliser quatre stages, un par année avec une prise en charge de la classe graduelle. La durée des stages varie d’une semaine à trois mois, pour totaliser un minimum de 700 heures (MEQ, 2001). En Belgique, l’organisation des stages est laissée au libre choix des Hautes Écoles. Elles ont l’obligation de proposer au moins 780 heures d’activités de savoir-faire à répartir sur les trois années de formation. Le contexte de stage en enseignement pose des défis différents de ceux dans les cours. Tous les étudiants doivent s’adapter rapidement à un nouveau milieu, faire preuve d’attitudes « professionnelles », respecter les horaires, les échéances et le code de vie de l’école, tout en établissant des relations appropriées avec plusieurs personnes (enseignants, intervenants, élèves, parents…). Or, ces exigences constituent des éléments de stress susceptibles d’intensifier les manifestations des handicaps invisibles comme l’anxiété. Si on y ajoute les attitudes parfois dubitatives de certains enseignants associés/maîtres de stage et superviseurs, les facteurs de stress sont amplifiés et ne sont compensés par aucune mesure. Dans ces situations, il arrive que l’accompagnement soit inadéquat, que des décisions soient prises au risque de compromettre la réussite du stagiaire ou l’atteinte des objectifs du stage (Ducharme et Montminy, 2012). Par exemple, un enseignant associé/maître de stage décide de mettre un terme au stage et place le stagiaire SH en échec. Par ailleurs, la formation à l’accompagnement des stagiaires n’est pas obligatoire ni au Québec ni en Belgique francophone. Selon une recherche menée par Lebel et ses collaborateurs (2016), les enseignants associés seraient plus enclins à accueillir des stagiaires SH à condition d’en être informés, d’être formés adéquatement et de disposer d’un suivi plus soutenu de la part du superviseur.
En outre, les stagiaires SH ne sont pas tenus de divulguer leur situation de handicap. Certains d’entre eux sont réticents à faire connaitre leur trouble aux enseignants associés/maîtres de stage et superviseurs, plus particulièrement ceux présentant des troubles d’apprentissage ou des troubles de l’attention (Csoli et Gallagher, 2012). Selon nos expériences d’accompagnatrices de futurs enseignants, plusieurs nous ont exprimé leur refus d’en parler par crainte d’être jugés défavorablement et d’autres ont regretté s’être confiés. Une pression ressentie par les étudiants SH est de devoir prouver aux autres, mais aussi à eux-mêmes, leurs compétences et leur légitimité par rapport à la formation qu’ils ont choisie. Ils ont notamment la conviction de devoir mieux réussir que les autres (Ferri, Keefe et Gregg, 2001). Dans ce contexte, il peut être difficile pour ces étudiants de faire appel aux différents services d’aide ou de mentionner leur situation de handicap aux formateurs encadrant leur stage. Or, le cacher pourrait se révéler être un frein à leur réussite. En effet, qu’ils soient capables d’expliquer leur trouble, mais également les effets de celui-ci sur leurs apprentissages permettrait aux accompagnateurs de stagiaires de mieux les comprendre et, donc, d’être plus disposés à proposer les accommodements nécessaires (Wolforth et Roberts, 2010).
Actuellement, concernant l’accompagnement des étudiants SH, les pratiques sont hétérogènes, varient d’un milieu à un autre, elles sont peu validées et manquent d’appuis empiriques (Macé et Landry, 2012). Peu de recherches ont porté sur l’accompagnement en stage des étudiants SH en enseignement alors qu’ils représentent 10 % de cette population au Québec (AQICESH, 2018). Face à l’arrivée massive des étudiants SH en contexte universitaire, il se révèle nécessaire d’adapter et de développer de nouvelles pratiques appuyées sur des résultats de recherche (Brodeur et al., 2017 ; Le May, Ducharme et Otero, 2013). Cette recherche menée conjointement en Belgique et au Québec francophones cherche à répondre à cette question : quelles sont les perceptions des stagiaires SH en formation initiale en enseignement au regard des mesures d’accommodements et d’accompagnement selon leur vécu en contexte de stage ? Il s’agit de savoir si les stagiaires SH communiquent leur situation de handicap, à qui ils se confient, et si les accompagnateurs y répondent favorablement. D’autre part, cette recherche vise à identifier les mesures d’accommodement et d’accompagnement accordées en stage, les difficultés et les besoins des stagiaires SH ainsi que les répercussions de leur handicap en stage. Peu de recherches ont porté sur les étudiants SH dans les stages en enseignement et encore moins centrées sur le point de vue des étudiants, outre la thèse récente de Monfette (2018) qui l’aborde. Cette recherche vient donc répondre à un manque de connaissances scientifiques sur les conditions d’efficacité des mesures de soutien à offrir aux étudiants SH (Landry et Goupil, 2013). Son originalité repose sur la réalisation d’une collecte des données auprès de stagiaires SH en enseignement. À partir de leurs perceptions, il sera possible de mieux cerner la réalité entourant les mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles ou informelles accordées par les enseignants associés/maîtres de stage et les superviseurs. Dans la prochaine partie du texte, les principaux concepts à l’étude seront présentés soit la situation de handicap et les dimensions qui l’entourent ainsi que la dynamique de l’accompagnement de la pratique en stage. Par la suite, les principes méthodologiques seront décrits, suivis des résultats et de la discussion. Une conclusion ouvre la réflexion sur les apports, les limites et les prospectives de cette recherche tant sur le plan scientifique que celui des implications pédagogiques en matière d’accompagnement.
Cadre conceptuel
Le cadre conceptuel gravite autour de la situation de handicap et de la dynamique de l’accompagnement des stages et des stagiaires SH.
Situation de handicap
Cette recherche adhère à une approche inclusive qui valorise la diversité des étudiants et qui consiste à soutenir la réussite pour tous en levant les obstacles à l’apprentissage (Fortier et Bergeron, 2016). Elle s’inscrit dans une perspective d’inclusion sociale des étudiants SH, désignés « en situation de handicap » selon la conception du processus de production du handicap de Fougeyrollas (1995). Les étudiants SH se distinguent par un handicap « traditionnel » (déficience motrice, organique ou sensorielle) et « émergent » ou « invisible » qui réfère à un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H), trouble de santé mentale (TSM), déficience multiple (DM), troubles d’apprentissage (TA) et trouble du spectre de l’autisme (TSA). En Belgique, le décret précise qu’un étudiant SH est celui qui présente : « une déficience avérée, un trouble spécifique d’apprentissage ou une maladie invalidante » (Parlement de la communauté française, 2014).
Le terme de handicap n’est pas pris ici comme restreint à la personne, à un état ou à un diagnostic. Il réfère à un individu qui, placé dans un contexte et/ou un environnement, devient en situation de handicap parce qu’il rencontre des obstacles qui bloquent l’accès à son intégration à la vie sociale (Chapleau et al., 2017). Cette conception repose sur le modèle de processus de production du handicap (Fougeyrollas, 1995) sur lequel s’appuient les politiques belges et québécoises. Ce modèle est dit « social » et s’attarde aux obstacles et aux facilitateurs contextuels plutôt que mettre l’accent sur le handicap ou l’incapacité de la personne. Ainsi, l’étudiant SH est présenté selon une perspective non déficitaire. Le handicap émerge de la relation entre la personne en situation de handicap et son environnement.
L’obligation d’accommodement « raisonnable » permet aux étudiants SH de démontrer qu’ils peuvent atteindre les exigences et réussir sans être désavantagés par la situation de handicap et éviter ainsi la discrimination. Cela dit, les accommodements ne doivent pas compromettre les exigences académiques (Philion et al., 2016a). C’est le principe de l’égalité des chances du droit de démontrer son plein potentiel (Le May et Magloire, 2018). Pour bénéficier de ces mesures, chaque étudiant SH formule une demande auprès des services spécifiques, lesquels établissent un PAI (plan d’accompagnement individualisé en Belgique) ou PI (plan d’intervention au Québec) permettant la mise en place d’accommodements pour les cours et les examens. En général, ces mesures ne posent pas de trop de difficultés, surtout pour les étudiants ayant des handicaps plus traditionnels (Philion et al., 2016a). Notons que dans le cadre de stages en formation à l’enseignement, les accommodements prévus pour les cours et examens sont difficilement applicables et, qu’à l’heure actuelle, aucun accompagnement spécifique ni accommodement particulier ne sont prévus formellement. Au final, tous les stagiaires, y compris les stagiaires SH, doivent se conformer aux règles et aux exigences du milieu scolaire (GT-ÉSHÉ, 2014).
Accompagnement en stage
L’accompagnement selon Paul (2016) se définit comme étant le fait de se joindre à quelqu’un (mise en relation) pour aller où il va (mise en chemin) et en même temps que lui (à son rythme). L’accompagnement des stagiaires est un processus allant de la prise de contact, au suivi, au soutien, à l’incitation à la réflexivité et à l’auto-évaluation (Boutin et Camaraire, 2001). La collaboration entre l’accompagnateur de terrain et le stagiaire est importante, d’autant plus qu’il devient le référent privilégié au moment du stage et déjà lors de la phase de préparation (Deprit et Van Nieuwenhoven, 2018).
La posture de l’accompagnateur définie par Paul (2016) précise bien la place de second du maître de stage/superviseur qui s’adapte aux besoins de l’accompagné et avance à son rythme, ce qui s’inscrit particulièrement bien dans le contexte de l’inclusion et la mise en valeur des ressources de l’étudiant SH. D’autres auteurs insistent quant à eux sur la qualité de la relation qui doit s’établir dès la première rencontre dans la dyade enseignant associé/maître de stage et étudiant, voire la triade avec le superviseur, pour assurer une réelle collaboration au bénéfice de tous. Ainsi, la relation permet à chacun de pouvoir exprimer ce qu’il ressent, de poser des questions, de faire part de ses doutes et de ses défis (Colognesi, Parmentier et Van Nieuwenhoven, 2018).
Selon la recherche de Lebel et ses collaborateurs (2016), l’une des principales tensions vécues par des accompagnateurs de futurs enseignants au Québec est à la fois de les accompagner et de les soutenir tout en s’assurant qu’ils développent les compétences attendues. Ils seraient moins favorables à soutenir les stagiaires ayant un trouble de la santé mentale et, dans une moindre mesure, ceux ayant un trouble d’apprentissage. Ils acceptent plus facilement d’accompagner des stagiaires ayant un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité, ou une déficience motrice, handicaps pour lesquels ils se disent plus familiarisés. Or, Baldwin (2007) souligne que des attitudes négatives vis-à-vis des étudiants SH sont plus marquées au moment des stages, que dans d’autres contextes de formation, notamment lors de l’évaluation. Les stagiaires SH souffriraient donc d’un rejet lié aux croyances profondément ancrées et à la méconnaissance de leur situation de handicap de la part des formateurs. Il semblerait donc important de confronter ces derniers à leurs représentations (Csoli et Gallagher, 2012), mais surtout de les former spécifiquement pour qu’ils se sentent compétents à aider les stagiaires SH (Lebel et al., 2016 ; Lebel, Bélair et Goyette, 2012 ; Leyser, Zeiger et Romi, 2011).
Selon une autre recherche réalisée au Québec auprès de formateurs universitaires et de terrain (Philion et Vivegnis, 2018), les défis des stagiaires SH en enseignement seraient les mêmes que pour les autres stagiaires, mais avec des besoins accrus au niveau de la maîtrise de la langue, des besoins particuliers (manque de confiance en soi, anxiété de performance), des problèmes d’attitudes (peu ou pas de disponibilité pour les rétroactions et la réflexion, le déni) et des problèmes d’organisation (difficulté à planifier et piloter des activités d’enseignement). Les chercheuses recommandent, par exemple, la mise en place de mesures d’accompagnement avant les stages (ex. : cours d’appoint en français), pendant (ex. : recourir au tableau blanc interactif pour les étudiants dysorthographiques) et après les stages (mesure de suivi d’un stage à l’autre). Elles suggèrent de définir les attitudes et les comportements attendus en stage et de maintenir des exigences élevées et clairement explicitées. Elles mentionnent la nécessité pour les stagiaires SH de divulguer leurs besoins avant les stages, ce qui ne semble pas facile en pratique (Philion et Vivegnis, 2018). Robert, Debeurme et Joly (2016) ont notamment évoqué un manque d’habileté à demander de l’aide de la part des étudiants ayant un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité. Ils l’expliquent entre autres par le fait qu’au secondaire les jeunes ne s’impliquent pas dans le processus, puisque tous les dispositifs d’aide sont organisés au niveau institutionnel. Cette difficulté peut avoir des répercussions sur la réussite des étudiants aux études supérieures qui doivent faire preuve d’autonomie. Ils soulignent par ailleurs que pour être autonome l’étudiant devrait bien connaître sa situation de handicap ainsi que ses droits et les accommodements qui lui seraient nécessaires. La recherche de Monfette (2018) a fait ressortir que les principales difficultés rencontrées en stages sont d’ordre organisationnel et interactionnel. En outre, la persévérance des étudiants dans les programmes professionnalisants se distingue par la capacité à surmonter les difficultés en stage qui sont d’autant plus variées en enseignement à cause du contexte hautement interactionnel. Pour surmonter les difficultés, les stagiaires priorisent les stratégies de gestion des ressources, principalement humaines, en faisant appel à leur enseignant associé/maitre de stage ou leur superviseur (Monfette, 2018). Toutefois, pour obtenir ce soutien, l’étudiant doit en faire la demande.
Méthodologie
Cette recherche est exploratoire et descriptive (Fortin et Gagnon, 2016). Elle se veut exploratoire, car peu de recherches ont été réalisées au regard des stages et directement auprès de stagiaires SH, comme spécifiées dans la problématique. Les données obtenues permettront de décrire la situation perçue par ces stagiaires, dans les deux pays, au niveau des pratiques d’accompagnement et d’accommodement existantes et souhaitées et aux répercussions du handicap sur les stages. Dans les prochains paragraphes, l’instrument de collecte de données sera décrit ainsi les participants et la procédure d’analyse des données.
Instrument de collecte de données
Les données ont été recueillies par le biais d’un questionnaire en ligne qui a été conçu pour la présente recherche. Celui-ci combine des questions ouvertes et des questions fermées avec un choix de réponses et, pour certaines, un espace pour ajouter un commentaire. Des données qualitatives et quantitatives ont été collectées. Des questions portaient sur les pratiques existantes au regard des mesures d’accommodement et d’accompagnement dans les stages et sur la divulgation de la situation de handicap aux enseignants associés/maitres de stage et superviseurs. Certaines questions se rapportent à des données factuelles comme le type de handicap, le programme de formation et les stages réalisés. D’autres sont centrées sur les difficultés et les besoins des stagiaires SH ainsi que les répercussions de leur handicap en stage.
Participants
Les répondants au questionnaire sont des stagiaires SH de Belgique et du Québec francophones, inscrits dans des programmes de formation initiale à l’enseignement. Après avoir obtenu un certificat éthique à l’Université du Québec à Montréal, et avec l’accord et la collaboration de la direction du Service d’aide aux étudiants, le questionnaire a d’abord été transmis aux conseillers en soutien aux étudiants SH de six universités francophones au Québec, qui ont ensuite transféré le questionnaire aux stagiaires SH, qui ont accepté de participer sur une base volontaire. Pour la Belgique francophone, le questionnaire a été acheminé aux stagiaires SH par le biais des responsables de l’enseignement inclusif de six Hautes Écoles proposant des bacheliers en enseignement. Un total de 242 stagiaires SH en enseignement ont répondu au questionnaire. De ce nombre, 158 questionnaires ont été retenus puisqu’ils étaient remplis entièrement (65,5 %). Les participants à la recherche se répartissent ainsi : 45 % sont des Belges et 55 % sont québécois ; 73 % sont des femmes contre 27 % d’hommes et 59 % ont moins de 25 ans, 11 % ont entre 26 et 30 ans et 11 % ont plus de 30 ans. En Belgique, les étudiants sont répartis assez également dans trois programmes de formation : 37 % secondaire, 31 % primaire et 32 % préscolaire. Près de la moitié d’entre eux se retrouvent en BAC1 (46 %), alors que les autres sont en BAC2 à 37 % et en BAC3 à 17 %. Au Québec, les répondants sont inscrits à 32 % en éducation préscolaire et enseignement primaire, à 24 % au secondaire, à 20 % en adaptation scolaire au primaire et 16 % en art visuel ou dramatique. La majorité se retrouve au début de leur formation, c’est-à-dire que 34 % des étudiants sont en BAC1 et 25 % en BAC2. Les étudiants en BAC3 représentent 23 % de l’échantillon et ceux en BAC4, 17 %.
Dans le Tableau 1, nous constatons qu’en Belgique, 59 % des répondants présentent un trouble d’apprentissage (TA) et 11 %, un trouble déficitaire de l’attention (TDA/H), alors qu’au Québec, ils sont 8 % ayant un TA et 32 % un TDA/H. Signalons par ailleurs que 29 % des Québécois présentent deux à trois situations de handicap différentes en comparaison à 9 % des Belges. Parmi les 31 stagiaires présentant plus de deux situations de handicap, 12 stagiaires, soit un peu plus d’un tiers, combinent un TDA/H avec un TA.
Analyse des données
Les données quantitatives de cette recherche ont été traitées par le logiciel utilisé pour la mise en ligne du questionnaire, Lime-Survey, et le logiciel Excel. Pour les données chiffrées ou les questions à choix de réponses, des analyses descriptives ont été effectuées soit des fréquences, pourcentages et des moyennes. Pour les questions ouvertes, les données ont été soumises à une analyse de contenu. Elles ont été classées, catégorisées et codifiées selon les thèmes du questionnaire et des thèmes émergeant. Des synthèses ont été ensuite rédigées permettant d’identifier les thèmes principaux qui ressortaient des réponses des stagiaires SH en enseignement. Il s’agit d’une approche qualitative qui s’inscrit dans une visée compréhensive (Van der Maren, 1996) et interprétative (Savoie-Zajc, 2011). C’est donc bien le point de vue des étudiants qui nous intéresse, le sens qu’ils donnent à l’objet de notre recherche ainsi que leur perception de la situation (Bogdan et Biklen, 1992 ; Denzin et Lincoln, 1994).
Présentation des résultats
Les participants à cette recherche (n =158) sont des stagiaires SH en enseignement provenant de la Belgique et du Québec ayant répondu à un questionnaire en ligne. Les résultats présentent premièrement leurs réponses au regard des pratiques actuelles concernant les mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles et informelles. Deuxièmement, les enjeux de la divulgation de la situation de handicap seront décrits et troisièmement, les répercussions du handicap ainsi que les difficultés et les besoins liés aux stages.
Mesures d’accommodement et d’accompagnement
Demandes formelles de mesures d’accommodement et d’accompagnement pour les stages
L’un des objectifs de cette recherche était d’identifier les mesures formelles d’accommodement et d’accompagnement accordées en stage via un plan d’accompagnement individualisé (PAI) ou sur une base informelle, que ce soit par l’enseignant associé/maitre de stage ou par le superviseur. Soulignons que seulement 20 étudiants, soit 12 %, disent bénéficier d’un plan d’accompagnement individuel pour leurs stages (15 % des Belges et 10 % des Québécois). Notons que les stagiaires belges sont issus de Hautes Écoles différentes, alors que la majorité des stagiaires québécois bénéficiaires sont inscrits dans la même université. Ces 20 étudiants ont répondu à des questions ouvertes permettant d’identifier les mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles accordées en stage. À noter qu’un des étudiants québécois présentant un trouble de santé mentale (Q135)[4] a mentionné qu’il bénéficiait d’un PAI pour ses stages, mais n’a répondu à aucune des questions posées à ce sujet. Nous rendons compte ci-dessous des données reçues pour les 19 autres répondants.
Inventaire des mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles en stage
Les mesures formelles d’accommodement qui ont été accordées aux stagiaires SH lors des stages, consignées dans un PAI, se rapportent principalement à des délais pour les échéances de remise de travaux, à l’attribution de lieux spécifiques de stage et au recours à du matériel spécifique. Les répondants affirment avoir bénéficié de mesures formelles d’accommodement comme avoir plus de temps pour la préparation du stage (B78) ou pour rédiger le rapport de stage (Q175, Q108). Pour d’autres, des pauses ont été accordées pendant le stage (B99, Q175). Pour un étudiant présentant un trouble de la santé mentale (TSM) (B99), un lieu de stage près du domicile a été sélectionné. Pour une étudiante belge ayant une déficience auditive, le stage a été choisi dans un milieu pour élèves sourds (B11). D’autres accommodements concernent l’aide technologique, comme le logiciel Antidote, évoqué par trois étudiants présentant un trouble d’apprentissage (B83, B97, Q114). Un étudiant québécois parle de logiciels installés sur son ordinateur (Q158) sans donner plus de précision. Par ailleurs, une étudiante avec une déficience motrice bénéficie d’une chaise adaptée (Q155).
Les mesures d’accompagnement en stage consignées dans un PAI et décrites par les répondants sont surtout offertes avant le stage. Au Québec, deux stagiaires avec un TDA/H bénéficient d’un tutorat pour élaborer les planifications (Q139, Q200). Une stagiaire présentant un TA et TDA/H est aidée dans la « rédaction des documents » (Q114) et un stagiaire atteint d’épilepsie bénéficie de conseils avant le stage : « Il s’agit surtout de conseils qui me sont donnés avant de commencer le stage au sujet des relations sociales avec l’enseignant associé » (Q238). Il ne mentionne pas la fonction de la personne qui le conseille. En Belgique, trois stagiaires (deux ayant un TA [B6, B76] et un ayant un TSM [B104]) disent bénéficier d’un meilleur suivi et de conseils. Cependant, ils n’explicitent pas la teneur de l’accompagnement, sauf : « Nous donner plus de conseils pour les stages » (B76). Deux étudiants évoquent avoir reçu un accompagnement particulier par des enseignants de la Haute École et des didacticiens au niveau disciplinaire (B84, B104). Un stagiaire présentant une déficience visuelle (DV) a simplement noté par qui : « maître de stage » (B40).
Les résultats montrent qu’une majorité des stagiaires SH en enseignement (66 %, soit 71 % des Québécois et 61 % des Belges) n’ont pas de mesures ciblées sur les stages dans leur PAI. Nous leur en avons demandé la raison à travers une question à choix multiples. De ces répondants, 37 % « n’ont pas d’idée de ce qu’ils pourraient demander comme accommodement » (41 % des Québécois et 32 % des Belges), 12 % estiment « pouvoir réussir sans mesure » (14 % des Belges et 10 % des Québécois), 10 % pensent « qu’il n’est pas possible de mettre en place des mesures d’appui même si ce serait utile » (10 % des Belges et des Québécois), 3 % « ne souhaitent pas » et 3 % « n’osent pas demander des mesures d’aide ». Il est à noter que 21 % des stagiaires interrogés ne se sont pas positionnés. Peut-être que certains n’ont pas compris la question, mais on observe que la moitié des non-répondants sont en BAC1.
Demandes informelles de mesures d’accommodement et d’accompagnement pour les stages
Nous avons demandé aux 158 stagiaires SH participants à la recherche s’ils avaient bénéficié de mesures d’accommodement et d’accompagnement de manière informelle de la part de leur enseignant associé/maître de stage ou de leur superviseur. Il en ressort que 28 % ont répondu oui (29 % des Québécois et 27 % des Belges), 50 % ont répondu non (52 % des Québécois et 48 % des Belges) et 22 % n’ont pas répondu à la question (25 % des Belges et 20 % des Québécois). Parmi les stagiaires SH qui ont répondu avoir bénéficié de mesures d’accompagnement informelles. Certains ont eu de l’aide de la part du superviseur (18 % des Belges et 17 % des Québécois), d’autres de la part de l’enseignant associé/maître de stage (18 % soit 21 % des Québécois et 14 % des Belges) et quelques-uns ont bénéficié de l’aide des deux accompagnateurs, mais dans une faible proportion (8 % soit 9 % des Québécois et 6 % des Belges). Certains stagiaires SH (3 % des Belges et 3 % des québécois) ont eu un accompagnement supplémentaire informel de la part de l’enseignant associé/maître de stage ou du superviseur, en plus de bénéficier de mesures d’accommodement formelles grâce à un PAI. La prochaine section explicitera l’ensemble de ces mesures.
Inventaire des mesures d’accommodement et d’accompagnement informelles en stage
Les résultats sur les mesures d’accommodement informelles seront présentés suivis des mesures d’accompagnement informelles. Les principales mesures d’accommodement informelles accordées en stage, soit par l’enseignant associé/maître de stage ou le superviseur, identifiées par les répondants, se déclinent ainsi selon un ordre décroissant : des aménagements liés au temps, le recours à du matériel ou à des outils technologiques, l’adaptation des exigences et des accommodements liés aux déplacements.
En premier lieu, on accorde informellement aux stagiaires SH, des délais sur les échéances dans la remise de travaux, de rapports de stage ou des planifications de leçons : « Ma superviseure de stage 2 m’a fait part de son ouverture quant au fait que je puisse remettre mes travaux après la date d’échéance si j’étais trop fatiguée » (Q124). À noter qu’un stagiaire québécois a eu la possibilité de vivre une semaine d’observation supplémentaire (Q156) et un stagiaire belge a bénéficié d’un report du stage de quelques jours (B96). Un stagiaire québécois (Q166) mentionne avoir été aidé par son enseignant associé à gérer son temps pendant les périodes d’enseignement.
En deuxième lieu, des outils matériels et technologiques ont été mis à la disposition des stagiaires SH informellement, surtout par le superviseur comme le mentionnent trois stagiaires SH québécois : un stagiaire (Q116) a reçu un calendrier comportant les dates importantes et les échéances, un autre présentant un TDA/H combiné avec un TA (Q145) a eu accès aux logiciels comme Antidote et Word Q et une stagiaire ayant une déficience motrice (Q163) indique un iPad. Cependant, elle a écrit un commentaire et soulève la problématique du coût élevé et spécifie que cela ne règle pas son problème à proposer un enseignement vivant. Par ailleurs, signalons que cette stagiaire a mentionné que son superviseur a veillé à diminuer au minimum ses déplacements et que son enseignant associé s’est assuré que le matériel était bien disposé dans la classe pour qu’elle puisse donner ses cours. Pour 2 % des répondants, ils affirment avoir reçu de leur enseignant associé/maître de stage, un canevas pour les planifications (deux Québécois : Q198, Q173) et un tableau d’organisation pour un Belge (B21).
En regard des mesures d’accommodement informelles liées aux exigences, celles accordées par les superviseurs se rapportent aux travaux écrits. Un stagiaire belge (B99) et un stagiaire québécois (Q180) ont eu la possibilité de rédiger leurs planifications à la main et deux autres ont bénéficié d’une indulgence au niveau de la rédaction (Q163, Q238) : « Une flexibilité dans la structure des travaux de planification à remettre, car il s’est bien rendu compte que ces travaux ne m’aidaient en rien dans ma pratique et qu’il n’était pas nécessaire de m’épuiser à rédiger des scénarios et des analyses dans un contexte non pertinent si ce n’était que pour aggraver les symptômes de l’épilepsie » (Q238). Des enseignants associés/maîtres de stage sont indulgents envers les erreurs de français : « Elle m’a demandé de veiller à faire le moins de fautes possible, mais elle ne me pénalise pas, étant elle-même dyslexique elle comprend bien le souci » (B88). L’un propose une validation visuelle des écrits spontanés (B83) et une autre demande aux stagiaires SH de formuler les planifications de leçon à l’oral plutôt qu’à l’écrit (Q125). Par ailleurs, deux répondants mentionnent l’intervention spécifique entre un superviseur et un enseignant associé pour établir une entente : « L’enseignant associé a soutenu ma demande auprès de mon superviseur pour procéder autrement par rapport à mes planifications » (Q198).
Quant aux mesures d’accompagnement informel, les stagiaires SH en enseignement indiquent avoir été soutenus par leur enseignant associé/maître de stage (9 % soit 10 % des québécois et 7 % des Belges) et par leur superviseur (5 % soit 6 % des québécois et 4 % des Belges). Parmi ces mesures, 6 % des stagiaires SH (soit 7 % des Belges et 5 % des québécois) ont bénéficié d’une relecture de leurs travaux par leur enseignant associé/maître de stage. Des stagiaires SH (4 %) disent avoir profité de divers conseils de la part de l’enseignant associé/maître de stage au niveau de l’organisation (Q164, Q200), des leçons (B96, Q151, Q198) et de livres de référence : « Elle me fournissait beaucoup d’informations, de livres pour trouver ce que je recherchais. Elle prenait souvent plus de temps durant la journée pour faire mes rétroactions, sachant que mon attention était dissipée à la fin de la journée » (Q198). Les stagiaires SH ont apprécié le soutien (B83, B106, B104, Q118, Q164), la confiance (B83, B104), la disponibilité (Q222, Q181) et la patience (Q222, Q197) de l’enseignant associé/maître de stage : « parce qu’elle me donnait des trucs précis sur lesquels travailler et m’accompagnait juste assez pour que je puisse voler de mes propres ailes le tout avec tact et honnêteté » (Q118). Un autre répondant a écrit : « beaucoup de compréhension, de patience et de disponibilité » (Q222). À propos de l’accompagnement informel par les superviseurs, les stagiaires SH ont mentionné les encouragements qu’ils ont reçus (B86, B22, Q156), par exemple : « Elle connait mes difficultés et donc m’aide à évoluer là où je suis plus faible. Mais également à m’encourager et à me féliciter de mes efforts d’un point de vue de l’oral » (B86). La compréhension (B86, B104, Q124) et la disponibilité ont aussi été appréciées : « Mon superviseur a gardé contact très souvent avec moi pendant le stage que ce soit par téléphone ou par courriel. Elle était toujours là pour moi » (Q116).
Aucune mesure d’accommodement et d’accompagnement
Nous avons demandé à ceux qui ne bénéficiaient d’aucune mesure d’accommodement et d’accompagnement (72 % des étudiants SH) quelle était, selon eux, la raison. Au total, 49 % des stagiaires SH ont répondu à cette question. Dans 5 % des cas, l’information a été transmise au superviseur ou à l’enseignant associé/maître de stage, mais aucune mesure n’a été mise en place.
Un stagiaire affirme avoir même subi du rejet. Les stagiaires SH répondent qu’ils ne transmettent l’information ni à l’enseignant associé/maître de stage (23 % soit 27 % des Belges et 20 % des québécois) ni au superviseur (15 % soit 15,5 % des Belges et 15 % des québécois), sans en expliquer les motifs. Certains estiment que ce n’est pas nécessaire de le dire à l’enseignant associé/maître de stage (7 %, soit 10 % des québécois et 3 % des Belges), ou au superviseur (6 %, soit 8 % des québécois et 3 % des Belges), car ils pensent pouvoir s’en sortir seuls. Seulement 1 % des stagiaires SH mentionnent que le superviseur ne peut pas les aider alors que 5 % affirment que c’est plutôt l’enseignant associé/maître de stage qui ne peut pas les aider. À noter qu’il y a une différence entre les répondants des deux pays avec 10 % des Belges et 1 % des Québécois qui ont répondu dans ce sens. Une proportion de 2,5 % des stagiaires, autant belges que québécois, a avoué qu’ils ne savaient pas qu’ils pouvaient bénéficier d’aide de la part de l’enseignant associé/maître de stage et 5,5 % de la part du superviseur.
Divulgation de la situation de handicap et transmission de l’information
Parmi les 20 étudiants ayant un PAI décrivant les accommodements formels en stage, neuf préviennent eux-mêmes le lieu de stage de leur situation de handicap. Ils prennent cette initiative parce qu’ils s’aperçoivent que la HE ou l’université ne le fait pas : « Personne n’est au courant de mes difficultés, j’en ai parlé à ma maître de stage durant une conversation, mais elle n’avait pas été prévenue » (B76) ; « L’université ne transmet pas ces informations au milieu de stage. Par contre, je considère qu’il est important de le faire, alors j’en parle moi-même avec mes enseignants associés » (Q114). Lorsque c’est le stagiaire qui prévient le lieu de stage, les accommodements demandés sont respectés. Le degré de satisfaction est positif pour trois des neuf stagiaires (B76, Q104 et Q175) et moyen pour deux stagiaires belges (B83, B6). Les quatre autres ne se prononcent pas (Q158, Q139, Q114 et B40). Pour cinq des stagiaires (quatre belges et un québécois), c’est le lieu de formation qui prévient le milieu de stage. À noter que pour deux stagiaires belges, l’un présentant un TSA (B52) et l’autre un TA (B76), la transmission du PAI à l’école de stage est une mesure d’accommodement indiquée dans leur PAI : « Accompagnement de ma coordinatrice de stage lors du premier contact avec l’école » (B52) et « Prévenir l’école dans laquelle on fait notre stage de nos problèmes » (B76). Deux des stagiaires ne font pas de commentaire, mais ils indiquent que les accommodements ont été mis en place (B11 et Q155). Par contre, pour un stagiaire belge présentant un TA, il déplore que les accommodements n’aient pas été mis en oeuvre : « je n’ai pas eu mes sujets de leçon plus tôt que les autres » (B78). Pour deux autres stagiaires présentant un trouble de santé mentale, cela dépend de l’accommodement (B99) ou du bon vouloir du maître de stage : « J’aurai voulu un bouton “parfois oui, parfois non”. Tout dépend du maître de stage. Certains sont ouverts et attentifs, d’autres sont blasés de devoir m’encadrer plus qu’un autre dans les premiers moments. Et dans les cas extrêmes déjà rencontrés, certains ne me croient pas et/ou ne comprennent pas bien ce qu’est mon syndrome » (B52).
Pour les cinq autres stagiaires SH, l’information n’a pas été transmise au milieu de stage. Un stagiaire québécois (présentant un TDA/H et un TA [Q208]) ne sait pas pourquoi l’information n’a pas été transmise. Un stagiaire belge (B84) indique qu’il n’est pas satisfait, mais ne fait pas de commentaire. Les trois autres stagiaires ont des craintes à transmettre l’information, par peur de discrimination. L’un d’eux est en BAC4 au Québec et présente un trouble anxieux :
« J’ai peur que ce soit perçu comme une triche alors que je devrais être autonome à 100 %. J’ai peur qu’ils disent que ce ne sont pas mes propres planifications alors que ma tutrice est là pour m’aider à les bonifier et à me dire ce que j’ai oublié » (Q200). Le second, québécois, est en BAC1 et souffre d’épilepsie : « Parce que personne ne juge cette approche nécessaire, ni même souhaitable, de peur que la présence d’un stagiaire “particulier” soit vue comme un défaut par les partenaires de formation de l’école » (Q238). Le troisième, belge, avec un TA et inscrit en BAC2, mentionne qu’il a déjà vécu une mauvaise expérience :
« Pour éviter toute forme de discrimination. J’ai déjà prévenu une maîtresse de stage qui a accepté la situation et a prévenu l’école que compte tenu de mon trouble d’apprentissage, elle ne jugeait pas utile d’évaluer l’orthographe et la Haute École a encore plus regardé les fautes d’orthographe dans mes documents en prétendant que ma dyslexie était une excuse » (B97).
Répercussions, difficultés et besoins en stage
Dans cette section, les résultats portant sur les répercussions du handicap, les difficultés et les besoins liés aux stages sont présentés. Une question permettait aux stagiaires d’indiquer si le handicap avait des répercussions sur les stages et dans l’affirmative, ils se positionnaient, par un choix de réponses, sur la nature de ces répercussions : la planification, le déroulement et l’évaluation. Une proportion de 86 % des stagiaires SH affirme que leur situation de handicap a des répercussions sur leurs stages et qu’elles sont liées principalement à la planification (56 %, soit 61 % des Belges et 52 % des Québécois), au déroulement des stages (21 % des Belges et des Québécois) et l’évaluation du stage (9 % des répondants, soit 6 % des Belges et 11 % des Québécois).
Une question ouverte demandait quelle était la principale difficulté vécue en stage. Les réponses des Belges et des Québécois diffèrent. En Belgique, la difficulté principale relevée se cible sur la maîtrise de la langue écrite (38 % des Belges contre 18 % des québécois) : « j’ai peur d’écrire des fautes dans ce que j’écris pour les enfants » (B15) ; « Des fois je mélange des mots dus à ma dyslexie, je fais beaucoup de fautes de syntaxe » (B110).
Pour le Québec, la principale difficulté est liée à l’organisation, la planification ou encore à la gestion du temps (41 % québécois et 12 % belges) comme en témoignent ces réponses : « Un manque de temps flagrant pour planifier les activités vu la demande élevée et les dates d’échéances rapprochées » (Q197) ; « La planification/organisation et pilotage des activités » (Q240). À noter que 59 % des stagiaires SH belges interrogés présentent un TA (essentiellement dyslexie/dysorthographie) et que la majorité des répondants québécois a un diagnostic de TDA/H (48 %).
Nous avons demandé à l’ensemble des stagiaires SH d’identifier leurs besoins pour leur prochain stage. Ils ont répondu à 56 % à cette question. Les principaux besoins sont liés à du temps supplémentaire pour la remise des travaux (16 % des étudiants), du soutien pour communiquer à l’écrit et de la souplesse dans la correction des planifications (8 %), davantage d’accompagnement en stage (8 %), de l’aide dans la préparation des leçons et des cours (6 %) et des accommodements quant à certaines exigences. Finalement, 3 % des stagiaires SH disent ne pas avoir de besoins particuliers et 3 % disent ne pas savoir quoi demander et ce, autant chez les Belges que les Québécois.
Au Québec, les stagiaires désirent majoritairement obtenir des délais pour la remise des travaux (16 % soit 22 % des Québécois et 9 % des Belges). Avoir plus de temps pour accomplir les tâches est aussi souhaité, par exemple, en donnant les consignes plus tôt : « Organiser des rendez-vous avec le maître de stage plus longtemps à l’avance » (B96), ou en morcelant la tâche : « segmenter les étapes me permet de me sentir moins submergée » (B133). En Belgique, les besoins tournent essentiellement autour de la langue écrite (8 % soit 13 % des Belges et 4 % des Québécois). Les stagiaires désirent une correction plus indulgente des productions écrites, comme les planifications, un soutien pour rédiger leurs travaux ou encore remplacer les rédactions par une communication orale lorsque c’est possible. Un stagiaire demande de l’« accompagnement en français (développer mes compétences et moyens) » (Q145) et un autre : « Une aide au niveau de la correction de mes préparations » (B8).
Parmi les répondants, 8 % d’entre eux (10 % des québécois et 4 % des Belges) réclament davantage de soutien, de compréhension, de souplesse et d’écoute de la part des accompagnateurs : « Le superviseur de stage doit davantage encadrer les étudiants en enseignement » (Q208). Une stagiaire SH écrit : « j’aurais aimé me sentir plus soutenue » (B6). Certains stagiaires SH demandent un accompagnement dans les préparations de leçons (6 % soit 9 % des Belges et 4 % des Québécois) ou sur le plan organisationnel (3 % des Belges et 2 % des Québécois) afin de mieux organiser leur stage : « m’aider à structurer et organiser mon stage » (B102) et leur cours : « Organisation d’un cours (planification et pilotage d’une séquence didactique) » (Q200) ou encore l’anxiété liée à ces aspects : « gérer l’anxiété quant à la préparation et au déroulement du stage » (Q120). Par ailleurs, 3 % des stagiaires demandent un accommodement au niveau des exigences concernant les travaux : « Besoin de plus de liberté par rapport à la préparation de stage écrite » (B68) ; « D’avoir une charge de travail à remettre moins lourde » (Q151). Un stagiaire propose la mise en place de pauses plus fréquentes : « Prévoir des périodes lors desquelles je pourrais me reposer » (Q124).
Discussion
Rappelons que le principal objectif de recherche était d’identifier les pratiques existantes quant aux mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles et informelles, aux enjeux de la divulgation de la situation de handicap aux enseignants associés et aux superviseurs ainsi que les répercussions du handicap, les difficultés et les besoins liés aux stages en enseignement selon les perceptions des stagiaires SH. La discussion portera sur les principaux constats à partir des résultats présentés précédemment. Méconnaissance des mesures d’accommodement et d’accompagnement en contexte de stage. D’emblée, à la lumière des inventaires réalisés dans les résultats de notre recherche, on peut dire qu’il y a peu de demandes de mesures d’accommodement et d’accompagnement en stage en enseignement, qu’elles soient formelles dans un PAI ou informelles. La majorité des stagiaires SH ne bénéficient pas et ne font pas de demande d’accommodement en stage. Ils ne savent pas quoi demander, n’osent pas ou pensent qu’il n’est pas possible de mettre en place de telles mesures. Il ressort une méconnaissance de la part des stagiaires de la possibilité de demander des accommodements en contexte de stage, ainsi qu’une difficulté à identifier leurs besoins. En effet, un nombre important de répondants n’ont pas exprimé de besoins pour leur prochain stage, alors qu’ils estiment, en majorité, que leur situation de handicap a une incidence sur les stages, plus précisément dans la planification lors de la rédaction des préparations. Selon Robert, Debeurme et Joly (2016), pour devenir plus autonomes, ces étudiants devraient connaître leurs droits et les accommodements qui pourraient leur venir en aide.
Divulgation et confidentialité de la situation de handicap
Selon les données collectées, que ce soit au Québec ou en Belgique, nous avons relevé que plusieurs stagiaires SH préféraient ne pas informer le milieu de stage ou leur superviseur de leur situation de handicap et qu’ils ne formulaient pas de demande d’accommodement et d’accompagnement. D’ailleurs, sur les vingt stagiaires ayant un PAI, trois ne font pas part de leurs accommodements au milieu de stage par crainte de discrimination. Ce qui rejoint les propos de Robert, Debeurme et Joly (2016) quant au manque d’habileté à demander de l’aide de la part des étudiants SH.
Ils ont des craintes de ne pas être acceptés ou même d’être perçus comme des tricheurs. Certains ont évoqué de mauvaises expériences vécues avec des enseignants associés/maîtres de stage ou des superviseurs. Cela renvoie aux écrits évoqués dans la problématique sur la méconnaissance de la part des accompagnateurs de stagiaires des situations de handicap et sur leurs doutes qu’ils deviennent des enseignants (Lebel et al., 2016). Par ailleurs, il y a des stagiaires SH qui estiment devoir se débrouiller seuls, ou encore, pensent que l’enseignant associé/maître de stage ne peut rien faire pour eux ou bien qu’ils n’ont pas besoin d’aide en stage. Dans la mesure où le contexte des stages impose un accompagnement individualisé offert par des enseignants associés/maîtres de stage et des superviseurs, que doivent-ils connaître de l’étudiant qu’ils accompagnent pour être en mesure de le soutenir efficacement ? Bribosia et Rorive (2019) proposent que chaque établissement d’enseignement supérieur élabore un cadastre des accommodements possibles dans la structure en fonction des profils, avec toutes les difficultés liées à l’effort de standardisation (Belhomme, 2019) et à la nécessité de préserver les exigences au niveau des compétences attendues en stage.
Communication lacunaire des informations et des démarches à suivre
Un problème de transmissions des informations sur la situation de handicap entre l’école de stage, l’école de formation (Haute École ou Université) et les services de soutien est dénoncé par les stagiaires SH ayant un PAI. Ceci soulève la question des rôles et responsabilités de chacun par rapport à la transmission de l’information. Bribosia et Rorive (2019) suggèrent fortement d’éviter que ce soit l’étudiant qui négocie avec les intervenants concernés afin de supprimer toute forme d’obstacles liés au handicap dans tous les aspects de la formation. Les services d’accompagnement des étudiants SH auraient donc la responsabilité de ce rôle. En revanche, les services qui accompagnent les étudiants SH sont soumis au secret professionnel et toute divulgation ne peut être faite qu’avec l’accord écrit de l’étudiant. Il y a donc une réelle tension pour ces services à respecter le droit à la vie privée tout en transmettant certaines informations utiles pour la mise en place des accommodements. Les différents intervenants responsables de mettre en oeuvre les accommodements doivent donc être conscientisés par rapport à cette confidentialité obligatoire et l’accepter (Bribosia et Rorive, 2019). De plus, on peut se demander si les conseillers, pas nécessairement spécialisés en enseignement, sont les mieux placés pour communiquer directement avec les enseignants associés compte tenu des protocoles établis de communication. Toutefois, selon nos résultats, lorsque le stagiaire se présente lui-même avec son PAI, les accommodements sont réellement mis en place alors que ce n’est pas forcément le cas lorsqu’il y a une intervention de la Haute École ou de l’Université. Selon les commentaires de certains stagiaires SH, cela dépend de l’ouverture de l’enseignant associé/maître de stage et, comme on le sait, ils sont plutôt réticents (Lebel et al., 2016). Quelques suggestions amenées par les répondants méritent d’être nommées. Le superviseur peut renforcer son rôle d’intermédiaire et ainsi envoyer un courriel à l’enseignant associé/maître de stage ou se rendre sur le lieu de stage avec le stagiaire pour se présenter. Il offre au stagiaire SH ses conseils avant le stage sur la manière d’interagir avec l’accompagnateur en milieu scolaire, ce qui rejoint l’idée de soutenir avant le stage (Philion et Vivegnis, 2018). Ces démarches doivent se faire avec l’accord du stagiaire SH.
Mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles et informelles
Au niveau des pratiques existantes pour soutenir les étudiants SH, la présente recherche confirme le peu de mesures d’accommodement et d’accompagnement mises en place pendant les stages en enseignement et inscrites dans un PAI, que ce soit en Belgique ou au Québec. Celles qui existent sont liées au temps, à l’aménagement des consignes et des exigences et à la possibilité d’utiliser des supports matériels, notamment les aides technologiques. La mesure d’accommodement la plus fréquemment proposée est d’allonger les échéances pour la remise des travaux. Nous avons aussi relevé le fait de bénéficier de plus de temps d’observation, de recevoir les consignes de stage en avance, d’accorder des pauses pendant le déroulement du stage ou encore reporté le début du stage. Au Québec, certains stagiaires SH ont évoqué le soutien d’un tuteur pour la planification du stage, mesure inscrite dans leur PAI.
Les mesures d’accompagnement mises en place de façon essentiellement informelle par les enseignants associés/maîtres de stage et superviseurs sont liées à la communication écrite. Les stagiaires SH de notre recherche évoquent très peu les outils technologiques. Les logiciels comme Antidote ou Word-Q sont les seuls nommés par moins de cinq stagiaires SH. Or, la connaissance et la maitrise des outils technologiques spécifiques pour les étudiants SH est un facteur de réussite (King, Nguyen et Chauvin, 2010). Ce qui incite à recommander qu’une attention doive être portée sur le choix des outils pour qu’ils répondent aux besoins des stagiaires SH et sur l’accompagnement à l’emploi de ces outils.
Quant aux mesures d’accompagnement, nous observons qu’il y a peu de mesures formelles et que celles qui sont formulées sont peu claires. D’ailleurs, souvent, on ne sait pas qui offre ces mesures. Certains stagiaires SH ont mentionné des mesures d’accompagnement informelles offertes par l’enseignant associé/maître de stage qui semblent pallier certaines difficultés. Par exemple, il corrige les travaux, soutient le stagiaire pendant qu’il donne son cours en validant visuellement ce qu’il écrit au tableau. On peut toutefois se demander si le rôle de l’accompagnateur dépasse l’accompagnement et s’il permet réellement de développer l’autonomie du stagiaire.
On constate la nécessité d’offrir des balises claires sur les types de mesures d’accompagnement et d’accommodement à accorder en stage afin de trouver l’équilibre entre le soutien et les attentes de formation (Baldwin, 2007 ; Bribosia et Rorive, 2019). Les stagiaires SH évoquent également l’importance de la relation avec l’enseignant associé/maître de stage ou le superviseur, dont le soutien moral, l’écoute, l’empathie, l’ouverture, la patience, la bienveillance, l’encouragement ainsi que la disponibilité. Ces propos convergent avec ce que nous savons de l’importance de la relation stagiaire et accompagnateur (Colognesi et al., 2018).
Répercussions, difficultés et besoins en stage
Les stagiaires SH estiment en majorité que leur situation de handicap a un effet négatif sur leur vécu en stage. Quant aux difficultés identifiées, elles sont très liées au type de handicap. Pour le Québec, où la majorité des stagiaires SH ont un TDA\H, les difficultés se rattachent à l’organisation et à la planification. Pour la Belgique, où la majorité des stagiaires SH ont un TA, les difficultés se rapportent à l’écrit. Parmi les autres besoins identifiés par les stagiaires SH questionnés, on retrouve : la demande d’indulgence, d’adaptation des exigences et de soutien par rapport à l’écrit, dont la possibilité de suivre des cours spécifiques, morceler les tâches, avoir du repos, recevoir les consignes plus tôt et accorder des délais. La nécessité d’être soutenu par les conseillers pour développer des stratégies d’apprentissage et dans la rédaction de travaux avait déjà été pointée dans le contexte des études supérieures (Philion et al., 2016b). Selon les propos recueillis dans notre recherche auprès des stagiaires SH, ceux-ci réclament la possibilité de faire appel à ce type d’accompagnement en stage. Selon les résultats, nous observons la nécessite de porter une attention particulière aux stagiaires SH par un accompagnement plus soutenu, notamment par des rencontres avant le stage. Ce qui requiert plus de temps et soulève encore une fois la nécessité pour les accompagnateurs de disposer de conditions propices, et de suivre une formation adéquate (Lebel et al., 2016). Il faudrait peut-être aménager des tâches pour les superviseurs de stagiaires SH, en ayant moins de stagiaires à accompagner. Un service de tutorat par des pairs formés et supervisés pourrait aussi répondre à un besoin.
Conclusion
Cette recherche visait à mieux cerner les pratiques existantes auprès des stagiaires SH en contexte de stage en enseignement en identifiant les mesures d’accommodement et d’accompagnement, les enjeux de la divulgation de la situation de handicap aux enseignants associés/maitres de stage et superviseurs ainsi que les répercussions du handicap, les difficultés et les besoins en stage. Bien que les stagiaires SH de cette recherche affirment en majorité que leur situation de handicap a un effet sur leur vécu en stage, peu de demandes de mesures d’accommodement et d’accompagnement sont mises en place en stage, qu’elles soient formelles dans un PAI ou informelles. Les stagiaires SH pointent principalement des difficultés et des besoins de soutien liés à leur situation de handicap, soit des difficultés plus marquées sur l’organisation pour le Québec (majorité de stagiaires ayant un TDA\H) et au niveau de l’écrit pour la Belgique (majorité de stagiaires ayant un TA).
Les principales limites de la recherche se rapportent à l’instrument de collecte de données. En effet, le questionnaire est relativement long, ce qui a peut-être découragé une partie des répondants (44,5 % des questionnaires n’étaient pas complétés). Beaucoup de questions ouvertes étaient proposées et il est parfois difficile de rédiger pour les étudiants ayant des difficultés d’expression écrite. Certaines réponses ne sont pas claires, ce qui laisse à penser que le stagiaire a peut-être mal compris la question.
Du point de vue scientifique, cette recherche contribue à produire de nouvelles connaissances permettant de documenter ce qui est mis en place concernant les mesures d’accommodement et d’accompagnement formelles et informelles ainsi que les difficultés et les besoins des stagiaires SH durant les stages d’enseignement. Sur le plan de la formation, les résultats apportent un éclairage nouveau ciblant l’accompagnement des stagiaires SH en enseignement, tout en présentant un fort potentiel de transférabilité vers d’autres programmes comportant des stages, comme en travail social ou en sciences infirmières. Les données pourraient éventuellement servir à l’élaboration de formation pour les enseignants associés/maitres de stage et les superviseurs.
Par ailleurs, cette recherche a suscité l’intérêt de nombreux stagiaires SH en enseignement. En effet, 40 % des participants ont laissé leurs coordonnées afin que nous puissions communiquer avec eux pour un éventuel entretien individuel semi-dirigé. Ainsi les stagiaires SH pourraient s’exprimer quant aux mesures à mettre en place afin de les soutenir dans l’expression de leur plein potentiel. D’autres recherches, comme des recherches-actions, pourraient faire l’objet de la mise à l’essai de mesures d’accommodement et d’accompagnement auprès de stagiaires SH et qui pourraient, éventuellement, servir à tous les stagiaires.
Selon une perspective inclusive, on mise notamment sur la prise en compte des besoins de tous pour ainsi devancer les demandes d’accommodements individuels (Fortier et Bergeron, 2016). Cette perspective permet de faire face aux difficultés des services d’aide qui sont débordés par les demandes sans cesse croissantes qui requièrent des réponses individuelles coûteuses en temps et en ressources humaines tout en étant parfois insuffisantes pour assurer la qualité des apprentissages (Philion et al., 2016c ; Brodeur et al., 2017).
Appendices
Notes
-
[1]
Dans ce texte le masculin est utilisé comme générique dans le seul but de ne pas alourdir le texte.
-
[2]
(16/06/2014 - Circulaire 4880 - Circulaire relative à l’enseignement supérieur inclusif [Cette circulaire remplace la circulaire n° 3841 du 5 janvier 2012]
-
[3]
Académie de recherche et d’enseignement supérieur
-
[4]
Ce code identifie le numéro du répondant et son pays; B = Belgique, Q = Québec.
Bibliographie
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