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Les approches biographique (AB) et narrative (AN) ont connu des développements autonomes. Leurs origines respectives se situent dans la recherche en sciences humaines et sociales pour l’une et dans l’intervention sociale pour l’autre. Il nous est toutefois apparu qu’une comparaison de leurs contributions pourrait se révéler fructueuse tant pour la recherche que pour l’intervention sociale. Un examen de leurs convergences, sans pour autant délaisser leurs spécificités, concrétisées par leurs divergences, permettrait un enrichissement mutuel et un potentiel décuplé de possibilités pour les deux types de pratiques que sont la recherche et l’intervention sociale auxquelles nous ajouterons la formation. C’est le défi que nous avons voulu relever, avec les auteur.e.s qui ont apporté leur contribution au Dossier et aux Échos de pratique.
L’approche biographique permet de regrouper un grand nombre de pratiques et d’appellations, transitant historiquement du récit de vie en tant que technique de collecte de données en recherche – en passant par l’histoire de vie, l’(auto)biographie – vers le développement progressif d’une méthodologie autonome en sciences humaines, sociales et éducatives qui se met aujourd’hui au service de trois principales finalités : la production de connaissances (recherche), l’amélioration du vivre individuel et collectif (intervention) et, enfin, la mise en forme de soi (formation).
L’approche narrative avec des individus et des familles, de son côté, est définie de manière succincte par White et Epston (2003) comme « Une thérapie du raconter ». Par contre, cette définition n’englobe pas l’approche narrative collective qui vise plutôt à accompagner des communautés aux prises avec de la souffrance sociale ou un vécu traumatique (intervention) pour lesquels la thérapie n’est pas souhaitable ou n’a pas de référence culturelle (Denborough, 2012). Dans les deux cas, l’intervention cible le discours de personnes souffrant de l’internalisation d’un problème qui produit de l’aliénation et accompagne la personne, les groupes ou communautés concernés dans la recherche d’une alternarration potentiellement émancipatrice. Depuis ses débuts, les fondateurs et les tenants de l’AN travaillent à développer, enrichir et évaluer ses assises théoriques et à les traduire dans des pratiques d’intervention qui inscrivent les histoires de problème dans leur contexte culturel, historique et relationnel (recherche). Ils sont aussi animés par l’importance de diffuser et de partager les idées narratives pour les faire évoluer (formation).
Dans ce qui suit, nous nous proposons de développer brièvement quelques-uns des grands thèmes qui étayent ces contributions. Nous débutons avec une énumération des convergences et spécificités de chaque approche, eu égard à leurs finalités. Suivent l’enjeu de l’élaboration de dispositifs axés sur la production de sens qui scelle le caractère clinique des deux approches, la question des positions respectives des protagonistes dans chaque approche et, enfin, l’enjeu double de la réarticulation de la temporalité et l’édification d’un monde meilleur en tant que retombées des processus biographique et narratif.
Convergences et spÉcificitÉs en bref
Les principales contributions de l’approche biographique (AB) et de l’approche narrative (AN) à l’intervention apparaissent d’abord au niveau de leurs convergences. Soulignons d’entrée de jeu que les deux approches s’adressent aux individus, aux groupes ou aux collectivités. De plus, elles s’appuient sur une narration de soi dans une perspective temporelle dont l’horizon couvre toute la vie, dans l’AB et, de manière plus pointue, se concentre sur une histoire de problème vécu, dans l’AN. Dans les deux approches, cette démarche narrative repose sur une quête de sens. L’issue attendue de l’une ou l’autre démarche est une émancipation individuelle ou collective. Le langage – et ses différentes fonctions (prescriptive, performative, etc.) – est le principal support de chaque démarche, laquelle, comme toute démarche humaine significative, se concrétise dans un processus. Les deux approches partagent une vision socioculturelle du sujet en démarche qui est porteur de ce lourd héritage. Enfin, les deux approches s’inscrivent dans une approche clinique.
Par ailleurs, l’AB et l’AN se distinguent par leur finalité première. Depuis leur création, les histoires de vie ont été mises au service de la production de connaissance en sciences humaines et sociales, alors que l’AN a émergé dans l’accompagnement de différents types d’acteurs sociaux et de groupes sociaux qui souhaitent se libérer de ce que l’on appelle une narration internalisée de problèmes socialement construits (White et Epston, 1990). Bien que l’objectif premier de l’approche narrative ne soit pas la production de connaissances, encourager un individu, un groupe ou une communauté à faire l’étude anthropologique de ses problèmes ou de sa souffrance sociale (Epston, 2014) fait en sorte que les principaux intéressés produisent des connaissances sur le sujet (Denborough, 2012 ; Epston, 2014). L’AB, pour sa part, a connu un développement fulgurant depuis les dernières décennies. Certain.e.s chercheur.e.s, utilisant l’AB, ont intégré à leur démarche des objectifs et moyens relevant de l’intervention. Ailleurs, en sciences de l’éducation, s’est développée une pratique autobiographique de mise en forme de la personne, introduisant ainsi une troisième finalité à l’AB (Pineau et Marie-Michèle, 1983 ; Galvani et al., 2011). De son côté, l’AN, plus récente, s’est développée à partir des années 1980. C’est en 1985 que White, à l’invitation de Karl Tomm, a fait une première présentation dans le cadre du programme de thérapie familiale à l’Université de Calgary, qui fut suivi en 1986 par une tournée de quelques ateliers de formation sur l’approche narrative. L’émergence de l’approche narrative collective, quant à elle, remonte au début des années 1990 (Denborough, 2012). Actuellement, à travers le monde, plusieurs types de professionnel.le.s utilisent l’approche narrative et contribuent à son développement, tant du côté de l’intervention que de la formation et de la recherche.
De notre point de vue, des découvertes émergent du croisement de ces trois finalités tant pour la recherche que pour l’intervention et la formation. Un enrichissement qui nous apparaît même souhaitable en cette époque où la complexité du vivre ensemble augmente. Il nous conduit à une démarche de recherche-action (intervention)-formation potentiellement mise en oeuvre tant dans les pratiques de l’AN que de l’AB (Desmarais et Pilon, 1996 ; Chaput, Giguère et Vidricaire, 1999 ; Leahey et Yelle, 2003 ; Gomez Gonzalez et al., 2013 ; Bernard, Tschopp et Slowik, 2019).
À propos de la contribution de l’AB…
Les récits de vie ont d’abord été utilisés au début du XXe siècle en anthropologie pour éclairer la vie collective. Avec l’École de Chicago, les récits de vie sont utilisés pour produire des connaissances sur le changement social et le développement de la personnalité. Dans les décennies suivantes, les chercheur.e.s poursuivent et développent des connaissances sur certains aspects psychologiques de la personne. Dans cette foulée, émerge pour la première fois l’épineuse question du rapport entre le, la chercheur.e et la personne qui raconte sa vie. Avec la contribution originale de l’anthropologue Lewis apparaît clairement la fonction expressive du je dans le récit de vie et, par ailleurs, l’intérêt d’une combinaison de méthodes (dont l’observation participante) pour la production de connaissances en sciences humaines et sociales. C’est dans la période actuelle de développement des histoires de vie/récits de vie que s’opère la consécration d’une véritable approche nouvelle et autonome de recherche, telle que l’a étiquetée Daniel Bertaux (1980 ; 2016). La période actuelle, qui débute avec la décennie 1970, a vu l’élargissement de la pratique de l’AB à des fins d’intervention et de formation ainsi que son utilisation au Québec. L’approche va permettre des développements significatifs sur l’importance de la réflexivité du chercheur, « c’est-à-dire l’explicitation de ses prémisses épistémologiques, de sa vision du monde, car elles participent à la production de connaissances » (Desmarais, 2021, p. 300).
S’agissant de l’intervention, la pratique de l’AB se diversifie selon le type d’acteurs sociaux concernés et les étapes de vie. À titre d’exemple, l’approche biographique a été utilisée au Québec pour l’accompagnement des mourants (Hétu, 2000 ; Nadeau, 2011) et des personnes dites analphabètes (Cartier et Houle, 1981 ; Benoit, dans Pineau et Jobert, 1989 ; Desmarais et al., 2003). Pratiquée en petits groupes, tant par l’équipe de recherche-intervention que par les participant.e.s, l’AB débouche sur un transformation des rapports entre tous les protagonistes ainsi que sur une nouvelle pratique d’intervention ou son renouvellement en profondeur.
D’autres contributions à l’intervention avec l’AB sont apparues, portées par des collectifs, en milieu communautaire. Du point de vue d’un chercheur-intervenant, la pratique du récit collectif remplit quatre fonctions : cathartique, heuristique, solidarisante et mobilisatrice (Dionne, 1996). Pour opérer un bilan critique de l’action dans l’AB, certaines initiatives ont utilisé le récit de vie individuel collectivisé comme moyen de conscientisation et de mobilisation (Van Schendel, 2011). Construire une histoire de vie collective amène parfois à confronter l’Histoire officielle, à réaliser des « actes de résistance face à des dominations culturelles et idéologiques » (Tatem et Fasseur, 2008, intro), ce que développe de manière continue l’approche narrative. L’approche biographique en collectif peut de plus soutenir la création d’une « nouvelle collectivité », un « nouvel espace économique et social, celui d’un vivre ensemble fondé sur les valeurs d’intériorité, d’écologie et de lien social réciproque » (D-Trois-Pierres, 2005, p. 10). Dans tous les cas de figure, « les sans parole » ont pris la parole. Ils ont transformé leur place dans l’espace socioculturel, leurs représentations de soi et des autres, leur identité, individuelle et collective, et développé leur réflexivité. Enfin, ils ont vécu diverses retombées telle une reconnaissance sociale.
Sous l’angle de l’approche narrative…
L’approche ou thérapie narrative s’inscrit au premier chef dans des finalités de réauteurisation de sa vie et de son identité individuelle ou collective ainsi que dans un processus d’émancipation et de transformation de ses rapports avec les autres et la réalité sociale. L’AN accompagne différents groupes et types d’acteurs sociaux confrontés à une variété de problématiques sociales tels la violence envers les femmes et les enfants, la négligence à l’endroit de populations vulnérables, la résolution de conflits ou d’inégalités sociales, la guérison ou réconciliation sociale, le racisme ou la discrimination, les problèmes de santé mentale, etc. Les fondements théoriques et pratiques de l’AN ont été développés conjointement par Michael White et David Epston, alors que White exerçait comme travailleur social et thérapeute familial. À cette époque, White prend ses distances de l’approche systémique dans la formalisation de son intervention, priorisant désormais la notion d’histoire à celle de système. Tel que mentionné précédemment, Epston (2014) a, pour sa part, insufflé dans l’AN des éléments anthropologiques et sociologiques qui en font une approche ethnographique et de co-recherche.
Par ailleurs, l’approche narrative collective cherche à redonner du pouvoir aux communautés sur leurs problèmes, difficultés ou traumatismes pour faire entendre leurs voix-voies. La découverte des savoirs, des récits et des principes de vie qui leur sont propres est la porte d’entrée pour enclencher un processus de guérison et d’émancipation (Denborough, 2012). En collaboration avec des membres du Dulwich Centre, Denborough (2012) a développé des projets d’intervention collective innovants s’inscrivant dans la tradition narrative et mettant à contribution de nouvelles modalités d’intervention. Ces projets ont été réalisés dans des communautés à travers le monde à la demande de groupes, d’organisations ou d’institutions locales. Pour illustrer le potentiel de ces pratiques, voici les objectifs poursuivis par quelques projets : en Australie, contribuer à la prévention du suicide dans des communautés aborigènes du Territoire Nord ; en Ouganda, développer une méthode de travail avec des enfants soldats ; au Zimbabwe, mettre en place une intervention collective avec des enfants vulnérables ; ou encore en Palestine, documenter les savoirs des travailleurs sociaux intervenant en territoires occupés. Ces projets poursuivent toujours la finalité de replacer les conflits ou les discriminations dans les domaines de la culture et de l’histoire.
Lors du décès de Michael White en 2008, le Dulwich Centre qu’il avait contribué à mettre sur pied a créé une fondation qui finance des recherches qualitatives et quantitatives dont l’objectif est de démontrer empiriquement l’efficacité de l’approche narrative (Gusew, 2017). Pour tenir compte du caractère collaboratif et interprétatif de l’approche narrative, Busch (2012) propose de privilégier la recherche qualitative et une méthodologie discursive. D’autres chercheurs, comme Stillman et Erbes (2012), développent des devis de recherche qui s’inscrivent à la fois dans le langage de la science et dans celui de l’approche narrative.
L’AN s’intéresse aux effets constitutifs du langage qui crée et cristallise la réalité, dont les histoires de problèmes qui deviennent alors internalisées. Elle se centre sur les savoirs locaux et les réponses créatrices des usagers à leurs difficultés, ayant pour objectif de faire émerger les savoirs subjugués au sens où l’entend Foucault (Epston, 2014). L’AN privilégie l’utilisation du terme discours, d’une part parce que ce terme rappelle la dimension idéologique du langage et, d’autre part, parce que le discours structure systématiquement le sujet tout comme le font les interactions sociales (Foucault, 1972). Dans l’AN, les discours sont considérés comme des systèmes de pensée composés d’idées, d’attitudes, de croyances, de pratiques, de modes d’action , qui circulent simultanément dans une même culture où prévalent certaines idéologies (Madigan, 2011). Leur légitimité varie historiquement. Enfin, ces discours permettent à chaque sujet de construire sa propre réalité (Lock et Strong, 2012). L’AN cible au départ ce qui fait problème pour la personne, ce qui l’enferme dans un discours aliéné et aliénant sur elle-même. Alors que le récit de vie ou l’histoire de vie propose une temporalité biographique à cette histoire racontée, l’AN s’est approprié le concept d’histoire qu’elle définit comme « des expériences de vie, reliées en séquences, situées dans le temps selon un thème » (Morgan, 2010, p. 27) et accorde une importance centrale au phénomène de regroupement signifiant de mots dans le langage pour construire la réalité. « Les mots viennent en grappes », dit André Grégoire (2021). Ainsi, nous (nous) racontons des histoires pour donner sens à cette réalité. Dans cette foulée, Vidricaire, pionnier des histoires de vie au Québec, s’interroge : « Comment l’histoire de vie […] échappe-t-elle au piège d’une parole sociale qui a déjà défini [la place des sujets-acteurs] et le sens à donner à leur existence ? » (1996, p. 167).
Avec l’AN, White et Epston (2003) proposent une voie de sortie de cette situation aliénante. Elle consiste à débusquer « les moments d’exception » où la personne prend des initiatives particulières par rapport à son problème, ce qu’ils appellent « le récit de résistance ». En premier lieu, la personne est invitée à raconter l’histoire de son problème et ensuite à explorer le contrôle qu’exerce le langage sur son histoire par le biais des normes sociales. Ce processus se nomme déconstruction. Il se fait à l’aide de conversations externalisantes qui créent une distance entre l’identité de la personne et le problème. Ce faisant, ce type d’accompagnement permet d’appréhender le social internalisé (Grégoire, 2008), notamment les discours et les relations sociales qui contribuent à son maintien. Cette démarche thérapeutique s’appuie d’ailleurs, du point de vue de l’AN, sur l’aspect créatif des mots en tant que tels. L’issue de la thérapie étant la production d’une autre histoire de soi-même « qui incorpore des aspects essentiels et préalablement négligés de l’expérience vécue » (White et Epston, 2003, p. 31).
Une posture clinique et des enjeux Éthiques
Le caractère essentiellement clinique, tant de l’AB que de l’AN, constitue un vecteur de convergence des deux approches. Nous définissons d’emblée la posture clinique comme « une attitude comportant souplesse, prudence » (Grawitz, 1986, p. 362), imprégnée de sensibilité, faisant une place à l’intuition et au sens créatif de l’ensemble des acteurs sociaux en présence, tout en prenant en compte la singularité de chaque situation dans une perspective de résolution de problème (Sévigny, 1993) ou d’allégement d’une souffrance. Une telle posture se situe aux antipodes d’une position d’expert et d’un savoir absolu et s’inscrit dans une éthique de la curiosité (Mongeau, Asselin et Roy, 2013) et du questionnement centrale dans l’AN qui préconise l’adoption par les intervenant.e.s-clinicien.ne.s d’une posture de non-savoir.
La pratique des histoires de vie pose d’emblée la question du sujet (Mercier et Rhéaume, 2007) et, qui plus est, d’un sujet qui se raconte (Mitchell et al., 2004). Pour Legrand, le sujet « est capacité potentielle de réflexivité, de retour sur soi et de volonté, de décision délibérée » (1993, p. 121), c’est-à-dire « la possibilité pour un être humain de faire entrer dans les relais qui conditionnent ses actes les résultats de son processus de réflexion » (1993, p. 31). Le sujet est aussi acteur. Il agit sur les rapports sociaux autant qu’il est agi par eux. Ce sujet-acteur se construit aujourd’hui en confrontant des enjeux liés à l’âge, au genre, des enjeux identitaires liés à son pluriculturalisme à son plurilinguisme, à l’appartenance générationnelle, à des expériences de pluri-mobilités, etc., bref, à des caractéristiques qui reflètent sa place dans les rapports sociaux et dans divers collectifs.
Lorsque les intervenant.e.s-clinicien.ne.s de l’AN interviennent avec des parents ayant des comportements négligents, des hommes violents envers leur conjointe, des abuseurs sexuels, etc., au-delà même d’une attitude bienveillante et d’une éthique de la dignité (Grégoire, 2021), l’intervention menée implique de s’inscrire dans une éthique de la responsabilité (Jenkins, 1990), car toutes les narrations ne s’équivalent pas et ne permettent pas toutes d’assumer la responsabilité de ses actions.
White et Epston (1990) accolent clairement une finalité thérapeutique ou d’émancipation à la narration de soi. « Il y a thérapie lorsqu’il y a travail sur la souffrance psychique », affirme Legrand (1993, p. 265). Ultérieurement, ce dernier distinguera deux types de souffrance : une souffrance psychique commune aux humains et une souffrance psychique plus destructive, paralysante. Alors que l’AB peut accueillir une souffrance commune à tous les humains, l’AN, pour sa part, s’adresse à tout type de souffrance. L’investissement du clinicien, de la clinicienne et du ou des sujets en demande dans la dimension thérapeutique orientera le cadre et le dispositif de la démarche. L’offre de l’intervenant.e et la demande (Lainé, 1998) de la personne désirant amorcer une démarche – doivent converger. En ce qui concerne le dispositif, l’AN a développé une panoplie de pratiques ou de dispositifs innovants pour accompagner les personnes, les groupes ou les collectivités dans leur processus de réauteurisation de leur histoire. Par ailleurs, rappelons que les chercheurs pratiquant l’AB ont largement documenté les effets thérapeutiques de cette démarche. Dans cette foulée, le psychanalyste de Villers (2002) s’appuie sur Épicure pour parler – à propos de l’histoire de vie – d’une thérapie de l’âme. La narration de soi porte le sujet à prendre soin de soi et nourrit le souci de soi (l’art de l’existence, de la vérité). Au-delà même d’une connaissance introspective, le sujet qui raconte son histoire s’engage dans une quête, dans la recherche d’un art de l’existence, qui se concrétise ce faisant dans une démarche d’émancipation tout au long de la vie.
Le clinicien, la clinicienne choisit le terrain, en proximité avec les acteurs sociaux et exprime un intérêt manifeste pour l’ensemble de leurs positions et de leurs points de vue. Plus encore, d’après Legrand, une démarche dite clinique et alliant production de connaissance et intervention ne fait pas l’impasse sur l’implication du chercheur, de la chercheure dans le rapport qu’il ou elle instaure avec son objet/sujet. Nous y revenons plus loin.
Pour agir autrement, il faut pouvoir penser autrement (Karsz, 2004). C’est pourquoi le travail théorique est une exigence dans l’intervention. La clinique prend de plus appui sur l’expérience singulière du sujet en démarche pour passer du vécu au su, pour transformer l’expérience vécue en expérience analysée et, par la suite, en connaissance, dans une dynamique dialogique. Les logiques identifiées deviendront alors utilisables ailleurs ; une situation singulière peut comporter un potentiel de généralisation non négligeable, ce que Courtois (2006) appelle la « sphère de pertinence ».
L’implication du chercheur-intervenant et, plus globalement, sa posture éthique auront assurément des effets sur la connaissance produite. Surgit un enjeu éthique additionnel pour le chercheur-intervenant dans l’étape ultime du processus. Dans la phase de diffusion des connaissances ou savoirs produits, le, la chercheur.e-intervenant.e doit lutter contre les injustices épistémiques (Piron, 2019) que constituent les profondes inégalités sociales entre les différents types de savoirs, notamment entre les savoirs scientifiques et les savoirs expérientiels (Rhéaume, 2011) des sujets-acteurs, dits « savoirs de l’usager.ère » en AN, « en livrant un portrait narratif ne brisant pas le lien entre une personne et ses savoirs » (Piron, 2019, p. 224).
Les positions du sujet en dÉmarche et du, de la chercheur.e-intervenant.e
L’AB a entraîné une véritable révolution paradigmatique en opérant un renversement total de la suprématie du, de la chercheur.e-intervenant.e dans la production de connaissance. Le sujet qui se raconte devient le moteur de la démarche en prenant la parole. Le ou la chercheur.e-intervenant.e veillera à ne pas faire dériver cette parole vers ses propres intérêts ou questions, étant entendu que le cadre de la démarche aura été explicite et bien saisi par toutes les personnes qui racontent leur vie. L’AN, pour sa part, participe de ce nouveau paradigme, car l’intervenant.e narratif.ve opère résolument une distanciation de la position d’expert.e et place les savoirs de l’usager.ère et les savoirs locaux au centre de l’intervention. L’art de poser des questions qui suscitent la réflexion loge au coeur des pratiques narratives (White et Epston, 2003). Or les professionnel.le.s de l’intervention sociale, dont les travailleurs sociaux qui se conçoivent comme des expert.e.s, ont le pouvoir de dénaturer l’expérience des usager.ère.s avec leurs connaissances théoriques et pratiques lorsque lesdit.e.s expert.e.s posent des questions de nature informative ou démonstrative pour vérifier leurs hypothèses (Paré, 2013 ; Gusew, 2017). Bien que le questionnement soit au coeur de l’intervention narrative, il ne vise jamais à confirmer des hypothèses, mais cherche plutôt à explorer de nouveaux territoires. De là, l’accompagnateur.trice crée un espace de dialogue avec le sujet en démarche, une dynamique que l’on nomme volontiers «coconstruction» dans l’AB et dans l’AN.
Dans la situation qui cadre la narration de soi, chacun.e des protagonistes joue néanmoins un rôle crucial. Dans une démarche individuelle, les protagonistes s’engagent dans un pas de deux qui présente des variations plurielles. Ce peut tout aussi bien être un « pas de trois », un « pas de quatre »… dans une démarche de groupe ou de collectif plus grand. Un pionnier de l’AB en formation des adultes met en relief un aspect spécifique de ce processus. Le narrateur, la narratrice et le narrataire occupent des positions diamétralement opposées au départ de la démarche (Pineau, 1986). Le narrateur, la narratrice est totalement plongé.e dans son expérience de vie et le ou la narrataire en est totalement étranger.ère. Le cheminement vers la production de sens exige plusieurs déplacements du narrateur, de la narratrice mais aussi du-de la chercheur.e-intervenant.e clinicien.ne, sans que ce dernier, cette dernière ne cesse jamais « de se présenter à l’[autre] comme une personne différente qui lui oppose une manière différente d’être investi.e dans le monde, ce qui justement permet à l’autre de sentir ce qu’il est en tant qu’être unique » (Leahey, 2011, p. 115). Les va-et-vient dans le déroulement du processus – exploratoires, pluriels – s’accompagnent de retours sur soi, tant pour le sujet que pour l’intervenant.e.
Dans l’esprit de ce processus dialogique, l’AN souligne en résumé la nécessité pour l’intervenant.e de créer une relation de réciprocité, d’adopter une posture de réelle curiosité, d’être à la recherche de la singularité du récit de l’autre et de faire preuve d’une capacité de double-écoute sur l’histoire du problème et sur l’histoire alternative.
La production de sens
Se raconter signifie une mise en mots et en sens de son histoire ou d’une partie de celle-ci. Pineau et Le Grand définissent l’histoire de vie comme : « recherche et construction de sens à partir de faits temporels personnels » (Pineau et Le Grand, 2019, p. 3). La production de sens est donc au coeur de l’AB. Donner du sens à son expérience, c’est la remettre en contexte, dans le temps et l’espace notamment et se donner la possibilité, dans l’ici et maintenant, de lui donner un sens nouveau et d’ainsi décupler son pouvoir d’agir. Cette perspective rejoint celle d’un praticien de l’AN. Du point de vue de Grégoire, l’AN adopte (comme l’AB) le projet « de comprendre notre propre vie et de faire sens avec les évènements qui s’y succèdent » (Grégoire, 2021, p. 44).
Le moment de production du récit, dit « l’expression de l’expérience » (Desmarais, 2021) dans le vocabulaire de l’herméneutique, renvoie à la fois à l’« externalisation » du problème et à l’élaboration d’une histoire préférée dans l’AN. On déplace le centre de gravité que constitue le problème, motif de consultation, vers la prise en compte de la personne dans sa globalité, avec ses ressources et toutes ses expériences. L’atteinte d’objectifs dits thérapeutiques exige une implication active de la personne en démarche dans une « libre recombinaison de tous les facteurs culturels en n’importe quel modèle possible » (Turner, 2003, p. 18). Dit autrement, la mise en place d’histoires et de pratiques alternatives viendra, dans l’AN, de l’exploration des histoires de ces idées-vérités où le sujet a refusé de vivre une situation d’assujettissement. White rappelle toutefois que l’histoire alternative qui émerge est soumise aux mêmes mécanismes de production en raison de « l’importance de la base sociale de ces conclusions identitaires alternatives, [même si] on affirme parfois que ces conversations externalisantes sont associées à la proposition d’un “soi” autonome libéré de l’oppression du problème » (White, 2009, p. 50). Dans la foulée d’un effort de dépassement des déterminations sociales, les tenants de l’AB, de leur côté, voient cette approche comme un puissant levier d’émancipation du sujet qui devient « un véritable auteur et donc, d’un acteur qui agit au lieu d’un acteur qui est agi » (Vidricaire, 1996, p. 178).
Dans les dispositifs de groupe ou d’action collective, la production de sens avec l’AB s’enrichit de la contribution des co-apprenant.e.s, des citoyen.ne.s ayant vécu la même situation, tout comme c’est le cas dans l’AN collective. Comme toutes les histoires de problèmes persistent par Autrui, lors d’intervention avec des individus et des familles, les praticien.ne.s narratif.ve.s utilisent divers types de stratégies avec les « témoins » (personnes de l’environnement) pour affaiblir le problème, mais aussi pour amplifier l’histoire alternative.
Les pionniers de l’AN soulignent l’intérêt de l’écriture dans l’intervention. Toutefois, contrairement à la pratique de l’écriture du récit par la personne en démarche dans l’AB, ce sont les intervenant.e.s narratif.ve.s qui utilisent différents types de productions écrites durant les rencontres. Ces productions sont partagées avec l’usager.ère. Elles servent de relais mnésiques et prolongent ainsi dans l’après de la rencontre les changements en élaboration chez l’usager.ère.
La rÉarticulation de la temporalitÉ et l’Édification d’un monde meilleur
Les travaux sociologiques sur les caractéristiques de l’époque actuelle montrent que le rapport au temps, un analyseur essentiel tant des parcours de vie que des transformations sociétales, s’est profondément modifié. L’une des caractéristiques des mondes contemporains est la prégnance du présent (Augé, 2011). Or ce présent se contracte et, du même coup, le passé n’apparaît plus pertinent eu égard au présent ; de plus, l’avenir demeure incertain. Au niveau subjectif, on a le sentiment que « le temps passe de plus en plus vite » (Rosa, 2010, p. 104). La perception de cet état « d’immobilité fulgurante » crée chez les sujets-acteurs une expérience d’aliénation.
Tant dans l’AB que dans l’AN, la démarche de se raconter s’entreprend toujours à partir du présent, à la lumière duquel le passé est (ré)examiné et l’avenir est envisagé. Comme maintes fois vécu par les sujets en démarche, chaque (nouveau) présent fait émerger une histoire différente. Chaque présent fait émerger un regard différent sur le passé et ouvre des horizons d’avenir distincts. « Pour percevoir le changement dans sa propre vie – pour ressentir une progression dans sa vie – et pour se percevoir en train de changer sa propre vie, une personne a besoin de mécanismes qui l’aident à pointer les évènements de sa vie dans le cadre de séquences cohérentes à travers le temps » (White et Epston, 2003, p. 35). L’équilibre entre le passé, le présent et l’avenir, toujours reliés dans la temporalité biographique, est sans cesse à réarticuler, dans une entreprise de désaliénation conduisant vers une autonomie grandissante, ce qui, du point de vue de Lucien Sève, comprend entre autres la réappropriation par tous, notamment de leurs savoirs (2012).
Nous sommes aujourd’hui engagé.e.s dans une transformation de nos horizons socioculturels : défis reliés à la biodiversité, aux diversités culturelles et linguistiques qui multiplient les parcours de vie[1]. Eu égard à cet horizon, une triple exigence ne s’impose-t-elle pas dans une démarche cohésive ? Celle de mieux comprendre cette réalité complexe (recherche), d’intervenir pour améliorer le bien-être individuel et collectif (intervention) et, enfin, d’accompagner les individus individuellement ou en groupe (formation), sans faire l’économie des nouveaux défis ainsi posés aux chercheur.e.s-intervenant.e.s-formateur.trice.s? Les approches biographique et narrative peuvent-elles en devenir le terreau ? Rosa affirme, pour sa part, que l’écoute – en pleine résonance (Rosa, 2018) – constitue l’attitude essentielle à adopter pour développer un monde meilleur. Or tant la pratique de l’AB que celle de l’AN ont appris aux chercheur.e.s-intervenant.e.s-formateur.trice.s l’écoute, l’attention portée à tous les sujets-acteurs et le dialogue, et ce, dans tous les domaines de la vie. Ainsi, les approches biographique et narrative ne détiennent-elles pas des clés pour contribuer à un monde meilleur ?
PrÉsentation du dossier
Les articles réunis dans le dossier thématique sur les approches biographique et narrative proposent une réflexion sur les usages, les potentialités, les défis méthodologiques et les enjeux éthiques liés à ces pratiques. En premier lieu ressort le grand potentiel que recèlent les approches biographique et narrative comme dispositif de recherche. Ce dispositif peut en effet être adapté de manière créative selon le profil des participant.e.s et l’objet de la narration. En deuxième lieu, dans le registre des effets de la production de connaissances, les approches biographique et narrative sont susceptibles d’induire des transformations et des changements chez les protagonistes impliqués dans la narration, et plus largement, sur l’entourage, la communauté et la société. En troisième lieu, la production d’un récit ouvre la porte sur l’intimité des participant.e.s, ce qui conduit plusieurs auteur.e.s à réfléchir sur une éthique de la relation narrateur.trice-chercheur.e-intervenant.e. Les défis et les enjeux liés à l’usage de telles méthodologies font aussi l’objet de réflexion, par exemple la contribution des participant.e.s à la coconstruction de la recherche et des connaissances.
Sans prétendre que les articles du dossier thématique et des échos de pratique dressent un tableau exhaustif des convergences et spécificités entre les approches biographique et narrative, ces contributions enrichissent certes la réflexion sur une thématique qui, à notre connaissance, est explorée pour la première fois.
Les trois premiers articles illustrent le potentiel et les retombées individuelles, communautaires et sociales de deux recherches-intervention et d’une recherche-formation ayant mis à contribution une approche biographique ou narrative associée à un dispositif de groupe avec des populations en situation de grande vulnérabilité ou vivant des difficultés significatives. On avance l’idée que les histoires racontées par les participant.e.s narrent à la fois leur histoire singulière, mais aussi une histoire collective, la contribution des autres enrichissant la réflexion sur soi et les prises de conscience potentiellement transformatrices et sources de changement.
Dans le premier texte, Jean Evenson Lizaire propose une réflexion sur la résonance biographique du récit de soi en tant que composante centrale d’un dispositif de recherche-intervention que l’auteur rattache à la sociologie clinique. Le cadre, c’est celui d’un groupe de jeunes filles d’un même quartier de Port-au-Prince et qui partagent des conditions matérielles de pauvreté. L’objectif ultime du chercheur-intervenant est d’accompagner les participantes dans une réflexion sur leur histoire personnelle pour en dégager une compréhension qui les guidera vers une réappropriation de leur pouvoir d’agir, voire celui de leur communauté. Les défis pour les participantes sont nombreux. L’intervention commence déjà avec le recrutement qui exige toute l’attention du chercheur-intervenant. Le dispositif comprend neuf séances d’un groupe de huit personnes au maximum. Des supports divers sont proposés aux participantes aux trois moments de l’intervention. Le repérage de l’écho des récits individuels dans le groupe est facilité par l’enregistrement des séances – puis leur visionnement – avec le consentement libre des participantes. Le processus groupal comporte deux temps. D’un premier temps où les participantes ont tendance à raconter leur expérience en suivant une logique de respect des convenances, le processus évolue vers un second temps dans lequel les participantes se racontent avec une « parole de l’intérieur ». L’auteur montre comment une parole singulière comporte une résonance plurielle. La narration provoque deux effets cernables : un effet de mise en évocation et un effet de réflexivité. Dans la dernière section du texte, l’auteur réitère que ce dispositif suscite des enjeux d’ordre psychosocial, méthodologique et éthique. Enfin, l’auteur soulève un enjeu fondamental de l’intervention avec les approches biographico-narratives : les récits des participant.e.s résonnent aussi pour le chercheur-intervenant.
Dans le second texte, les auteur.e.s Ailma Cinthia Barros Nascimento, Ilze Braga de Carvalho Nobre et Marcelo Silva de Souza Ribeiro se sont engagé.e.s collectivement dans une recherche sur le point de vue de jeunes enfants à propos de leurs droits, à partir de leurs récits de vie. Ces jeunes habitent des communautés traditionnelles dans l’un des États fédérés du nord-est brésilien. En accord avec les approches biographique et narrative, les chercheurs partent du postulat selon lequel les enfants sont de nécessaires protagonistes lorsqu’il s’agit d’exprimer et d’énumérer leurs propres désirs ainsi que leurs besoins. Dans le contexte brésilien, les enfants ne sont pas écoutés, plus particulièrement – précisent les chercheur.e.s – dans les communautés défavorisées. Or dans certaines de ces communautés, les enfants ont un rôle important à jouer en participant à la vie communautaire. Les chercheur.e.s se sont donc déplacés pour rencontrer les enfants, participant ainsi d’un geste de reconnaissance des enfants. Ils présentent leur dispositif : des cercles de parole, enregistrés, à trois moments successifs. À partir d’une analyse de contenu thématique, les chercheur.e.s ont cerné dans les propos des enfants un ensemble d’enjeux qui ouvrent des perspectives de changement dans les rapports des adultes avec les enfants et dans les politiques publiques les concernant. Ils ont de plus cerné six types de droits propres aux enfants. En conclusion, les auteur.e.s insistent sur l’importance du lien affectif à construire entre les chercheur.e.s et les enfants. De plus, ils énumèrent une série de points méthodologiques à mettre en pratique dans la recherche avec les enfants.
Dans le troisième article, les auteur.e.s, Clara Maria Miranda de Sousa et Marcelo Silva de Souza Ribeiro s’intéressent à l’autosoin chez les enseignantes de la maternelle. Les chercheur.e.s partent du postulat voulant que ce qu’on appelle le care dans le rapport aux autres et au monde passe par l’autosoin. Les auteur.e.s citent des études indiquant que les enseignantes, notamment celles de la maternelle, vivent des conditions de travail précaires et une surcharge relationnelle qui peuvent provoquer de la détresse psychologique ainsi que différents problèmes physiologiques. Les stratégies d’autosoin qu’elles développent sont notamment influencées par leur histoire de vie. Les auteur.e.s adoptent une démarche formative participative et dialogique qui pose l’enseignante comme sujet du processus, ce qui les amène aux histoires de vie. Les chercheur.e.s ont accompagné un groupe de 13 enseignantes d’école maternelle, durant 5 rencontres, en 2017. Les techniques de collecte de données sont nombreuses. L’analyse des données – restituées et validées par le groupe – fait émerger trois types de rapport à l’autosoin dans les histoires de vie des enseignantes. Les réflexions qui suivent montrent une compréhension sensible des propos des enseignantes chez les auteur.e.s et illustrent ce que nous pensons être une posture clinique. Ce type de recherche croise les identités et permet de plus d’accéder aux incertitudes, reflets d’une réalité toujours en mutation et qui affectent les subjectivités. L’être qui réfléchit sur soi est engagé dans une recherche de solutions émergeant en soi et articulées sur son milieu. Ce sujet adopte une écoute sensible, partie prenante d’un grand nombre d’histoires qui s’entrelacent et structurent notre façon d’être avec soi et avec l’autre. Les auteur.e.s signalent en conclusion que la démarche de recherche-formation a eu des retombées concrètes dans la pratique.
L’article qui suit, tout comme les précédents, porte un regard sur les retombées positives pour les participant.e.s d’une démarche biographique collaborative. Cependant c’est l’analyse des enjeux éthiques et méthodologiques de la posture du-de la chercheur.e et la nature de la relation participant.e-chercheur.e qui est un élément fort de ce texte et des trois suivants. En premier lieu, l’article de Clément Mercier, Denis Bourque et Julie Richard analyse les défis méthodologiques et éthiques d’une recherche avec 12 professionnel.le.s d’expérience en intervention collective lors de la production de leurs récits biographiques. Ces professionnel.le.s ont été retenu.e.s en raison de l’importance de leur contribution dans le champ de l’organisation communautaire au Québec et de leur grande capacité d’analyse et de réflexion, des qualités essentielles en raison de la récursivité du processus d’analyse privilégié. Ainsi, c’est à l’aide d’une approche biographique collaborative que cette recherche vise à documenter les influences personnelles et professionnelles ainsi que les éléments théoriques et analytiques à l’oeuvre dans la pratique de ces personnes. Les auteur.e.s tissent des liens entre l’approche narrative et leur posture de chercheur.e en favorisant la coconstruction des connaissances. Par la suite, des enjeux éthiques sont soulevés au sujet de la relation narrateur.trice-chercheur.e. En premier lieu, on précise l’importance de bien camper les rôles de chacun.e des protagonistes : le rôle du, de la chercheur.e étant de théoriser sur la pratique du narrateur.trice et celui de ce dernier.ière, de l’enrichir de son propos réflexif. On souligne ensuite la nécessité pour le ou la chercheur.e de maintenir une saine distance. Selon les auteur.e.s, l’une des retombées de la production du récit pour ces professionnel.le.s a été de favoriser une prise de conscience sur la nature de leur engagement ainsi que sur les valeurs personnelles et professionnelles qui les animent. Les auteur.e.s concluent que l’analyse transversale des récits permet de dégager des pistes de réflexion susceptibles d’enrichir et de questionner le corpus de connaissances en intervention communautaire.
Le cinquième article de ce dossier aborde les effets du processus d’auteurisation sur les proches de la personne qui se raconte, en plus d’analyser la nature des liens tissés entre les femmes immigrantes et la chercheure. Delphine Leroy aborde les effets imprévus d’une recherche ethnographique suscitant « la narration de l’ordinaire » sur les protagonistes concerné.e.s par cette narration, en l’occurrence la narratrice, les proches et la chercheure. Les liens tissés entre la chercheure et les femmes se sont échelonnés sur une période prolongée dans des contextes à la fois formels et informels, motivés par des finalités propres à chacune. Cette incursion dans l’intimité des femmes a eu des répercussions multiples. Cette recherche s’appuie sur la prémisse qu’un stigmate est associé aux personnes ayant de la difficulté à lire et à écrire, lequel peut être amplifié par la présence d’autres éléments discriminants comme être une femme immigrante. Le concept d’auteurisation est au coeur de la démarche. Considérant la complexité du rapport à l’écrit des femmes que Leroy a accompagnées, la chercheure était considérée comme la professionnelle de l’écriture. Tout au long de la démarche d’accompagnement, la chercheure s’est dissociée de la position d’expert.e, ce qui l’a conduite à partager ses interprétations avec les femmes. C’est le désir de faire reconnaître leur parcours semé d’obstacles qui a motivé les femmes à se raconter, avec pour retombées une transformation de leurs représentations d’elles-mêmes et de leur entourage. L’élément fort et déstabilisateur pour l’entourage fut la teneur affective du récit des femmes. L’intérêt porté à la vie quotidienne des femmes par la chercheure a des effets similaires à ceux de l’intervention. En conclusion, la chercheure porte un regard sur la place et la reconnaissance données aux auteur.e.s des récits de vie dans une production de nature universitaire ou scientifique.
Dans le sixième article du dossier, où la position de chercheure fait aussi l’objet d’une analyse, la réflexion s’élargit à la place accordée aux femmes à toutes les étapes de la recherche lorsqu’on souscrit à une perspective de coconstruction des connaissances. Les auteures, Isabel Lanteigne, Marie-André Pelland, Lise Savoie et Hélène Albert, proposent une analyse réflexive sur les enjeux éthiques et méthodologiques rencontrés lors de recherches menées avec deux groupes de femmes différents (polygames et en situation de pauvreté). Plus spécifiquement, elles analysent la place donnée aux femmes dans l’ensemble du processus de la recherche, mais aussi la position adoptée par la chercheure. Dans les recherches présentées, l’approche narrative a été utilisée en tant que méthode. Elle permet à la fois de comprendre la réalité singulière des femmes tout comme les dynamiques collectives sous-jacentes. La relation qui se tisse entre les histoires des femmes et les histoires scientifiques de la chercheure peut devenir une source de changement. De plus, les auteures avancent l’idée que la perspective psychosociale que l’on adopte comporte des défis spécifiques. Les chercheures s’inscrivent dans une perspective féministe. Les repères théoriques retenus permettent de jeter un regard réflexif sur la relation entre les femmes et les chercheures, mais aussi sur la performativité de ces dernières. Les auteur.e.s constatent que même lorsqu’on vise une co-production des connaissances, les participant.e.s sont rarement invitées à s’impliquer dans toutes les étapes de la recherche. D’autres éléments font aussi l’objet de réflexion, comme la participation libre et éclairée des femmes, la création d’une relation invitant à la narration de soi ainsi qu’une analyse rigoureuse qui tient compte de trois actes interprétatifs. En conclusion, les auteur.e.s rappellent que la recherche est une forme d’intervention qui poursuit des finalités de changement social et que le « rôle de porte-voix » des chercheures comporte des exigences éthiques.
Dans le septième article du dossier, on analyse la posture du, de la chercheur.e mais cette fois dans le contexte spécifique de l’interculturalité. Les auteur.e.s Sophie Hamisultane, Marie-Josée Lorrain, Cécile Nicolas et Jacques Rhéaume réfléchissent à la posture de la personne intervenante – incluant la personne chercheure – dans un contexte d’interculturalité, à travers le prisme de la sociologie clinique. Devant les différentes représentations de l’agir professionnel, les auteur.e.s dégagent trois postures-types. Le cadre conceptuel sera constitué d’une dialectique du vivre-ensemble à normes et valeurs communes, à visée universelle et modulations singulières. Les auteur.e.s affirment d’emblée que la forme narrative ne consiste pas uniquement à traduire un événement ou une séquence de vie, mais à pouvoir persuader son public, et ce, dans un contexte interculturel où existe un rapport causal entre le soi et la souffrance des autres. Chez l’intervenant.e, la relation à l’autre est aussi relation à soi. Les auteur.e.s relèvent différentes composantes de cette posture complexe de l’intervenant.e, y compris les techniques utilisées. Ainsi, les chercheur.e.s mettent l’accent sur les visées de deux méthodes biographiques qui permettent d’interroger la posture de la personne intervenante. Le photolangage donne à voir la prise de l’imaginaire social sur l’interculturalité. Il permet d’articuler l’intrapsychique et l’intersubjectif. Dans un groupe, le partage de la parole autour de l’image choisie permet de dégager des thématiques reliées à la théorisation des rapports interculturels. Le récit d’expérience, pour sa part, a permis de faire émerger le cadre interprétatif des délégué.e.s à partir de quatre dimensions d’une implication syndicale. Dans tous les cas, un constat : laisser une trace de son expérience. En conclusion, les auteur.e.s constatent que la dynamique de groupe sous-jacente aux deux méthodes biographiques présentées permet de rendre compte de soi… et de l’objet en concomitance.
Les deux derniers articles du dossier ont été rédigés par un même collectif de chercheures. Le premier article explore les possibilités qu’offre la trame narrative pour débusquer des changements dans le parcours de vie des participant.e.s et mieux nuancer l’analyse de leurs récits, une réflexion porteuse pour les tenants des approches biographiques et narratives. Le second article s’intéresse aux liens entre les concepts d’identité narrative, d’archétypes narratifs et la présence ou non de résilience. L’idée selon laquelle les récits sont façonnés par les histoires maîtresses qui circulent dans la société est transversale aux deux textes. Dans le premier des deux articles, à Isabelle F. Dufour s’ajoutent Brenda Aucoin, Julie Marcotte et Marie-Christine Fortin. L’objectif des auteures est de mettre en évidence le rôle de la trame narrative dans le rapport que les jeunes adultes ayant commis un ou des crimes entretiennent avec le crime, ce qu’elles nomment « les processus de désistement du crime ». C’est dans la période de l’entrée dans l’âge adulte que l’on retrouverait à la fois le plus grand nombre de personnes qui commettent des délits et le plus grand nombre de personnes qui ne commettent plus de délits. La plupart des études reconnaissent que ces changements se retrouvent dans la trame narrative des individus. La narration de soi donne continuité, sens et finalité à la vie, et permet d’unir passé, présent et avenir. Les auteures ajoutent toutefois que le ou la narrateur.trice doit pouvoir modifier son propos pour actualiser des changements dans sa vie. Les auteures ont interviewé 28 personnes ayant commis des délits, dont le profil sociologique est partiellement présenté. L’analyse des données a amené les auteures à classer les interviewé.e.s sur une ligne de vie allant de ce qu’elles nomment un « désistement peu probable » à un « désistement en voie de complétion ». Suit une reformulation phénoménologique du récit à l’aide d’une analyse thématique des propos. Les récits contiennent des abandons, des ruptures, des violences familiales, de la consommation de substances psychoactives mais aussi des traces d’émancipation. Les auteures ont de plus identifié quatre types de récits, établis d’après le titre apposé par le jeune adulte à son récit. En conclusion, les auteures affirment que la contribution principale de cette étude est de mettre en exergue la trame narrative des « désisteurs en devenir » et de la distinguer à la fois de celle des « désistés » et de celle des « persisteurs ».
Dans l’article suivant, Julie Marcotte agit à titre de première auteure. Elle est accompagnée de Marie-Christine Fortin, Isabelle F.-Dufour, Marie-Claude Richard, Aude Villatte, Chantal Plourde et Georgia Vrakas. Toujours dans le cadre du projet Transcendance, 18 récits ont été analysés en vue d’explorer les liens théoriques entre les concepts d’identité narrative, d’archétypes narratifs et la présence ou non de résilience. Selon les auteures, les récits de vie sont façonnés, consciemment ou inconsciemment, par les histoires maîtresses qui circulent dans la société. Il ressort de la discussion que les thèmes de l’identité narrative et d’archétypes narratifs se sont avérés utiles pour cerner la présence de résilience. Au sujet de l’identité narrative, on constate que l’agentivité et la signification sont très présentes dans le discours des personnes résilientes. Le concept des archétypes narratifs, pour sa part, permet de voir qu’il existe un lien clair entre les archétypes positifs et la trame rédemptrice. Les archétypes négatifs, quant à eux, sont marqués par l’absence de pouvoir de la personne sur sa vie. Enfin, les archétypes paradoxaux ne permettent pas d’identifier de la résilience. Quelques réflexions suivent sur la position de la chercheure et sur sa subjectivité ainsi que sur la posture épistémologique sur laquelle s’appuie la recherche. En conclusion, les auteures constatent la pertinence des trois concepts de l’étude et leur interdépendance. Elles soulignent que la méthodologie utilisée pour produire le récit de vie a permis à ces jeunes adultes une réauteurisation de leur vie, favorable au développement de la résilience. Toutefois, elles rappellent que la création d’espaces de paroles pour entendre ce que les jeunes ont à dire est également une responsabilité sociale et collective.
PrÉsentation de la rubrique Échos de pratique biographique et narrative
Les textes classés sous cette rubrique apportent des exemples concrets de l’utilisation dans l’intervention de l’approche biographique ou de l’approche narrative, voire d’un croisement des deux approches. Ils mettent l’accent tantôt sur le processus d’intervention et ses retombées, tantôt sur les outils originaux développés pour accompagner des personnes dans la reconstruction de leur parcours de vie et le mieux-être, voire la reconstruction identitaire qui en a résulté. Les quatre articles qui suivent rendent compte d’intervention narrative ou biographique menée auprès d’individus, de groupes ou de communautés. Bien que les interventions fassent appel à des assises théoriques ou à des dispositifs différents, elles accordent toutes une grande importance à la nature de l’accompagnement, à la qualité des liens, au potentiel de changement et aux retombées.
Dans le premier texte, l’auteur·e Charlie Crettenand présente le jeu Graines de Rêves, coélaboré avec Doria Roustan, en mettant de l’avant le potentiel qu’il recèle. Iel avance l’idée que ce jeu collaboratif stimule la créativité de la personne grâce à l’utilisation de questions narratives et la présence d’autres joueurs. Il s’agit d’une pratique d’intervention novatrice qui s’ajoute à celles déjà utilisées dans le cadre de la thérapie narrative. Pour Crettenand, ce jeu contribue à aider les personnes qui vivent des épreuves ou des crises existentielles à se raconter pour parvenir à une ré-auteurisation de leur récit. Durant ce « voyage existentiel », iel propose d’offrir à la personne un accompagnement mettant de l’avant ses forces, ses expériences et ses valeurs. L’auteur·e rappelle la place particulière que doivent occuper « les allié.e.s » de la personne puisqu’ils et elles contribuent au processus de changement. Deux concepts constituent les assises théoriques de ce jeu narratif : la migration identitaire et le voyage identitaire. L’accompagnement clinique offert à une jeune femme sert à illustrer l’apport du jeu et comment il met à contribution le « cercle fertile » ou « les allié.e.s » de la personne pour favoriser le changement. L’auteur·e conclut qu’une des retombées du jeu est de favoriser l’émergence de récits plus près des aspirations de la personne qui consulte.
Le texte suivant partage un même type d’intervention dite thérapeutique avec le texte précédent. Hélène Kauffmann, Karine Croteau et Cassidy Sullivan présentent une approche autobiographique en intervention de groupe avec des ainé.e.s. Dans la présentation de leur modèle conceptuel, les auteures situent historiquement leur intervention dans l’École de Chicago. Dans le modèle, la reconstruction du parcours de vie enchaîne sur l’importante étape d’analyse autobiographique qui permet de faire émerger l’interprétation subjective singulière du parcours, et notamment le potentiel de souffrance ainsi que les réalisations, les siennes propres et celles d’autrui. Ce processus, qui n’est pas sans nécessiter plusieurs séances, d’après les auteures, comporte de nombreux avantages et retombées. Ainsi, la démarche permet notamment de connecter avec son être profond, de développer une meilleure estime de soi et de son pouvoir personnel et, enfin, de donner du sens à sa vie, sans oublier les liens créés avec les membres du groupe. Par la suite, les auteures s’interrogent sur la posture véritable de la personne ressource qui accompagne le groupe, sans pour autant mettre de côté le rapport égalitaire qui doit exister entre « l’aidant et l’aidé ». « Accompagnant » ou « thérapeute » ? Les auteures conservent les deux termes tout en affirmant que l’intervenant.e est un « catalyseur positif ».
Dans le troisième texte, Yann Strauss apporte une contribution sensible et concrète à ce qu’il appelle une approche clinique narrative. Une contribution d’une criante actualité dans plusieurs pays du monde, dans le contexte de la Covid. Il présente son expérience d’accompagnement d’une personne vivant en établissement d’hébergement pour personnes âgées et dépendantes, dans le cadre d’une recherche doctorale. La personne vit de grandes pertes, y compris le sentiment de se perdre elle-même. La méthode d’intervention et d’analyse expérimentée permet à cette personne, à travers une co-exploration et une coconstruction des événements significatifs de son parcours de vie, de se retrouver dans le regard du clinicien, à travers une mise en mots par le dialogue. La personne renaît dans la relation. L’auteur affirme en conclusion que cette expérience indique une nouvelle voie d’accompagnement des personnes âgées et dépendantes : les résidents eux-mêmes, le personnel de l’établissement et les aidant.e.s peuvent devenir narrataires pour « accompagner la re-co-naissance » de chaque sujet dans sa singularité.
Olivier Vallerand signe le quatrième texte avec des collaborateur.trice.s d’un organisme communautaire montréalais dédié à la déconstruction des stéréotypes associés à la diversité sexuelle et de genre : Kevin Lavoie, Olivier Lépine, Julien Plante-Hébert, Marie-Ève Baron, Eliott Corriveau-Branchaud, Sam Lajeunesse, Amélie Charbonneau et Marie Houzeau. Ce souci de déconstruire des réalités sociales jugées problématiques est une finalité par ailleurs partagée avec les tenants de l’approche narrative. L’intervention communautaire menée par l’OSBL cible plusieurs groupes sociaux distincts, tant dans l’organisme lui-même que dans les écoles secondaires. Elle s’appuie sur le témoignage de bénévoles attachés à l’organisme. Les témoignages sont empreints d’affects, garants, du point de vue des auteur.e.s, d’authenticité et d’un contact réel avec le public. L’émergence des réalités trans et non binaires a obligé l’organisme à réfléchir à sa mission et à son dispositif, ce qui a conduit le collectif à s’engager dans un exercice de planification stratégique. Bien que cet exercice ait confirmé la place du témoignage comme fondement de l’intervention, la formation des bénévoles a été soulevée, car elle en constitue un aspect essentiel. Divers questionnements éthiques et méthodologiques ont de plus émergé. L’organisme accompagne les bénévoles dans la (re)formulation de certains aspects de leur témoignage, entraînant un enrichissement des ressources de l’organisme et un dialogue plus adéquat et approfondi avec les publics ciblés.
Enfin, l’illustration de la page couverture a été confiée à Louis-Philippe St-Laurent, illustrateur, à la suite d’une exploration décevante de banques d’images. Les discussions au sujet de la réalisation de cette page couverture nous ont permis de réfléchir sur notre façon de traduire en image les contributions de l’approche biographique et l’approche narrative à l’intervention sociale ; nous l’en remercions.
Appendices
Notes biographiques
Danielle Desmarais est professeure associée à l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQÀM). Anthropologue, ses champs de recherche et de formation ont longuement porté sur le processus de construction identitaire (notamment des jeunes adultes en difficulté) d’une part et, d’autre part, sur divers aspects du rapport à l’écrit, des parcours de vie dits « chemins de traverse » (analphabétisme, illettrisme, décrochage/raccrochage scolaire) et de l’accompagnement de ces parcours. Elle continue de s’investir dans l’épistémologie et la méthodologie qualitative, notamment de la démarche autobiographique en recherche, en formation des adultes et en intervention.
Annie Gusew est professeure associée à l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQÀM). Formé en travail social, ses contributions en recherche et en formation concernent la méthodologie de l’intervention, dont l’utilisation de l’approche narrative dans l’intervention individuelle en travail social ; les pratiques pédagogiques novatrices favorisant la construction de l’identité professionnelle ainsi que les défis et les enjeux liés au volet de la formation pratique des programmes de baccalauréat incluant la formation à supervision pédagogique des professionnels. Au cours des dernières années, elle a coordonné le regroupement des directeurs-trices des écoles et unités de travail social du Québec.
Note
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