Abstracts
Résumé
Cet article étudie les relations entre contrôle de gestion environnemental (CGE) et apprentissage organisationnel (AO) en inscrivant le modèle de Simons (1995) dans une perspective contingente. Par des facteurs stratégiques et organisationnels, ce modèle enrichi explique les liens entre les modes de contrôle (diagnostique et interactif) de Simons et les niveaux d’apprentissage (en simple et double boucle) d’Argyris et Schön (1978). S’appuyant sur le « cas révélateur » d’une éco-PME missionnaire, l’étude montre l’influence de trois facteurs (valeurs fortes, stratégie proactive, cycle de vie des activités) sur les quatre configurations relationnelles CGE-AO et ouvre de nouvelles perspectives aux travaux de Simons.
Mots-clés :
- Contrôle de gestion environnemental (CGE),
- Apprentissage organisationnel (AO),
- Contrôle interactif,
- Contrôle diagnostique,
- Facteurs de contingence
Abstract
This article examines the relationship between Environmental Management Control (EMC) and Organizational Learning (OL) by extending the theoretical model of Simons (1995) in a contingent perspective. Through strategic and organizational factors, this enriched model expounds the links between the Simons’s (1995) levers of control (diagnostic and interactive controls) and the Argyris and Schön’s (1978) levels of learning (simple loop learning and double loop learning). Based on the “revelatory case” of a missionary organization, eco-SME, this study highlights the influence of three contingency factors : strong core values, proactive strategy and activity life cycle in the four configurations of EMC-OL relationships identified.
Keywords:
- Environmental Management Control (EMC),
- Organizational Learning (OL),
- Interactive Control,
- Diagnostic Control,
- Contingency Factors
Resumen
Este artículo estudia las relaciones entre el control de la gestión ambiental (CGE) y el aprendizaje organizacional (OA) al colocar el modelo de Simons (1995) en una perspectiva contingente. A través de factores estratégicos y organizativos, este modelo enriquecido explica los vínculos entre los modos de control (diagnóstico e interactivo) de Simons y los niveles de aprendizaje (en bucle simple y doble) de Argyris y Schön (1978). Basándose en el "caso revelador" de una eco-PME misionera, el estudio muestra la influencia de tres factores (valores sólidos, estrategia proactiva, ciclo de vida de actividades) en las configuraciones relacionales CGE-AO y se abre Nuevas perspectivas sobre los trabajos de Simons.
Palabras clave:
- Control de Gestión Ambiental (CGE),
- Aprendizaje Organizacional (OA),
- Control Interactivo,
- Control de Diagnóstico,
- Factores de Contingencia
Article body
L’apprentissage organisationnel (AO) fait l’objet d’une littérature abondante en sciences de gestion[1] depuis les travaux précurseurs d’Argyris et Schön (1978), Senge (1990), Huber (1991) et March (1991). Toutefois dans le champ du contrôle de gestion, les recherches consacrées à l’AO sont rares. Si l’AO est l’un des objectifs du contrôle de gestion (Simons, 1990; Neely et Najjar, 2006), peu d’études empiriques examinent les systèmes de contrôle comme des vecteurs d’apprentissage (Kloot, 1997; Widener, 2007; Dambrin et Löning, 2008; Arena et Solle, 2008; Batac et Carrassus, 2009; Sponem, 2009), et tout particulièrement dans le domaine environnemental. Pourtant, le contrôle de gestion environnemental (CGE) est un support propice aux apprentissages (Gond et Herrbach, 2006; Henri et Journeault, 2010; Essid et Berland, 2011; Gond et al. 2012; Renaud, 2013; Journeault, 2016). On entend par CGE l’extension du contrôle de gestion traditionnel vers le management environnemental (Renaud, 2014). Les relations entre CGE et AO méritent d’être étudiées, car l’AO est un enjeu crucial pour les organisations désormais confrontées aux dérèglements écologiques (changements climatiques, pollutions des eaux, épuisement des ressources naturelles, perte de la biodiversité…). En effet, « organizational learning [AO] is a main requirement for change towards sustainability » (Van Hoof, 2014, p.116). « It can help to question current underlying assumptions and norms, and subsequently institutionalize and consolidate the new mental models for sustainability » (Lozano, 2014, p. 206).
L’objectif de cet article est d’explorer les relations entre CGE et AO pour ouvrir des pistes de recherche dans le domaine du contrôle de gestion. Plus précisément, nous tentons de répondre à la question : comment les relations CGE-AO sont-elles influencées par les facteurs stratégiques et organisationnels ? Pour ce faire, nous élargissons le modèle théorique de Simons (1990, 1995, 2000) pour prendre en compte les facteurs de contingence susceptibles d’expliquer les liens entre contrôle de gestion et AO. Dans ce modèle, l’AO est opérationnalisé comme « a process of detecting and correcting error » (Argyris et Schön, 1978, p. 3). Mais les travaux de Simons (1995) - qui associent les modes de contrôle[2] (contrôle diagnostique/contrôle interactif) aux deux niveaux d’apprentissage d’Argyris et Schön (1978) (apprentissages en simple/en double boucle) - ne permettent pas de répondre complétement à notre problématique. En effet, Simons n’étudie que la variable stratégique dans son modèle et néglige tous les autres facteurs de contingence. En outre, les études empiriques découlant de ce modèle ne sont pas toujours convergentes (Lee et Widener, 2012). Pour une meilleure compréhension des relations CGE-AO, il est nécessaire de dépasser les limites de ce modèle en examinant les différents éléments contextuels qui façonnent les systèmes de contrôle et leurs utilisations dans les organisations (Otley, 1980; Chenhall, 2003). A l’instar de Kruis et al. (2016), nous mobilisons la théorie de la contingence pour enrichir le modèle de Simons. En effet, ces auteurs ont montré le potentiel d’une perspective contingente pour expliquer le fonctionnement des leviers de contrôle : « We draw on the contingency framework to provide a richer multivariate description of the control configurations. (…) We posit that multiple combinations of levers can result in balance, which is consistent with configurational theory, and that these configurations are associated with different strategic challenges and contextual settings, which is consistent with contingency theory. (…) We (…) examine organizational and contextual factors that validate and help explain the observed patterns of balance. » (Kruis et al., 2016, p. 28-40).
Fort de ce cadre théorique, notre recherche étudie le « cas révélateur » (Yin, 2014) d’une organisation missionnaire. ECOTECH est une PME du secteur des éco-activités[3] dont la stratégie et les actions reposent sur une idéologie environnementale. Ce contexte spécifique permet de découvrir des éléments nouveaux. Les résultats de cette étude de cas mettent en lumière quatre configurations types de relations CGE-AO ainsi que l’influence de trois facteurs de contingence (valeurs fortes, stratégie proactive, cycle de vie des activités) sur ces relations. L’article est structuré en quatre parties. La première partie pose le cadre théorique de la recherche. La deuxième partie justifie et présente l’étude de cas. La troisième partie expose les résultats empiriques. La dernière partie présente les contributions théoriques et pratiques, les limites et pistes pour des recherches futures.
Cadre théorique
Le cadre théorique de la recherche s’inspire du modèle de Simons (1995) qui lie les modes de contrôle (contrôle diagnostique/contrôle interactif) aux niveaux d’apprentissage d’Argyris et Schön (1978) (apprentissages en simple boucle/double boucle). Toutefois, ses limites ne permettent pas de répondre complètement à notre question de recherche. Une approche contingente, enrichissant le modèle de Simons, explique l’influence des facteurs de contingence sur les relations CGE-AO. Avant de présenter ce nouveau modèle, nous définissons les concepts de la recherche.
Le contrôle de gestion environnemental
Nous définissons le CGE (environmental management control ou eco-control en anglais) comme « the process by which managers influence other members of the organization in order to put into practice or develop the organization’s green strategies » (Renaud, 2014, p. 68). Les stratégies vertes peuvent être classées selon un continuum allant des stratégies passives/marginales vers des stratégies réactives (conformité réglementaire) et des stratégies proactives (Sharma et al., 2007; Rodrigue et al., 2013; Pondeville et al., 2013). Gendron (2004) distingue deux types de stratégies proactives. La stratégie de leadership vise à promouvoir et à capitaliser sur les bonnes performances environnementales de l’entreprise pour en tirer des avantages en termes de coûts, compétitivité et légitimité. Au-delà des enjeux commerciaux, la stratégie écologique considère la protection de l’environnement et le développement durable comme la raison d’être de l’entreprise.
D’apparition récente, la littérature en CGE reste focalisée sur les systèmes de contrôle (calculs de coûts environnementaux, analyses de cycle de vie, bilan carbone, budgets verts, audits environnementaux, indicateurs et tableaux de bord verts…) et néglige la question de l’AO. Or, l’AO est un enjeu majeur pour les organisations : « organizational learning has been proposed as a fundamental strategic process and the only sustainable competitive advantage of the future » (DeGeus, 1988, cité par Vera et Crossan, 2004, p. 222). Il est indispensable à la survie et au développement des organisations désormais confrontées à des environnements plus complexes et plus turbulents que par le passé (Koenig, 2015). Face aux mutations écologiques (changements climatiques, pollutions des eaux, épuisement des ressources naturelles, perte de la biodiversité…), les organisations qui sauront s’adapter à ces changements et saisir les opportunités offertes par l’économie verte bénéficieront d’un avantage concurrentiel (PNUE, 2013). Dans ce contexte, le CGE semble jouer un rôle capital dans le développement des apprentissages (Gond et Herrbach, 2006; Essid et Berland, 2011; Henri et Journeault, 2010; Renaud, 2013…).
Parmi les rares auteurs traitant des liens CGE-AO, Journeault (2016) montre dans une étude canadienne que l’usage des systèmes de CGE favorise tantôt des apprentissages en simple boucle, tantôt des apprentissages en double boucle (Argyris et Schön, 1978). « By providing feedback regarding the differences between goals and outcomes, which allows for the correction of errors and the achievement of pre-established environmental objectives, environmental budget and EPIs [environmental performance indicators] can act as feedback practices facilitating adaptive and single-loop learning. Furthermore, by gathering information provided by other eco-control practices, environmental strategic planning can help organizations identify the correct time to seize new environmentalopportunities and strategic orientations, which promotes generative or double-loop learning. » (Journeault, 2016, p. 153 et p. 174). Si les liens CGE-AO sont évoqués, ils restent encore peu documentés dans la littérature empirique. Les circonstances dans lesquelles et les différentes manières dont le CGE génère des apprentissages demeurent floues et mériteraient d’être davantage explorées. Tout en s’inscrivant dans la lignée des travaux précédents, cet article cherche à mettre en évidence les relations entre CGE et AO et les facteurs de contingence expliquant ces relations.
Les relations CGE-AO à l’aune des leviers de contrôle de Simons
Nous exploitons la perspective d’apprentissage à partir des travaux de Simons (1990, 1995, 2000), car plusieurs études ont montré l’intérêt de ce cadre conceptuel pour comprendre le rôle des systèmes de contrôle en général (Kloot, 1997; Abernethy et Brownell, 1999; Widener, 2007; Batac et Carassus, 2009), des systèmes de contrôle RSE (Gond et Herrbach, 2006; Essid et Berland, 2011) et des systèmes de CGE en particulier (Renaud, 2013; Journeault et al., 2016) dans le développement des apprentissages.
Selon la théorie des leviers de contrôle (Simons, 1995), les managers s’appuient sur quatre leviers pour contrôler la stratégie d’une entreprise : croyances, contraintes, contrôle diagnostique et interactif. Le système de croyances véhicule les valeurs fondamentales pour encourager les acteurs à réaliser les buts organisationnels et orienter la recherche de nouvelles opportunités stratégiques tandis que le système de contraintes limite les comportements opportunistes et fixent des règles d’éthique afin de s’assurer de la réalisation de la stratégie. Les contrôles diagnostiques et interactifs désignent les différents usages des systèmes de contrôle de gestion. Plutôt que de s’intéresser à la nature de ces systèmes (ex. budgets and profit plans, balanced scorecard, technology development systems…), Simons analyse la manière dont ils sont utilisés par les managers. Un même système de contrôle peut être utilisé soit de manière diagnostique pour déployer la stratégie délibérée des dirigeants, soit de manière interactive pour contribuer à l’émergence de nouvelles stratégies.
En se focalisant sur les leviers diagnostiques/interactifs, il est possible d’en déduire un modèle permettant d’appréhender les tensions entre contrôle de gestion et AO (cf. schéma 1).[4] Ce modèle associe les contrôles diagnostiques/interactifs aux deux niveaux d’apprentissage d’Argyris et Schön (1978) (apprentissages en simple et double boucle). « Diagnostic control systems facilitate single-loop learning, interactive control systems facilitate double-loop learning. The single-loop learning keeps a process within desired bounds; double-loop learning leads to question about the very basis upon which strategies have been constructed. » (Simons, 1995, p. 106). Les deux niveaux d’AO se distinguent ainsi : « When the error detected and corrected permits the organization to carry on its present policies or achieve its presents objectives, then that error-and-correction process is single-loop learning. Double-loop learning occurs when error is detected and corrected in ways that involve the modification of an organization’s underlying norms, policies and objectives. » (Argyris et Schön, 1978, p. 2-3).
Dans ce modèle, les systèmes de contrôle diagnostiques servent à surveiller les résultats de l’organisation et à corriger les déviations sans remettre en cause les objectifs prédéfinis. Ces systèmes de contrôle contraignent l’innovation et la recherche d’opportunités afin de préserver la routine organisationnelle. Ce faisant, ils conduisent à un apprentissage en simple boucle, qui par essais-erreurs permet d’atteindre les objectifs fixés dans le cadre de la stratégie délibérée des dirigeants (Sponem, 2009). A contrario, les systèmes de contrôle interactifs sont utilisés par les dirigeants pour s’impliquer régulièrement et personnellement dans les décisions de leurs subordonnés. Ils ont vocation à favoriser l’exploration de nouveaux savoirs et le changement stratégique. L’apprentissage est alors qualifié de double boucle car il permet de modifier les objectifs initiaux et de renouveler les stratégies sur lesquelles reposent les actions.
Une approche contingente des relations CGE-AO pour enrichir le modèle de Simons
Nous proposons ici de dépasser les limites du modèle de Simons (1995), qui traite la question des relations contrôle de gestion-AO sans les expliquer et ne tient pas compte du contexte dans lequel elles émergent. Or, en faisant abstraction du contexte, ces relations apparaissent comme immuables et identiques dans toutes les entreprises. En effet, en se focalisant sur les relations réciproques stratégie-contrôle, Simons a négligé d’autres facteurs susceptibles d’expliquer les liens contrôle de gestion-AO. C’est ainsi que Kruis et al. (2016, p. 30) suggèrent de mobiliser la théorie de la contingence pour enrichir le modèle de Simons : « These patterns, however, will not just be influenced by strategic concerns, but also by the organizational and environmental setting in which they occur. Although this theme does not figure very prominently in Simons’ work, he does allude to it on several occasions, for instance when he claims that balance is a function of various organizational contingencies that determine the different levels of emphasis on each lever (Simons, 1995). This is why we now turn to contingency theory to further our exploration of balance. » Un appel en faveur de ce type d’étude a été lancé par Chenhall (2003, p. 130) : « There is a pressing need for studies into situations in which contemporary MCS [Management Control Systems] may be best suited. (…) There is very little published contingency work on balanced scorecards, target costing, life cycle costing, the broad array of non-financial performance indictors including those related to assessing human resource management initiatives. Examples of the latter include measurement to guide and evaluate the learning capabilities of the organization, measures suchas team maturity indexes and organizational climate surveys that attempt to assess the effectiveness of administrative innovations. » Chenhall (2003) nous incite donc à explorer les relations entre les pratiques innovantes de contrôle (le CGE en ce qui nous concerne) et l’apprentissage organisationnel.
En adoptant une approche contingente, nous proposons un nouveau modèle (cf. schéma 2) qui tient compte de l’ensemble des éléments de contexte pouvant façonner les systèmes de contrôle et leurs utilisations dans les organisations (Otley, 1980; Chenhall, 2003; Kruis et al. 2016). Nous supposons que ces facteurs de contingence, qui influencent les systèmes de contrôle, peuvent expliquer les configurations des relations CGE-AO. En effet, grâce aux travaux de Simons et de ses disciples cités supra, nous savons que les usages des systèmes de contrôle génèrent des AO en simple et en double boucles. Dès lors, il s’agit d’identifier dans l’étude empirique les facteurs qui influenceront les systèmes de CGE et leurs conséquences en termes d’AO. Confronté aux données empiriques de notre étude de cas, ce nouveau modèle théorique (cf. schéma 2) permettra d’analyser la manière dont chaque système de CGE est utilisé par les managers (diagnostique ou interactive), de qualifier les apprentissages qu’il génère (simple ou double boucle) et d’évaluer ses impacts sur la stratégie et les objectifs de l’entreprise (maintien ou changement stratégique). Ainsi, chaque système de CGE sera analysé selon les dimensions : facteurs de contingence, modes de contrôle, niveaux d’apprentissage et impacts stratégiques.
Nous présentons ci-après les facteurs de contingence retenus dans cette étude. Ces derniers sont issus de la littérature sur la contingence du CGE qui, rappelons-le, est récente et très peu développée. Si certains facteurs tels que le cycle de vie des entreprises sont négligés, d’autres facteurs en revanche font l’objet d’études empiriques. Dans une étude belge, Pondeville et al. (2013) testent trois facteurs supposés influencer les systèmes de CGE dans les entreprises industrielles : la stratégie verte, les pressions des parties prenantes et l’incertitude environnementale. Les résultats de l’étude montrent que le degré de proactivité de la stratégie verte impacte fortement le développement des systèmes de CGE dans les organisations. En d’autres termes, plus l’entreprise est proactive, plus ses managers utilisent différents systèmes de CGE pour réaliser les objectifs environnementaux, qui vont au-delà des exigences réglementaires. De même, les pressions de certaines parties prenantes (market, organizational and community stakeholders)[5] encouragent les managers à améliorer leur proactivité environnementale et à mettre en place des systèmes de CGE adaptés. A contrario, le niveau d’incertitude environnementale ne semble pas favoriser l’utilisation active des systèmes de CGE : « The companies in our sample thus seem to adopt a wait-and-see attitude in highly uncertain circumstances » (p. 326). Ces incertitudes font référence aux difficultés à prévoir les évolutions des cadres législatifs et réglementaires, le comportement des clients et les changements stratégiques des concurrents dans le domaine environnemental.
De même, Rodrigue et al. (2013, p. 313) s’interrogent sur l’influence des parties prenantes d’une multinationale sur sa stratégie verte et ses indicateurs de performance environnementale (EPI). Ils découvrent que les valeurs jouent un rôle clé dans cette relation : « The beliefs system represents the platform through which stakeholder influence over environmental strategy and EPI penetrates the organization and its management practices. The beliefs help to translate stakeholders’ perspectives on strategy, targets, and measurement into tangible managerial actions protecting corporate legitimacy. The beliefs system (…) makes it important to acknowledge stakeholders’ voices and concerns in the selection of EPI and to have the proper EPI to respond to stakeholders’ concerns. » A l’instar de Rodrigue et al. (2013), d’autres auteurs dans la littérature classique ont montré l’impact des valeurs sur les systèmes de contrôle de gestion (Widener, 2007; Kruis et al., 2016; Heinicke et al., 2016).
Le cycle de vie des entreprises n’est pas étudié comme facteur de contingence dans la littérature de CGE. Pourtant, depuis les travaux précurseurs de Moores et Yuen (2001), la littérature classique met en évidence les liens entre les phases du cycle de vie des entreprises (naissance, croissance, maturité et déclin) et le développement des systèmes de contrôle gestion. En phase de naissance, la stratégie des entreprises étant tournée vers l’innovation, le contrôle de gestion est peu formalisé et l’analyse des coûts a peu d’importance à ce stade (Condor, 2012). Les entreprises ont tendance à utiliser des systèmes contenant des mesures non financières, comme le balanced scorecard, pour explorer les performances futures (Hoque et James, 2000). En phase de croissance, le contrôle de gestion devient plus formel et plus sophistiqué. Le nombre et la variété des systèmes de contrôle augmentent. L’usage des budgets devient central. En phase de maturité, le contrôle de gestion se formalise davantage, l’innovation n’étant plus une priorité, c’est la maîtrise des coûts qui domine (Condor, 2012) et les managers utilisent des indicateurs financiers pour contrôler la rentabilité des produits vaches à lait (Choffel et Meyssonnier, 2005). Dans la phase de déclin, les indicateurs de performance sont peu présents et la gestion des coûts est plus serrée (Condor, 2012). Si le CGE s’inscrit dans la continuité du contrôle de gestion classique, on peut s’attendre à ce que le cycle de vie des entreprises influence également les systèmes de contrôle utilisés pour maitriser leurs impacts environnementaux.
Méthodologie
Nous retenons l’étude de cas comme méthode de recherche (Yin, 2014) pour analyser en profondeur un phénomène jusqu’ici inexploré, c’est-à-dire l’influence des facteurs de contingence sur les relations CGE-AO. Plusieurs raisons motivent ce choix. Tout d’abord, la complexité du phénomène étudié nécessite des investigations de terrain pour être appréhendée (Batac et Carrassus, 2009). L’étude de cas est adaptée dans notre situation car elle permet une « analyse spatiale et temporelle d’un phénomène complexe par les conditions, les évènements, les acteurs et les implications » (Wacheux, 1996, p. 89). Ensuite, la pertinence de cette méthode qualitative a déjà été démontrée dans des travaux similaires (Simons, 1990, 1995; Kloot, 1997; Abernethy et Brownell, 1999; Rodrigue et al., 2013…). Enfin, notre recherche repose sur un « cas révélateur » (Yin, 2014) qui permet de découvrir de nouveaux éléments scientifiques en explorant les relations CGE-AO dans un contexte spécifique, celui d’une eco-PME missionnaire. Comme nous le verrons infra, le cas étudié (ECOTECH) permet de réfuter les relations préétablies entre CGE-AO et d’enrichir le modèle théorique issu des travaux de Simons. Pour Graham Allison (1971), cité par Yin (2014, p. 39), le choix d’un cas unique se justifie dans ce contexte : « The single case can represent a significant contribution to knowledge and theory-building. Such a study can even help to refocus investigations future in an entire field. » Après avoir justifié et présenté le cas étudié, nous décrivons le protocole de recueil et d’analyse des données.
Sélection du cas
Pour analyser les relations CGE-AO, le terrain de recherche devait permettre d’observer les usages diagnostique et interactif des systèmes de CGE et leurs conséquences en termes d’apprentissages. Trois critères ont orienté la sélection du cas : la stratégie verte proactive, la taille et le secteur d’activité de l’entreprise. Premièrement, l’entreprise retenue devait poursuivre une stratégie proactive car, en cherchant à atteindre l’excellence, les entreprises d’avant-garde en matière environnementale s’inscrivent dans un processus d’apprentissage continu (Gendron, 2004) et utilisent divers systèmes de CGE pour déployer leur stratégie proactive dans l’organisation (Pondeville et al. 2013; Rodrigue et al. 2013; Renaud, 2013; Journeault et al. 2016). Deuxièmement, le choix d’une PME semblait pertinent pour traiter notre problématique puisque les PME mettent davantage l’accent sur les systèmes de contrôle interactifs (Heinicke et al. 2016) étant donné que le contrôle de gestion y est moins institutionnalisé que dans les grandes entreprises. En particulier dans les PME innovantes, le contrôle interactif laisse des marges de manoeuvre pour saisir des opportunités et faire émerger de nouvelles stratégies (Zawadzki, 2014). En effet, avec ce mode de contrôle, l’information produite fait l’objet de discussions et d’interprétations et permet de débattre sur les données, les plans et leurs hypothèses sous-jacentes (Meyssonnier, 2015). Toutefois, la taille de la PME doit atteindre un certain seuil pour observer des systèmes de CGE. Selon Pondeville (2013, p. 321), ces systèmes seraient présents dans les entreprises de plus de 20 salariés. Troisièmement, notre choix s’est porté sur le secteur des éco-activités afin d’étudier l’influence des valeurs sur les relations CGE-AO. En effet, indépendamment des considérations économiques, les entreprises vertes seraient dotées d’une forte idéologie orientant leurs stratégies et leurs actions (Bansal et Roth, 2000; Gendron, 2004). Ces entreprises peuvent être considérées comme des organisations missionnaires au sens de Mintzberg. Contrairement aux travaux antérieurs qui se sont focalisés sur les secteurs polluants, tels que les industries chimiques, pharmaceutiques ou métallurgiques (Banerjee et al., 2003), notre étude va enrichir la littérature en apportant un nouvel éclairage sur les systèmes de CGE utilisés dans les entreprises respectueuses de l’environnement.
L’entreprise sélectionnée répond à tous ces critères.
Présentation du cas ECOTECH
Fondée en 1995, ECOTECH est une PME innovante du secteur des éco-activités. Cette entreprise française emploie 24 salariés pour un chiffre d’affaires d’environ 2 millions d’euros par an. Elle réalise une activité de bureau d’études (conseils en environnement et maîtrise des risques) et une activité d’expérimentation testant et développant des projets de recherche et développement (écotechnologie, valorisation de la biomasse, traitement des eaux industrielles, des sols pollués et des effluents…). Cette seconde activité est réalisée par des ingénieurs et techniciens sur le plateau technique de l’entreprise ou directement sur les sites industriels des clients (grandes entreprises industrielles, collectivités territoriales, établissements publics ou PME régionales). Plus récente, cette deuxième activité s’est développée au cours des cinq dernières années et représente aujourd’hui près de 50 % du chiffre d’affaires.
La stratégie de l’entreprise. L’entreprise s’est dotée d’une stratégie proactive qui vise l’excellence commerciale et environnementale. Cette stratégie repose sur des valeurs dominantes telles que l’innovation et l’exemplarité environnementales. Ces dernières sont inscrites dans les documents de référence de l’entreprise (mission, vision des dirigeants, engagement de la direction, politique environnementale…), guident les actions de ses membres et sous-tendent ses activités commerciales. « Nous innovons dans nos services et nos thématiques pour anticiper les besoins de nos clients et de nos partenaires » (Rapport d’activité). Les dirigeants déploient en interne les dispositifs et services offerts aux clients : « Il nous semble important d’appliquer les dispositifs QSSE (qualité, santé, sécurité et environnement) chez nous pour être plus pertinent chez les clients. » (Directeur adjoint et responsable QSSE). Le bilan carbone est assez symptomatique de cette stratégie : « On est en avance sur les autres, car il n’y a pas tant que ça de petites structures qui ont fait leur bilan carbone. » (Directeur). Depuis 2002, l’entreprise est certifiée ISO 9001 (pour la qualité) et ISO 14001 (pour l’environnement) par l’organisme BVQI. Ces certifications sont présentées comme une preuve de son exemplarité : « C’est une preuve vis-à-vis de l’extérieur et une reconnaissance par tierce partie que l’entreprise est dans un système d’amélioration en continue. » (Animateur environnement).
Les systèmes de CGE d’ECOTECH. Instauré dans le cadre du Système de Management Environnemental (SME) ISO 14001[6], le CGE est une combinaison de plusieurs systèmes de contrôle utilisés pour décliner la stratégie verte au sein de l’organisation : analyses environnementales, programmes environnementaux, audits environnementaux et tableau de bord vert. Ces derniers sont décrits successivement.
Les analyses environnementales. Ce système de contrôle sert à mesurer les impacts sur l’environnement des émissions (dans l’air, l’eau, le sol) et des extractions (matières, énergies) occasionnées par les activités de l’entreprise, ceci dans le but de les réduire et de respecter les objectifs légaux ou managériaux. Ce système de contrôle est composé de l’outil d’identification des aspects et impacts environnementaux, l’analyse de conformité réglementaire et le bilan carbone. Le premier outil permet d’évaluer et de hiérarchiser les différents impacts environnementaux afin de déterminer les priorités de l’entreprise : « On regarde les différentes thématiques : la gestion de l’énergie, des déchets, la consommation de matières premières et de l’eau, la gestion des rejets atmosphériques et aqueux, des risques de pollution, etc. » (Animateur environnement). Des critères de priorisation et de pondération sont établis pour identifier les impacts les plus significatifs : « les critères qu’on a pris sont : la gravité potentielle de l’impact, la probabilité d’apparition de l’impact et le niveau de maîtrise. » (Animateur environnement). L’analyse de conformité réglementaire sert à vérifier le respect des lois et réglementations environnementales en vigueur et à corriger les éventuelles non-conformités. Cette analyse comporte également une veille juridique. Enfin, l’entreprise réalise un bilan carbone pour comptabiliser ses émissions de gaz à effet de serre.
Les programmes environnementaux. Ce système de contrôle regroupe les plans d’action annuels ou pluriannuels auxquels sont affectés des budgets verts, qui servent à chiffrer économiquement les investissements et les dépenses de fonctionnement nécessaires à la réalisation des objectifs prévus par les dirigeants. Par exemple, l’entreprise a mis en place un programme d’efficacité énergétique qui consiste à réduire sa consommation et ses coûts d’énergie. Dans ce cadre, plusieurs actions ont été menées pour modifier le comportement des employés et atteindre les objectifs souhaités : « Les bonnes pratiques, c’est d’économiser les utilités au maximum (eau, électricité, gaz). Par exemple, quand on conçoit des machines, c’est de privilégier du matériel moins consommateur en énergie. Après, on sensibilise le personnel qui travaille sur le plateau. » (Responsable plateau technique).
Les audits environnementaux. Ce système de contrôle permet d’évaluer les performances environnementales et de corriger les non-conformités. Les audits se situent en aval des analyses environnementales pour évaluer l’efficacité du management environnemental (i.e. les efforts déployés par les dirigeants pour prévenir ou réduire les impacts). Deux types d’audits sont réalisés par des spécialistes de l’environnement : les audits internes menés par les membres de l’entreprise et les audits externes effectués par BVQI, un cabinet d’audit indépendant. Ils sont réalisés à une fréquence annuelle pour évaluer la conformité des sites aux exigences de l’ISO 14001 et l’efficacité du SME. Un programme d’audit externe est établi et les résultats sont ensuite présentés lors des réunions post-audits : « Tout le personnel est présent à la réunion de clôture de l’audit pour discuter des résultats du SME. Ensuite, moi, je fais une note de synthèse par mail pour résumer les informations aux salariés, parfois pour dédramatiser. » (Directeur adjoint et responsable QSSE).
Le tableau de bord vert. Ce système de contrôle comprend deux catégories d’indicateurs environnementaux. Les indicateurs « classiques » permettent de piloter la performance environnementale des activités de bureau d’études, qui constituent la vache à lait de l’entreprise. Bien qu’elles soient matures et stables, ces activités génèrent des impacts environnementaux non négligeables : « En tant que spécialiste de l’environnement et de la maîtrise des risques, on essaie d’être exemplaire dans ce domaine et de toujours progresser vers une activité plus propre et plus sobre. » (Directeur). Pour s’inscrire dans un processus d’amélioration continue, les dirigeants utilisent les indicateurs « classiques » pour détecter et corriger les déviations par rapport aux objectifs prédéfinis ou standards de performance. « On a des indicateurs et certains objectifs à respecter concernant la publication papier, la réduction des impressions, l’utilisation des cartouches d’encre, le recyclage des piles et du papier. On a aussi fait des efforts en ce qui concerne les déplacements. On nous demande d’utiliser soit le vélo, le covoiturage, les transports en commun et tous les mois c’est suivi en interne. Ici, l’indicateur retenu c’est le nombre d’aller-retour par mode alternatif mensuel par salarié. » (Chargée de communication).
Quant aux indicateurs « émergents », ils favorisent le pilotage de la performance environnementale des activités innovantes du plateau technique. Ces indicateurs sont qualifiés d’émergents car ils évoluent au gré des projets de R&D : « Les indicateurs environnementaux sont en construction car ils évoluent en même temps que notre activité sur le plateau évolue; on reçoit régulièrement de nouveaux projets et c’est dur dans ces conditions de définir des indicateurs au niveau des consommations d’utilités (électricité, eau, gaz, etc.) » (Responsable plateau technique). En effet, cette plateforme d’essais fournit un soutien au développement d’innovations vertes pour le compte des clients (traitements d’effluents industriels, bio-indicateurs des sols pollués, procédés de valorisation de la biomasse…). Ces innovations vertes sont des éléments distinctifs sur lesquels reposent les avantages compétitifs de l’entreprise.
Collecte et analyse des données
L’étude de cas s’est déroulée sur deux ans. S’agissant d’une entreprise de petite taille, nous avons pu échanger avec des acteurs rattachés aux différents niveaux hiérarchiques et fonctionnels de l’organisation (cf. tableau 1). Nous avons ainsi réalisé 8 entretiens semi-directifs d’une durée variant de 30 minutes à 3h30. La polyvalence des acteurs interviewés a permis d’obtenir une richesse d’information. Les thèmes abordés durant les entretiens découlaient de notre revue de la littérature. En plus des entretiens, des échanges informels (moins de 10 minutes) ont eu lieu lors des visites en entreprise ou par emails. L’entreprise ne disposant pas de contrôleur de gestion, la gestion financière relève des attributions du directeur. Le CGE se déroule donc sans contrôleur de gestion. La littérature souligne le rôle limité voire inexistant du contrôleur de gestion dans le domaine environnemental (Quairel, 2006). En effet, ce sont d’autres fonctionnels (les spécialistes de l’environnement) qui interviennent dans le processus de CGE comme ses architectes et animateurs (Renaud, 2013). A l’instar des qualiticiens, les spécialistes de l’environnement s’ajoutent à la liste des concurrents du contrôleur de gestion (Bouquin, 2010).
Par ailleurs, les observations non participantes se sont déroulées durant les visites dans les locaux de l’entreprise. Plusieurs documents ont été collectés au fur et à mesure de l’étude directement sur le terrain ou via Internet. Il s’agit notamment de comptes rendus de réunions, rapports d’activité, rapports d’audits, politique environnementale, manuel de management environnemental, publications sur l’Intranet… La diversité des sources et méthodes de collecte a permis de trianguler les données et de renforcer la validité interne de la recherche (Yin, 2014).
Enfin, avec l’aide du logiciel d’analyse qualitative NVivo 7, les données collectées ont été traitées suivant la méthode d’analyse de contenu thématique (Miles et Huberman, 2003). Cette analyse a consisté à lire le corpus, segment par segment, pour identifier les idées significatives et les regrouper dans des codes découlant de notre grille d’analyse (facteurs de contingence, modes de contrôle, niveaux d’apprentissage et impacts stratégiques). Les résultats obtenus ont été confrontés à notre cadre théorique. Ils font l’objet de la section suivante.
Résultats
Les résultats de l’étude de cas sont présentés en deux temps. A la lumière du modèle théorique, nous mettons d’abord en exergue les relations CGE-AO en examinant chaque système de CGE selon les dimensions : modes de contrôle (diagnostique ou interactif), niveaux d’apprentissage (simple ou double boucle) et impacts stratégiques (maintien ou changement stratégique). Cette analyse aboutit à quatre configurations relationnelles entre CGE et AO. Puis, nous expliquons ces nouvelles relations à l’aune des facteurs de contingence identifiés dans le cas ECOTECH.
Analyse des relations CGE-AO
Les usages diagnostique et interactif des systèmes de CGE
Le contrôle diagnostique. Dans l’entreprise ECOTECH, trois systèmes de CGE (analyses environnementales, programmes environnementaux, audits environnementaux) semblent fonctionner selon un processus cybernétique et régulateur dans lequel les acteurs fixent les objectifs environnementaux, surveillent les performances et corrigent les écarts par rapport aux standards et objectifs prédéfinis. En l’absence de contrôleur de gestion, ces systèmes sont construits et pilotés par les spécialistes de l’environnement et les opérationnels. En référence aux modes de contrôle de Simons (1995), ces systèmes semblent réunir les caractéristiques du contrôle diagnostique (cf. tableau 2).
En effet, le rôle des dirigeants se limite essentiellement à la définition des objectifs annuels dans ce processus. Ils pratiquent le management par exception en délégant l’attention des systèmes de CGE aux fonctionnels de l’environnement : « J’interviens, une fois par an, au moment de la revue de direction; je ne m’occupe pas de ce qui se passe quotidiennement. (…) Les objectifs sont définis par la direction, à partir du retour des informations, de la stratégie globale et des possibilités techniques de l’entreprise…, avec les fonctionnels, c.-à-d. l’équipe chargée du SME. » (Directeur). Même s’ils sont moins fréquemment impliqués dans ce processus, les dirigeants accordent de l’importance aux informations produites par les systèmes de CGE. Ils interviennent notamment pour régler des problèmes complexes ou imprévus : « Par contre, s’il y a un problème spécifique, on organise une réunion en petit comité avec les personnes impliquées. Là, on analyse les causes du problème, on recherche des solutions. » (Directeur adjoint et responsable QSSE).
A contrario, les spécialistes jouent un rôle central dans l’usage des systèmes de CGE. Par exemple, les analyses environnementales sont effectuées par l’animateur environnement, car elles requièrent des compétences techniques et spécifiques pour collecter et interpréter les données : « L’animateur essaie de chiffrer les impacts par activité ou par poste de travail. Par exemple, on cherche à quantifier les types de déchets créés par le poste de travail, déterminer leur dangerosité, comment sont-ils gérés ? Comment partent-ils dans les poubelles ? Est-ce que c’est récupéré par un prestataire ? Y’a-t-il un suivi particulier ? Quelles sont les quantités annuelles ? » (Animateur environnement). De même, l’analyse de conformité réglementaire est menée par les spécialistes du droit de l’environnement : « Cette analyse est réalisée à partir d’un référentiel conçu sur Excel, qui liste les différents textes juridiques applicables à l’entreprise (code, décrets, arrêtés, circulaires, directives européennes, etc.) » (Juriste). Outre les audits tierce partie de BVQI, les audits internes sont menés par des membres de l’entreprise : « En fait, il y a deux types d’audits : les audits techniques sont réalisés par le responsable QSSE pour vérifier par exemple, si la personne en charge du recyclage du papier fait son boulot, et les audits systèmes permettent de vérifier le fonctionnement du SME. Ils sont réalisés par des opérationnels, formés sur l’audit interne, pour éviter que le responsable QSSE s’auto-audite » (Directeur).
Les opérationnels sont chargés de réaliser les actions planifiées dans les programmes environnementaux et de corriger les écarts mis en évidence par les audits. Des plans d’action correctifs, appelés Fiches d’Amélioration des Ecarts (FAE), sont mis en place pour rectifier les déviations et atteindre les objectifs préétablis : « Cette FAE présente les actions à planifier et les délais pour corriger la non-conformité. Lorsqu’un collaborateur identifie un écart, il a la possibilité de demander une FAE qu’il renseigne avec l’aide de l’animateur qualité ou l’animateur sécurité-environnement. » (Juriste). Aucune incitation financière n’est prévue pour la réalisation des objectifs environnementaux. Compte tenu de la mission de l’entreprise, les managers estiment que cela va de soi : « Il n’y a pas de répercussion sur le salaire. Quand on intègre ECOTECH, on accepte moralement de faire des efforts pour l’environnement. » (Responsable plateau technique). Toutefois, ils envisagent une récompense symbolique : « On n’a pas de prime écologique pour le moment. Par contre, on montre aux salariés le fruit de leurs efforts. Peut-être, que l’année prochaine, on va organiser une journée à Biarritz. » (Directeur adjoint et responsable QSSE).
Le contrôle interactif. Parmi les systèmes de CGE, le tableau de bord vert est le seul système de contrôle qui focalise l’attention personnelle et constante des dirigeants sur les priorités stratégiques de l’entreprise et stimule régulièrement des débats avec leurs subordonnés. « On a mis en place un tableau de bord, dans lequel on trouve les indicateurs majeurs, pour que les gens puissent avoir un retour sur le travail qu’ils font en termes de qualité et d’environnement. On insiste autant sur les succès que les échecs. » (Directeur adjoint et responsable QSSE). Si l’on se réfère aux critères de Simons (1995), le tableau de bord vert présente l’apparence d’un contrôle interactif (cf. tableau 2).
En effet, ce système de contrôle permet aux dirigeants d’orienter leur réflexion sur les incertitudes stratégiques telles que le développement d’innovations vertes sur le plateau technique. Par exemple, des réflexions menées dans le cadre d’une étude bio-physico-chimique ont permis de développer des biomarqueurs pour les sols pollués : « Les biomarqueurs offrent une photographie dynamique des variations de l’impact généré par un sol. L’évaluation du niveau d’impact devient possible et par conséquent la surveillance de la pollution qui en est responsable » (Directeur adjoint et responsable QSSE). De même, le suivi régulier des déchets dangereux sur le plateau technique constitue l’une des priorités de l’entreprise : « l’enjeu est de prendre en compte les déchets industriels et agricoles générés par la plateforme et de mettre en place les mesures nécessaires à leur bonne gestion » (Rapport d’activité).
Contrairement aux autres systèmes de CGE, le tableau de bord vert fait l’objet de nombreux échanges formels et informels au sein de l’organisation. Les discussions formelles prennent la forme de réunions stratégiques ou opérationnelles. Les réunions « réponse au besoin client » ont lieu tous les trimestres et sont des réunions de pilotage de l’activité commerciale. Elles permettent de faire le point sur les performances environnementales : « On a tous les trimestres une réunion avec tout le personnel où on fait un état commercial des dossiers et c’est l’occasion de passer des messages en QSSE sur des déviations ou d’informer le personnel sur les modifications ou améliorations du système. » (Directeur adjoint et responsable QSSE).
Les revues de processus (RDP) sont des réunions annuelles organisées pour alléger la revue de direction. L’entreprise est subdivisée en plusieurs processus : management, gestion des ressources humaines, gestion administrative et financière, gestion du matériel, achats, communication externe, produits… Les RDP permettent aux pilotes de processus d’étudier les indicateurs, d’interpréter les résultats obtenus et de réfléchir aux pistes d’amélioration de leur processus avant d’aller en revue de direction. L’animateur environnement est toujours présent à ces réunions pour s’assurer de la prise en compte effective des préoccupations environnementales dans l’analyse des processus. « Dans la revue de processus produit, se réunissent les pilotes du processus, l’animateur qualité et l’animateur environnement. Cette revue est organisée par petit groupe pour discuter des indicateurs, des objectifs, des écarts, des FAE et préparer la discussion pour la RDD. » (Juriste).
La revue de direction (RDD) est la réunion stratégique de l’entreprise. Elle a lieu une fois par an pour évaluer les résultats et déterminer si des changements doivent être apportés à la stratégie, aux objectifs environnementaux ou à d’autres éléments du SME. « La définition de nouveaux objectifs intervient lors de la revue de direction, on discute des résultats obtenus et on revoit les objectifs. » (Directeur). Tous les employés ne participent pas à la réunion, seuls les pilotes de processus, les animateurs QSSE et les dirigeants sont présents à la réunion. « Chaque pilote de processus expose son processus : ce qu’il en est, son avancement sur les points à améliorer, le bilan des écarts soldés et les indicateurs de processus. La revue de direction, c’est l’un des moments où l’on apporte ses opinions sur les processus. » (Responsable plateau technique). Parallèlement aux réunions formelles, des échanges informels ont lieu entre les membres de l’entreprise. Ils permettent de discuter librement des informations délivrées par les indicateurs : « Mes collègues regardent aussi les indicateurs, il nous arrive souvent d’en discuter entre nous, en général autour d’un café. Après, si on a des interrogations, on pose nos questions à la direction lors des réunions. On est une petite structure, donc on se parle régulièrement quel que soit le niveau hiérarchique. » (Commercial et délégué du personnel). Selon Simons (2000), ces divers échanges constituent les éléments distinctifs d’un contrôle interactif.
Les effets des systèmes de CGE sur l’AO et la stratégie
Dans le cas ECOTECH, nos observations indiquent que l’usage des systèmes de CGE produit des apprentissages de différents niveaux (cf. tableau 3).
L’apprentissage en simple boucle. Certains systèmes de contrôle semblent conduire à des apprentissages mineurs. Dans le cas étudié, ce sont les programmes environnementaux et les indicateurs « classiques » qui favorisent ce type d’apprentissage. En effet, les changements préconisés par les programmes environnementaux comme la gestion du papier ou la gestion de déchets non dangereux ne révolutionnent pas les pratiques de l’entreprise. Il s’agit par exemple d’« une incitation à l’économie d’impression en optant pour le mode brouillon, le noir et blanc, le recto/verso ou le livret, précédée d’une relecture systématique avant tout lancement d’impression » ou d’effectuer « le tri sélectif dansle respect de certaines procédures comme la récupération des piles, la transmission des cartouches d’encre et la suppression de la majorité des corbeilles à papier dans les bureaux » (Rapport d’activité). Ces changements mineurs relèvent d’un apprentissage en simple boucle.
De même, l’usage d’indicateurs « classiques » permet de détecter et corriger les écarts afin de réaliser les objectifs prédéfinis pour les activités de bureau d’études. Par exemple, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, l’instauration et le suivi d’un indicateur « modes de transports alternatifs » a permis de modifier les habitudes de transports des employés sur les trajets domicile-travail ou lors des déplacements professionnels : « L’idée bien sûr est de privilégier un mode de transport vert. Surprise agréable le vélo est rarement disponible et le covoiturage fait des émules. » (Responsable plateau technique). Dans la même logique, pour baisser la consommation de papier dans les bureaux, les dirigeants ont fixé une cible environnementale à 6000 feuilles par salarié. Le résultat obtenu en 2006 étant de 4770 feuilles par salarié, donc inférieur à la cible, les dirigeants ont ajusté la cible à 5500 feuilles pour l’année 2007 sans toutefois remanier l’objectif environnemental. Il convient ici de distinguer la notion de cible environnementale de la notion d’objectif environnemental. La cible correspond à une exigence de performance visée et chiffrée qui résulte d’un objectif. Ainsi, les indicateurs « classiques » permettent d’ajuster les cibles liées aux activités de bureau d’études, mais ne remettent pas en cause les objectifs sur lesquels elles reposent. En définitive, ce type de système de contrôle semble se limiter à des apprentissages en simple boucle.
L’apprentissage en double boucle. D’autres systèmes de contrôle s’avèrent capables de favoriser des apprentissages en double boucle. C’est notamment le cas des indicateurs « émergents », des analyses environnementales et des audits environnementaux. En effet, les activités sur le plateau technique étant en constante évolution, l’élaboration de nouveaux indicateurs constitue une opportunité pour les dirigeants d’apprendre et d’adapter sans cesse leur stratégie en fonction des opérations : « Au début, notre stratégie environnementale était centrée sur la gestion de papier dans les locaux administratifs. Depuis que notre activité a évolué, notamment avec le plateau technique, on a plus de choses à gérer : on s’occupe [désormais] de la gestion des produits et des déchets dangereux, de l’optimisation énergétique. » (Directeur adjoint et responsable QSSE). La construction des indicateurs sur le plateau technique semble stimuler un apprentissage majeur : « On pourrait aller beaucoup plus loin, en traitant mieux nos données et nos résultats, pour davantage alimenter notre stratégie. Aujourd’hui, on est en train d’améliorer la mesure de nos résultats, on a mis en place des indicateurs, on pourra faire un bilan, un retour d’expérience notamment en ce qui concerne le plateau technique, en fin d’année 2007. On a un système qui est très en mouvement, on va de l’avant. » (Directeur adjoint et responsable QSSE).
De même, les analyses environnementales menées sur le plateau technique conduisent les dirigeants à questionner leurs objectifs régulièrement. En effet, comme nous l’avons vu, ce plateau sert de lieu d’expérimentation et de maintenance de nouvelles technologies pour le contrôle et le traitement des pollutions atmosphériques et aqueuses, des déchets industriels, chimiques ou agricoles… Ce faisant, les impacts environnementaux générés par cette activité évoluent au gré des projets de R&D testés sur ce site opérationnel : « Au fur et à mesure que de nouveaux projets arrivent, c’est à moi de relayer les informations sur leurs impacts environnementaux. » Cet apprentissage conduit les dirigeants à revoir les objectifs initiaux, les plans d’actions et les budgets qui en découlent : « Les objectifs sont revus avec une fréquence annuelle car il faut attendre un an pour la plupart des objectifs pour avoir des résultats concrets. Mais si l’activité est plus importante que prévue, les opérationnels peuvent dépasser les dépenses prévues dans leur budget. Nous avons des budgets flexibles pour ça. » (Directeur).
Les changements stratégiques. La stratégie verte de l’entreprise a évolué suite aux audits externes menés par l’organisme BVQI. Si à l’origine, la stratégie visait la conformité aux obligations légales, elle est désormais tournée vers l’exemplarité environnementale et le développement de projets innovants sur son plateau technique. Mais, cette stratégie n’était pas encore visible des parties prenantes externes. En effet, un premier audit mené en 2005 révèle une absence de communication environnementale. Or, la communication est un facteur déterminant pour légitimer les activités de l’entreprise et répondre aux attentes des parties prenantes. Suivant les recommandations de l’auditeur externe, les dirigeants d’ECOTECH décident, lors de la revue de direction de 2006, de modifier la structure organisationnelle en créant un service de communication et un Extranet QSSE. Une chargée de communication est recrutée : « Je m’occupe de tout ce qui est publication, communication vers l’extérieur à destination de nos adhérents, de nos clients et d’un plus large public. Je m’occupe aussi de la logistique des manifestations que nous organisons tout au long de l’année, il y a aussi une partie gestion du conseil d’administration et des assemblées générales. » (Chargée de communication). En outre, les dirigeants impliquent les diverses parties prenantes dans le processus décisionnel : « Auprès des clients, on a convenu de transmettre les informations de notre SME à partir du manuel de management et du compte rendu d’activité. Notre manuel environnemental comporte la stratégie de l’entreprise, l’engagement de la direction, les procédures et le tableau des indicateurs. Auprès de nos fournisseurs, on leur donne nos exigences à partir du cahier des charges ou messages spécifiques. Auprès du conseil d’administration et de l’assemblée générale, des adhérents (qui sont une forme de clients), on communique le rapport d’activité. Le banquier est invité à notre assemblée, on lui envoie notre rapport d’activité. C’est un rapport public qui est diffusé sur Internet. » (Directeur). En résumé, l’audit externe semble avoir favorisé un apprentissage en double boucle en remettant en question la stratégie des dirigeants et en l’adaptant aux besoins d’information des parties prenantes. Conformément à la typologie de Gendron (2004), la stratégie verte a donc évolué d’une stratégie réactive de type conformité vers une stratégie proactive de type leadership. En effet, ces dernières se distinguent fondamentalement au niveau de la communication et du positionnement politique.
Dans le cadre d’un second audit externe réalisé en 2007, les dirigeants ont entrepris d’autres modifications afin de faire évoluer leur stratégie verte vers une stratégie globale intégrant les différents volets du développement durable : « Nous sommes en train d’évoluer vers une présentation sur le développement durable avec des indicateurs environnementaux, sociaux et économiques. Ça figurera dans notre prochain rapport d’activité. » (Directeur). Ce renouvellement stratégique nécessite des changements organisationnels et la transformation du système de mangement de l’entreprise. « Les propositions d’amélioration pour 2007 sont de : redéfinir la stratégie déclinée suivant les principes du développement durable et déclinée dans les processus; faire évoluer le manuel de management QSSE et diffuser de façon systématique ce manuel à tous nos partenaires et fournisseurs; modifier le texte de la boucle PDCA et de reformuler l’engagement de la direction. » (Compte rendu RDD). Ce changement de cap est expliqué par les dirigeants : « La politique environnementale était au départ assez théorique. Elle s’est affinée aujourd’hui, elle consiste à travailler selon les principes du développement durable pour nous même en interne et en même temps chez les clients pour les accompagner dans cette démarche d’un point de vue technique et de communication. » (Directeur adjoint et responsable QSSE). Désormais, la stratégie de l’entreprise consiste à « s’efforcer d’être exemplaire dans les différents comportements du développement durable » (Assemblée générale). En référence à la littérature, cette nouvelle stratégie semble correspondre à la stratégie proactive de type écologique (Gendron, 2004), selon laquelle les entreprises intègrent au coeur même de leur existence et de leur raison d’être les défis environnementaux et ceux du développement durable.
Synthèse des configurations relationnelles CGE-AO
A partir des résultats empiriques du cas ECOTECH, nous pouvons mettre en lumière quatre configurations relationnelles entre CGE et AO (cf. tableau 4). Ces configurations illustrent les croisements entre les modes de contrôle (diagnostique/interactif) et les niveaux d’apprentissage (simple/double boucle) générés par les systèmes de CGE. Si certaines configurations (1 et 4) sont conformes aux prédictions de Simons (1995) - selon lesquelles le contrôle interactif et le contrôle diagnostique produisent respectivement des AO en double et en simple boucle - d’autres configurations (2 et 3) contredisent cette théorie. En effet, des systèmes de contrôle diagnostiques (analyses environnementales et audits environnementaux) engendrent des apprentissages en double boucle en bouleversant les objectifs et la stratégie de l’entreprise (configuration 2), tandis que des systèmes de contrôle interactifs (indicateurs classiques) ne produisent que des apprentissages en simple boucle, induisant des changements mineurs dans l’organisation (configuration 3). En montrant qu’il existe d’autres combinaisons possibles entre modes de contrôle et niveaux d’apprentissage, notre étude relativise l’universalité du modèle de Simons. Dans la section suivante, nous expliquons pourquoi les configurations (2 et 3) divergent du modèle de Simons.
Facteurs explicatifs des relations CGE-AO
Dans le cas ECOTECH, deux facteurs de contingence expliquent les divergences avec la littérature : la stratégie proactive et le cycle de vie des activités de l’entreprise. Les valeurs fortes de l’entreprise jouent un rôle indirect sur ces relations (cf. schéma 3).
Tout d’abord, le CGE est influencé par la stratégie verte de l’entreprise. Comme nous l’avons vu supra, cette dernière a évolué d’une stratégie de conformité réglementaire vers une stratégie proactive qui vise l’excellence commerciale et l’exemplarité environnementale. En adoptant une stratégie proactive, l’entreprise s’inscrit dans une dynamique d’innovation continue à tel point que ces systèmes de contrôle diagnostiques (analyses et audits environnementaux) stimulent des apprentissages en double boucle impliquant la modification des objectifs stratégiques et de la structure organisationnelle. En effet, la recherche d’amélioration continue change ici la manière dont le contrôle diagnostique est utilisé par les dirigeants. Bien qu’il soit moins fréquemment mobilisé que le contrôle interactif, le contrôle diagnostique fait néanmoins l’objet d’une attention particulière de la part des dirigeants qui accordent une place centrale aux problématiques environnementales dans leur stratégie globale. Cette attention managériale est notamment accentuée par l’absence de contrôleur de gestion qui, selon la littérature, a tendance à se replier sur une logique financière de la performance au détriment des logiques sociales et environnementales (Quairel, 2006). Ainsi, l’absence de contrôleur conduit les dirigeants d’ECOTECH à ne pas privilégier le pilotage financier de leur entreprise sur celui de la performance environnementale. Cette attention est aussi entretenue par les spécialistes de l’environnement (animateur et auditeur externe) qui sont les porte-voix des questions écologiques au sein de l’organisation. Ces derniers jouent un rôle central dans le processus diagnostique du CGE comme ses architectes, rénovateurs et animateurs. Ils remplacent les contrôleurs de gestion dans le modèle diagnostique de Simons.
Ensuite, le cycle de vie des activités semble expliquer pourquoi certains systèmes de contrôle interactifs n’aboutissent qu’à des apprentissages en simple boucle. Comme l’étude l’a montré, les indicateurs classiques servent au pilotage des performances environnementales des activités de bureau d’études. Ces activités matures ont livré le plus gros de leur potentiel d’apprentissage. Elles sont entrées dans une zone de rendements décroissants. Elles font encore l’objet d’une attention régulière et de débats fréquents dans l’organisation, car les dirigeants ont à coeur d’être exemplaires dans le domaine environnemental. Cependant, les discussions autour de ces indicateurs classiques ne conduisent pas à modifier les objectifs ou à redéfinir la stratégie de l’entreprise. Ainsi, l’utilisation interactive des indicateurs classiques ne favorisent que des apprentissages mineurs.
Enfin, on peut noter l’impact indirect des valeurs sur les relations CGE-AO à travers la stratégie et les activités de l’entreprise. L’idéologie environnementale, reposant sur des valeurs fortes - telles que l’exemplarité, la recherche d’innovation - oriente le comportement des acteurs. Ces valeurs favorisent l’adhésion et la mobilisation des acteurs autour du CGE : « Chez nous, tout le monde est impliqué dans la mise en oeuvre du CGE. Ce n’est pas des procédures que l’on ressort à l’approche d’un audit. C’est vraiment ancré dans la culture de l’entreprise. » (Animateur environnement). « C’est complètement dans les moeurs de l’entreprise » (Juriste). Ces valeurs dominantes conduisent l’entreprise à un positionnement missionnaire. Nous entendons par là que l’organisation est engagée dans l’idéologie de protection de l’environnement au point de transformer son propre pilotage interne et son offre commerciale pour le mettre au service de cette idéologie. Ce qu’elle vend est d’abord mis en oeuvre par elle à titre d’exemple. Les valeurs supportées par ECOTECH infusent sa stratégie et ses activités qui influencent à leur tour les systèmes de CGE et les apprentissages qu’ils génèrent.
Par ailleurs, contrairement à la littérature, les autres facteurs de contingence (pressions des parties prenantes et incertitude environnementale) ne semblent pas influencer les relations CGE-AO dans le cas étudié.
Discussion et conclusion
A travers le prisme des travaux de Simons (1995), l’objectif de notre recherche était d’étudier l’influence des facteurs de contingence sur les relations CGE-AO. Cette étude fut réalisée dans le contexte spécifique d’une eco-PME missionnaire dont l’idéologie environnementale façonne la stratégie et les actions de ses membres. Nous discutons ci-après des contributions théoriques de la recherche. Nous les complétons en montrant comment les managers peuvent se réapproprier nos résultats. Les limites et perspectives de la recherche sont aussi mises en exergue.
Contributions théoriques au modèle de Simons et à la théorie de la contingence
En premier lieu, notre recherche contribue à une meilleure connaissance des liens entre le contrôle de gestion et l’apprentissage organisationnel. Elle montre l’apport de la théorie de la contingence aux travaux de Simons (1995) en soulignant le rôle clé des facteurs stratégiques et organisationnels pour expliquer les configurations relationnelles que nous observons. Dans le cas ECOTECH, la prise en compte de la stratégie proactive et du cycle de vie des activités explique la nature singulière des relations contrôle de gestion–apprentissage (cf. schéma 3). Cette fertilisation croisée permet d’enrichir le modèle initial de Simons (1990, 1995, 2000) et de ses disciples (Abernethy et Brownell, 1999; Gond et Herrbach, 2006; Sponem, 2009; Batac et Carrassus, 2009; Lee et Widener, 2012; Journeault, 2016…). Contrairement à ces auteurs qui relient chaque mode de contrôle (diagnostique ou interactif) à un seul niveau d’apprentissage (simple ou double boucle), nous avons montré comment les contrôles interactif et diagnostique entrainent à la fois, respectivement, des AO en simple et double boucle, prenant la théorie en défaut. De là découle notre première proposition théorique :
Proposition 1 : Loin d’être générique, le modèle de Simons s’adapte aux spécificités du contexte dans lequel il est utilisé. Les facteurs stratégiques et organisationnels expliquent alors les différentes combinaisons reliant les modes de contrôle aux niveaux d’apprentissage organisationnel et leurs conséquences pour l’organisation.
En second lieu, nous complétons les travaux de Simons (1995) en montrant que le rôle du contrôle diagnostique est susceptible d’évolutions. Sa transformation s’explique sans doute par la nature missionnaire de l’entreprise ECOTECH, marquée par une idéologie environnementale mobilisatrice, et par une stratégie proactive qui incite ses acteurs à s’inscrire dans une dynamique d’apprentissage continue. Ainsi, dans ce contexte, la recherche d’amélioration continue change la manière dont le contrôle diagnostique est utilisé par les dirigeants. En outre, notre article montre que le contrôle diagnostique fait l’objet d’une attention managériale plus accrue en l’absence de contrôleur de gestion. En effet, dans un contexte où le contrôle de gestion est pris en charge par les dirigeants eux-mêmes, les informations produites par les systèmes de contrôle diagnostiques sont directement interprétées par les décideurs sans passer par le filtre intermédiaire du contrôleur de gestion. Ce n’est donc pas simplement comment est utilisé l’information qui importe (proposition de Simons) mais aussi par qui elle est utilisée. Ce résultat invite les chercheurs à explorer davantage l’usage du contrôle diagnostique dont les caractéristiques ont longtemps été réduites à une attention managériale limitée, voire exceptionnelle.
Proposition 2 : Dans une entreprise missionnaire, le contrôle diagnostique crée des apprentissages en double boucle lorsqu’il s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue visant à soutenir une stratégie proactive.
Proposition 3 : En l’absence de contrôleur de gestion, le contrôle diagnostique nécessite une attention managériale plus soutenue et contribue au changement stratégique en favorisant des apprentissages en double boucle.
En dernier lieu, nous contribuons à la littérature sur la contingence en RSE en montrant que le CGE n’est pas l’apanage des entreprises de grande taille comme l’indiquent Pondeville et al. (2013) ou des entreprises devant faire face à de sérieux enjeux environnementaux comme l’affirment Banerjee et al. (2003) ou Journeault (2016). Nous montrons aussi l’impact de deux variables de contingence jusqu’ici ignorées dans la littérature sur le CGE : la stratégie proactive et le cycle de vie des activités. Ces variables offrent un potentiel important pour des études à venir puisqu’il devient possible de distinguer selon le type de stratégie proactive et selon l’étape du cycle de vie, l’état du CGE. Dans ce dernier cas, la nature de la transformation du CGE au fur et à mesure que l’entreprise se déplace sur sa courbe de cycle de vie est également un sujet intéressant pour des études futures. Notre étude permet également d’alimenter les recherches sur la sincérité des entreprises en matière de RSE. En effet, nos résultats impliquent que l’existence de pratiques de contrôle associées à des apprentissages sont le signe d’une stratégie proactive en matière de RSE.
Proposition 4 : La pertinence du CGE est liée à sa capacité à répondre aux besoins spécifiques des organisations. Il s’adapte et évolue selon un ensemble d’éléments contextuels tels que la stratégie, la taille, le secteur d’activité, le cycle de vie des activités, les valeurs de l’organisation…
Contributions pratiques
Par ailleurs, il convient d’aborder les implications pratiques de notre recherche. En France, le secteur des éco-activités est très concurrentiel. Si les grandes entreprises et leurs filiales occupent largement le marché, les PME doivent innover pour soutenir cette concurrence. Pour ces dernières, l’innovation constitue un atout considérable pour compenser le manque de ressources financières et humaines auquel elles sont souvent confrontées. Ainsi, notre recherche aide les dirigeants de PME, souhaitant investir ce secteur, à mettre en place des systèmes de CGE pour développer des connaissances permettant d’obtenir des avantages en termes de coûts, de compétitivité et de légitimité. En effet, notre étude empirique montre que l’exemplarité est au coeur de la stratégie de l’entreprise ECOTECH. Elle conduit l’entreprise à s’inscrire dans une dynamique d’innovation continue. Pour ce faire, le CGE apparaît comme un processus d’apprentissage permettant non seulement de réguler les comportements mais aussi de saisir de nouvelles opportunités stratégiques.
Limites et perspectives de recherche
Enfin, notre étude présente plusieurs limites et perspectives futures. Les limites sont inhérentes à la méthodologie retenue. Si la généralisation analytique est désormais admise dans les recherches qualitatives, elle nécessite toutefois de répliquer l’étude de cas dans d’autres contextes (Yin, 2014). Nos propositions de recherche ne peuvent être généralisées sans recours à d’autres recherches. Nous suggérons par conséquent la réplication de cette étude sur un échantillon théorique d’organisations missionnaires afin de confirmer ou d’élargir les configurations relationnelles mises en évidence dans le cas ECOTECH. Puis, nous préconisons une seconde réplication dans des secteurs d’activité peu innovants ou moins avancés en matière environnementale afin de tester des propositions rivales. Enfin, dans une visée comparative, il serait intéressant de répliquer l’étude dans d’autres pays, comme par exemple au Canada, où le secteur des éco-activités est dynamique : comment le CGE génère-t-il des apprentissages dans les éco-PME québécoises ? Des facteurs culturels ou institutionnels peuvent-ils influer la relation contrôle de gestion-AO ?
Appendices
Notes biographiques
Angèle Renaud Professeure à l’Université de Bourgogne, Angèle RENAUD dirige le Centre de Recherche en Gestion des Organisations (CREGO, EA 7317). Ses recherches s’inscrivent dans les champs du contrôle de gestion, de la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) et du management public.
Nicolas Berland Professeur à l’Université Paris Dauphine, Nicolas BERLAND gère l’executive MBA et a dirigé pendant quatre ans DRM (Dauphine Recherche en Management). Ses recherches portent sur le contrôle de gestion, le pilotage et la mesure de la performance.
Notes
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[1]
Pour un état de l’art sur l’AO, le lecteur peut se référer aux travaux de Koenig (2015, p. 83-95) ainsi qu’aux numéros spéciaux publiés par la revue Organizational Science, Vol. 2, N° 1, février 1991 (www.jstor.org/stable/i345200) et Vol. 3, N° 1, février 1992 (www.jstor.org/stable/i345204).
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[2]
Un mode de contrôle est une modalité d'exercice du contrôle (Chiapello, 1996).
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[3]
Ce secteur regroupe « les activités qui produisent des biens et services destinés à mesurer, prévenir, limiter ou corriger les dommages environnementaux à l’eau, l’air, et le sol et les problèmes relatifs aux déchets, aux bruits et aux écosystèmes » (Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie). Selon l’ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie), ce secteur est en forte expansion en France et prend un poids économique de plus en plus significatif. En 2011, il représente 79,3 milliards d’euros, soit 1,37 % du PIB.
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[4]
Si des auteurs ont exploré les relations entre les 4 leviers de Simons (voir Tuomela, 2005; Widener, 2007; Plesner Rossing, 2013…), l’objectif de notre recherche est différent. Nous traitons ici des liens entre les leviers diagnostiques et interactifs (usages des systèmes de contrôle de gestion) et les niveaux d’apprentissage organisationnel. Dans son modèle, Simons (1995) exclut les systèmes de croyances et les systèmes de contraintes car ces deux leviers ne relèvent pas directement du champ du contrôle de gestion. Autrement dit, Simons ne s’est pas intéressé à l’impact des deux autres leviers sur l’AO. Mais cette piste de recherche pourrait faire l’objet de futures études complémentaires.
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[5]
On entend par parties prenantes tout groupe ou individu qui peut affecter ou qui peut être affecté par la réalisation des objectifs de l’entreprise (Freeman, 1984, p. 46). Pondeville et al. (2013, p. 324) classent les parties prenantes en quatre catégories : les regulatory stakeholders qui imposent des lois et directives aux entreprises; les community stakeholders qui incluent les communautés locales, la presse/média, les organisations environnementales, les institutions scientifiques; les market stakeholders qui regroupent les clients, les concurrents et les associations professionnelles; les organizational stakeholders qui ont un lien direct avec la gestion de l’entreprise (propriétaires/actionnaires, managers, employés).
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[6]
Le SME est un ensemble plus vaste dans lequel s’inscrit le CGE. Selon l’Organisation internationale de normalisation, la norme ISO 14001 fournit un cadre pour implanter un SME efficace. Ce système inclut la structure organisationnelle, les activités de planification, les responsabilités, les pratiques, les procédures pour élaborer, mettre en oeuvre, réaliser, contrôler, réviser et améliorer la politique environnementale (Boiral, 2007).
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Appendices
Biographical notes
Angèle Renaud Professor at the University of Burgundy, Angèle RENAUD heads the Research Center in Management Organizations (CREGO, EA 7317). Her research is in the fields of management control, corporate social responsibility (CSR) and public management.
Nicolas Berland Professor at the University Paris Dauphine, Nicolas BERLAND is in charge of the executive MBA and has managed for four years DRM (Dauphine Research in Management). His research focuses on management control, management and performance measurement.
Appendices
Notas biograficas
Angèle Renaud La profesora de la Universidad de Borgoña, Angèle RENAUD dirige el Centro de Investigación en Organizaciones de Gestión (CREGO, EA 7317). Su investigación se centra en los campos del control de gestión, la responsabilidad social corporativa (RSC) y la gestión pública.
Nicolas Berland El profesor de la Universidad Dauphine de París, Nicolas BERLAND, gestiona el MBA ejecutivo y ha dirigido durante cuatro años el DRM (Dauphine Research in Management). Su investigación se centra en el control de gestión, gestión y medición del rendimiento.