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« La France, nul ne l'ignore, fut parmi les dernières nations européennes à reconnaître aux femmes leurs droits politiques, même si elle avait été la première à établir le suffrage universel masculin. Ce paradoxe est à lui seul, un symbole : celui d'une démocratie entre “frères”, refusant aux femmes, jusqu'au milieu du XXe siècle, leur droit d'entrée dans le club des citoyens. » C'est à la lumière de cet incroyable paradoxe, dont les politologues ne cessent de sonder les profondeurs, que Mariette Sineau entreprend d'engager ses lecteurs dans la compréhension du lent processus d'inclusion des femmes dans la Cinquième République. La organisé son ouvrage en deux parties : la première traite du hors-jeu politique des femmes de 1958 à 1995 et la seconde interroge l'émergence d'un autre partage du pouvoir entre les sexes de 1995 à 2001. Dans la première partie, Mariette Sineau analyse le processus d'exclusion des femmes de la participation politique, de la période de la glaciation gaulliste jusqu'au tournant mitterrandien, en passant par le dégel giscardien. L'intérêt de son approche et son originalité consistent à mettre en évidence la dialectique de l'exclusion et de l'inclusion des femmes en politique en fonction des enjeux et des personnalités des chefs de l'État successifs. Mariette Sineau utilise la technique des portraits pour illustrer les analyses proposées. Cette utilisation rend son livre particulièrement attachant et vivant. Elle met en scène des figures de femmes politiques qui ont marqué la Cinquième République et souligne ces destins d'exception. Cette approche permet également de comprendre les facteurs qui ont permis à ces femmes d'être actrices de la vie politique dans un contexte très hostile. Dans la seconde partie, Mariette Sineau présente la rupture introduite par le retour de la gauche aux affaires en 1997 par le biais de la féminisation du pouvoir législatif et exécutif et par la réforme institutionnelle de la parité qui vont, à ses yeux, précipiter l'inclusion des femmes dans la cité. La proximité de la réforme rend l'auteure d'un optimisme que nous sommes loin de partager et son épilogue sur « la parité au banc d'essai » laisse poindre quelques doutes sur la diffusion de la parité hors des cadres prévus par la loi. La même crainte surgit de l'enquête réalisée auprès des actuels députés des deux sexes sur la diffusion des idées féministes et égalitaires au sein du Palais Bourbon. Ces données sont très contextualisées et datées, mais elles renseignent sur l'état d'esprit de la classe politique au lendemain de la réforme de la parité et favoriseront la comparaison dans le temps à partir de cet arrêt sur image. Un seul regret : l'abandon du portrait dans la seconde partie, qui rend l'ouvrage particulièrement original et le situe quelque part entre l'essai et le roman politique, tant la vie de ces pionnières de la Cinquième relève de l'aventure.