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Tout d’abord le titre interpelle et nous invite d’entrée de jeu à la réflexion ! Certes, nous connaissons le rôle primordial que l’entrepreneur joue… Et si nous lui avions laissé trop de place ?… jusqu’à en oublier que l’entrepreneuriat est un chemin, un processus plus qu’un but, un point d’arrivée. Le concept d’entrepreneuring invite à se déplacer d’une vision individualiste vers une approche relationnelle englobant une multiplicité d’acteurs.
Le livre propose de se poser un instant et d’engager la réflexion autour de ce qu’est la zone de pensée et d’action du champ de l’entrepreneuriat afin de mieux connaître ses apports, ses limites et les perspectives de recherche qui s’ouvrent à nous. Cet ouvrage collectif est stimulant, car il propose différents angles de vue en mobilisant des connaissances certes issues des sciences de gestion, mais aussi de la psychologie ou encore des sciences humaines et sociales.
L’ouvrage est structuré en 3 parties, la première met l’accent sur les nouveaux contextes d’investigation qui ont permis un renouvellement du champ. La deuxième partie aborde les nouvelles trajectoires entrepreneuriales (les entrées, les sorties, le retour, etc.). Enfin la troisième partie étudie l’entrepreneur dans son écosystème (d’accompagnement, de financement, etc.).
Pour ce compte rendu nous ne reviendrons naturellement pas sur tous les chapitres en détail, car nous ne voulons pas empêcher le futur lecteur de se délecter de chacun des thèmes abordés. En revanche, nous nous arrêterons çà et là sur des questionnements et réflexions qui sont apparus au fil de la découverte de cet ouvrage.
Ainsi, ce que nous avons trouvé intéressant dans le chapitre sur l’entrepreneuriat culturel, c’est qu’il revient sur la métaphore du bricoleur et nous invite à la réflexion autour de la pensée créative à travers l’improvisation et la capacité à créer de la valeur malgré les limites et ressources limitées de ce type d’entrepreneuriat. Un autre chapitre a attiré notre attention en proposant un état de l’art de l’entrepreneuriat de nécessité avant de nous inviter à utiliser le cadre de W. Gartner pour analyser l’entrepreneuriat de nécessité à travers ses quatre dimensions, à savoir l’individu, l’environnement, l’organisation et le processus. Dans le dernier chapitre s’en suit une discussion sur l’entrepreneuriat social qui débouche sur l’importance de mobiliser des analyses multiniveaux au regard de la multiplicité des acteurs et activités constitutives de ce type d’entrepreneuriat. De fait, cette première partie invite le lecteur tantôt à opposer, tantôt à créer des ponts entre entrepreneuriat culturel, de nécessité et social.
La deuxième partie nous fait poursuivre le voyage sur la trajectoire entrepreneuriale ! Le chapitre 4 nous propose un champ de recherche relativement nouveau, celui de l’engagement des entrepreneurs naissants – le chaînon manquant entre l’intention et l’action entrepreneuriale. Il se concentre sur les phases volitionnelles du processus entrepreneurial (versus les fondements motivationnels, déjà largement étudiés dans la littérature). Autre domaine relativement peu documenté : la sortie entrepreneuriale. Le chapitre qui y est consacré discute des stratégies de « sortie » (la récolte financière, les stratégies d’intendance, ou encore la liquidation) et de ses déterminants. L’approche est intéressante, car elle propose d’étudier le phénomène de sortie d’un point de vue global afin d’apporter une certaine cohérence et continuité à la littérature existante. Et puis, une fois qu’on a mis un terme à son entreprise… quoi de plus naturel que de vouloir recréer après une sortie… C’est ce qu’explore le chapitre 6. Enfin le dernier chapitre de cette deuxième partie revient sur les compétences de l’entrepreneur ou du repreneur et met en avant l’importance des compétences sociales dans le succès/l’échec ou encore la performance financière. Il incite à des recherches complémentaires, notamment en collaborant avec des chercheurs en sociologie pour comprendre le développement de ces compétences.
La troisième et dernière partie discute des principaux débats et points de tensions actuels sur les business models pour enrichir les cadres existants (Chapitre 8) et aborde également la mobilisation du business model pour étudier plus précisément les incubateurs (Chapitre 10). Le jeu concurrentiel est de plus en plus féroce… il faut à tout prix être innovant ! Alors, les incubateurs aussi innovent pour attirer et retenir les entrepreneurs et financeurs ! Toujours dans cette logique de différenciation et dans cette course à l’innovation, le chapitre 9 met la lumière sur les innovations ouvertes, certes très connues, mais peu étudiées chez les start-up : l’analyse proposée permet d’y découvrir les compétences entrepreneuriales associées à ce type d’innovation ouverte. Enfin, l’ouvrage termine sur ce qui se cache derrière la finance entrepreneuriale et comment les innovations viennent là encore redéfinir ses contours et proposer de nombreuses pistes de recherche… qui feront, sans nul doute, le bonheur des chercheurs !
À la fin du livre, un constat s’impose au lecteur : le constat de la vitalité des recherches en entrepreneuriat qui depuis vingt ans se questionnent et se renouvellent sans cesse ! L’ouverture de ce champ à d’autres disciplines lui a sans doute permis de mûrir plus vite et de faire preuve lui-même d’innovations ! Bien sûr, là aussi nous sommes sur le chemin et la route est – non pas encore – mais heureusement longue ! Et les perspectives de recherche qui s’ouvrent sont nombreuses, à commencer par des approches multiniveaux qui permettront de mieux appréhender les facteurs individuels, collectifs et contextuels pour une vue plus holistique.
Comme vous l’aurez compris, dans cet ouvrage, les contributions des auteurs sont riches et permettent non seulement de faire un état des lieux, mais également nous invite à la réflexion. Cet ouvrage est une bouffée d’oxygène et nous insuffle une dynamique créative pour poursuivre nos recherches en entrepreneuriat !