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Spécialiste de la Pennsylvanie au xviiie siècle et de l’histoire culturelle, les intérêts de George Boudreau vogue de la personne de Benjamin Franklin à la culture matérielle, et ce en passant par l’histoire publique. Boudreau est reconnu pour son travail parmi les institutions muséales et historiques de la ville de Philadelphie. Independence : A Guide To Historic Philadelphia se trouve à la croisée de ses divers intérêts et s’inscrit dans une tendance d’écriture de l’histoire accessible à un vaste public. Le propos du livre est de raconter de manière compréhensible et attrayante une histoire plutôt complète des quartiers historiques de Philadelphie, et de révéler la voix moins connue d’une diversité de témoins de l’indépendance des États-Unis[1]. Dès son introduction, Boudreau se situe en complément et en opposition à l’histoire de Philadelphie telle qu’elle est présentée aux millions de visiteurs qui, chaque année, parcourent les quartiers historiques de Philadelphie qui ont vu l’indépendance américaine et la naissance des États-Unis.
À travers dix-sept courts chapitres aisés à lire, Independence prend la forme d’un guide touristique, divisé par espaces importants, tout en étant chronologique. Boudreau utilise ces places et quartiers de Philadelphie pour faire ressortir différents personnages, thèmes et évènements. Les deux premiers chapitres touchent les éléments fondateurs de Philadelphie : William Penn, sa vision de Philadelphie et son plan urbain, et l’héritage de la colonisation suédoise. Boudreau éveille ensuite son lectorat à la société de Philadelphie et à ses richesses culturelles, commerciales et architecturales en nous guidant au travers de Market Street, Christ Church, Franklin Court, des nombreuses institutions culturelles, de Society Hill et de la vie de l’élite, des environs City Tavern et de la vie marchande, de Carpenter’s Hall et des débuts de la Révolution. Le quotidien philadelphien de Thomas Jefferson est exploré au travers de la Declaration House, les évènements importants de la Déclaration d’indépendance et de la Révolution sont dépeints par les lieux de Independence Square, Washington Square, et la Old City. Boudreau aborde ensuite les années fédérales avec le Centre de la Constitution Nationale, la President’s House, Germantown, le refuge de plusieurs et du gouvernement, durant la grande fièvre jaune de 1793, et Philadelphia qui s’épanouit sous une architecture fédérale comme première capitale politique, culturelle des États-Unis. Boudreau termine avec la Liberty Bell, ce symbole fort de l’ère révolutionnaire américaine, afin d’aborder la mémoire de ces évènements.
Dans ces divers lieux, Boudreau aborde une multiplicité de thèmes de l’histoire de Philadelphie au xviiie siècle : la diversité économique, l’importance de la consommation, l’histoire politique, l’histoire sociale, la sociabilité, la religion, les femmes, les esclaves, et la vie domestique. Boudreau discute évidemment de certains pères fondateurs, mais, sans nier l’importance de leur rôle, il les présente sous un angle rafraîchissant : Franklin qui correspond avec son épouse sur la décoration de leur maison, Jefferson qui dépense à Philadelphie, la vie privée et publique de Washington dans la Maison présidentielle. Il expose des acteurs historiques moins connus — Alice, l’esclave de 116 ans, le révérend Duché, Elizabeth W. Powel, parmi d’autres —, par le biais de bulles biographiques, détachées de la narration principale, stratégie également employée pour détailler les styles architecturaux de Philadelphie. Étant donné le lectorat visé, cette stratégie éditoriale est avantageuse. La quantité et la qualité des cartes et des images qui parcourent le livre sont remarquables et décuplent l’accessibilité de cet ouvrage.
Boudreau parvient également à expliquer divers aspects de la discipline historique. Si la méthodologie en histoire n’est pas visible — le livre ne contient aucune note de bas pages et une bibliographie sommaire par chapitre — nombre de citations pertinentes provenant de sources ornent les marges. Plusieurs sources sont introduites auprès des lecteurs, expliquées et analysées au travers du récit narratif : la correspondance de Franklin et de sa femme, le journal de Elizabeth Drinker, les livres de comptes de Jefferson, entre autres. Aussi, lorsqu’il décrit les différents bâtiments et quartier, ou encore la Liberty Bell, Boudreau implique le lectorat dans les recherches archéologiques, et les choix de restauration, reconstruction et préservation qui font que, par exemple, la Maison présidentielle a été reconstruite de façon symbolique, alors que Ellfreth’s Alley fut préservée dans son originalité.
En bref, Independence. A Guide to Historic Philadelphia n’est pas un livre qui innove en terme de recherches en histoire, mais en terme de rendre la lecture d’une histoire professionnelle accessible à un grand public. Boudreau maîtrise la synthèse et la vulgarisation d’énormément de recherches, construit un livre intelligemment, comme un guide parcouru d’images, de cartes, d’extraits de sources et de bulles d’information. Ainsi, cet ouvrage est parfait pour tous étudiants et professionnels qui entament une recherche sur Philadelphie et l’indépendance américaine, et Boudreau remplit ses objectifs en nuançant et en rapprochant de la vérité et de la méthode historiques l’histoire à laquelle le public américain et touristique est exposé.
Appendices
Note
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[1]
Pour le cas spécifique de Philadelphie au xviiie siècle, l’archéologue Rébecca Yamin poursuit le même but en promenant un lectorat qui se veut grand public au travers de ses recherches archéologiques de Philadelphie au xviiie siècle. Elle entend faire ressortir les voix mons entendues: les esclaves, les femmes, les classes sociales moyennes et pauvres, des bâtiments disprus etc. Rebecca Yamin, Digging the City of Brotherly Love: Stories from Philadelphia Archaeology, New Haven et Londres, Yale University Press, 2008.