Abstracts
Résumé
Le développement de la forme romanesque entre le xiie et la fin du xiiie siècle correspond à la période que les historiens de l’économie appellent la « révolution commerciale » (950-1350). L’espace occupé par la fiction dans l’essor de l’économie monétaire ne résulte pas seulement de cette coïncidence chronologique. Les nouvelles valeurs de cette économie plus monétarisée reposent sur la confiance accordée à une fiction qui s’incarne dans l’opposition entre monnaie réelle (le moyen de paiement) et monnaie imaginaire (la monnaie de compte). Qu’il s’agisse de formes brèves (le fabliau), de l’excroissance d’une fable animalière ou allégorique (le Roman de Renart), ou d’un roman d’amour et de chevalerie, comme ceux de Chrétien de Troyes, il s’agit toujours de fiction. La fiction médiévale se rapproche ainsi d’une monnaie fiduciaire qui repose sur la confiance de l’acheteur envers l’émetteur, ici la confiance de l’auditeur-lecteur à l’égard du romancier.
Abstract
The development of romance between the twelfth and late thirteenth centuries corresponds to the period that economic historians call the “commercial revolution” (950–1350). The space occupied by fiction in the rise of the monetary economy does not solely result from this chronological coincidence. The new values of this more monetarized economy rest on the trust placed in a fiction which is embodied in the opposition between real money (the means of payment) and imaginary money (the money of account). Whether it is a question of short forms, such as the fabliau, an outgrowth of an animal or allegorical fable, such as the Roman de Renart, or a romance of love and chivalry, like those of Chrétien de Troyes, it always remains a fiction. Thus, medieval fiction comes nearer to a fiduciary currency based on the trust of the buyer towards the issuer, in this case, the trust of the listener-reader towards the romancer.