Abstracts
Résumé
L’éclatement de la crise sanitaire mondiale en pleine crise climatique planétaire a permis de saisir de fortes articulations entre celles-ci : leurs origines et leurs impacts sur les processus socio-écologiques mettent en évidence la problématique structurelle d'un système économique capitaliste dont le fonctionnement est axé sur l'exploitation intensive d'une planète finie et à bout de souffle. Une telle réalité est dissimulée par une stratégie idéologico-politique basée sur l'homogénéisation culturelle et la colonisation d'éléments de représentation symbolique. Dans ce processus complexe, la communication de masse et les processus éducatifs deviennent des outils majeurs pour instaurer une concentration monopolistique d'idéaux et d'imaginaires sociaux, ainsi que des modes de vie conformes aux intérêts du système. Les intentions associées à de tels intérêts ont été révélées par la pandémie et le seront encore davantage lorsque les points de basculement de plus en plus critiques du système climatique terrestre commenceront à se produire plus tôt que tard. Ainsi, une nouvelle opportunité, nécessaire et urgente, apparaît pour réfléchir à la dérive des systèmes éducatifs vers une vision utilitaire de l'éducation : il importe de repenser ces systèmes d'un point de vue critique, intégrant les apports des sciences humaines et sociales, de l'éducation relative à l’environnement et de l'enseignement des sciences dans les politiques et pratiques éducatives, permettant de développer une éducation qui tienne compte de ce qui est non négociable à la lumière de la justice sociale et climatique.
Mots-clés :
- éducation aux changements climatiques,
- urgence climatique,
- crise socioécologique,
- lecture critique,
- politiques climatiques
Abstract
The outbreak of the world health crisis in the midst of a planetary climate crisis has made it possible to grasp the strong links between these crises : their origins and their impacts on socio-ecological processes highlight the structural problems of a capitalist economic system whose functioning is centered on the intensive exploitation of a finite and exhausted planet. Such a reality is concealed by an ideological-political strategy based on cultural homogenization and the colonization of elements of symbolic representation. In this complex process, mass communication and educational processes become major tools for establishing a monopolistic concentration of social ideals and imaginaries, as well as ways of life that conform to the interests of the system. The intentions associated with such interests have been revealed by the pandemic and will be further revealed when the increasingly critical tipping points of the earth's climate system begin to occur sooner rather than later. Thus, a new and urgent opportunity arises to reflect on the drift of educational systems towards a utilitarian vision of education : it is important to rethink these systems from a critical point of view, integrating the contributions of the humanities and social sciences, environmental education and science teaching into educational policies and practices, allowing for the development of an education that takes into account what is non-negotiable in light of social and climate justice.
Keywords:
- climate change education,
- climate emergency,
- social-ecological crisis,
- critical reading,
- climate policies
Resumen
La crisis sanitaria global y la crisis climática global revelan fuertes articulaciones en sus orígenes e impactos en los procesos socioecológicos que ponen de relieve los fallos estructurales de un sistema económico capitalista que basa su funcionamiento en la explotación intensiva y a gran escala de un planeta finito y con graves síntomas de estar exhausto. Ello, se disimula a través de una estrategia ideológico-política sustentada en la homogeneización cultural y la colonización de elementos de representación simbólica y la construcción de identidades sociales, mediante la inducción de deseos impostados para uniformar el pensamiento y configurar una única forma y estilo de vida. En ese proceso complejo, la comunicación de masas y los procesos educativos, sobre todo los escolarizados, constituyen un componente de primer orden para implantar una concentración monopólica de idearios e imaginarios sociales, así como estilos de vida acordes con las intenciones de los intereses ocultos en los entretelones del sistema. Estas intenciones han quedado exhibidas por la pandemia y lo estará aún más cuando se comiencen a producir, más pronto que tarde, puntos de inflexión cada vez más críticos en el sistema climático terrestre. Aparece así una nueva, necesaria y urgente oportunidad de reflexionar sobre la deriva de los sistemas educativos hacia una visión utilitarista de la educación, con la finalidad de repensarlos desde una visión crítica que integre las aportaciones de las Ciencias Sociales y las Humanidades, de la educación ambiental y de la enseñanza de las ciencias en las políticas y prácticas educativas que permitan desarrollar una educación de lo que no es negociable a la luz de una justicia social y climática.
Palabras clave:
- educación para el cambio climático,
- emergencia climática,
- crisis socioecológica,
- lectura crítica,
- políticas climáticas
Article body
L’épidémie de COVID-19 semble être survenue de façon imprévue malgré les recherches avertissant des risques probables d’apparition de nouveaux coronavirus (Wolfe et coll., 2005). Ses impacts ont mis en évidence l’indécence du système économique mondial et les nombreuses problématiques sociales et politiques qui y sont associées. Le récit dominant autour de l’impossibilité de réduire les modes, les rythmes et les échelles de production et de consommation qu’exigerait une action climatique permettant de rester sous les 2 degrés Celsius de réchauffement, comme le propose l’Accord de Paris, a été réfuté par un arrêt brusque et inédit de la vie sociale et économique mondiale en 2020.
La pandémie a obligé les sociétés d’abondance, qui paraissaient observer en toute sécurité ces phénomènes avec une certaine distance géographique et psychologique, à éprouver de façon radicale l’incertitude et le risque qu’engendre la surexploitation de la planète. Malgré le fait qu’auparavant la science ait averti de ces conséquences, les réponses politiques des différents gouvernements n’ont pas été enclenchées, exprimant ainsi plus profondément encore les traits de l’actuelle société du risque (Beck, 2006) et des inégalités qui y sont associées.
Dans le cas spécifique de l’éducation, on observe la même inattention à l’égard des premiers signaux d’alarme, il y a plus de 60 ans. On déplore le peu d’importance accordée au traitement des changements climatiques et à la nécessité de mettre en place des stratégies pour préparer les citoyens à un futur caractérisé par l’incertitude et le changement.
Cet article explore les relations existantes entre le changement climatique et l’épidémie de la COVID-19, mettant en évidence les enjeux politico-éducatifs relatifs à de telles crises, espérant stimuler ainsi l’engagement du milieu socioéducatif.
Science, société et politique
La pandémie est une manifestation de plus de l’urgence environnementale et humanitaire des sociétés actuelles. Le modèle de développement dominant, qui dépend de l’usage intensif de combustibles fossiles et de la surexploitation de la planète, génère des situations de crise (ONU, 2020) et des désastres ; ceux-ci sont « pour l’essentiel historiquement et géographiquement des résultats spécifiques du capitalisme contemporain » (Wisner et coll., 2004, p. 279, traduction libre).
Valladares (2020) affirme que la conservation de la nature et de ses écosystèmes est le vaccin plus efficace face à l’apparition de nouveaux agents pathogènes infectieux. Il réfute que la chauvesouris, le pangolin ou toutes autres espèces soient considérés coupables de la pandémie actuelle et souligne les responsabilités dérivées de pratiques liées au système socioéconomique. Dans le même ordre d’idées, Daszak (ONU, 2020) suggère que la pandémie actuelle provient d’activités humaines analogues à celles qui sont à l’origine du changement climatique, car l’apparition de nouvelles maladies infectieuses est directement liée à la déforestation, à la perte de la biodiversité et aux changements dans l’usage des terres pour étendre les monocultures intensives (Giménez-Font, 2008 ; Lorentzen et coll., 2020 ; Wolfe et coll., 2005). À cette situation s’ajoute l’impact massif sur les écosystèmes des processus liés l’extractivisme intensif d’hydrocarbures et de minerais (Gudynas, 2009), ainsi que l’expansion de cultures transgéniques, de l’élevage de bétail et de la pêche industrielle pour répondre à une demande incessante de biens et de services. Ces pratiques contribuent à la surexploitation des ressources biotiques et dégradent des espaces naturels qui constituent des niches écologiques de micro-organismes qui coexistent symbiotiquement avec leurs hôtes naturels, mais qui, suite à une grave altération de leurs habitats, peuvent migrer ou infecter d’autres espèces entraînant des bouleversements à divers degrés (Wilcox et Ellis, 2006).
Par ailleurs, les pratiques productives néolibérales ont soumis une grande partie de la population à une spirale de pauvreté (Inglada et Sastre, 2014) en soutenant un système qui, subordonné à une croissance économique continue, concentre les bénéfices dans les mains des mieux nantis, tandis qu’elle induit globalement des risques et des inégalités. La façon d’opérer dans les zones rurales met en évidence des processus d’accumulation par dépossession avec l’expulsion de populations d’agriculteurs de leurs territoires, ce qui fragmente et transforme les différentes formes de possession sous le régime de la propriété privée, supprime les ressources communales, efface des modes alternatifs de production et de consommation, puis supprime, à travers la tromperie et la violence, des processus et des structures traditionnelles pour les supplanter par des relations capitalistes de production (Harvey, 2006).
De la même manière, à l’image de la réponse internationale face à l’urgence virale qui consiste à dériver les responsabilités vers des vecteurs de transmission en oubliant ses causes structurelles, la crise climatique donne lieu à un mouvement négationniste qui tente de dévier l’attention à travers une post-vérité, en suscitant des incertitudes, en discréditant les scientifiques et en culpabilisant les populations plus atteintes et vulnérables (Klein, 2015 ; Oreskes et Conway, 2018). De cette façon, il s’agit de cacher les structures socio-économiques, politiques et culturelles à l’origine des inégalités, aggravant encore davantage la dégradation environnementale et les crises récurrentes (Lutz, 2013).
De plus, les alertes émises par la science et par les organismes internationaux sur les risques pandémiques causés une gestion inadéquate des ressources naturelles (Cheng et coll., 2007) se sont paradoxalement intensifiées avec les excès de confiance envers les sciences biomédicales ainsi qu’avec la détérioration des programmes de santé publique (Wilcox et Ellis, 2006) causée par des politiques néolibérales. Il s’agit là d’une illustration du dialogue malheureux entre science, société et politique au cours des dernières décennies.
Malgré des similarités majeures entre la pandémie du COVID-19 et le changement climatique en tant qu’« objets » de nature scientifique et d’une importance sociale majeure, ils présentent toutefois deux différences principales. La première est la perception sociale du fait que la COVID-19 implique une menace mortelle imminente qui, en plus d’être statistiquement fondée, est suffisamment concrète et notoire pour provoquer une certaine appréhension parmi la population générale. La cause (le virus) et sa conséquence (la mort probable) sont liées dans l’imaginaire social. Par contre, la fatalité du changement climatique n’est pas évidente et facilement prévisible pour une grande majorité de la population. Des mécanismes culturels et psychologiques contribuent à alimenter une telle la distance émotionnelle.
La deuxième différence est reliée aux attentes de solutions. Face à la COVID-19, nous aurions accès à deux solutions miracles : la conception de vaccins efficaces et la découverte d’un traitement médical efficient. On ne perçoit pas que le l’origine du « virus » se trouve à l’intérieur du système, bien qu’en réalité, il est relié à celui-ci par sa genèse zoonotique et par le fait qu’il soit distribué via des réseaux de la mondialisation. On conçoit donc que le système en lui-même a la capacité de trouver une solution : ainsi, la situation d’alarme a une date de péremption. De plus, le système n’a pas pour seul objectif de protéger la santé humaine, mais il peut aussi réparer les dégâts causés à l’économie globale.
Face au changement climatique, nous n’avons par contre aucune solution miracle à portée de main. On reconnaît que le déséquilibre du climat est l’une des conséquences du fonctionnement même du système. L’affronter implique d’« arrêter » et de « reformuler » les manières selon lesquelles nous produisons, consommons et nous interagissons avec nos semblables. Contrairement au virus, une menace apparemment « externe », le changement climatique devient une menace « interne », un produit structurel du système lui-même qui se retrouve mis en échec en raison même de ses conséquences. La solution au changement climatique passe donc par l’arrêt et la réorientation du système, mais il s’agit d’un enjeu que nous ne sommes pas encore prêts à affronter.
Dans le domaine éducatif, les preuves s’accumulent pour montrer l’insuffisance de la prise en compte de la crise climatique par les institutions (Reid, 2019). Il existe au sein de la recherche en sciences sociales, une sorte de « silence organisé » (Henderson et coll., 2017) par rapport au changement climatique, qui freine le progrès des contributions venant des domaines académiques, de l’enseignement et de la recherche. Une telle situation oblige à accélérer le dialogue entre les sciences « dures » – chargées principalement de comprendre les aspects biophysiques de la question climatique et maintenant, de la crise pandémique – et les sciences sociales et humaines pour formuler des réponses plus pertinentes et cohérentes permettant d’affronter ces crises et celles qui surviendront, d’un point de vue scientifique, éthique et démocratique (González-Gaudiano et Meira-Cartea, 2019).
Le confinement comme exercice de réflexion sur l’éducation post-pandémique
Isaac Rosa, en plein confinement à domicile en Espagne (Gallego, 2020), réfléchissait sur l’absurdité du fait que, face à une situation aussi singulière, on ait prétendu poursuivre l’année scolaire dans un cadre de « normalité » présumée, où on se contenterait d’assouplir les évaluations tout en s’efforçant d’aborder, dans la mesure du possible, les contenus préétablis des programmes scolaires. D’une certaine manière, ce que l’écrivain dénonce c’est l’incohérence d’une réponse éducative « normalisatrice » face à une situation inédite dont il n’existe aucun antécédent (Comisión Internacional sobre los Futuros de la Educación, 2020). Le fait de comprendre l’éducation comme un processus fermé, contrôlé et quantifié dans une relation de cause à effet et de processus-produit, devient un obstacle à l’adaptation du curriculum et par conséquent, une entrave au déploiement d’une éducation émancipatrice et démocratique qui permettrait d’affronter les défis d’une société du risque caractérisée par l’absence de mesures destinées à réduire les menaces croissantes et la difficulté à attribuer des responsabilités (Beck, 2006).
Biesta (2017) suggère une analyse de cette tension entre le risque et l’éducation en identifiant deux tendances différentes. D’un côté, il existe une éducation « forte et métaphysique » - celle qui prédomine dans les systèmes actuels - qui tente de réduire les risques en considérant les processus d’enseignement-apprentissage comme des processus et produits évaluables et quantifiables, immunisés devant l’incertitude et la vulnérabilité. D’un autre côté, l’auteur propose un modèle alternatif qui favorise la création d’espaces où la subjectivité de l’étudiant peut se déployer, c’est-à-dire une éducation qui offre les conditions pour que le sujet assume sa relation éthique avec les autres et pour que puisse se manifester une responsabilité unique et singulière de tout un chacun envers autrui et avec autrui.
Dans ce modèle alternatif, le risque représente une réalité indissociable de l’éducation : ici, les résultats sont ouverts, dynamiques et indéterminés ; la possibilité de ne pas atteindre ce qui prescrit demeure sous-jacente. Il importe donc selon Biesta (2017, p. 41) de s’assurer que notre organisation de l’éducation ne contribue pas à assourdir et à aveugler les étudiants devant les grands enjeux de l’époque et les réponses qu’il faut y apporter, comme l’action face au changement climatique, la décarbonation, les changements de modèles de consommation et/ou de modes de vie, etc. Il est donc impérieux de créer des espaces et des moments où les personnes peuvent débattre et de faciliter à cet effet la réflexion sur des situations où il convient d’identifier et d’accepter la subjectivité et la responsabilité. Dans son analyse de la théorie de la communication de Dewey, Biesta défend que la conception d’une communication « efficace » a une influence sur l’éducation, en situant l’acte communicatif en tant qu’élément capital du processus socio-éducatif. Il propose ainsi une vision de la communication en tant que processus de signification et d’interprétation, ouvert et indéterminé, et qui pourtant n’est pas sans risque face à une conception de la communication en tant que processus unidirectionnel d’émission-réception d’information/produits.
À cet effet, on observe que la pandémie et le changement climatique ont envahi le domaine du sens commun par le biais de différents canaux de communication et de divers processus sociaux et psychologiques qui impliquent des représentations sociales préalablement constituées ou qui en produisent de nouvelles pour interpréter et agir dans le labyrinthe d’un présent problématique qui se reconfigure vertigineusement. Certes la complexité des deux phénomènes rend très difficile une communication/transmission efficace, comme on a pu le constater jusqu’ici. Mais il faut souligner aussi que la quantité de savoirs scientifiques disponibles aujourd’hui rend impossible leur intégration dans un curriculum déjà saturé en termes de contenus d’apprentissage scolaire.
Devant une production scientifique soutenue et exponentielle, un programme éducatif ne peut pas être conçu comme un récipient doté d’une capacité infinie pour en remplir le contenu. Quels contenus doit-on choisir alors et lesquels doit-on écarter ? Lesquels sont indispensables ? Est-ce que nous avons besoin de contenus en épidémiologie et en microbiologie en tant que réponse à la pandémie ? Est-ce que l’alphabétisation épidémiologique représente la réponse pédagogique face à ce problème ?
Une personne alphabétisée dans le champ épidémiologique pourrait être celle qui :
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comprend les principes fondamentaux des épidémies ;
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est capable de vérifier des informations scientifiquement fiables à propos de l’épidémiologie ;
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communique ses connaissances par rapport aux épidémies d’une manière adéquate ;
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est capable de prendre des décisions informées et responsables par rapport aux actions qui peuvent protéger d’une pandémie.
Ces quatre critères ont été paraphrasés à partir de la définition donnée au concept d’alphabétisation climatique par l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique et l’Association américaine pour l’avancement des sciences (NOAA, 2009). Bien qu’il puisse être souhaitable que des segments importants de la population possèdent des connaissances sur des « objets scientifiques » déterminées en fonction de leur pertinence pour donner une explication aux problématiques de la vie sociale, professionnelle et politique, il est peu réaliste d’aspirer à ce que ces connaissances soient acquises et comprises par l’ensemble de la population.
De la même manière, il est illusoire de prétendre trouver un espace scolaire « normalisé » où des contenus liés à des représentations scientifiques complexes deviennent des objets d’études, comme l’épidémiologie des virus ou le changement climatique, en supposant que les étudiants aient les compétences nécessaires pour déterminer la crédibilité de l’information qui mène à des décisions informées et responsables. Les capacités cognitives pour comprendre, pour communiquer de façon significative, pour évaluer ou pour prendre des décisions appropriées entre autres, ne peuvent pas aisément se développer dans le cadre de programmes scolaires qui sont saturés au plan cognitif et dont les finalités dans les sociétés prospères du monde occidental s’alignent habituellement avec les intérêts du marché global et avec des modes de production et de consommation qui y sont associés.
Dans un tel contexte, la communauté éducative a de multiples raisons de se préoccuper des choix d’un enseignement d’où sont exclus des éléments clés de la réalité contemporaine (Jiménez-Liso et coll., 2019). Certains programmes éducatifs s’annoncent comme constructivistes, écologistes ou humanistes dans leurs préambules, leurs objectifs ou leurs finalités, mais en fin de compte, ceux-ci se concentrent sur des « contenus minimaux communs » (Facal, 2011). Les approches constructivistes et humanistes semblent avoir de la difficulté à s’insérer dans un système qui tend à contrôler, à comprimer et à coloniser les temps éducatifs, sociaux et du travail de toute la communauté éducative et, par extension, de toute la société (Morán et Caride, 2005), pour les mettre au service de la logique et des intérêts du marché.
Comment faire face à la crise climatique et pandémique ? La nécessité d’un cadre commun depuis les sciences sociales et l’enseignement des sciences
Dès lors, il devient urgent de remplacer l’approche standardisée face à la crise climatique et tout autre risque qui découle du système socioéconomique global comme c’est le cas de la pandémie actuelle, de la crise humanitaire des réfugiés ou les fortes inégalités d’un monde polarisé entre opulence et pauvreté.
En ce qui concerne le changement climatique, il subsiste des erreurs conceptuelles à cause d’informations tendancieuses et incomplètes sur le phénomène, lesquels se répètent et se reproduisent de façon épidémique tout autour de la planète dans différentes cultures, peu importe l’âge, le genre, l’ethnie ou le niveau d’étude (Leiserowitz et coll., 2011 ; Meira-Cartea et coll., 2013). Quant à la COVID-19, les médias ont bombardé le grand public avec une telle quantité d’informations que cela a provoqué une forme d’incertitude qui oscille entre deux pôles ambivalents. D’un côté, nous avons la sensation d’en savoir davantage en ayant acquis des notions telles que zoonose, indice R0, vecteur de transmission, courbe de stabilisation, etc. Mais d’un autre côté, nous nous trouvons égarés devant l’énorme quantité d’informations, la complexité de celle-ci et la diversité de pronostics quant aux conséquences attendues. Dans cette optique, l’incertitude se montre sous deux visages : le premier est d’ordre épistémique, lié à la quantité et la qualité des connaissances disponibles et à l’usage qu’on peut en faire au plan individuel et collectif ; le second est contingent, lié à la difficulté d’anticiper en toute certitude comment sera le futur et de contrôler les étapes à venir. Autrement dit, nous pouvons recevoir des informations fondées sur la connaissance scientifique disponible, mais la difficulté d’étendre ces certitudes à ce qui surviendra à l’avenir peut souvent engendrer de la perplexité et de la paralysie. En outre, la recherche d’une certitude totale (qui s’avère impossible) entraîne le risque de dénaturer l’engagement envers la vie elle-même, en nous éloignant « des choses qui importent réellement et qui requièrent notre attention, ici et maintenant » (Biesta, 2017, p. 36, traduction libre).
En fin de compte, il faut reconnaître que l’incertitude est inhérente aux représentations scientifiques qui prennent un sens social, culturel, éthique et politique quand elles abandonnent le champ de la science pour coloniser celui de la culture commune, de la prise de décisions et de mesures par des gouvernements qui doivent définir des priorités, distribuer des ressources et tracer des lignes d’action à suivre afin qu’elles contribuent à une vie humaine digne, équitable et soutenable.
À l’ombre de sa dimension temporelle qui apparaît insaisissable et du mirage de l’invulnérabilité des sociétés d’opulence, le changement climatique continue d’être un phénomène invisible, distant et abstrait quant à ses origines, dont les conséquences complexes sont mal comprises et les solutions difficiles à accepter. Une fois de plus, on trouve ici des caractéristiques similaires à celles de la COVID-19, sauf en ce qui concerne le fait que les solutions à la pandémie n’ont pas été acceptées, mais imposées. Donc, il est urgent que les sciences sociales en général, et l’éducation en particulier, problématisent la crise climatique depuis sa dimension socio-environnementale autant dans le domaine de la recherche que dans celui de l’intervention politique, éducative et sociale, en stimulant une pensée critique apte à mettre au jour les relations entre les modes de vie dominants et leurs conséquences locales et globales.
Même si nous ne partons pas de zéro puisqu’il existe une « grande quantité de connaissances fondamentales […] sur la façon dont les sociétés s’organisent, sur la manière dont les individus et les groupes perçoivent les menaces et répondent à des tensions en situation de catastrophe et sur le fonctionnement plus efficace de l’action collective » (Meira-Cartea et coll., 2018, p. 9, traduction libre), ces connaissances sont à peine considérées dans la transposition pédagogique de la crise climatique et par extension, de la crise pandémique actuelle, ce qui rend plus difficile la transformation des représentations et pratiques au sein des sociétés contemporaines.
Antécédents, obstacles et propositions de l’éducation au changement climatique - Vers une éducation post-pandémie
Dans le domaine particulier de la recherche éducative liée au changement climatique, il existe deux champs d’investigation qui ont une certaine trajectoire, à savoir l’enseignement des sciences et l’éducation relative à l’environnement, dans lesquels on retrouve des études qui se fondent sur différents cadres de référence pour aborder l’épistémologie et la pédagogie. Busch et coll. (2018) identifient trois cadres de référence :
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Le positivisme/post-positivisme, qui est centré sur la transposition au sein du curriculum de la connaissance scientifique disponible et qui met l’accent sur les processus d’enseignement et d’apprentissage exclusivement d’ordre cognitif. D’une manière implicite, il est assumé que l’acquisition du savoir scientifique formera des personnes qui agiront de façon plus rationnelle pour répondre à l’urgence climatique.
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Le constructivisme social, qui établit que les personnes comprennent le monde depuis leurs expériences, en développant des significations subjectives et intersubjectives sur la réalité. Ces significations vont dépendre de processus sociaux, historiquement et culturellement conditionnés par ce qui est considéré comme une connaissance socialement construite et contextualisée. Une grande partie de la recherche en éducation relative à l’environnement est ainsi ancrée dans ce paradigme qui souligne le rôle fondamental que jouent les interactions sociales, la culture et ses manifestations, matérialisées dans des expériences particulières et ancrées dans les émotions et des systèmes de valeurs qui sont ou peuvent être des agents prédictifs des perceptions du changement climatique, de la préoccupation générée et des dispositions pour passer à l’action.
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La pensée critique/transformatrice, qui questionne l’approche strictement cognitiviste des paradigmes positivistes et post-positivistes, ainsi que le piège du paradigme constructiviste. Cette perspective s’efforce de transformer la réalité en assumant la connaissance en tant qu’outil pour forger une meilleure société (incluant le progrès de l’éducation) ; il s’agit de rendre les personnes plus autonomes et capables de comprendre les inégalités dérivées des structures de pouvoir qui les marginalisent en fonction de l’ethnie, du genre, de la génération et l’orientation sexuelle.
Busch et coll. soulignent que les approches relevant de ce dernier paradigme « sont centrées sur la façon dont les systèmes socio-économiques et de pouvoir interfèrent avec le changement climatique et les phénomènes éducatifs » (2018, p. 8, traduction libre). Cette affirmation rejoint les réflexions d’Apple (2002) à propos de l’influence du capitalisme néolibéral dans le système éducatif des États-Unis par le biais de différents groupes de pouvoir et grâce aux intérêts idéologiques, économiques et de classe sociale ; elle rejoint également les observations de Klein (2015) sur l’influence du lobby négationniste dans les agendas publics. Le néolibéralisme devient ici une doctrine qui fonde son projet politique sur quatre dimensions de l’individu : la dimension de l’économie qui situe l’argent au centre de la vie ; celle de la consommation qui conditionne et contraint à payer des prix élevés (directs et indirects, monétaires et environnementaux) pour satisfaire des « nécessités » induites ; la dimension de l’endettement en tant que signe de distinction sociale ; et la dimension numérique au sein de laquelle tout est mesurable et quantifiable avec l’objectif de diagnostiquer et de contrôler des comportements (Carbonell, 2019). Un tel cadre idéologique est particulièrement évident aux États-Unis, bien que de plus en plus présents dans d’autres latitudes comme le Royaume-Uni, l’Australie ou l’Europe occidentale (Klein, 2015).
À cet effet, Facal (2011) analyse, justifie et défend, sur une base législative et pédagogique, le devoir « d’inclure [dans les salles de classe] l’analyse et le débat des enjeux sociaux conflictuels, de « conflits sociaux brûlants » […] qui donnent lieu à des opinions opposées et qui génèrent certains types de confrontation dans la société » (p. 11, traduction libre). Il s’agit de reconnaître et de promouvoir la nature politique d’une éducation dans laquelle il est indispensable de comprendre la différence entre la reconnaissance des faits objectifs du monde physique qui permettent de prendre position depuis une sorte d’impartialité ou de neutralité face aux preuves, aux évidences et aux opinions, et la posture engagée en toute partialité, qui se réclame du terrain de l’éthique et de la politique, de sorte que l’éducation soit libératrice face à un néolibéralisme doctrinaire.
Dans ce contexte, le projet Resclima [1] vise à explorer des réponses éducatives et sociales au changement climatique depuis plus d’une décennie (García-Vinuesa et coll., 2020, 2020a ; Meira et coll., 2013 ; Ramírez-Vázquez et González-Gaudiano, 2016, entre autres). Nos résultats indiquent que la compréhension sociale du changement climatique est limitée ; elle est constituée de connaissances scientifiques de base et aussi d’erreurs conceptuelles qui sont partagées. La crise climatique ne représente pas une préoccupation majeure à l’heure de faire reconnaître les responsabilités des instances gouvernementales et des collectifs d’activistes à cet effet. Le rôle des modes de vie dominants dans le phénomène climatique est mis en doute et les conséquences possibles sont sous-estimées.
Ces résultats concernant la population espagnole et mexicaine sont semblables à ceux que l’on peut retrouver dans la littérature de recherche en général. D’un côté, la compréhension limitée du phénomène peut se justifier par le fait que les programmes scolaires et les ressources éducatives standardisées intègrent le changement climatique en tant que contenu figé, une caractéristique des matières scientifiques-techniques (Miléř et Sládek, 2011). Par rapport aux conceptions erronées, la littérature suggère que celles-ci ont leur origine dans des pratiques éducatives inadéquates (Shepardson et coll., 2014), avec des manuels scolaires qui reproduisent des erreurs (Reinfried et coll., 2012 ; Serantes-Pazos et Lotti, 2020), avec la présence de théories profanes de la part des enseignants (Arslan et coll., 2012) ou d’une information inadéquate transmise par les médias (Meira-Cartea, 2015).
En outre, nous avons constaté que la déclaration d’une connaissance plus étendue n’est pas reliée à une meilleure compréhension de la responsabilité dans les causes du changement climatique et le risque associé à ses conséquences. Cela suggère que le fait d’intégrer le changement climatique en tant que contenu figé des sciences naturelles, ajouté à la conception d’une éducation qui craint le risque d’adopter des approches critiques, transformatrices et émancipatrices, contribue à faire en sorte que des éléments essentiels de sa représentation sociale se forgent en dehors des pratiques éducatives, à travers les médias ou dans l’interaction sociale au quotidien.
Ces conclusions soutiennent la thèse du « négationnisme organisé » d’Henderson et coll. (2017). Elles mettent en évidence la principale contrainte que l’éducation relative à l’environnement a subie tout au long de son existence (González-Gaudiano et Meira-Cartea, 2019), soit la surcharge des programmes prescrits, ce qui ne laisse pas de place à l’intégration de questions comme celle du changement climatique, sinon dans l’enseignement des sciences où le manque de temps incite les enseignants à se réfugier, dans une certaine mesure, dans des pratiques centrées sur l’instruction.
Conclusion
La crise climatique ainsi que la pandémie de la COVID-19 sont en train de mettre en évidence les conséquences d’un style de vie hyper-consumériste qui refuse d’accepter les limites d’une planète dont les ressources ne sont pas infinies. La reconnaissance des risques causés par une pandémie ou par le changement climatique, lesquels ont pourtant été annoncés en amont par la science, suppose d’admettre publiquement l’échec d’un système basé sur une logique de marché qui refuse d’accepter que la cause des désastres et des inégalités réside dans sa propre structure.
Dans cette perspective, il semble plus facile de comprendre pourquoi la politique et, par extension, l’éducation et la société résistent à s’occuper du changement climatique et de ses dimensions sociale, économique et environnementale, depuis une perspective holistique, critique, transformatrice et émancipatrice. Le même constat doit être fait pour la pandémie actuelle. Nous sommes en effet confrontés à une éducation standardisée qui a l’habitude de s’abriter dans la neutralité morale associée aux approches d’alphabétisation, ainsi que de se définir comme « verte », en intégrant certaines pratiques limitées et superficielles qui sont finalement palliatives face à la magnitude et la complexité du problème.
La crise mondiale déclenchée par le coronavirus a dévoilé la perversité du « meilleur des mondes » que serait celui du consumérisme démesuré, où un prix est fixé à tout et n’importe quoi, y compris la vie humaine. On peut observer comment quelques dirigeants politiques évaluent la quantité de vies humaines qu’il est possible de perdre sans nuire à la stabilité économique du pays, ou comment quelques collectifs citoyens dénoncent la diminution de leurs libertés (ou de leurs privilèges, selon la perspective) face à des mesures qui en appellent à la responsabilité collective en vue de freiner le taux de mortalité lié à la pandémie.
Il importe de stimuler la réflexion et l’analyse critique permettant de comprendre qu’une gestion des risques inadéquate, déficiente et négligée, une inaction devant les prévisions scientifiques et une éducation restreinte au contrôle d’un « produit » éducatif homogène et normalisé, convergent dans leurs causes et conséquences. En ce sens, cette crise pandémique est une illustration de ce que la communauté scientifique n’a de cesse d’annoncer par rapport au changement climatique et qui en appelle à une réponse socio-éducative urgente et cohérente avec la dimension du problème et avec les principes éthiques d’une citoyenneté démocratique et plurielle.
Il convient alors d’envisager un changement paradigmatique dans le domaine éducatif. Un changement de vision quant au curriculum, non pas en tant qu’assemblage d’abstractions formelles, mais en tant que véhicule pour la prise en compte la réalité concrète (Biesta, 2017). Un changement qui, en raison de son envergure, a besoin de temps, de décisions majeures et d’engagements formels de la part de tous les acteurs éducatifs pour concevoir à nouveau un système éducatif qui :
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propose aux citoyens les outils pour faire face à l’incertitude et aux multiples risques qu’implique le changement climatique, ainsi que l’actuelle et les futures pandémies dont la science annonce l’avènement ;
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dévoile les structures de pouvoir qui aggravent la situation d’urgence locale et globale et qui discrimine les personnes en raison de leur appartenance de classe, ethnie, genre, génération et orientation sexuelle ;
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facilite la compréhension et l’acceptation des nécessaires mesures de changement des pratiques, dont celles qui concernent la décarbonation.
Il ne s’agit certes pas d’une tâche simple. La réponse socioéducative au changement climatique doit prendre en compte la complexité du problème lui-même et son impact majeur sur la structure socioéconomique et culturelle de toute la société. Il faut reconnaître que pour changer les conditions qui nous permettent d’envisager adéquatement tant la crise climatique que la crise pandémique, il importe de transformer les valeurs sociales actuelles qui sont en train d’engendrer de la résistance, de l’inaction ou de l’indifférence. Ces valeurs sont associées à la logique du capitalisme, mais aussi à celles d’autres courants structurels qui lui sont antérieurs comme le patriarcat, le logocentrisme ou le colonialisme. Il ne s’agit donc pas seulement d’avoir conscience du fait que le changement climatique est en train de toucher, et touchera encore davantage, notre qualité de vie, mais qu’il est impératif de se connecter à tout ce qui nous arrive actuellement et, plus fondamentalement, à ce que nous sommes en tant qu’êtres humains.
Appendices
Remerciements
Ce texte a été produit dans le cadre du Proyecto Resclima (RTI2018-094074-B-I00 -RESCLIMA-EDU2) financé par le ministère espagnol de la Science, l’Innovation et des Universités.
Note
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