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Cet ouvrage traite des principales problématiques liées au soft power (appelé également « puissance douce » ou « puissance en douceur » en français). Défini au début des années 1990 par Joseph Nye comme la capacité d’atteindre les objectifs par le biais de l’attraction au lieu de la coercition, le soft power d’un pays est généralement basé sur la culture, les valeurs politiques et la politique étrangère. Fondé principalement sur ces principaux éléments, le soft power permet de gagner les coeurs et les esprits par la séduction et la persuasion, à l’inverse du hard power, qui s’appuie plutôt sur des méthodes coercitives. L’originalité de cet ouvrage réside dans sa qualité pluridimensionnelle basée sur une lecture des volets normatifs, linguistiques et symboliques du soft power. À ce titre, l’ouvrage recensé apporte un nouvel éclairage critique à propos d’un concept omniprésent non seulement dans le langage du monde médiatique contemporain, mais aussi du monde universitaire.
Tout d’abord, la structure choisie par les directeurs reflète une compréhension critique du concept de soft power et regroupe un grand nombre d’études de cas. Chaque section de l’ouvrage débute par une brève vue d’ensemble qui aide les lecteurs à mieux appréhender le contexte des sections et à suivre ainsi leur enchainement.
La première partie du livre est consacrée à l’étude des questions théoriques et problèmes méthodologiques liés au soft power. La seconde partie présente un survol géographique enrichissant en cartographiant le soft power à travers les Amériques, l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie.
À partir de ce squelette de l’ouvrage, certains chapitres s’avèrent plus pertinents que d’autres notamment par rapport à l’originalité de leurs approches. Par exemple, Robin Brown analyse le cas des actions culturelles extérieures françaises et allemandes sur le plan de leurs similitudes et différences vis-à-vis du soft power. D’après Brown, il vaut mieux considérer la place du concept d’influence dans les Relations internationales parce que le soft power demeure un concept assez ambigu en dépit de son attractivité dans la sphère du discours politique. De son côté, Ying Jiang souligne le rapport des médias sociaux et de la « e-diplomatie » avec le soft power. Ying Jiang part principalement de l’idée selon laquelle les médias sociaux constituent l’un des outils les plus dynamiques de la diplomatie publique en tant que domaine primordial du soft power. L’auteur offre une analyse largement cohérente en se basant sur une recherche statistique sur les diverses ambassades en Chine actives sur la Weibo, la célèbre plateforme virtuelle de ce pays. Toujours au sujet du lien entre les médias sociaux et le soft power, Matthew O. Adeiza et Philip N. Howard étudient deux cas très originaux provenant de l’Afrique subsaharienne. Il s’agit de la campagne #BringBackOurGirls qui a vu le jour suite à l’enlèvement au Niger de 270 jeunes filles par le groupe terroriste islamiste Boko Haram, et de la campagne intitulée #SomeoneTellCNN, contre la représentation médiatique du Kenya par cnn, qui est apparue au moment de la visite de Barack Obama en 2015. Ces deux auteurs examinent plus spécifiquement les divers aspects de l’instrumentalisation des médias sociaux pour sensibiliser la communauté internationale aux questions locales. Parallèlement, le chapitre de Yelena Osipova élucide de façon éloquente comment la Russie adopte à sa manière les concepts de soft power et de diplomatie publique au sein de sa diplomatie émergente.
Le lecteur pourra cependant regretter l’absence de cohésion de certaines parties du livre. Par exemple, le contenu de la troisième section intitulée « The Cultural Imperative » manque de clarté et de fil conducteur. Les chapitres ne s’attardent pas directement aux rapports entre le soft power et le domaine culturel, comme semble l’énoncer pourtant le titre de cette section. De plus, la contribution de Zhipeng He, portant sur la diplomatie légale de la Chine, s’écarte largement du contexte thématique de cette section ainsi que du livre en général. Cela affaiblit non seulement la cohésion générale de l’ouvrage, mais tend aussi à diminuer l’intérêt des lecteurs.
En somme, cet ouvrage destiné à devenir un livre de référence se révèle original, riche et bien structuré. Il présente une synthèse complète des enjeux conceptuels entourant le soft power. Les directeurs de l’ouvrage s’adressent surtout à un public déjà familier des recherches sur le soft power et la diplomatie publique. Cet ouvrage sera donc d’une grande utilité, surtout pour les doctorants et les chercheurs qui visent à enrichir leur bagage méthodologique et conceptuel sur ce sujet.