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Il s’agit là des actes d’un colloque qui s’est tenu à Paris en avril 2005 sur le thème des sanctions susceptibles de frapper les États membres qui ne se soumettraient pas aux décisions de l’Union européenne.
L’ouvrage débute avec le rapport introductif d’Isabelle Pingel, qui note que les traités créant les Communautés et l’Union européennes ne contiennent que deux fois le mot sanction. Pourtant, on aurait tort de penser que la quasi-absence d’un mot exclut nécessairement la présence de l’idée.
En effet, il existe de nombreux exemples de mécanismes de sanction dans le cadre du système communautaire tant à l’égard des États membres (recours en manquement, sanction en cas de violation grave et persistante des libertés fondamentales) que des États tiers (embargo, gel des avoirs financiers, restrictions des crédits ou des investissements). Pour autant, les manifestations de ce pouvoir de sanction ne traduisent pas l’existence d’une théorie générale en la matière.
Enfin, l’auteur s’est interrogé, devant la multiplication des sanctions, sur leur efficacité et sur les alternatives qui peuvent exister.
Le colloque était lui-même axé sur deux thématiques : les sanctions contre les États membres de l’Union et celles contre les États non membres.
En ce qui concerne les premières, il s’agit d’abord de sanctions juridictionnelles. À cet égard, le professeur Azoulay a montré que, sur la forme, la sanction peut être une technique d’occupation du champ des droits des États membres et un moyen de collaboration forcée des instances nationales garantes du respect du droit communautaire.
Puis, le juge Gervasoni s’est attaché à analyser les mécanismes de sanction contre la non exécution des arrêts de la cjce et à constater que, devant l’inefficacité des mécanismes classiques, la Cour de justice est amenée à développer une nouvelle voie de droit basée sur la contrainte financière.
Enfin, le professeur Constantinesco s’est penché sur le mécanisme des sanctions politiques en cas de violation grave et persistante des libertés fondamentales par un État membre. Ce système, établi par le traité d’Amsterdam, connaît cependant des limites, comme l’a révélé son unique mise en oeuvre contre l’Autriche en 2000. Aussi Constantinesco appelle-t-il de ses voeux l’adoption d’un mécanisme de prévention.
En ce qui concerne les sanctions contre les États tiers, le professeur Ascensio a montré qu’elles avaient une triple finalité : la participation au système de sécurité collective mis en place dans le cadre de l’onu, la réaction à la violation d’une obligation internationale et la mise en oeuvre d’une véritable politique publique. Il s’est ensuite demandé si les moyens coïncidaient avec les fins et s’il ne fallait pas aussi envisager l’existence de finalités implicites.
Ensuite, les débats devaient porter sur les modalités de la sanction. M. Jan Kuijper, conseiller juridique principal pour les relations extérieures au Service juridique de la Commission européenne, a dressé un intéressant panorama de la pratique des sanctions commerciales, le professeur Rosenberg celui des sanctions financières et Mme Fink-Hooijer s’est à son tour appesantie sur leur efficacité.
Il revenait alors au professeur Sorel de conclure en s’attachant à rappeler l’ambiguïté de la notion de sanction tant dans le droit en général que dans le droit communautaire en particulier. En droit communautaire, il a notamment mis l’accent sur le fait qu’il n’y a pas de véritable théorie ou système et que la pratique des sanctions repose avant tout sur un bricolage.
Au-delà de la qualité des interventions, le principal mérite de ce colloque est de rappeler que si la construction européenne était à l’origine centrée sur l’édiction de normes, elle est aussi aujourd’hui à la recherche de mécanismes tendant à en assurer le respect.